mardi 1 décembre 2020

animosité policière… et violences illégitimes

Linda Kebbab de bonne tenue sur LCI

En civil, et non en tenue, sur LCI, la policière Linda Kebbab n’a pas commis d’impair, elle s’est montrée crédible dans ses partis pris. En revanche, n’ayant pas lu son livre Gardienne de la paix et de la révolte (chez Stock éd.) je ne sais trop si elle en a rajouté un peu pour sa bonne cause ou non.


On peut être journaliste et prendre parti. En tout cas ici, où je n’écris surtout pas comme j’ai pu le faire pour l’AFP ou l’Agence centrale de presse (la défunte ACP), je m’y autorise. Simplement tenter aussi de prendre les choses à la légère n’autorise pas à déformer les faits. À la légère, quand on a Tombeur pour patronyme, j’en risquerai bien une mauvaise sur celui de cette dame plutôt avenante, mais bon, glissons… Elle a fait un peu la promo de son bouquin (pas trop, normal) et un peu moins de son syndicat Force ouvrière, tout en ne s’écartant pas de sa ligne (fort bien).

Je ne considère pas que narrer qu’elle a failli se recevoir un tambour de lave-linge sur la tête pour ajouter que c’était cela son quotidien soit une exagération excessive. On peut le ressentir ainsi du fait de « violences illégitimes » de la part de justiciables. J’avais oublié l’expression, je remise celle d’animosité policière (euphémisme ironique). Des violences verbales pas toujours croisées (les policiers gardant leur sang froid), j’ai pu en entendre lors de contrôles ou d’interpellations. Mais c’était bien la première fois que je visualisais, sur l'étrange lucarne, un policier à terre se faire rouer de coups. Je n’y reviens pas, j’ai déjà fait part de ma détestation de ce type de violences illégitimes de la part de je ne saurais dire qui (soit, ici, dans l’impossibilité de départager manifestants lambda et casseurs ou voyous).

Deux réflexions me viennent à l’esprit. D’une part la généralisation des caméras pour les policiers. Je m’attends à des diffusions de séquences insolites, cocasses, de justiciables aux visages floutés, à la voix vaguement déformée, sortant des inepties. Du genre « quoi le vélo, mais je n’y ai même pas touché », protestation d’un voleur de vélo pris sur le fait et en selle du dit vélo (anecdote qui date mais doit encore faire vaguement sourire dans les postes de police). Sur les réseaux sociaux qu’animent des policiers, ce devrait être parfois assez distrayant. Les policiers ne perdront pas tout avec cette innovation.

Ce qui m’a étonné dans les propos de Linda Kebbab, auteure de Gardienne de la paix et de la révolte ; son éditeur, Stock, ne me tiendra pas durablement rigueur de ce rappel, c’est qu’elle soutient qu’une abondante et permanente action militante qui, prenant modèle d’une radicalisation aux États-Unis, incite à faire de la police le symbole d’un État oppresseur. Franchement oui, j’ai constaté quelques exemples, mais ne serait-ce pas une exagération légèrement outrée de sa part ?

Parce que le militantisme de gauche en général a certes usé de ce thème mais que cela me semble plutôt globalement en régression. Et que je me souviens de violences illégitimes de la part d’ouvriers, voire aussi d’ouvrières, en grève et occupations de locaux industriels, davantage motivées par des coups de sang ou une volonté de riposte que par des ressorts idéologiques.

D’accord, il y a des rappeurs aux propos plus que discutables. En faire des militants contre un État bourgeois qu’ils aspirent surtout à rejoindre à leur manière (mode Kany West se prononçant pour Trump parce que dans le même club de friqués), ça me laisse dubitatif. Quant à pousser plus loin et insinuer que des footballeurs richissimes et parfois entourés de policiers faisant des ménages en gardes du corps, là, je commence à ricaner. L’argument n’a pas été repris par l’intéressée, je l’ai lu ailleurs de sources policières.

Linda Kebbab a admis la possibilité que trois policiers, dont deux aguerris, aient pu avoir peur et paniquer du fait de la stature de Michel Zecler. Admettons que c’est parole contre parole (notamment sur les invectives racistes), mais restent les coups. Et au final, les covictimes, ce seront nouzôtres. Parce qu’avec un avocat de la pointure d’un actuel garde des Sceaux, je ne vous dis pas combien cela pourra coûter aux contribuables qui, pour l’instant, nourrissent et logent un temps les policiers agresseurs (on peut dire « policiers agresseurs » ?).

Bien sûr, je ne vais pas exiger que des syndicats de policiers présentent des excuses aux contribuables. Je peux comprendre que les policiers de base considèrent qu’ils rendent plus à la population que ce qu’ils lui coûtent. Cela étant la population s’inquiète encore du ratio policiers en réel service et policiers planqués ou hauts-cadres en placard administratif privés de réelles responsabilités. J’ai fait un peu d’incruste (on dit « au lit avec », embedded) avec des pompiers, en dortoir et interventions. Métier qui n’est pas que psychiquement dur (en véhicules de secours notamment). Mais qui présente divers avantages enviables. Compensent-ils vraiment les risques ? Cela peut se discuter. Indéniablement, pas les plus forts risques. Pour une  majorité des carrières, heureusement, surtout si on va pantoufler dans l’industrie en tant que responsable sécurité d’un site pépère, cela s’apprécie autrement.

Les syndicats de police font des campagnes d’opinion sur la dangerosité de leurs métiers. C’est admissible. Rarement sur la répartition des postes exposés ou non. Ce ne sont pas que des affaires à forte portée émotionnelle qui alimentent non pas la défiance, mais le malaise ressenti par la population. Je ne dis pas que le discours de Linda Kebbab (auteure de…, allez, passons) ne soit pas sincère ni argumenté, mais quelque peu partial (ce n’est pas un reproche, cela se conçoit) et surtout partiel. Elle disait ailleurs (elle passe sur divers plateaux) que la peur « fait partie du quotidien des forces de l’ordre ». Vraiment de l’ensemble des forces de l’ordre ?

Sur une autre chaîne, Philippe Val, pour qui j’ai une estime mitigée (je suis plutôt Siné que du Charlie de Val, ne serait-ce qu’en me souvenant de Denis Robert), considère que, non, la police n’est pas raciste mais que, nuance, « des » policiers pourraient l’être et que ceux qu’il fréquente (il reste sous protection policière) étaient atterrés par les images montrant Michel Zecler. Val ne peut avoir tort sur tout. D’autant que même le Charlie qu’il dirigeait n’était pas trop le chantre obséquieux de la police. Le duo humoristique Font et Val (sketche L’Aumônier militaire et autres) se gaussait de la maréchaussée. Il faut savoir raison et mesure garder.

Faut-il rappeler aussi que du temps de l’IGS (depuis incorporée dans l’IGPN), pour la période 1993-1999, les violences aux personnes entraînaient un taux de 46,6 % de relaxes, avec une prédominance pour les dossiers relatifs à des violences en service ? On veut bien admettre que la violence accrue des justiciables peut susciter des violences illégitimes plus fréquentes. Je ne me souviens pas (et je peux me tromper) que les syndicats de policiers s’en émouvaient très fort. Il paraîtrait qu’initialement, Linda Kebbab ait été tentée par le journalisme. Un métier qui implique pas mal de recul, et, qu’elle le croit ou non, une culture de l’autodérision. Une culture quelque peu différente de celle des animatrices et animateurs de télévision (même passés par la case journalisme, on ne bonifie pas toujours en prenant du galon ou de meilleurs émoluments). Je lis que Linda Kebbab déclare au Figaro que les policiers « n’ont pas réclamé cette proposition de loi ». Certains syndicats en réclament le maintien. Elle évoque une confusion issue d’une « instrumentalisation politique » de la part de l’extrême-gauche. La Commission de la carte de presse (CCIJP), paritaire, instrumentalisée par l’extrême-gauche ? En voilà une idée qu’elle est crédible ! Puis-je risquer qu’elle l’ait lu dans la sauce du chawarma et des frites ? (désolé, disait la marionnette des Guignols de l’info, cela m’a échappé).

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