samedi 30 avril 2022

Voter Le Pen (ou RN) pour faire barrage à Zemmour (ou Reconquête) ?

Pour ne pas se fâcher avec les potes, raisonnez crétin.

Raisonner crétine-crétin (ici, adjectivés) ne devient pas plus stupide qu’autre chose. J’opte donc pour raisonner crétin (syntagme nominal, avec mes deux neurones descendus dans mes gonades). Une Le Pen pourrait-elle marginaliser l’islamo-facho Zemmour ? Oui, mais laquelle ?


Petite mise au point sur l’islamo-fascisme d’un Zemmour. Tendance Franco ou Salazar ? Allez savoir. Comme tout gaucho de ma génération, le sionisme des origines, laïque et socialo-diversifié, me semblait séduisant. Mais le résonnez musettes de Reconquête m’en semble si éloigné, voire antagoniste, qu’il me hérisse le poil. Je n’en puis mais. En crétin assumé, je vois chez lui la mentalité des Frères musulmans. Je peux me gourer, je ne le connais pas. Je ne peux donc affirmer qu’il pense ce qu’il dit (d’ailleurs, la même réflexion crétine vaut pour tout·e politicien·ne dont on ne sait plus s’il ou elle pense à autre chose qu’à favoriser ses ambitions). Réfléchir crétin, c’est estimer que, pour éviter d’attendre que la Marion renvoie le Zemmour sur le banc de touche, il faut miser sur la Marine. Donc, la conforter aux législatives, pour voter « utile ».

Les sondeurs ont tellement négligé ce vote crétin (voir ce qu’en relate Le Canard enchaîné), sans doute considéré trop marginal, qu’on ne sait trop comment l’interpréter, ni le quantifier. Entre 13 et 17 % des mélanchonistes du premier tour auraient voté FN (ou RN nouvelle appellation), selon deux instituts. Du fait de quels calculs biscornus ? Fragiliser Macron coûte que coûte ou se laisser abuser par les déclarations socialo-compatibles du FN ? À moins que des relents fondamentalistes religieux aient pu jouer (entre islamisme et judaïsmes rances, c’est tellement imbriqué et similaire ; quant au christianisme intégriste, il reste sur la ligne pillez et massacrez pour acheter reliques et indulgences, et une bonne confession vous vaudra au moins le purgatoire). De ce point de vue, Marion, Marine ou Éric se valent : bonnets noirs et noir bonnet. Cap à droite toute, comme à Varsovie ou Budapest. Qu’importent les promesses ou les moyens, ce qu’un électorat crétin pressent mais ne veut pas considérer sérieusement.

En fait, le « penseur » crétin (ma pomme) ne croit plus en rien ni en personne. Mais, furtivement (pas trop longtemps), il fait encore semblant (ou se l’imagine, histoire de ne pas renier frontalement ses chimères antérieures). Fondateur et suprême manitou (præsident-maréchal) du PrOuT, ou Parti de rien ; revenu de tout (seule formation politique de l’univers exploré à inclure un point-virgule dans son intitulé), je n’ai jamais préconisé le vote blanc, car on ne sait jamais. Mais de quelle fontaine politique actuelle boirait-on de son eau ? Leurs chefs de file puisatiers semblent ne plus s’exprimer que pour s’écouter parler. Dernière en date des recompositions : voilà que la Refondation républicaine de J.-P. Chevènement va se retrouver à négocier des circonscriptions avec les sarkozistes ralliés à Macron. Qui l’eut imaginé voici seulement six ans ? Cette Refondation sera-t-elle aussi durable que l’Alliance républicaine, écologiste et sociale de Jean-Louis Borloo et Jean-Marie Bockel (ce dernier issu, comme Chevènement, du Cérès, un temps aile gauche du PS) ? Cette Alliance se proclamait « Pour une France juste », juste à point sans doute, entre saignante et bien recuite. Ces tentatives de placer des parents, amis et transparents affiliés, tous proclamés soucieux du bien commun ordonné et commençant par soi-même, pourraient être qualifiées de formations girouettes, pour paraphraser feu Edgar Faure. Tant que flotte dans le vent un fumet de soupe, elles tournicotent.

On ne sait jamais, et l’électeur crétin ou auto-crétinisé peut virer de nouveau naïf. Un peu comme l’électeur ultramarin votant Le Pen en s’imaginant que la réduction du nombre des immigrés créera des opportunités de postes ou d’emplois. Le crétin en politique est fort souvent un ex-naïf porté à le redevenir à l’occasion ou à se laisser emporter par un accès de colère. Et la colère, cela se suscite et s’amplifie. En abruti revendiqué, je vois très bien les possédants ressusciter les ligues violentes d’avant le Front populaire. Passer pour un sombre crétin inoffensif deviendrait sans doute salutaire. À tout hasard, je m’entraîne. L’option de se réfugier au Groland étant désormais caduque quoi d’autre ?