vendredi 12 octobre 2018

La photo d'Édouard Philippe par Jeff Pachoud


Photographie : en dépit du « bruit optique », la réussite magistrale de Jeff Pachoud
J’ai rarement été aussi « bluffé » par une photo de presse… Nous avons Édouard Philippe, un Premier ministre français, et en ombre portée, « comme » un militaire britannique en arrière-plan… Martial et prêt à en découdre, ou « aux ordres », le gars dont il fut « tapé la plaque » ?


Bien, Édouard Philippe, Premier ministre de la présidence d’Emmanuel Macron (circa 2018), n’est pas Che Guevara, Tolstoï, Freud, &c. La postérité l’oubliera, mais non de sitôt… Or donc, cette photographie de Jeff Pachoud (de ou pour l’Agence France Presse) ne deviendra sans doute pas « iconique », comme l’époque désigne ses éphémères éléments notoires.
            N’empêche, c’est une éclatante réussite… Certes, il subsiste un « bruit optique ». À l’arrière de l’épaule du personnage, se discerne comme une sorte d’épaulette. Autrefois, en labo, « nous » (les tapeurs de plaques du temps de l’argentique qui développions puis tirions dans le noir) l’aurions floutée. Et de nos jours, avec DXO ou Toshop’, un coup de « tampon de duplication » en aurait eu raison.
            Je dois énormément au redchef de Vues et images du monde, bien davantage qu’à Roland Barthès (Rhétorique de l’image), Albert Plécy, et à sa Grammaire élémentaire de l’image (éds Éstienne, puis Marabout), la meilleure assurance de mes seconds pas photographiques – enfant, adolescent, tel André Villers, nous débutions avec un 6×6 peu cher – car la notion de « bruit optique », c’est Plécy. La locution latine idoine d’enchaînement ne me revenant pas à l’esprit, souffrez que je passe du coq à l’âne…
            Cette image de Jeff Pacoud me remémore ma photo floue du « petit » – pas tellement – juge Lambert… J’avais dû l’imposer aux secs de rédac’ de L’Union. Oui, le sujet était flou… Jean-Michel Lambert, jeune magistrat instructeur, était, à Épinal, lors de l’affaire de « la Vologne » (ou « Affaire Grégory »), assailli par des journalistes, des photographes, &c., et il passait entre une véritable haie : un très léger flou de bougé résumait le contexte. Lambert, dont la presse disséquait la présumée « psychologie », et la nuée des « zincs » (appareils) « piquant » (non, ici, nulle référence à la chasse à courre, mais à la mise au point) son passage – et sa haletante progression dans le dossier des époux Grégory et consorts –, valait de rester flouté.
            Pourquoi saluer cette photo de Jeff Pacoud ? Selon les médias et leurs « messages-massages » de l’automne 2018, ce Premier ministre, et le président Emmanuel Macron, seraient (le conditionnel s’impose) en désaccord sur un remaniement ministériel découlant de la démission d’un ministre de l’Intérieur. Voyez donc, à cette aune, la portée de ce cliché… Ici reproduit suffisamment dégradé pour me dispenser de solliciter de son auteur une autorisation de reproduction (l’AFP, dont je fus le dernier cycliste universel – une toute autre histoire –, et un pigiste récurrent, n’aura pas l’outrecuidance de m envoyer des huissiers). Nul besoin d’être sémiologue de comptoir pour en saisir la puissance… Elle exprime soit la défiance, soit l’attitude « bon petit soldat » du Premier ministre… Totale ambiguïté. C’est ce qui fait sa force. Souvenez-vous de ces images de la guerre (étasunienne) de l’ex-Indochine, légendées diversement : soit le Vietminh avance, soit il reflue.
            Là, c’est puissant. L’Édouard « Malborough s’en va en guerre » ou garde rapproché(e) du président ? Antagonisme ou cohésion ? En fonction de ce que développent les Premiers Paris et les autres, c’est l’une des meilleurs photos d’« actu » qu’il m’été offert de voir depuis longtemps. Conclusion : merci pour cet instantané…