jeudi 11 février 2021

Trump humilié, Trump relégué, mais Trump acquitté

 Les républicains moins fracturés qu’il y paraîtrait

Donald Trump, selon diverses indiscrétions, aurait été froissé par le manque d’audace des avocats qui le représentent devant le Sénat. Mais il reste impavide, et pour cause, il reste la référence électorale du parti républicain.


Aucun bookmaker n’a pris des paris sur l’acquittement ou la condamnation de Donald Trump par le Sénat étasunien. Et pour cause, les jeux semblent faits d’avance. La majorité des sénateurs républicains regardent d’un œil distrait les vidéos de l’accusation démocrate, au mieux gribouillent sans prendre de notes ou somnolent ostensiblement. S’ils sont une demi-douzaine à voter contre Trump, ce sera un maximum, selon toutes les prévisions (il faudrait qu’ils soient 17).

C’est d’autant plus significatif qu’il semble établi que l’ex-président avait été parfaitement mis au courant à l’avance qu’une partie de ses partisans préparaient activement un assaut du Capitole. Son équipe de communication, dirigée par Dan Scavino, surveillait activement les réseaux sociaux (dont Reddit, 4 chan et 8kun) depuis des semaines et des mois avant le 6 janvier. Les principaux organisateurs de la convergence vers Washington ont été lourdement financés par le comité de campagne de Trump, via Made Media Consultants LLC et des sociétés écran. Certains de ces organisateurs, dont Alan Hostetter, avaient appelé à l’exécution des traitres et des communistes (démocrates et républicains opposés à Trump).

Certes, une centaine d’éminents républicains, dont beaucoup de retraités des précédentes présidences républicaines, ont organisé une visioconférence pour décider de la formation d’une tendance conservatrice plus traditionnelle au sein du GOP. Voire d’une scission : mais pour créer un troisième parti, il faut des sous, et les donateurs potentiels douteront très fort de la viabilité d’une formation indépendante.

Qu’à cela ne tienne, Fox News et les autres médias plus ou moins nettement pro-Trump ne mettent en avant que les arguments lui étant favorables. Mieux encore, le sénateur Lindsay Graham tente d’insinuer que les démocrates étaient tout aussi au fait des risques d’assaut du Capitole et n’auraient rien fait pour les prévenir. C’est tout juste si la fiction d’une infiltraton d’antifas dans les rangs des fanas de Trump n’est pas remise au goût du jour, alors que, parmi les victimes ou les arrêtés, il ne s’en trouve pas. Mais l’exemplication est simple, c’est tout bonnement que le FBI se refuse à en trouver.

Donald Trump Jr, le fils aîné, laisse entendre que les assaillants étaient surtout des dérangés, aux motivations très diverses. Alors que les démocrates ont encouragé le mouvement BLM (Black Lives Matter) qui a généré beaucoup plus de dégâts.
Le New York Post, qui avait pourtant pris position contre les allégations de fraude électorale de Trump, considère que le débat au Sénat n’intéresse pas son lectorat et titre “Born tu Rum” (Bruce Springsteen ayant conduit alcoolisé).

La plupart des têtes de pont de la marrche du 6 janvier ont indiqué avoir été en liaison étroite avec des élus républicains, ces derniers, nommés, s’abstiennent de commenter ou dénonçent des débordements imprévisibles.

En fait, même si Trump avouait publiquement qu’il a menti (enfin, non, qu’il plaisantait) en faisant état de fraudes électorales que cela ne changerait sans doute pas grand’chose. Il aurait possiblement été abusé par ses opposants infiltrés dans ses propres rangs (si ce n’étaient des démocrates se faisant passer pour des trumpistes). Comme c’est idiot : il en a grâcié quelques-uns par inadvertance.

Cette éventualité est farfelue, bien sûr, mais même si Trump perdait progressivement de sa superbe, il restera peu désavoué par ses électeurs. C’est Trump un jour, Trump toujours pour la majorité des trumpistes (hors ceux qui seront sans doute traînés en justice et n’ont pas été grâciés, et encore...).

Le mouvement Maga soutient désormais que le policier mort peu après le 6 janvier n’aurait jamais été blessé par les assailllants et qu’il s’agit d’une accusation infondée de la presse mal-pensante (entendez non pro-Trump). Les plus flagrantes outrances de la Woke Culture alimentant les craintes des trumpistes qui se sentent assiégés et véritablement en état de légitime défence (non pas face au covid, mais du fait des restrictions), leur fourniront toujours assez d’arguments pour estimer qu’ils incarnent le bien, la religion, le patriotisme, les valeurs fondamentales (à leurs yeux) des États-Unis d’Amérique. God Save Trump’s America. Steve Bannon a beau rester en délicatesse avec la justice (en divers États, notamment en Floride où son associé Andrew Badolato s’est fait pincer par le FBI), sa carrière n’est pas en danger. Trump peut jouer au golf peinard.