samedi 5 septembre 2020

Oregon : l’antifa de Portland abattu

 

Un procès promptement évité

Michael Reinoehl, qui avait tué, semble-t-il, le « Patriote chrétien », Danielson à Portland, a été abattu par la police à Washington. Bonne nouvelle : aucun autre civil ni aucun policier n’est mort dans la fusillade déclenchée par la police.


C’est bien un déluge de feu (au moins une cinquantaine de coups tirés par la police) qui a fait taire Michael Reinhoehl, lequel se déclarait antifa et avait estimé avoir agi à Portland en état de légitime défense (lors d’un entretien avec Vice News). On peut effectivement considérer que cette déclaration vaut aveu d’avoir tiré sur Danielson, membre ou sympathisant du groupe Patriot Prayer.

Danielson avait aussitôt été présenté tel un remarquable Américain pacifique, un homme de bien, quasiment un bienheureux. Un homme compassionnel, comme l’ont décrit ses amis. Il n’en reste pas moins que l’enquête a déterminé qu’il était armé non seulement d’un pulvérisateur capable de neutraliser des ours, d’une matraque télescopique, et d’un pistolet automatique chargé et d’un chargeur de munitions. L’un des témoins de la scène, qui l’avait enregistrée avec une caméra, avait d’ailleurs déclaré que Danielson avait porté la main à sa ceinture. Il semble que Reinhoel ait tiré deux coups, l’un faisant éclater l'aérosol, l’autre ayant atteint Danielson dans le dos. La police, selon la vidéo et des témoignages de secouristes, avait sécurisé la scène, écartant les secouristes, et le légiste survenu par après n’avait pu que constater le décès de la victime.

L’Oregonian a enquêté sur l’embuscade du secteur de Lacey, à Washington, au cours de laquelle Reinoehl a été abattu. Il se trouvait sur un parc de stationnement, parmi de nombreux civils (comme en témoigne une photo montrant Reinoehl devant son véhicule). Un témoin a décrit « les enfants et les familles courant pour sauve leurs vies ». Au moins quatre policiers ont tiré une cinquantaine de balles, réussissant à ne pas s’entretuer. Reineohl fut atteint de plusieurs balles, apparemment une demi-douzaine, mais le légiste s’est refusé à en confirmer le nombre.

Le procureur général William Barr, très proche de Trump, s’est empressé d’estimer que force était restée à la loi et que, désormais, Portland était un peu plus paisible. « Les rues de nos villes sont plus sûres depuis que cet agitateur violent a été éliminé », a-t-il déclaré.

La sœur de Reinhoel, qui avait reçu d’anonymes menaces de mort la visant elle et tous les siens, n’a pas condamné l’action de la police et appelé à l’apaisement, elle a recueilli la nièce de 11 ans de son frère, dont le fils aîné, àgé de 17 ans, semble avoir fui la ville, voire l’Oregon.

La police a attendu que Reinoehl soit monté dans sa voiture pour ouvrir le feu sur son véhicule et il a été tué dès qu’il en fut descendu. La police du comté de Thruston, chargée de l’enquête sur l’intervention, n’a pas indiqué si Reinoehl était armé ou aurait tenté de riposter.

Donald Trump avait incité la police à agir contre Reinoehl au plus vite : « tout le monde sait qui est ce bandit », commentait-il. Vœu exaucé.

jeudi 3 septembre 2020

Valentin Gendrot et la police : confirmations, approximations

 Des limites du livre-témoignage brut

Je vous en parle sans avoir déjà lu Police (Goutte d’or éditeur), mais comme il existe une version numérique peu chère, je vous en entretiendrai de nouveau sans doute. Histoire de confirmer ou infirmer mon présupposé : un témoignage brut ne peut être que parcellaire.


Il est bien présomptueux de reprocher à Valentin Gendrot d’être resté au ras des pâquerettes. Soit au récit d’une formation bâclée dans un centre de province et de six mois d’observation au sein d’un commissariat d’arrondissement parisien. C’est du grand reportage, à la, mettons Florence Aubenas mode Quai de Ouistreham (six mois au coude à coude des précaires). Chapeau, donc. Avec un handicap pour Gendrot : tenter de prendre contact avec des collègues d’autres commissariats, de sonder la hiérarchie, d’élargir son terrain d’enquête l’exposait à se brûler rapidement. Soit il restait infiltré et il n’encourrait pas la vindicte d’autres policiers, soit… comme il l’explique, il risquait de se retrouver au placard et en butte à l’hostilité, aux brimades.

Ce qu’il ressort de la revue de presse et des quelques entretiens donnés par l’auteur, c’est qu’un jeune flic ne peut que devenir flic à part entière ou démissionner. D’ailleurs, il se défend d’avoir écrit un livre « anti-flic », et même on peut deviner qu’il s’agit plutôt d’un livre pro-flics décents.

Mais il confirme que, comme il l’a fait lui-même, les décents sont rapidement contaminés, couvrent non pas seulement les bavures, mais les exactions délibérées des collègues, et que la hiérarchie, ne voulant pas d’histoires ou compromettre son avancement, tolère quasiment tout comportement limite. Cela confirme les conclusions des diverses études sociologiques.

On a l’impression que seuls les « bâtards », ainsi désignent les policiers xénophobes) tous ceux sur lesquels ils se sentent libres de frapper, tous étrangers ou « bronzés » au sens large, font l’objet de menées contraires au code de déontologie. Rien n’est plus faux globalement. À moins d’être magistrat ou avocat ou de faire valoir une preuve indubitable de sa proximité avec le pouvoir, tout justiciable (c’est-à-dire pratiquement tout le monde) peut se retrouver provoqué puis poursuivi pour outrage. Mais dans le doute face à un bon Français « indigène », né en France de parents Français et blancs, simple contrevenant ou délinquant, les méthodes, par précaution, sont plus subtiles. C’est, par exemple, serrer les pinces à fond pour faire mal, mais de façon à ce que les traces ne puissent pas entraîner un constat médical qui, dans la plupart des cas, ne sera pas immédiat.

De son expérience d’une formation superficielle dans un centre régional, Gendrot déduit que n’importe qui peut devenir policier. Par cette voie, peut-être. Mais pour intégrer une école de police, formant des gardiens de la paix, ce n’est pas le cas : mieux vaut ne pas être trop diplômé et ne pas trop briller à l’écrit, être plus proche de 17 ans que du maximum (35 ans). Le tri est sévère pour éliminer les éventuels potentiels gêneurs.

Légère digression. En Espagne, on n’intègre plus une école de police si on n’a pas obtenu 62 bonnes réponses sur cent à l’épreuve d’orthographe. Que les nuls en orthographe ne désespèrent pas, cela ne durera pas.

Le livre est aussi un plaidoyer pour accorder des moyens décents aux policiers décents (dont les autres pourraient bénéficier, ce qui les apaiserait peut-être). Il est certain qu’entre les locaux et les véhicules des séries télévisées policières et le réel, l’écart est considérable. Mais une série policière qui ne bénéficierait pas de la sympathie de la hiérarchie ne durerait pas plus que quelques épisodes. Une bonne série policière doit donner une impression globale favorable de la police et de la gendarmerie.

En revanche, le mérite d’un tel témoignage brut est d’être difficilement réfutable, d’autant que l’auteur n’en est pas à sa première infiltration

Ce livre apporte beaucoup de confirmations. Et prolonge ce que décrivaient déjà les romans noirs d’Hugues Pagan, ancien policier et auteur (trop) franc, sincère. En réalité, pratiquement tout le monde savait déjà ce qu’il en était. Plus significatif me semble ce que l’éditeur en dit sur son site. Il avait été envisagé d’imprimer le livre à l’étranger (ce fut en Slovénie), d’en assurer la promotion auprès de relais d’opinion « dans le huis-clos du cabinet » d’un avocat.

Ce livre a déjà retenu l’attention à l’étranger (The Guardian, RTBF, Tribune de Genève, El Mundo, etc.).

Ce qui devient grave, c’est que, du fait d’une minorité, la majorité de la population devient appréhensive si elle doit frayer avec la police, en tant que témoin ou plaignant, s’attendant à être systématiquement toisée et intimidée. Il subsiste  pourtant des policiers faisant preuve d’écoute et d’une forte aménité.

À l’inverse, nombre de policiers sont quotidiennement insultés et confrontés à des attitudes provocantes de la part d’une minorité. Et certains policiers, sachant ce que subissent leurs collègues, en viennent à exprimer systématiquement un ressentiment à l’égard de populations assimilées hâtivement à ceux qui s’en prennent à leurs collègues. La tolérance de la majorité envers les écarts de comportements de certains en découle.

Ce qui est rassurant c’est qu’en découvrant les dépêches de l’AFP, largement reprises, le ministère a incité la préfecture de police à saisir l’inspection générale et alerté le parquet. Et pour une fois, le communiqué de la préfecture ne tente pas d’induire que les faits rapportés  (qualifiés « d’allégués » cependant) soient d’emblée dénués de tout fondement ou fortement exagérés.  Pour le moment, les syndicats de police n’ont pas réagi. Mais, pour donner l’ambiance du côté de France Police, il est réclamé, après le meurtre d’un policier au Mans, que policiers et gendarmes soient autorisés à ouvrir le feu en cas de refus d’obtempérer. Quant à Synergie officiers, ce syndicat définit les violences policières de « délit imaginaire caractérisé par les tribunaux médiatiques ». Quant au SICP-SCPN, qui appelle à manifester le 2 octobre, il dénonce la « mise en cause – systématique, médiatique et politique – de notre action au moindre incident. ». C’est mal parti pour la réception de ce livre.

Parmi les entretiens accordés par l’auteur, le plus significatif (je n’ai pas eu accès à celui de Mediapart) est le fait du site RTL belge. Ce n’est pas un hasard : les journalistes belges ont rarement à faire avec la police française et ne risquent pas des mesures de rétorsion.

Sur Twitter, une policière, Juliette Alpha, auteure de Vis ma vie de flic (Hugo Doc éd.), pose une question pertinente : «  est-ce que Valentin Gendrot a le recul nécessaire, avec seulement six mois dans une brigade,pour comprendre comment tous ces facteurs peuvent nous changer ? ». La question induit la réponse. Mais faudrait-il cinq à six ans pour un policier infiltré dans un gang d’une cité pour saisir, à défaut de comprendre, de quoi il en retourne ?

La version papier du livre était déjà, en soirée, en rupture de stock sur divers sites. Faut-il y voir un indice de l’évolution de la perception d’une partie de la police par une large partie de la population ? Un tantinet sans doute même si hors des agglomérations, la police reste très majoritairement respectée et appréciée. Ce que reflètent d’ailleurs les propos de l’auteur, pour le moins mesurés. Je ne doute d’ailleurs pas que le commissariat de son arrondissement reçoive aussi des félicitations méritées de la part des habitants. Un couple d’amis qui y résidait a fini par se réfugier en petite province, las des incivilités, des dégradations gratuites subies par son véhicule (une 4 L Renault). Des gens pas, ou plutôt plus choqués que des (et non les) policiers emploient parfois des méthodes « musclées ». Sans toutefois dénier qu’elles puissent exacerber des frictions, des tensions. Et cet engrenage mérite d’être pointé du doigt. Même, comme peuvent l’estimer certains policiers, maladroitement et cavantage à charge qu’à décharge.

Un fonctionnaire de l’Intérieur répondait à Juliette Alpha : « je n’ai rien contre un peu de justice expresse de rue, mais ce qui a l’air d’être décrit dans le bouquin est intolérable. Parce que cele arrive, mais surtout parce qu’il n’y a pas de sanctions. ». Mais, il y a des sanctions, contre les policiers dénonçant l’intolérable. On n’a pas oublié le sort fait au policier syndicaliste Alexandre Langlois de Vigi. Lequel syndicat dénonce « le racisme cautionné et encouragé dès l’école de police » (celle de Nïmes). 

mercredi 2 septembre 2020

Kenosha : Rittenhouse tabassait une fille avant d’aller tuer des Commies



 Aux É.U., c’est Daesh version chrétienne

Donald Trump a laissé entendre que Koyle Riettenhouse, qui a tué deux personnes à Kenosha, avait tiré en légitime défense. Bien sûr il ne savait pas que son protégé avait, le premier juillet, tabassé une jeune fille pour le plaisir. La Maison Blanche et la police s’enferrent dans le déni pour assurer la réélection de Trump.


Restons maîtrisés et non véhéments : que le jeune Rittenhouse, 17 ans, ait rossé davantage une jeune fille prise à partie par les copains d’une autre n’implique pas la suite de ses actes. Et que Donald Trump veuille trouver des alibis à tous ses partisans n’a rien de nouveau. Cet autre fait divers n’en reste pas moins significatif d’un mouvement d’ensemble. Une large étude portant sur les adhérent·e·s aux thèses complotistes dégage une forte majorité d’hommes blancs, mysogines, se croyant ou se voulant supérieurs aux autres (en particulier aux élites libérales) et inquiets du pouvoir ascendant des femmes dans la société étasunienne. Bref, ils ont tout pour reconnaître Trump pour l’un des leurs.

Quant aux hiérarchies policières couvrant leurs subordonnés en cas notamment non de bavures mais d’exactions criminelles, tout argument est bon, réel bien sûr, partiellement réel ou carrément fabriqué. Parmi les récents exemples en date, le cas de Breonna Taylor, abattue dans son appartement. Elle avait un ami d’enfance qui se livrait possiblement à des trafics de drogue. Au départ, ce dernier déclare que Breonna n’avait aucune part dans ses activités illicites. À présent, il a été sollicité pour déclarer le contraire et impliquer Breonna et bénéficier de faveurs judiciaires, rapportent NBC et d’autres médias. Des avocats de la famille Taylor ont pu produire un document en ce sens. Bien sûr, le parquet du comté de Jefferson a totalement démenti que cette manœuvre visait à dédouaner la police.

À Portland, dimanche dernier, la police a maté violemment des manifestants qui se livraient effectivement à des dégradations. On voit notamment des policiers frapper un homme à terre à coups de crosse de fusils. Que fait le chef de la police de Porland. Chuck Lovell, de sa propre intiative (c’est un Afro-Américain) ou sous la pression de ses effectifs interpelle le maire démocrate de Portland qui avait dénoncé tous les types de violences. Le policier réclame des sanctions visant les manifestants et tait tout rapport de cause à effet entre les violences policières et l’exacerbation des (enfin, non pas des, de certains, mais il ne le précise pas) manifestants.

En fait, un peu partout, la police — ou du moins les policiers estimant que la réélection de Donald Trump leur vaudra des primes ou des revalorisations — incitent les milices d’extrême-droite et ceux qui s’y assimilent pour se faire valoir à leurs propres yeux et ceux de leurs proches connaissances, à des affrontements avec les mouvements BLM ou associés. En gros, c’est « venez avec nous casser des rouges et des criminels ».

Au-dessus, Trump laisse entendre que les milices bénéficieront de l’immunité voire laisse présumer qu’il accordera une grâce présidentielle à ses partisans risquant d’être poursuivis et condamnés.

Cela devrait suffisamment fonctionner dans nombre d’États, surtout les moins peuplés, mais qui envoient davantage de grands électeurs que les États favorables aux démocrates.

De leurs côté, les hackers russes tent de dissuader l’électorat démocrate proche de Bennie Sanders et d’autres catalogués radicaux d’apporter leurs voix au tandem Biden-Harris. Ils continuent aussi, avec des comptes fictifs, d’entretenir des thèses complotistes. Ce qui revient à une collusion de fait avec Trump et la Trumpland.

Bien sûr qu’ils soient athées ou simplement financièrement intéressés (le milicien de Portland tué était spécialisé dans les livraisons et déménagements de coffre-forts pour armes à feu) se réclament du christianisme et du nationalisme. À Kenoscha, Trump a fait une tournée des destructions. Comme un commerçant dont la boutique a été incendiée ne voulait pas poser à son côté, l’équipe de communication de Trump est allée dénichée son prédécesseur, le présentant tel l’actuel exploitant.

C’est dans la presse et sur les sites de presse, mais toute la presse n’étant pas systématiquement pro-Trump est discréditée et les complotistes ne font confiance qu’aux réseaux sociaux les renforçant dans leurs convictions. Il se targue d’avoir conversé avec le révérend de la famille de celui auquel les policiers ont tiré dans le dos, la famille défend formellement, mais peu importe. La Trumpland retient que Trump est un excellent chrétien et que Biden pousse aux violences et aux destructions. C’est d’ailleurs son seul argument électoral : faites-moi confiance pour restaurer l’ordre et l’application des lois. Tout opposant à Trump étant un terroriste en puissance (sa dernière : armé de boîtes de conserves de soupe lancées contre les policiers).

Trump a carrément admis que déplacer l’ambassade de Tel Aviv à Jerusalem ne visait pas à fidéliser un électorat juif qui s’étiole, mais à sécuriser celui des évangélistes.

De toute façon, la Trumpland se moque de savoir que son herault conforte l’islamiste Erdogan en Lybie et contre la Grèce pour fragiliser l’Union européenne, en plein accord avec Poutine. L’avortement (sauf bien sûr quand la maîtresse ou une gamine enceinte pourrait réclamer des subsides), les armes, les églises et le drapeau sont ses seules préoccupations. Comme le rêve américain s’éloigne pour celles et ceux (surtout ceux) qui sont laissé pour compte, le complotisme devient un refuge, une compensation pour l’amou-propre malmené par les faits et la dèche (toute relative). Trump invente que des milliardaires affrètent des avions pour amener des terroristes perturber la convention républicaine (tiens, ils ne prêtent pas leurs jets privés : comme la presse dément, c’est que cela doit être vrai, forcément. C’est le réflexe : vous avez des diplômes, une meilleure situation que moi, mais moi, je sais ce qui se trame et avec Trump, je vais retrouver le pouvoir de changer les choses à mon avantage.

Cela ne s’est pas produit en quatre ans mais, c’est évident, en quatre ans supplémentaires, cela adviendra.

Comme, en face, une majorité ne pense pas que Biden fera beaucoup mieux qu’Obama, beaucoup restent la tête dans le sable. En fait, Trump applique les méthodes de Daesh et galvanise la Trumpland. La conjonction des deux semble en passe de lui valoir sa réélection.

En France, la droite constatant qu’aucune ou aucun chef de file naturel ayant l’aura d’un Tump et capable d’appliquer ses tactiques n’émerge, elle glisse vers un modus vivendi avec un Macron susceptible de lui laisser préserver quelques fiefs et avantages

lundi 31 août 2020

Portland : le sataniste Reinoehl (israélite) tue le bienheureux (Danielson) ?

 Si ce n’est un Noir, ce ne peut être qu’un démon…

Au-delà du fait divers de base (qui était qui, qui a fait quoi ?), le meurtre du « patriote pour la vraie foi » Aaron Danielson, par l’antifa Mike Reinoehl est tout à fait significatif de ce qu’on pourrait paradoxalement dénommer l’historiographie immédiate.


Je ne sais toujours pas qui est la victime du mouvement Patriot Prayer mort des suites d’une blessure qu’un certain Michael Reinoehl lui aurait, est-il affirmé, infligé. Ou que, selon un autre mode de story telling, la police de Portland aurait tout fait pour qu’elle devienne mortelle. Je ne vais surtout pas prétendre partager le vrai du vraisemblable et l’erroné du faux mais la suite de la « divine révélation » peut intéresser les médialogues.

C’est vraiment par hasard que, la nuit dernière, j’ai cherché à survoler un peu cette histoire de tir à Portland et effleuré l’angle médialogique (d’un membre du groupe Patriot Prayer, il est tout de suite fait un “Trump supporter”). Ce qui semble plausible mais n’est pas vraiment établi. Tout comme je ne m’aventure pas à déclarer le présumé coupable d'être le véritable auteur du tir. La seule source fiable reste The Oregonian, dont les journalistes se bornent à relater que la police a ouvert cette piste après que la sœur de Reinoehl ait reçu des menaces téléphoniques de mort visant toute sa famille.

Nous avons deux récits, qui ont d’ailleurs depuis évolué. Tout d’abord, un certain Andy Ngô affirme que des témoins ont vu a Black Male tirer sur Danielson. Comme cela semble difficile à étayer, mais après qu’un policier (qui n’a vraisemblablement rien vu), interpellé par un manifestant pour critiquer non la police en général, mais se déclarer contre la police locale présumée être aux ordres du maire démocrate ait affirmé que le treur est un antifa, on finit par trouver l’antifa idéal. Je sais ce n’est qu’une supposition. Mais certains auraient alors bondi sur la piste de l'antifa de Portland et faute de Noir, auraient, selon leurs détracteurs, déniché le coupable qui leur seyait.

Autre supposition, cette fois venant du camp d’en face. Une infirmière ou soignante bénévole, Sierra Boyne, qui s’était portée auprès de la victime, affirmera que tous les secours bénévoles furent violemment écartés du blessé, toujours vivant, par la police. Ce de façon à ce que, 20 minutes plus tard on ne puisse que le déclarer mort. Il fallait un mort pro-Trump à la police, CQFD (et c'est bien sûr impossible à démontrer, mais l'argument est suggéré hâtivement).

En réalité, il est fort possible que les policiers aient eu pour consigner de sécuriser la scène du crime en attendant un médecin légiste ou la police scientifique. Au risque peut-être que la victime ne puisse bénéficier de secours d’urgence, mais qu’il en ait été décidé sciemment semble une extrapolation.

Un mot sur la police de Portland, les nationalistes — les patriotes — pro-Trump ou non sont persuadés que la police et les magistrats de Portland reçoivent des consignes des démocrates locaux pour que les pillages et manifestations se poursuivent impunément. C’est d’ailleurs le discours sous-jacent de Donald Trump et de la Trumpland (et nul besoin d’étayer, c’est constant depuis la mort de George Floyd et les manifestations de Portland). Un George Floyd qui, bien évidemment, est mort d’une overdose et de pathologies préexistantes (l’avocat du policier demande donc sa relaxe, tout comme l’avocat du tireur de Kenosha, Lyle Rittenhouse,17 ans,  plaide à présent la légitime défense).

Danielson était accompagné d’un ami, Chandler Pappas, que l’on voit sur des photos antérieures revêtu d’un maillot frappé d’une swastika (à moins qu’il s’agisse d’un quasi-sosie, les détournements de photo ne sont pas imputables qu'à un seul camp). C’est banalisé que Pappas fera une petite allocution pour dire que la victime était simplement venue exercer son droit d’expression. Ce même Chandler Pappas fut accusé par son oncle d’avoir tenté de le tuer en pleine rue. Mais bien évidemment, les pro-manifestants BLM relèvent que la police omit de le poursuivre. Les anti-manifestants en ont autant contre la police et la justice qui n’auraient pas poursuivi Reinoehl pour port d’arme…

Ce qui semble sûr (d’un côté comme de l’autre), c’est que Reinoehl avait été précédemment blessé au bras par un projectile. Ce qui semble moins sûr, c’est que Danielson et Pappas s’en soient pris à des manifestants peu avant que Danielson reçoive un coup de feu. Certains l’attestent. Reinoehl se serait-il estimé en légitime défense, tout comme le soutient à présent Rittenhouse  pour son propre compte ?

Autre hypothèse avancée : en fait Reinohl aurait été rétribué pour infiltrer les antifas. Hypothèse bien sûr réfutée par le camp d’en face pour lequel Danielson semble en voie de béatification. Bref, l'un serait Boogaloo (alt-right) et l'autre de même.

Où cela tourne à l’absurde, c’est lorsque l’on consulte les commentaires sur 4Chan. Reinoehl est un nom d’origine allemande, donc juive, forcément juive. Et chacun sait que les Juifs actuels n’ont rien à voir avec ceux du temps de Jésus (dont les vrais descendants ramèneront le Sauveur, et feront triompher la chrétienté, selon les évangélistes). Il en découle que ce n’est pas un infiltré, mais un séide stipendié de George Soros. Cela va tellement de soi... Inutile de chercher à le démontrer, CQNFPD. Cela se passe d'explication, nul besoin de démonstration. Si vous ne croyez pas au diable, c'est que vous êtes un vilain athée (donc pervers et internationaliste proto-communiste).

Déroulez le fil et retrouvez Thierry Meyssan sur le Réseau Voltaire. Les antifas seraient, selon Meyssans, une pure création de la CIA, de l’Otan et de Soros, si ! Bref, de l’état profond Clinton-Obama. D’ici à ce que Reinoehl passe pour un santaniste se livrant à des sacrifices d’enfants, le pas n’a pas encore été franchi. En tout cas, il aurait massacré l’Enfant de Dieu, le patriote chrétien (ne peut être patriote qu'un chrétien et vice-versa, pardon, vertu oblige, God Save America).

Ce qui est vérifiable, c’est qu’un bord fait de Danielson la victime idéale et de Reinoehl un coupable haineux. Il n’y a eu que la Portland Tribune pour relever que Danielson et Pappas étaient aussi armés de couteaux. Le Portland Mercury a fait état d’un « possible suspect », sans le nommer. Le Portland Mercury avait aussi relaté que l’un des chauffeurs participant à la Trump Cruise Parade avait foncé dans la foule des contre-manifestants (entendez les pro-BLM). Fox News le nomme mais soulignait que la police locale n’était pas parvenue à des conclusions.

L’auteur de la vidéo la plus diffusée est celle d’un certain Justin Dunlap qui a déclaré à l’Oregonian que la victime, avant d’être atteinte, avait saisi quelque chose depuis sa taille de sa main droite et dirigé un jet (de gaz, peutt-être de’une bombe aérosol ou de gel au poivre), puis qu’il avait entendu deux détonations. Dunlap a déclaré aussi qu’il avait communiqué la séquence à la police. Il s’est déclaré incapable de dire qui pouvait être le tireur. 

Pour les uns, la victime est devenue davantage un Maga martyr (un pro-Trump martyr) qu’un affilié à un groupe d’extrême-droite, pour les autres, il s’agit d’un néo-fasciste, possiblement tué par un agent infiltré parmi les antifas.

Il est bien sûr déplacé de relever que France 24 a traduit bear mace par « masse d’ours » (ces aérosols, ou sprays, d’autodéfense sont utilisés dans les régions où les ours font des incursions dans les localités). Ce qui est certain, c’est que les membres de la « cavalcade » trumpiste en étaient massivement équipés et en ont fait un copieux usage, ainsi que des marqueurs de balles de peinture, mais qu’ils étaient aussi munis d’armes à feu dont ils n’ont pas fait usage. Il s’agissait assurément d’en découdre avec les pro-BLM et autres « teroristes ». La consigne était de pulvériser, mais de conserver les armes à feu dans les voitures (au cas où..). 

Récemment, dans Le Soir (be), un académique (universitaire), relevait que le terme de « frugal » était appliqué aux pays pingres de l’Union européenne et dénonçait cette litote. À l’inverse, la Trumpland peut maintenant s’autoriser à désigner terroriste tout opposant à Trump. Car complice objectif des antifas. 

Et tous les moyens sont bons. Saisissez antifa.com, et vous serez redirigez sur jobiden.com. Car bien sûr, on peut le lire sur divers sites pro-Trump, les antifas font la promotion de Joe Biden (il s’agit en fait d’un détournement du nom de domaine du présumé site des antifas). Ce qui incite non seulement à déduire que le démocrate Joe Biden « protège » les antifas, mais qu’il est lui-même un « terroriste » ou pour le moins un « marxiste » voire un « anarcho-léniniste » pro-émeutes, saccages, pillages.

Pour le moment, le site antifa de Portland, Rose City Antifa (Portland, entre autres villes étasuniennes, se définit comme la Toulouse de l’Oregon), ne s’est pas prononcé sur le meurtre de Danielson, ni n’a revendiqué Reinoehl pour l’un de ses membres. En revanche, des sites proches de BLM ont fait état des suspicions portées contre lui sans se prononcer sur son rôle aux côté de ses militants.

En réalité, de part et d’autres, nombre d’individus se proclament soit suprémacistes patriotes (redondance, l'un impliquant l'autre), soit antifas, et se targuent d’appartenir à des services d’ordre, selon une mentalité « spontex ». En fait, ils s’improvisent ultra-radicalisés pour un bord ou son adversaire. Pour le moment, ceux d’extrême-droite reçoivent la bénédiction urbi et orbi et  twitti de Donald Trump. Certains tentent de lever des fonds, de capter des dons, d’autres se contentent de se mettre en avant. De relever le menton et de poser pour les photos. Pour le selfie, comme on se sent à son avantage en partisan résolu d'une cause ou d'une autre. 

Même si le fondateur de Patriot Prayer a revendiqué la victime pour l’un des siens (et s’est empressé de récolter des fonds pour la famille de Danielson, tel un Bannon pour le mur frontalier), il est fort possible que le jeune homme décédé se soit contenté d’acheter une casquette sur le site marchand de Patriot Prayer pour frimer auprès de ses copains-copines partageant ses vagues opinions.

Bah, pour la NRA, la Rifle Association, l’essentiel c’est que les uns et les autres achètent des armes et de munitions.

Portland : un « Antifa terrorist » contre un « Trump supporter »

 Démocrates et républicains s'accusent de pousser à la guerre civile

La police de Portland n’a pas encore identifié qui avait abattu un adhérent du groupe Patriot Prayer, mais divers sites pro-Trump n’ont pas tardé à le nommer. Coupable idéal ou suspect envisageable ? En fait, « peu importe » : l’important, c’est de recueillir des dons et de vendre des gadgets.


L’homme tué à Portland portait une casquette achetée via le site du mouvement Patriot Prayer. Aussitôt ou presque, son fondateur, Joey Gibson, l’identifiait en tant que Jay Bishop et lançait un appel aux dons destinés à la famille de la victime. Suivi d’un second, indiquant cette fois que Jay Bishop n’était autre que’Aaron Dianelson et que la véritable page, l’officielle, pour envoyer de l’argent via le site gofund.me était celle dont il fallait largement partager l’adresse.

La précédente avait déjà recueilli 12 000 USD, mais la seconde a rapidement pris l’avantage, sans que pour autant ne cesse de récolter des fonds. En sus, message renvoyait sur une « page alternative » sur cette fois le site Fundly.  Bref, difficile de déterminer qui est qui exactement, mais l’important, c’est que « Dieu bénisse l’Amérique », quel que soit le ou les réels destinataires. J’ai eu la curiosité de chercher si une troisième page n’avait pas été créée sous l’un ou l’autre nom, mais je n’ai pas trouvé. Toujours est-il que Jessica McBride, du site Heavy (hevavy.com), a signalé que « de multiples comptes frauduleux » avaient été créés. Pour elle, la page Aaron Danielson, déclarée authentique par Gibson est bien la bonne, la seule, l’unique.

Quant à l’identité du tireur, elle n’a pas tardé à être révélée et largement diffusée. Photos d’archives à l’appui. Certains sites relayant l’info attribuée à on ne sait trop qui du forum 4Chan (un fourre-tout qui avait déjà diffusé, en 2016, que des démocrates se livraient à des rites pédophiles dans une pizzeria, ce qui fut formellement démenti par la suite), prennent quelques gants en ajoutant que Michael Reinoehl, 48 ans, serait le tireur « présumé ». Ce qui n’est pas supposé, c’est que cet homme serait indubitablement un antifa. En effet, il avait fait une déclaration en ce sens à l’agence Bloomberg. Pourquoi donc aller chercher plus loin.

J’ai tenté de remonter à la source sur 4Chan. Et effectivement, un anonyme s’exclame « On l’a eu ! » et renvoie vers une vidéo YouTube. Elle est due à un certain Olin Live. Certes, on voit bien, sur cette vidéo intitulée “Antifa Terrorist assassinates Trump Supporter in Portland”, une silhouette, d’un homme, de dos, qui pourrait être ce Michael Reinoehl. On ne sait pas trop où il se situe par rapport à la scène du crime. Mais d’autres ont retrouvé ailleurs le même homme, filmé sous un autre angle, visiblement pas à la même heure, et on voit bien sur son cou un tatouage identique à celui de l’homme qui s’exprimait sur Bloomberg. C’est bien la preuve que… Que l’homme vêtu de blanc, de la vidéo d’Olin Live soit bien l’homme vêtu de bleu de l’entretien avec Bloomberg soient identiques semble plus que plausible.

L’important, c’est de le cataloguer antifa et terroriste, et de faire de la victime un partisan de Donald Trump.

Il n’est pas tout à fait certains que tous les créateurs de mouvements nationalistes, à connotations religieuses chrétiennes diverses, soient fondamentalement des partisans de Trump. Ils sont surtout partisans d’eux-mêmes et de leurs cassettes, de leurs comptes en banque. Mais Donald Trump les revendique tous pour les siens et eux-mêmes ne sont pas regardants si les dons ou les achats de gadgets proviennent de la Trumpland. Toujours est-il que, comme à Portland, la Trumpland se joint avec bannières, casquettes Maga et paraphernalia trumpiste à tout appel de ces groupes. Ce qui fait que les vendeurs de bannières étoilées proposent aussi des oriflammes pro-Trump. Et peut-être des gadgets Biden-Harris si ce sont les démocrates les prochains prospects. Pour le moment, la Trumpland s’est appropriée la Star and Sprangled Banner en ajoutant une ligne bleue , ce nouvel emblème manifestant l’appui à la police (sous-entendu « attaquée par les démocrates qui veulent la détruire »). Cela donne une idée de l’ambiance (les pompiers ont le même, mais avec une ligne rouge). Tout cela se vend fort bien.

En tant que présumé couplable Michael Forest Reinoehl a tout pour plaire à la Trumpland (non content d’être un antifa communiste, il avait été contrôlé le 8 juin pour dépassement de vitesse au volant sous l’influence d’une substance). Il avait aussi été contrôlé porteur d’une arme chargée le 5 juillet.

En tout cas, les réactions se sont rapidement amplifiées. Et peu avant 08 heures, sa sœur aînée recevait des menaces téléphoniques du style : « livrez-nous le car songez que toute votre famille est en danger », rapporte The Oregonian. Ce journal relate de même que, sur divers réseaux sociaux, des « patriotes » en appellent à la vengeance.


dimanche 30 août 2020

É.U. : Michael Moore prédit de nouveau Trump victorieux

 Les femmes (Noires incluses) voteront-elles plus Trump que Harris ?

Je ne prévoyais pas la victoire de Donald Trump en 2016, contrairement à Michael Moore qui vient de récidiver. Si le documentariste se fonde sur l’écart qui se comble dans les sondages entre Trump et Biden dans les États cruciaux, ses explications du phénomène sont faibles. Le survolté Trump sait enthousiasmer ses partisans, et non l’ensommeillé Joe (comme le qualifie le Donald). Certes, mais c’est oublier plus crucial, le vote féminin pour la sécurité au quotidien.


Féminists for Trump
proclamait une épinglette de 2016. Ce n’était pas totalement inexact. Et le fait qu’Hillary Clinton n’enthousiasmait pas vraiment les électrices ne fut qu’un élément d’appréciation. En fait, nombre de femmes s’estimant féministes (au moins à leurs propres yeux) ont voté Trump en 2016. Certes, il ne se prononçait pas du tout pour l’avortement, mais ce n’est qu’un problème que pour plus pauvre que soi, et c’est ce qui compte avant d’autres considérations.

En 2020, Trump clame qu’il protégera la banlieusarde et c’est ce qui importe en priorité à la banlieusarde blanche, celle qui votera. En sus Trump, même s’il s’agit surtout de promouvoir sa fille Ivanka, qu’il verrait bien lui succéder dans douze ans (ce serait anticonstitutionnel, de se maintenir au-delà de deux mandats ; mais le Donald s’en contre-fiche), l’électorat féminin a été sensible à ce que la convention républicaine à mis nombre de femmes en avant. Les oratrices se sont même faites plus remarquer que les orateurs.

Bien évidemment, les mêmes considèrent aussi que les vies noires comptent, mais d’abord les leurs. Et que la vie d’une policière de couleur, mère de trois enfants, abattue froidement à New York par un homme de même couleur, alors qu’elle était assise sur son siège de la voiture de patrouille, leur importe tout autant et plus que celles d’un George Floyd, plusieurs fois condamné précédemment, y compris pour avoir agressé une femme enceinte. Candace Owen, femme de couleur, sut le mettre en avant pour se distancer du mouvement BLM. C’est une influenceuse conservatrice qui ne se définit pas moins féministe que d’autres.

Quant à l’exécuté de Kenosha, Jacob Blake, la police sait faire valoir qu’il était recherché pour harcèlement, violences sexuelles, et autres faits. Aucune mère de famille de couleur ne va bien sûr pas soutenir publiquement que cela justifie son exécution, mais il s’en trouve suffisamment pour déplorer publiquement les émeutes et les incendies. Et déclarer préférer voter pour Trump.

La rousse Ann Coulter, une autre influenceuse, tout aussi conservatrice à fait d’ailleurs état de son soutien au jeune blanc ayant tué des manifestants de Kenosha (elle a depuis élimininé son tweet).

Que de très nombreuses électrices se fourvoient ou non sur Donald Trump n’est plus à présent à tenir en ligne de compte. La réalité de la suite importe moins que ce qu’elles peuvent considérer à présent et au moment d’aller voter. La campagne de Trump a semble-t-il réussi à les en assurer, et il est fort possible que la suite en découlera.

L’économie ? Allons donc, Ivanka Trump est une successful businesswoman (pas tant que cela, même avec les coups de pouces appuyés de son daddy, mais l’important, c’est qu’elle le paraisse). La crise du covid ? Très bientôt près de 180 500 décès. Mais au-delà de 100 000, ce n’est plus qu’une statistique à laquelle les citoyennes et citoyens des grandes villes restent sensibles, mais beaucoup moins les États rouges (de la Trumpland). Certes, l’État le plus peuplé, la Californie, désigne 55 grands électeurs, et les moins peuplés n’en désignent que trois.

Trump fut élu grâce à ce système mais aussi parce que des femmes de tous âges, se disant féministes, dont certaines avaient voté pour Obama (voire pour le couple Obama), ont contribué à le porter au pouvoir. En croyant qu'il était pour l'empowerment féminin. D'ailleurs, il revendique (certes à tort, mais qu'importe, il a vraiment l'air de le croire et s'en est sans doute auto-persuadé) qu'il a promu plus de femmes dans son administration qu'Obama l'avait fait.

En 2016, Camille Paglia, que les féministes se définissant plus conformes que d’autres conspuent, avait fort bien analysé le vote des femmes pour Trump. Aux dernières nouvelles certains de ses étudiants voudraient la voir remplacée par une autre enseignante transgenre mais « de couleur » (a queer person of color). Elle se prononçait certes pour Bernie Sanders, mais comme elle est athée en tout. Elle rejoint Michael Moore en estimant que Trump est un meilleur comédien et bonimenteur forain que ses adversaires.

Estimer qu’une majorité de femmes applaudiront le meilleur artiste serait faire preuve d’une mysoginie qui ne voudrait pas s’avouer telle : le problème, c’est que Trump n’a pas besoin d’une majorité d’électrices pour se faire reconduire, simplement d’une minorité suffisante.

Mettons que j’ai d’autres types de préjugés. Ainsi, je considère que l’ex-Québécoise (anglophone) Kamala Harris et Karine Jean-Pierre (Haïtienne et Martiniquaise francophone) sont intellectuellement et humainement considérablement supérieures à un Donald Trump. Mais face au métier de la scène d’une Melania ou d’une Ivanka Trump, elles ne font guère le poids. Moralement, on pourrait s’en réjouir. Elles tenteront de faire réfléchir et les Étasuniennes et les Étasuniens, parviendront même peut-être à les convaincre, mais pas automatiquement de se rendre aux urnes.

Si vous ajoutez à cela que certaines féministes « plus dévotes que toutes les autres » seraient bien capables de les désavouer, le risque que le féminisme étasunien devienne incarné par une Sarah Palin (celle du Tea Party) ou similaire ne peut être écarté.

Or la critique de Harris d’un point de vue féministe a commencé avec des articles dans divers médias. Ces critiques qui ne sont pas totalement sans fondement, restent cependant contenues, minoritaires. Bien, je préfère aussi le style d’Ocasio-Cortez, qui avait soutenu Bernie Sanders. Non parce que Latinx, mais plus « verte », plus sociale, plus pugnace face à Trump (ou Zuckerberg qu’elle a su moucher).

Il reste que les démocrates vont aussi montrer qu’elles et ils savent promouvoir les femmes. Selon le New York Post, le maire démocrate de New-York, Bill de Blasio, pourrait tenter de passer le relais à l’Afro-Américaine Maya Wiley.

Mais il faudra vraiment que les démocrates parviennent à convaincre l’électorat féminin de se rendre dans les bureaux de vote. Car Trump maintiendra toujours que les votes par correspondance sont frauduleux. Et à l’appui, le New York Post publie en une la présumée confession d’un anonyme employé des démocrates décrivant comment il manipulait les bulletins sous enveloppes. Et dans ce type d’élection, celui criant le plus fort en feignant une force  supérieure de conviction risque de l’emporter