mercredi 14 août 2019

Brexit : le petit débat de Boris Johnson en direct via Facebook

Bojo lance le Brexit « comme j'aime » en direct

Emmanuel Macron avait lancé un « Grand Débat national » du 15 janvier à début avril dernier. Boris Johnson s’est contenté, ce 14 août, d’un petit débat de 12 minutes, The People’s Prime Minister’s Questions, via Facebook Live. Économique…
Faute de session parlementaire outre-Manche, Boris “Bojo” Johnson a réuni environ 7 600 Britanniques pour répondre en direct à diverses questions lui étant adressées par divers auditeurs… The Donald (Trump) tweete, Bojo converse… Apparemment, les questions n’étaient pas sélectionnées car certaines, des plus farfelues (ou des invectives) se sont intercalées entre celles portant bien évidemment sur le Brexit, le système de protection sociale, la criminalité, &c. Mais en fait, Bojo n'a répondu qu'aux questions soumises une heure avant le début de son intervention, oubliant celles soumises en direct...
Ce « direct » est intervenu alors que les États-Unis ont promis qu’ils promettraient la lune (de miel) au Royaume-Uni...
Ce dès le 1er novembre prochain… Soit des accords commerciaux sur mesure. Qu’importe si les négociations s’étendront sur des années et que la Great America se taillera la part de l’aigle face au petit lionceau du Small United Kingdom…
L’argument du Premier ministre britannique est que les gens (comme dit Mélenchon) en ont plus qu’assez des débats parlementaires et des élections… Selon lui, l’Union européenne ne veut pas rediscuter car elle s’attend à ce que le Parlement britannique bloque la perspective d’une sortie du Royaume-Uni sans accord (no-deal Brexit). « Nous partirons le 31 octobre », coûte que coûte), a répété Bojo…
Histoire de bien se faire comprendre de Bruxelles, le gouvernement britannique a fait fuiter diverses mesures visant à garantir l’approvisionnement en denrées comestibles et médicaments. Tous les hôpitaux ont aussi été sommés de prendre toute disposition pour les citoyens européens se voient appliquées le tarif fort.
Ce dès le 1er novembre s’ils sollicitaient des soins. Cela va à l’encontre de toutes les assurances précédentes et impliquerait la réciprocité, à échéance rapprochée, de la part des instances sanitaires de l’Union européenne sollicitées par des patients britanniques…
Au fond, exprime-t-il, ce n’est pas lui qui désire un Brexit Halloween, c’est l’Union européenne qui tergiverse et va le forcer au no-deal. L’UE, assure-t-il, s’illusionne : une majorité des Parlementaires (celle des conservateurs n’est plus que d’un siège, et nombre d’entre eux se sont déclarés prêts à toute éventualité pour bloquer une sortie sans accord) ne pourra rien faire contre la volonté du « peuple » , des gens, qu’exprime Bojo. Le Speaker (président de l’assemblée) et l’ancien Chancellor (ministre des Finances) peuvent s’égosiller, cette « cinquième colonne » n’obtiendra rien.
Boris Johnson a aussi laissé entendre qu’il reprendrait ainsi, aussi souvent qu'il lui semblera utile, la parole… Ce qui lui épargnera de devoir tenir des conférences de presse (et se voir harcelé de questions techniques ardues) ou de négocier avec les représentants de l’Écosse, du Pays de Galles et d’Irlande du Nord…
« Je ne me lasserai jamais de vous dire ce que nous allons faire », a-t-il résumé. Ce en direct, sans intermédiaires… Sauf qu’il n’a pas répondu à toutes les questions pertinentes et qu’il s’est contenté de vagues assurances (notamment sur l’émigration maîtrisée, filtrée pour ne plus admettre que les meilleurs scientifiques, médecins, ingénieurs et spécialistes de la finance...).
C’est Churchill ressuscité, ne promettant plus du sang et des larmes, mais de passagers désagréments…
En fait, il table sur le fléchissement de la croissance en Allemagne, pays qui sera le plus sollicité pour garantir à la République d’Irlande, pays européen le plus fragilisé par le Brexit, des aides économiques conséquentes. Il n’est pas loin d’espérer non plus que les États-Unis lancent des séries de mesures contre les produits européens.
C'est le Brexit « comme j'aime » : après la première semaine, du 31 octobre au 7 novembre, les cadeaux promotionnels (balance commerciale excédentaire), le retour à l'équilibre, sans le poids superflu des immigrants... Votre bilan Brexit g-r-a-t-u-i-t... Bojo, votre « coach personnel » sur Facebook, YouTube, &c..
Cette initiative, selon Tom Peck, de The Independent, serait due à Chloe Westley, en charge de la communication numérique au 10, Downing Street. On ne sait si c'est elle en personne qui est chargée de « monitorer » les commentaires sur la page  @10downingstreet de Facebook. On en était, peu avant 19 heures, à presque 6 000. Tous répartis en deux larges groupes : de nouvelles questions poliment exprimées sur tout et n'importe quoi (minoritaire), des messages d'enthousiastes félicitations (ultra-majoritaire). Histoire de crédibiliser le tout, quelques contributions très critiques subsistent (de Julian Foon Pratt : « si les mensonges étaient des mouches, nous ne pourrions plus voir votre visage »). Lesquelles suscitent des réponses cinglantes de la part de partisans du Brexit...
Et puis, outre les outrances (par exemple utiliser EURSS pour l'Union européenne), se glissent des commentaires dénonçant la présumée partialité pro-EU des médias (dont la BBC). Les médias ou les 5th columnists (la cinquième colonne).  Bref, la « bonne parole » de Boris fait fondre la grasse intox.
Elle ne sera pas que directe... The Sun a remarqué que le parti conservateur embauche à tour de bras avant fin août-mi-septembre : tous les postes proposés sont ceux de directeurs de campagne électorale. Une débauche d'offres d'emploi « en vue d'élections générales après le Brexit ».
En fait, le gouvernement conservateur veut retrouver une majorité avant que se fassent plus rudement sentir les conséquences de la rupture d'avec l'Union européenne... Et avec ces rendez-vous de questions-réponses, Boris Johnson est pleinement entré en campagne électorale.