samedi 22 août 2020

Oradour : une affaire à la Steve Bannon ?

 Pub exécrable pour faire des sous…

Donc, le mémorial d’Oradout-sur-Glane a été vandalisé afin de faire de la publicité à un certain Vincent Reynouard. Que l’acte soit le fait d’illuminés ou de gogos (l’un va souvent bien avec l’autre), c’est bien à ces Reynouard et consorts qu’il profite.

Autant demander de suite une possible indulgence pour ce qui pourrait passer pour de l’humour exécrable. Mais on a bien fini par comprendre qu’un Steve Bannon n’était pas qu’un escroc intellectuel mais un aigrefin tout court. Lequel, après sa condamnation, n’a pas manqué de dénoncer « un complot politique » contre lui-même et ses associés, dès sa sortie du tribunal. Il a développé ensuite cette thèse, relayée par des médias divers : il s’agirait de discréditer ceux qui veulent limiter l’immigration mexicaine et faire cesser la construction du mur frontalier. Et bien sûr, l’avenir lui donnera raison.

Dans cette affaire d’association caritative « bien ordonnée », il n’y avait pas que Bannon et ses deux co-inculpés mais aussi du beau linge : Kris Kobach, Erik Prince, David A. Clarke, et diverses personnalités pro-Trump, souligne The New Yorker. Ce qui fera qu’aux yeux de la Trumpland, Bannon et consorts passeront pour des symboles d’idéalistes injustement calomniés, par l’État profond, évidemment.

Je ne vais pas présumer de l’identité des vandales d’Oradour, ni de leur proximité avec Vincent Reynouard. Lequel a tenté de faire son beurre avec un livre laissant entendre que la responsabilité du massacre incombe davantage à la Résistance qu’aux troupe d’un détachement de la division Das Reich incluant 14 Malgré-nous alsaciens. Cette présentation des faits est assez bien résumée par le site Paris Dépêches (même si la conclusion est discutable).

Comme sur les sites du Monde et du Figaro l’inscription « Reynouard a raison » n’était pas mentionnée (sans doute pour ne pas contribuer à sa renommée), j’ai tenté d’en savoir un peu davantage. Et puisque, en janver 2014, la justice italienne avait ouvert une enquête sur le massacre d’Oradour (parmi les victimes, sept  enfants italiens de Lucia Zocvcarato et Giuseppe Miozzo), j’ai tenté de me tourner, en vain, vers la presse italienne de ce jour.

En revanche le Corriere della sera fait grand cas de Juan Romero Romero, dit El Codobes car natif de Courdoue, né en 1919, vivant à Aÿ (Marne), qui semble être l’un des tout derniers survivants du camp de Mauthausen. La ministre Carmen Calvo est venue à Aÿ lui rendre hommage.

Au passage, au lieu de faire des effets de manche sur l’infamie des dégradations, Castex et Darmanin auraient gagnés à s’associer à cet hommage, mais il n’y a pas de quoi leur en intenter un fort mauvais procès.

J’estime que s’il n’est pas superflu de retrouver et condamner le, la ou les individus ayant fourni à Reynouard une publicité gratuite (pour lui, non pour le contribuable qui restaurera la façade en son état initial), il serait tout aussi indiqué de mettre tout en œuvre, formule d’usage, pour tarir les soutiens des Vincent Reynouard et émules. Lesquels alimentent les imaginations de crédules qui les font plus ou moins prospérer. Dont, par exemple, la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X qui employa Reynouard et d’autres.

Je conçois que l’historiographie soit mouvante. Parmi les derniers exemples, récemment, on semble mieux se souvenir des faits d’armes des troupes indigènes et de celles des Républicains espagnols de la DB de Leclerc ayant libéré Paris. La vulgate dominante reste cependant celle d’une France majoritairement par elle-même libérée. Ce que des Résistants des premières heures, dont beaucoup ont préféré rester anonymes et décliner tout honneur ne contrediraient pas non plus, à très juste titre en ce qui les concerne.

Aucune et aucun des survivants d’Oradour n’a corroboré l’affabulation de Reynouard, pas d’explosions, sinon celles de grenades. Mais bien évidemment un affabulateur trouve toujours une explication, avance un élément de réfutation. Comme Bannon à présent.

La dernière intervention de Reynouard, sur YouTube ,car l’auditoire favori de ces escrocs, auditoire qui recommande à son entourage soucieux encore de lire d’acheter les ouvrages de l’orateur, avait pour slogan « devoir de mémoire égale embrigadement politique ». Certes Reynouard fut plusieurs fois condamnés, mais il s’est toujours trouvé des soutiens pour rétribuer ses avocats ou régler ses amendes.

Tout comme Hervé Ryssen, Boris Le Lay et d’autres, Reynouard s’appuie sur un réseau et beaucoup de gogos auxquels ils demandent de les soutenir (en bitcoins pour Bruno Le Lay).

Tous ces gens ne sont au service que d’eux-mêmes et de leurs propres intérêts, quelle que soit la cause qu’ils prétendent défendre ou illustrer. Bons faiseurs et malfaisants, ayant toujours un ennemi de « nouzôtres » à désigner. Et toujours la même explication simpliste : « on (les médias) nous cachent tout, on ne nous dit rien du réel. Moi seul vous révèle le vrai dessous des choses ».

Cela a fort bien réussi à Donald Trump qui soutient maintenant que le covid est propagé par l’État profond pour contrecarrer sa réélection. Et la peste, et la grippe dite espagnole, et le pleistocène (époque glaciaire), c’était l’État profond de ces époques ? Cela étant, je soutiendrai que le massacre d’Oradour n’était pas le fait des SS mais d’extra-terrestres, je suppose avec de fortes probabilités qu’il se trouverait des gens pour vouloir me croire.

Pour ne pas sombrer dans un humour nauséabond, peut-être faudrait-il remémorer aux Reynouard et consorts l’exposition d’Annes Heer de 1995 « La guerre d’anéantissement, les crimes de guerre de la Wermarcht 1941-119944 ». Elle était composée de photos de massacres prises par les soldats eux-mêmes, posant complaisamment devant des scènes d’exécution, des pendus, des cadavres. Ardu à réfuter, mais c’est un peu comme l’alunissage de Neil Amstrong et Appollo 11 en 1969, des montages, rétorquerait-il. Ces gens ont réponse à tout. Et puis, la Terre est plate, c’est l’évidence même, n’est-il point ? On vous a donc menti. Pour que l’ovalité terrestre se raplatisse : donnez, donnez, achetez, achetez.

vendredi 21 août 2020

Brexit explained : George Soros stipendie Michel Barnier ?

Enfin, tout est clair : Soros fait capoter le Brexit

On s’en doutait très fort. Il ne pouvait en être autrement. Si le Brexit tourne au détriment du Royaume-Uni, inutile de chercher plus loin. C’est la conséquence du « plan secret » de Georges Soros pour faire capoter la sortie du Royaume-Uni du carcan fasciste de l’Union européenne.

Michel Barnier et David Frost, le négociateur britannique, se renvoient la balle et s’accusent mutuellement de ne pouvoir parvenir à un accord de sortie négociée du Royaume-Uni de l’Union européenne à propos des droits de pêche et des subventions gouvernementales aux entreprises ? Ne cherchez pas plus loin. The Daily Express a la réponse. C’es George Soros qui sabote les négociations et pousse Michel Barnier à rester intransigeant. Mais bon sang, mais c’est bien sûr. Même si les Illuminati, Donald Trump et Vladimir Poutine ont poussé le Royaume-Uni à se prononcer pour un Brexit due (je n’invente rien puisque le Daily Express dénonce l’affabulation des anti-Brexit arguant que le Kremlin aurait influencé le référendum sur le Brexit), la volonté du peuple britannique (enfin, surtout anglais) est battue en brèche par les menées secrètes d’un sombre individu, George Soros.

Martina Bet, de l’Express, a déniché des documents secrets, forcément secrets jusqu’à ses trouvaillles qui prouvent pourquoi « de nombreux parlementaires et politiciens ont tenté de faire fi de la volonté du peuple ». Encore une fois, la force des baïonnettes morales se serait brisée (quoi ? Les dents, les gonades ?) contre le mur de l’argent d’un vil spéculateur. George Soros, encore lui. Elle ne fait que répercuter un article du Telegraph au titre explicite “Goerge Soros, le man who ‘broke the Bank of England’, backing secret plot du thwart Brexit’ ». Plus si secret que cela, le complot. Cela remonte à février 2018, et Le Courrier Intenational en avait fait état. Soros avait contribué à une campagne anti-Brexit.

Mais comment peut-on imaginer qu’il en soit resté là ? Si le Brexit se solde par un accord défavorable au Royaume-Uni, ce sera lui, et nul autre ; si une sortie sans accord s’avérait au détriment du Royaume, n’allez pas chercher plus loin. D’ailleurs, ne serait-il pas derrière la passation de pouvoir de Kim Jong-un à sa sœur, en vue de déstabiliser l’Antarctique et le Groenland (et Ségolène Royale restant coite, n’est-ce point une preuve ?). Ouh-ouh, méfions-nous, la main de Soros est partout !

Tout cela en vue d’obtenir un rapport euro/livre à 0,92. Vous ne voyez pas ce que cela implique ? Moi non plus, mais cela fait plus sérieux, documenté. Croyez-moi, retwittez : personne ne vous contredira d’autant que vous me présenterez tel un expert auprès de divers présidents-autocrates africains (tel un Luc Michel). Le saviez-vous ? Le Moro Naba mossi ne jure que par moi. Divers photo-montages l’établissent.

L’un des derniers entretiens de Soros fut le fait de Mario Platero, de La Repubblica, L’Obs l’a traduit. On (moi) comprend vaguement, confusément, qu’il ne se soucie plus de faire du pognon. Mon impression est que c’est justement cela qui lui est constamment reproché. Bon, accordez-lui des circonstances atténuantes : il ne s’est pas prononcé contre le Pr Raoult. Qu’à cela ne tienne : avec un prochain billlet «  Soros veut la peau de Raoult », le succès est d’avance garanti. Attendez-vous à savoir que… Une petite recherche sur les investissements de Soros dans le capital des laboratoires de pharma, pas mal de suppositions et de conditionnels suffira. Le saviez-vous, la désuétude des suppositoires, des synaspismes, des ventouses, des sangsues ? Mais évidemment, c’est Soros. Que vous faut-il de plus pour vous déclarer convaincus (et surtout assurer la promo de mon prochain livre) ? 

Pub : les confessions de Jane Birkin à son doudou

 Serge Gainsbourg et Jane Birkin nus (pas en rêve)

Comme pratiquement tous les Français de mon âge, je suis fond (et non fan) de Jane Birkin. Je m’accorde donc l’indulgence de faire un peu de publicité pout son bouquin (Orion publ.) de confessions faites à son doudou, Munkey, axé sur sa vie avec Serge Gainsbourg.

The Evening Standard, The Daily Mail et d’auttres titres semblent avoir clôné le communiqué de presse de l’éditeur (Orion) et le prière d’insérer. Pas The Guardian, dont la chtroniqueuse, Kathryn Hugues, semble avoir bénéficié d’un service de presse. Il s’agit des Munkey Diaries, qui couvrent la période 1957-1982 de Jane Birkin. Soit les journaux intimes adressé à Munkey, que j’imagine être un singe en peluche. Fayard, en 2018, avait sorti le même livre sous le même titre ; suivit, l’année d’après, chez le même éditeur français, Post Scriptum (période 12982-2013). Les deux ouvrages intéresseront donc les traductologues, surtout si, comme je le présume, auteure et traductrice ne font qu’une (avec l’aide d’Erin Floyd pour les passages en français dans le manuscrit original bilingue).

L’historiologie des biographies se penchera aussi sur ces deux versions. Il semble que Jane Birkin ait reproduit, sans les retravailler, des passages entiers de ses journaux intimes. Un tantinet vacharde, Kathryn Hughes considère que la prose s’apparente à de la word soup (verbiage semble faible, garrulité plus proche, mais je pencherai pour monologue décousu). Ce qui semble plaider pour une certaine authenticité : écrivant pour soi-même, la méticulosité auto-explicitative ne s’impose pas : on sait combler les vides.

Donc, si Gainsbourg ne prenait qu’un bain tous les trois mois, il est possible que, dans l’intervalle, il ait eu recours à des douches, ou au moins, à se laver à l’occasion les pieds dans un bidet, comme consigné. Et puis franchement, qu’il ait ou non pris le soin de changer de slip avant d’aller à l’hôpital, peu nous chaud. Et j’imagine fort bien que si je continue à vous entretenir de traductologie ou du genre biographique, vous n'allez pas tarder à reprendre des activités normales. D’où le sous-titre.

Et oui, en compagnie d’Odile Leclaire et de Marc Noyaret, je vis, depuis une chambre de bonne de la rue des Saints-Père (il me semble que l’entrée de l’immeuble donnait dans cette rue, ou était-ce rue de Lille ?), le Serge et la Jane échanger, à l’étage de leur demeure de la rue de Verneuil, des coups d’oreillers et ce dans le plus simple appareil. J’avais, comme toujours, le mien, mon Pentax LX, à portée de main, mais muni de son excellent 20 mm ou du 40 mm ultra-plat de cette époque. Et puis, franchement, ce moment de curiosité passé, nous n’allions pas restés scotchés à la lucarne, d’une, et je n’étais pas, de deux, versé dans ce genre « d’actualité ».

En revanche, avec le même, le réflexe Pentax, je me rendis des années après (fin 1989), dans cette même rue de Verneuil. Gainsbourg m’accordait un entretien sur son film Équateur, adapté du roman Coup de lune, pour Simenon Travelling (édité par le festival du polar de Grenoble). Histoire d’imputer les frais de déplacement à mon quotidien, je lui empruntais une voiture du journal. Et comme c’était le jour anniversaire des 18 ans d’un pigiste, Frédéric Chef, dit Chouf, je l’embarquais en catmini, car il avait beaucoup insisté pour m’accompagner. Je n’ai pu que m’en féliciter. C’set en faisant valoir cet anniversaire, après avoir recueilli quelques propos sans grand intérêt pour L’Union, que je parvins à persuader Gainsbourg de sortir faire une photo en la compagnie de Chouf devant son mur de la rue de Verneuil. J’allais la retrouver, créditée uniquement L’Union, quelques années plus tard, dans un album, Gainsbourg et cætera, de Verland et Salmon (éds Vade Retro, lequel s’accompagnait d’un CD incluant la chanson La Noyée. Bien évidemment, le recadrage expurgea Chouf de la photo publiée (il avait pris place, en passager clandestin, donc sans assurance ni ordre de mission). Je dois avoir encore d’autres vues, plus larges, dans la cave de mon fils, en Bretagne.

Il me fut indiqué, encore beaucoup plus tard, que le chanteur n’avait posé qu’une fois auparavant devant ce mur. Je n’ai pu savoir en revanche si ce fut l’une des toutes dernières photos de presse écrite publiée de son vivant (celle de la première page du Parisien, de mars 1991, fut une photo d’archives du « fumeur de gitanes » qui ne s’en accordait plus que dix quotidiennes lorsqu’il nous reçut).

En anglais, le livre de Jane Birkin s’accompagne de la mention : « mon amour pour un DOM’ » (Vieux salace, ou vieux dégueulasse, dirty old man). Mais on se doute bien que l’homme ainsi catalogué par un calembour (voir supra son hygiène supposée) était surtout un grand sentimental. C’est en tout cas le souvenir que j’en conserve. Il s’inquiétait du devenir de Lulu (Lucien), le fils qu’il avait eu avec Bambou (la carrière naissante de Charlotte lui semblait déjà bien orientée avec neuf films à son actif d’actrice).

Si j’en crois la note de lecture du Guardian, le livre de Jane s’apparente à une suite de gossip topics. Katie Rosseinsky, du Standard, gage que les lecteurs resteront sans doute un peu sur leur faim. Comprenez que l’auteure se révèle attachante, pleine d’humour (franglais peut-être), mais fort peu trash. Bref, telle qu’on veut s’en souvenir. Proche de la photo de la couverture de l’édition anglaise. Et, comme elle le consigne en sa préface, « restée puérile » (très infantile, dans la version française).

Les deux préfaces (la française et l’anglaise) sont consultables en ligne. Et il semble bien que certains détails d’une version soient omis ou élidés, dans l’autre, d’autres rajoutés ; rien d’essentiel. Des deux émane la même sincérité teintée de candeur. Nostalgie…