Amateurs d’émotions fortes ou réels protestataires ?
Présenter
les membres de la nébuleuse black blocs tels des voyous n’est pas trop loin de
réalité. Ils cassent, nous payons (contribuables, assurés, consommateurs).
Quant à savoir qui les instrumentalise le mieux, c’est une autre histoire.
Voici peu, réagissant à des propos la policière syndicaliste Linda Kebbab, je n’excluais pas que des pendants des Boogaloo Boys étasuniens aient infiltré les black blocks. Il se trouve que les membres de Strasbourg Offender, labellisés néo-nazis par Mediapart, s’étaient infiltrés dans les rangs des manifestant contre la loi de sécurité globale. En fait, ils n’étaient que 14 à vouloir « cherché en vain des antifacistes ». Faut-il rappeler que les antifas se manifestent davantage sur les réseaux sociaux, pour dénoncer tel ou telle tenant des propos douteux ou aux comportements discutables, que lors des manifestations ? On peut d’ailleurs se demander si antifas se mêlant aux black blocs et néo-nazis ne sont pas fondamentalement les deux faces d’une même réalité.
Soit,
selon Causeur, des gens majoritairement jeunes, las de ne s’exciter que
devant des écrans affichant des jeux violents ou de jouer au paint-ball
(je n’ai pas trouvé de traduction, de même pour airsoft), jeu un cran
au-dessus d’une bataille avec des pistolets à eau. Cela étant, je n’irai pas
extrapoler à partir d’un seul exemple ma comparaison entre ces Offenseurs
strasbourgeois et les Boogaloo Boys... Cela reste une hypothèse quelque peu
hasardeuse.
Toutefois,
les jugements de trois casseurs de Toulouse révèlent un insolite échantillon.
Soit un intérimaire alcoolisé, deux ados, dont l’un de 15 ans, fils de
diplomate. Cela me semble assez loin de jeunes fanatisés par l’ultra-gauche que
dénonçait Linda Kebbab. Laquelle, tout comme le courageux syndicaliste policier
Alexandre Langlois (ex-Vigi Police) qui vient de demander une rupture
conventionnelle, se pose des questions à propos de la façon policière (soit,
ici, de la hiérarchie) de traiter ces casseurs.
Faut-il
d’ailleurs les cataloguer tous extrême ou ultra-gauche ? Ou, comme Linda
Kebbab les cataloguer « manifestants dangereux ». Dangereux, certes,
manifestants, peut-être, car des manifestants ne se contrôlant plus car
colériques ou outrés par des violences illégitimes de policiers, ce ne peut
être exclu.
Mais comme
la droite la plus dure et la droite extrême ne cessent, comme Trump, de se
définir en partisans de la loi et de l’ordre, et de réclamer davantage de moyens
pour les policiers, et de dénoncer les casseurs d’ultra-gauche, des syndicats
de policiers se gardent bien de les contredire.
Linda
Kebbab estime que « la police est instrumentalisée par le politique ».
L’inverse serait-il tant sans fondement ?
En fait,
il est difficile de cerner ce qui compose le « bloc noir ». Pour apporter
une nuance à ce que relate (ou invente) Causeur, il convient de remarquer qu’on
trouve aussi des jeunes et moins jeunes femmes dans la galaxie des cagoulé·e·s
de noir.
Ce n’est
pas pour critiquer Marine Le Pen parce qu’elle est Marine Le Pen que je relève
qu’on ne peut dissoudre une mouvance floue. Mais que, même si elle était mieux
identifiée, elle se reformerait (comme les groupuscules d’extrême-droite) sous
une autre appellation. Et puis, l’arsenal juridique existant suffit en général
largement (ce qui vaut aussi pour l’article 24 de la loi sur la sécurité, qui
ne vise en fait qu’à pomper des voix d’électeurs policiers, gendarmes, voire
militaires, cette appréciation étant discutable, j’admets).
Enfin, il
est faux d’avancer que les « journalopes » ou la gauche exonère
systématiquement le bloc noir de ses responsabilités. Certes, Yannick Jadot et
d’autres ne sont pas à la gauche de la gauche du mouvement écologiste, tout
comme Xavier Bertrand ne se situe pas à la droite de la droite. Et le préfet
Didier Lallement n’est pas tout à fait le préfet Chiappe (soutien des ligueurs
des années 1930).
Ce qui semble
sûr, c’est que la police n’est pas formée, comme l’étaient des forces spéciales
australiennes en Aghanistan, à former les récentes recrues à tuer, égorger des civils,
tout comme les militaires français au Tchad, encadrés par de jeunes officiers
formés à Saint-Cyr, pendaient des paysans par les pieds pour leur enflammer un
brasier sous la tête (fameux article du Spiegel de l’époque).
Il n’existe
pas de défiance généralisée de la police de la part des justiciables lambda, juste
une méfiance qui devient plus générale. Cela tient aussi à de petites choses,
comme cette policière, alors je tentais d’argumenter que la situation n’était
pas tout à fait comme elle l’interprétait et montre son badge du doigt en me
disant « il ya marqué police, là ». Ce qui venait à signifier « tais-toi,
je n’ai rien à entendre d’un justiciable ». Ou ce petit gradé auquel je
disais que l’on allait raccompagner un jeune homme un peu éméché et seulement
bruyant qui me rétorquait : « on peut aussi vous embarquer »,
voussoyement sans doute dû à mes cheveux blancs ?. Je me plais à souligner le comportement irréprochable
et courtois d’autres policiers (ce n’est pas la première fois). L’entretien entre
Charlotte Herzog, du Monde et le sociologue Mathieur Zdagtrodzki, me
semble assez significatif de l’attitude de syndicats policiers clientélistes. C’est
en
accès libre.
Si, non
pas la police, mais des policiers, croient que l’opinion de droite leur sera
toujours favorable, qu’ils se dessillent. Une culture de l’impunité leur fera tôt
ou tard se la mettre à dos, comme par le passé. Pour le moment, la droite ne s’en
prend qu’à l’institution judiciaire (estimée outrancière dans des affaires de
fraude fiscale, d’abus de pouvoir, notamment). L’institution policière, laissée
à elle-même, suivra.
Je me
souviens de cet ancien directeur de maison d’arrêt de Belfort, ancien militaire,
me disant que « les réformes pénitentiaires ont toujours suivi l’incarcération
de gens n’ayant, a priori, rien à faire en prison. ». Il
faudrait peut-être que certains syndicats de policiers viennent à y réfléchir.
Alexandre Langlois estrime qu’’il n’ y a plus de moyen de se faire
entendre à l’intérieur de la police et considère que les policiers ont peur, non
pas de la population, de la hiérarchie. Je ne cautionne pas tous ses propos,
faute d’avoir enquêté. Les policiers devrait se souvenir de l’épuration à la
Libération, parfois abusive et biaisée, et se dire que sous l’uniforme, ils
restent des travailleurs, dispensables donc limogeables au gré des intérêts du
moment. Dont ceux d’autres policirers. Au fait, Linda Kebbab, pourquoi, sur la
couverture de vore livre, vote visage n’est-il pas flouté ?
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