mardi 29 octobre 2019

Foin d’ironie : deux nouveaux caractères de… caractère

Hémi et semi sont dans un cassetin

Le point d’ironie (objet de sempiternels débats) tarde à rejoindre la plupart des polices de caractère. Qu’en sera-t-il de ces deux nouveaux types ? Les siècles à venir le diront…
L’histoire des communautés typographique et ortho-typographique, des spécialistes et annalistes du Livre, fut et sera marquée par divers canulars. Le seul me revenant en mémoire, et que je ne sais plus à qui attribuer, fut révélé lors de l’ATypI-Roma (en l'an 2002, marquée par l’avènement du format Photofont, entre autres grands moments). J’ai consulté la liste des conférences d’alors (mention spéciale pour celle de Gillian Riley, “Clockwork peacocks, eggs, and artichokes”, ou de l’influence de la volaille, paonne et autre, au verjus, sur la création de caractères, ou quelque chose d’approchant). Non retrouvé.
Il s’agissait de l’ultime ET indépassable police de caractères de signalétique.
Testée dans des conditions extrêmes. Pour n’en mentionner qu’une, les plaques d’entrée de Aÿ et Llanfairpwllgwyngyllgogerychwyrndrobwllllantysiliogogogoch reconnues par des motards fonçant à 220 km/h dans le brouillard à une distance égale à la portée de phares de diverses marques… On lâcha des borgnes dans les aéroports et les gares, des plongeurs dans des piscines olympiques, des parachutistes, y compris ascensionnels. Au rancard la Frutiger et l’Astra-Frutiger (aéroports, voiries helvètes), la Métro (Ratp, depuis remplacée par la Parisine de Jean-François Porchez), et tant et tant d’autres devenues obsolètes.
Peu d’entre nous étaient dans la confidence, et je suis tombé dans… le panneau.
Histoire de meubler l’attente du résultat du vote sur les élections anticipées au Royaume-Uni (et le sort du Brexit), un mot sur le point d’ironie.
Là, il ne s’agit pas d’une blague de potache… Un caractère arabe approchant est souvent employé (U+061F ou 1567) ; divers créateurs l’ont inclus dans leurs tables (glyphes proches de ceux d’Alcanter de Brahm figurant dans Le Nouveau Larousse illustré de 1905) ; dernier ouvrage d’importance connu sur le sujet : Le Treizième signe, de Xavier Dandoy de Casabianca (éds Éoliennes, livre d’érudition pour lequel Jean Méron et ma pomme furent brièvement consultés). Dernier en date, à ma connaissance, des ouvrages l’ayant employé, le Gaston Couté d’Alain (Georges) Leduc (éds Libertaires). Nous en devisions tous deux encore furtivement la nuit dernière…
Et puisque fut évoqué Alain (Georges) Leduc sur ce blogue-notes, hier, à propos des points de suite (de suspension) ..; Euréka, bon sang, mais c’est bien sûr, l’épiphanie me transfigura. Deux caractères, outre ce fameux point d’ironie, manquent à l’appel des tables Latin A et B.
Je me devais, à mon tour, d’entrer dans l’histoire des écritures de la Mésopotamie aux lointaines planètes (nombreuses polices de métalangues de SF et autres genres littéraires) encore naissantes. Voici donc, protégés par une enveloppe Soleau, mes semi (ou hémi) points suspensifs ouvrant et fermant.
On sait que le Girodet admet la cohabitation des points de suite avec le point-virgule tandis que le Drillon la considère incompatible avec la langue, le bon goût, &c. Le Lacroux consigne : « L’association n’est pas interdite : hideuse et le plus souvent superflue, elle n’est guère recommandable. ». Jean-Pierre était un esthète, je partage son point de vue. Mais, tout change avec mon semi-point suspensif ouvrant (un sas vers la suite, étroit certes, mais non infranchissable). Par précaution, je lui ai adjoint un hémi-point expansif fermant…
Je sais ô combien les puristes me critiqueront. Pourquoi ne pas considérer que leurs appellations devraient être inversées ? Le suspensif fermant, l’expansif ouvrant (vers un avenir radieux dont ses utilisateurs définiront les emplois). Parce que. In vino veritas : l’inspiration de mes libations ne saurait s’être fourvoyée. D’autres s’insurgeront (et j’entends déjà leurs clameurs d'orfraie) : pourquoi agglomérer deux points de suite et non trois à celui du point-virgule ? Car ! Ce furent auto-bus, fillettes après canons. C’est libellule, c’est papillon, beaucoup plus mignon.
Je lègue donc à la postérité, pour la défense et l’illustration des Lettres bretonnes et étrangères, venus de France, « mère des arts, des armes et des lois », ces deux caractères, non d’exception car voués à la démultiplication.
Au bénéfice des mal-voyants qui en espèrent la version en Braille, et me consultent grâce à la reconnaissance vocale, je les décris ci-après. D’abord, au sabord de charge, pour le premier, deux points de suite d’une diagonale légèrement inférieure à celle du point du point-virgule, alignés sur celui-ci et le précédant. Pour le second, en décharge, inversement, le suivant, lui succédant, le prolongeant.
Le principe est établi, les variantes ne sont nonobstant pas déjà finalisées. Le réglage des approches reste certes discutable. Le diable se niche dans les détails, et le blanc, à mon sens excessif surmontant la virgule jusqu’au point, me turlupine. Quelque chose tintinnabule là-dedans, non point le tocsin immédiat. J'y retourne confiant. En passant au pastaga, se clora ce galimatias (visuel ; clora : futur simple pronominal lancé à toute vapeur sur les rails de l’apothéose). Mais rien n’entravera le progrès de ces caractères qui sont à la création typographique, oserai-je en toute modestie, les Phœbus et Artémis de la ponctuation.
Leurs usages sont multiples. Je ne mentionnerai que ceux d’abréviations pour « ouvrez le ban » et « fermez le ban » en musique militaire. En signalétique tzigane (mais souffrez que je ne m’en ouvre aux profanes)… Je signale aux graphistes qu’ils interpellent grave en lettrines. Quant aux versions obliques à venir, ascendante et descendante, je ne vous dis que cela…
     À Paris-Bonne-Nouvelle, ce scorsonère 8 brumaire an CCXXVIII

Brexit means Brexmas, really?


Un Brexit avant la Chandeleur ?

Heinz means Beanz : les fayots sauce tomate, c’est Heinz. Noël c’est… la Chandeleur, c'est le 2 février. La flextension s’étendant jusqu’au 31 janvier, il y a de grandes chances que le Brexit sera effectif auparavant. Quand exactement ? Qu’en dit Reading (siège du Centre européen pour les prévisions météorologiques) ? Qu’en dit-on au Banat ?
« Que soit proclamé par sa Plus Excellente Majesté la Reine (…) avec le consentement des Lords Spirituels et Temporels, des Commons… l’Acte des élections générales parlementaires anticipées 2019. ».
On saura, tard ce soir, si le projet de loi passera ou si un amendement pervers l’aura fait capoter…
Cela étant, les prévisions météo ne vont pas au-delà de dix jours. Ce qui pourrait finalement se produire, c’est que, comme le prédit un humoriste, le Royaume-Uni reste seul dans l’Union européenne, les 27 formant l’Alliance européenne « parce que c’est moins compliqué que le Brexit. ».
Je ne sais à qui l’attribuer… Cela figure sur la page Facebook de Dan Coclici, Très Honorable membre du Clubul Degustatorilor de Vin Neautorizati, un… Timisorien, Timisoreaneén ? Je ne trouve pas le gentilé de Timisoara, Temeswar, Temeschburg, &c. C’est la principale ville du Timis et de Caras-Severin (départements du… et de…) et encore de l’ex-province serbo-romano-hongroise du Banat austro-hongrois. La ville est jumelée avec pas moins de 20 autres, dont trois allemandes et Mulhouse, car elle fut un temps majoritairement souabe et germanophone (le yiddish étant aussi couramment pratiqué). Elle fut partie de la Dacie et changea une dizaine de fois (au moins) de mains (de souverains, gouverneurs, tsars, empereurs, sultans et j’en passe). Ville « francophone » et siège d’un Institut culturel français.
C’est, presque davantage que Bruxelles, ou Strasbourg, une ville européenne (capitale culturelle européenne en 2021, avec Novi Sad, Éleusis ou Elefsina… Timisoara compta aussi une forte communauté grecque). On la surnomme Trevisoara (du fait de l’implantation de très nombreux Italiens à partir de 2004-2007). Ville gastronomique et vineuse (et siège, depuis 1718, sous Eugène de Savoie, de l’une des plus anciennes fabrica de bere — brasserie — d’Europe orientale). La Societatea Timisoara fut lauréate, en 2014, du Prix du citoyen européen décerné par le Parlement européen. On y compte des lycées allemand, anglais, français et la France y est représentée par un consul honoraire. Le français y est à présent surtout pratiqué couramment par les étudiants des facultés médicales et dentaires venus de France (et des universitaires, des artistes comme Cristian Sida, aussi résident français depuis quelques années). Je ne sais si l’église catholique romaine saint Georges y accueille des cultes anglicans ou si les Brexpats fréquentent la Betel Church (baptiste) ou l’une des deux autres églises protestantes. Mais j’y entends, pratiquement, dans chaque restaurant que je fréquente, parler un anglais proche de celui de la reine (The Queen’s English). Malheureusement, les deux restaurants espagnols successifs que je connaissais ont fini par fermer (et la discothèque El Torero est tenue par un Italien) mais Ibero et Lexico serviraient, paraît-il, des spécialités ibères (la cuisine mexicaine est mieux représentée).
L’ennui, pour les quelque 2 200 Britons de Roumanie (contre 420 000 Roumains au Royaume-Uni), c’est que selon Mike Ormsby (ancien journaliste, auteur de trois livres sur la Roumanie), la paperasse pour acquérir la nationalité roumaine peut dissuader (au passage : la préfecture du Maine-&-Loire a fait part d’un dispositif afin de faciliter les démarches des Britanniques d’Anjou et communiqué une adresse de courriel dédiée ; souhaitons qu’elle soit imitée).
En tout cas, de « Timi », on entend sunt nebuni, acesti englezi (ils sont fous…).
Sans doute parce qu’on s’y ressent tout autant Européens que Roumains (voire davantage, pour nombre d’ami·e·s) : comme en maints endroits à Londres…
Mais Timi n’est pas la Roumanie, ni Londres le Royaume-Uni. En revanche, le Parlement de Westminster évoque de plus en plus celui de Bucarest...

lundi 28 octobre 2019

Brexit : éponge ou gant jetés ?

Mais quand donc le Royaume-Uni tirera-t-il l'échelle ?

Quand les Britanniques tireront-ils l'échelle de coupée ?  On prévoyait ce soir la tenue d'élections (enfin, « on », moi et d'autres, pas vraiment...). Mais demain, rebelote, nouveau vote. Lundi matin, la reine, l'consort et le p'tit prince, sont venus chez moi... Mardi matin... Comme j'étais resté, le Bojo m'a dit...
L'Express a remis sa pendule à l'heure, mais ce soir, sur la même
page, l'ancienne et la nouvelle cohabitaient
Or donc, sempiternel rappel, l'UE accorde une flextension au Royaume-Uni. Tu veux ou tu veux pas, si tu veux, tant mieux, si tu veux pas, tant pis... La France a fléchi, mais le Royaume-Uni fait toujours du Brexit une maladie (air connu : Marcel Zanini). « On » pensait donc que Boris Johnson, soit obtiendrait des élections le 12 décembre, soit, en raison d'un compromis, le 9 ou le 11. Inconvénient d'avancer la date pour complaire aux indépendantistes écossais et aux libéraux-démocrates, le vote du budget pour l'Irlande du Nord, la procédure pour obtenir l'agrément de sa majesté Elizabeth, je ne sais plus trop quoi (j'ai su...).  
Or donc, le Bojo s'est ramassé. Il n'a pas obtenu la majorité des deux-tiers requises. Il lui a manqué 135 votes pour atteindre les 434 (The Independent), ou les 455 (The Sandard). Croyez-le ou non, les deux titres se contredisent (c'est bien 434), mais s'accordent pour dire que le gouvernement a obtenu 299 votes, contre 70, et le reste... Oh bof. Les travaillistes se sont abstenus (à quelques 38 près, ayant voté contre ; j'ai les noms, de Antoniazzi à Zeichner). 
Bien, demain, mardi, le gouvernement remet autrement la chose sur le tapis et espère cette fois l'emporter à la majorité simple. Et maintient la date du 12 décembre.
Les travaillistes se déclareraient (cela peut changer d'heure en heure) contre, aux prétextes que les étudiants se disperseront, que les bureaux de vote seront difficiles à trouver (les écoles organisant les spectacles de danse ou les chorales pour fêter Noël). Les libéraux-démocrates devraient (le conditionnel s'impose) maintenir la date du 9 décembre. Bref, les conservateurs « maintenus » (on se croirait en Corse) peuvent compter sur 280 voix. Sur 650 moins une (un travailliste aurait rejoint la chambre des Lords...).
Voui, mais je ne sais trop qui pourrait introduire des amendements (sur l'abaissement de la majorité électorale à 16 ans, le droit de vote des citoyens européens résidents, les plafonds de dépenses pour la campagne électorale...). Et des députés conservateurs peu soucieux de se représenter pourraient se rebiffer... Bref, la brièveté du coup d'après est loin d'être assurée.
Demain, mardi, je tenterai de vous tenir au jus... Attendez-vous à ne pas trop savoir... Mercredi, j'aurai d'autres chats à fouetter, jeudi, je pars à la pêche.
En attendant, la Royal Mint (l'équivalent de l'hôtel de la Monnaie) va refondre des milliers de pièces de 50 pence ; quelle purée de pois (ps se prononce peas) et de poids. Ils portaient la date du 31 prochain. Des tas d'imprimeurs, d'agences de com', ne savent plus ce qu'il adviendra de la campagne de pub' Get Ready for Brexit. Les fonds gouvernementaux sont gelés. Il y a déjà cent millions de livres jetés par les fenêtres. Le Sun indique aussi que les fonctionnaires qui planchaient sur le Brexit dur mettent l'arme au pied (cela a déjà coûté environ 30 livres par habitant).
Une qui s'abstient de pouffer de rire, c'est Theresa May. Il paraît qu'elle pleurait (d'énervement, de joie, de dépit ?) au soir des résultats sur le Brexit (selon une biographie non autorisée). Tout comme le Bojo espérait bien que le Royaume-Uni resterait dans l'Union européenne.
Décidément, en presse écrite, on finit par faire comme à la télé : plus grand'chose à dire, alors, on meuble avec des à-côtés. Sans moi. À (de)main levée, si vous le voulez bien.






Typographie et orthotypographie : des points de suite...

Avant la Brexertinity, alignons les points de suspension...

Or donc, la flextension s'appliquera au Royaume-uni jusqu'à... au plus tard le 31 janvier prochain. Quel rapport avec les points de suite (ou de suspension, et non de conduite) ? Petit pastiche authentique de ce qui peut déclencher d'interminables débats typographiques et orthotypographiques. Quel foin de...
Je ne vais pas vous gaver avec le distinguo entre typo et orthotypo (un, une orthotypographe est soit une correctrice, un correcteur, soit une, un allumé du bocal se triturant la tête sur les bons, prescrits ou néfastes usages de l'emploi de caractères divers ; j'en fus... cela se soigne mais le traitement est long, à peu près la durée d'une psychanalyse, généralement — mais je connais plusieurs cas incurables, dont ceux de divers défunts).
Pour vous donner une idée, L'Orthotypographie de Lacroux (et alii) — sous-titres : Orthographe et typographie française, dictionnaire raisonné ; Lexique des règles typographiques françaises — couvre deux volumes (de A à F ; de G à Z), forts chacun de centaines de pages.
Il en résulte deux éditions imprimées et deux en ligne (docs PDF et HTML dus à l'ami Alain Hurtig : orthotypographie.fr). Passe encore... Cette somme résulte d'années et d'années d'échanges de courriels, de discussions passionnées, de colloques informels, entre ou réunissant de multiples interlocutrices et teurs et le regretté Jean-Pierre Lacroux, qui fut correcteur de 16 à 24 heures et de 00:00 à 16:00. Pour traiter par exemple de césure, divisions, tirets et points à la ligne.
Pour l'édification des populations tentées par cette discipline, et à la suite de multiples consultations de documents techniques et autres (depuis quelques jours), dont une page intéressante du blogue-notes « Langue, sauce piquante » (salutations au passage et clins d'œils appuyés), voici une retranscription à peu près fidèle des échanges entre votre serviteur et... Allez, nommons-le : Alain (Georges) Leduc.
Lequel est loin d'être un béotien, un ignoramus, un tout à fait profane, en ces domaines. Mettons un grand amateur... éclairé ? Ce qui correspond à ce qu'il énonce sur le site roger-vailland.com en son article « Les lieux désormais dits ». « Si j'écris que Roger Vailland était à la fois un amateur de voitures et de botanique (ce qui sent bon son zeugma, reconnaissons-le), c'est tout à l'honneur de notre écrivain fétiche. ». Vailland fut congru de courses de F1, de bolides et autres tires en ayant sous le capot, et féru de botanique (ce, dès son jeune âge).
Or donc, voici quelques jours, Alain (Georges) Leduc m'interpelle à propos d'un caractère mystérieux. Je réponds, il me relance, ainsi de suite... Je vous épargne les quelque cinq ou six premiers courriels, celui dans lequel je rectifiais et mentionnais les points de suspension obliques (si, si, c'est un caractère Unicode).
Cela donne ensuite, avec Alain (Georges) Leduc infra désigné A, moi-je J, ou sinon rien en fonction de l'imprégnation anisée :
A  — Ni X (nom d'un célèbre metteur en page), ni Y (consœur journaliste émérite et autre), qui ont néanmoins identifié les « ... », ne savent quel est leur nom exact. Tu n'aurais plus dans tes relations un typographe, qu'il me le dise ?
J —  Franchement, pour ces « ... » , je veux bien que X (id.) et Y (id.) les aient identifiés, mais où ? En langage courant, les points « de conduite » ou « de suite » sont parfois synonymes.En jargon, « points de suite », c'est le sus, le suce, la suspension. Ou, parfois, c'est appelé, proche de l'ang., ellipse (comme au Québec). L'aspect diffère selon que la police est « monospace » (type Courrier) ou non. Avec une machine à écrire, les trois points ont une chasse égale à tout autre caractère. Avec une police proportionnelle, le signe chasse plus large (en général, proche de la chasse du m). Au plomb, selon les polices et les fonderies, il se peut que les points de suite de suspension et d'omission (...) aient été différents.​ Si je n'ai pas sous les yeux (capture d'écran) ce dont tu me parles, je ne pourrai déterminer s'il s'agit d'un manuscrit, d'un incunable, d'un caractère (ou plutôt glyphe) de machine à écrire, de Monotype, de Linotype, de police numérique de telle ou telle époque (les polices évoluent, vois la Vernada et la Verdana Pro, du même auteur...), de telle ou telle version, je ne peux te répondre. Je ne comprends pas pourquoi X (ibid.) ne peut identifier. Je pourrais poser la question sur la liste typographique mais, même chose, sans visuel, personne ne pourra répondre. La seule chose qui me vient à l'esprit, ce serait l'abréviation maçonnique (un triangle, plus ou moins isocèle, en général équilatéral) : si le point sommital était très rapproché des deux points de la base, alors... En cas d'aposiopèse, oui, capitale ensuite.
A — Suffoqué par ce qu'elle lui avait dit, il préféra trouver cela... drôle.Voici un exemple. Si c'étaient des points de suspension, il y aurait une majuscule à « drôle ».
— Non, les points de suspension (de suite) ont plusieurs emplois.
En cas d'aposiopèse, oui, capitale ensuite.
Trouver cela... (on ne sait comment l'énonciateur trouve cela ; le narrateur trouve cela drôle donc : cela... Drôle.)
Si les points de... indiquent un moment d'hésitation, un laps de silence, un intervalle, alors, pas de capitale après.
Prenons :
Tu me gonfles... Marre !
(j'observe un temps de silence, puis exclamation).
Tu me gonfles... marre à la fin.
J'ai hésité à m'exprimer, après un temps, je reprends.
C'est le même signe, le même caractère, et le même glyphe...
Cela étant, je  pourrais aussi énoncer :
— Tu me gonfles... merde, merde, merde, merde...
— Non mais, ça va, reprit-il (autre énonciateur, dialogue), you just don't say so.
Tous les codes, toutes les marches, admettent cette alternative : ... Cap ; ... bas de casse.
C'est le même caractère Unicode. Correspondant sans doute à la même description ISO.
On a même un car. « points de suspension » verticaux.

A — Très bien. J'essaierai de te faire une démonstration orale, ce sera plus probant.
Vous sortez, Z (nom d'un chien) et toi, ce soir ?
— C‌omme répondu précédemment, ce soir, sauf aléa, impératif, imprévu, j'escompte partir de chez moi avec Z (id.) vers les 10:30 ou 11:00 pm (dix-heures-trente ou onze heures, ou 22 h 30 ou 23 h, ou dix heures et demie ou...) afin de remonter le fg W (voie publique) et me rendre au V (nom d'un troquet).
Dois-je ajouter : ... ?
Ou ..?
Certaines marches préconisent ..? ou ..! ; et décrivent cela comme la fusion du troisième point de suite avec les ponctuations en question ou l'élision du troisième point de suite, ou l'emploi d'un caractère deux points de suite (il a existé au plomb, on le retrouve en Unicode) suivi immédiatement, sans espace, de la ponctuation.
Mais, à ma connaissance et mon humble avis, il n'existe pas de dénomination pour ..? ou ..!
Bon, tu me mettras les points sur les i et des barres aux t (à la menthe, à la bergamote, vert... cela reste du thé).
INCIPIT (euh, explicit, je confonds encore...)
A et J sont pourtant deux seniors, avec des années de pratique de la presse et de l'édition derrière eux.
Figurez-vous que de plus savants qu'eux (en typo et orthotypo) ont pu, peuvent, pourront s'échanger des courriels à teneurs voisines des jours, des semaines durant.
Vous en doutez ? Consultez L'Orthotypographie de Lacroux (qui fournit d'assez cocasses échantillons).
P.-S. — le rendu à l'écran découle des copiés-collés et de mon exaspération de tenter d'harmoniser tout cela. Pour qui voudrait poursuivre, je renvoie au Drillon (Traité de ponctuation française), au Ricquier, Au Girault, &c. Et à la thèse de doctorat de Julien Rault, Poétique du point de suspension, valeur et interprétations (Laboratoire Formes et représentations en littérature et linguistique – Poitiers). Et je signale au passage à A. (G.) D. qu'il peut relire le Dürrematt, « Ponctuation de Mirbeau », Actes du colloque international Octave Mirbeau d'Angers, Presses de l'université d'Angers, pp. 311-321. ;-) 


dimanche 27 octobre 2019

Les Rencontres Roger Vailland (15 & 16 nov.)

Le théâtre de Roger Vailland, thème des 25e Rencontres

L'association Les Amis de Roger Vailland organise ses vingt-cinquièmes rencontres les 15 et 16 novembre prochain à Bourg-en-Bresse sur le thème du théâtre de l'auteur (et des rapports l'écrivain avec la dramaturgie et les femmes et hommes de théâtre).
Si Roger Vailland, encore jeune journaliste de Paris-Midi et Paris-Soir (et occasionnellement pigiste pour Cinémonde) fréquentait surtout les cinémas et laissa à d'autres la chronique théâtrale, il était déjà proche d'Arthur Adamov, fréquentait Antonin Artaud et sans doute les Pitoëff et Tristian Tzara. Il suivit notamment une tournée théâtrale de l'imprésario Fernand Lumbroso, ami de longue date, au Proche-Orient en 1947. Mais il attendra 1946-1947 pour écrire sa première pièce, Héloïse et Abélard, qui obtiendra le Prix Ibsen, deux ans après les représentations au théâtre de Mathurins, lesquelles avaient suscité des polémiques... Cette première pièce fut maintes fois reprises, du vivant de Vailland,  en France et à l'étranger, et depuis son décès (notamment par Daniel Benoin, en 1997, à la Comédie de Saint-Étienne).
C'est d'ailleurs à partir de cette année 1947 qu'il aborde moins occasionnellement la critique théâtrale. Ainsi, dans Action, il est estime, à propos de la pièce de Salacrou : « Il y a dix ou quinze ans, au temps où Berl enquêtait sur "la fin de la morale bourgeoise", L'Archipel Lenoir eût fait un beau scandale. Les Ligues eussent dépêché quelques chatueurs pour siffler, chaque soir. Et il se fut bien trouvé quelque cydard pour provoquer Salacrou en duel. Aujourd'hui, même le cydard applaudit gentiment pour montrer qu'il a du goût. La bourgeoisie a lâché du lest. ». Toujours dans Action, il critiquera vertement Les Justes, de Camus. « Le public populaire (...) ne comprendrait rien à l'idéologie de Camus. (...) Ceci dit et clairement entendu, l'effort de Barraud et de Camus pour construire un spectacle complet autour de quelques thèmes d'actualité est intéressant. (...) Quels textes à faire sur le thème "C.R.S.+S.S." » (16 novembre 1948). 
Roger Vailland aura par la suite de nombreux échanges avec Louis Daquin et Jean Mailland, Bertold Brecht, Roger Planchon et sans doute Jean-Marie Boëglin, et nombre de dramaturges et metteurs en scène proches du Parti communiste.
Sa seconde pièce ayant défrayé la chronique fut Le Colonel Foster plaidra coupable, dont l'écriture débuta en Italie dans la maison de Malaparte, qui fut interdite rapidement en France, mais lui valut de l'accompagner en maints pays de l'ex-bloc communiste. 
Batailles pour L'Humanité resta quelques années cependant son texte théâtral le plus connu du grand public : un tirage spécial fut largement distribué par le Parti communiste au lendemain de la représentation au Vélodrome d'Hiver.
Sa pièce radiophonique, Appel à Jenny Merveille (1948), doit être aussi mentionnée.
Enfin, Monsieur Jean (1957, mais qui attendra 1976 pour être mise en scène), clôt l'œuvre théâtrale (« Finie la comédie (...) moi, je vous tire ma révérence », en est l'avant-dernière réplique).
Cependant, en 1954, il avait conçu La Bataille de Denain, pièce inachevée.
L'influence de ses pièces sur les dramaturges et metteurs en scène est peut-être moindre que celle de ses écrits sur le théâtre, dont Expérience du drame (1953). 
Ces rencontres se tiendront à l'hôtel Marron de Meillonnas (qui doit son nom au baron Gaspard Marron), à Bourg-en-Bresse, ville dont la Médiathèque possède et enrichi l'essentiel du fonds Roger Vailland.
Michèle Gally, professeure, ouvrira ces Rencontres le 15 novembre au soir. Spécialiste de littérature médiévale, elle reviendra sur les personnages d'Héloise et d'Abélard.
Samedi matin, Gérard Vantaggioli, du théâtre du Chien qui fume d'Avignon, exposera ses points de vue de praticien (dramaturge, metteur en scène) et Sabine Gamba, chercheuse universitaire, apportera son éclairage d'historienne du théâtre.
L'après-midi, Michel Bataillon, ancien du TNP de Villeurbanne, de la Commune d'Aubervilliers, spécialiste de la décentralisation théâtrale, reviendra sur les approches théoriques de Vailland. Il interviendra aux côtés de Michel Bertrand, président de l'association des Amis. 
De nombreuses et nombreux spécialistes de Vailland participeront aux débats en présence du public (entrée libre).
L'influence de Vailland sur le théâtre a été auparavant développée, notamment par Marie-Noëlle Rio (Cahiers Roger Vailland) et Patricia Devant (« Le théâtre communiste durant la Guerre froide, Revue d'Histoire moderne et contemporaine). Un entretien dans la revue Théâtre populaire (mai 1957) vaut aussi d'être cité ici. Tout comme les écrits de feu Christian Petr, ancien président de l'association, auteur de divers ouvrages sur le théâtre.
Mais le thème méritait encore d'être approfondi alors même que des troupes théâtrales, après le décès du dramaturge, ont porté sur scène divers de ses romans (dont 325 000 Francs, par le TEP, mise en scène de Guy Rétoré, en 1984).  Jean-Jacques Coltice créa Ébauche d'un bonheur prolongé au Grenier de l'Histoire de Bourg-en-Bresse en 1996. Gatherine Gandois a présenté Trois Soirées avec Roger Vailland (Maison des Métallos, 2007) et Roger Vailland : Esquisse (à la Cité des Récollets). J'en oublie sans doute (Assommons les pauvres, du théâtre du Triton, aux Lilas, associa des textes de Vailland, Bloy, Hugo, Baudelaire...) et d'autres viendront... Il y eut aussi, pour France Culture, l'émission « Pages arrachées à... » (Roger Vailland), d'Étienne Vallès.
Il resterait sans doute à recenser le plus exhaustivement possible les citations, articles, références au théâtre par (et de) Roger Vailland. Aussi à surveiller l'actualité théâtrale pour constater qu'il inspire encore des créations ou que des actrices et acteurs, des protagonistes du monde théâtral, se déclarent marqués par son œuvre, au sens le plus large. Ne serait-ce que pour vérifier si la prochaine ou le prochain metteur en scène d'un Don Juan le mentionnera (ce qui serait fort probable). Car c'est tout le personnage, et non seulement ses divers écrits ou dits, ses personnages (Marat, Milan, Lamballe, Duc... et ses héroïnes), qui peut inspirer la création théâtrale. Peu de pièces, certes, mais Vailland a beaucoup légué au théâtre et il l'inspirera encore...
P.-S. — En bonus (et PDF), deux articles parus en 1949 dans Paris-Presse et La Croix, sur la pièce Héloïse et Abélard... C'est là...





samedi 26 octobre 2019

Brexit & Brexodus ne sont pas alignés...

L'attractivité du Royaume-Uni peu affectée par le Brexit

D'un, en dépit des incertitudes liées au Brexit, le Brexodus ne s'est pas produit. Deux, même si le cours de la livre sterling fléchit, le Royaume-Uni reste attractif pour les entreprises. Trois, on finirait par se demander si le Brino (Brexit in name only) ou la Brexeternity ne finiront pas par l'emporter.
Une nouvelle pièce de 50 pence devait être frappée...
La Royal Mint a différé, elle aussi
Commençons par le point trois. Il est tout à fait exagéré d'imaginer que l'accord final entre le Royaume-Uni et l'Union européenne équivaudra à un Brino (un Brexit fortement édulcoré) ou que des prolongations sine die repousseront encore et encore l'application de l'article 50 (la Brexerternity). Mais comme je le concluais hier, il ne peut jamais être exclu qu'un amendement soit adopté par le Parlement britannique « par défaut » (de vigilance, de respect des consignes de vote, &c.).
Là, il serait étonnant que lundi, lorsque sera décidée ou non la tenue d'élection anticipées, les conservateurs fidèles à Boris Johnson se laissent duper par l'ensemble des Remainers. Un article du Guardian laisse en effet entendre qu'une alliance composite ferait passer par les Commons la tenue d'un débat exceptionnel afin de faire ratifier soit le protocole Theresa May, soit celui de Boris Johnson en assortissant cette résolution de la décision de tenir un second référendum. Le présumé complot des Remainers ayant été éventé, les Leavers feraient tout pour s'y opposer.
Le Labour consentira-t-il à affronter les conservateurs lors d'élections ? Ils risquent de considérer ces élections inopportunes tant que ne sera pas éclairci les points litigieux du protocole Johnson. Dont celui qui porte sur les garanties de préservation des règles du marché du travail. Selon les travaillistes, le protocole Johnson marquerait un retrait par rapport à celui de Theresa May. Comprenez que le Royaume-Uni resterait davantage libre d'assouplir les réglementations, et attirerait ainsi des entreprises trouvant trop contraignantes celles s'appliquant dans l'Union européenne (durée du travail, facilités d'embauche et de licenciement, cotisations sociales, &c.).
Autre angle d'attaque des travaillistes et d'autres : le protocole Johnson pourrait transformer le Royaume-Uni en Singapore-on-Thames. Soit qu'un gouvernement conservateur s'engage dans la voie du dumping fiscal. Dumping fiscal plus dumping social égale moins de recettes fiscales, moins de garanties pour les salariés... Et soit la croissance parvient à compenser, soit il faudra rogner sur les dépenses publiques, donc aussi sur les aides sociales...
Le Labour pourra donc faire valoir que la priorité serait d'amender ce protocole, de lever les ambiguïtés, et que cela ne peut attendre le résultat d'élections...
Ce qui s'observe par ailleurs, c'est que le Brexodus (les entreprises embarquant en masse sur un cargo rejoignant le continent), mis en avant par le Project Fear (les menées imputées aux Remainers par les Leavers) ne se produit pas. Certes, les Brexpats, cherchant à obtenir une nationalité communautaire, ont été et restent nombreux. Mais il ne s'agit pas majoritairement de salariés relocalisés. Des relocalisations se sont produites (vers Dublin, Luxembourg, Paris, Frankfurt et Amsterdam, dans cet ordre) dans le secteur financier, mais l'exode manufacturier tarde à se manifester.
Quant à la pénurie de main d'œuvre qualifiée liée au départ de citoyens européens, elle semble aussi globalement marginale. Cela étant, les actuelles dispositions britanniques, sur le papier favorables au maintien des citoyens européens, en réalité plus complexes, pourraient évoluer et provoquer une petite vague de départs.
Mais, plus généralement, les perspectives britanniques ne semblent guère désastreuses, Brexit dur ou plus ou moins aménagé.
En témoigne le récent palmarès de la Banque mondiale, le Doing Business Index... Il se fonde sur dix critères assez disparates (dont le raccordement à l'électricité), mais mesure assez bien l’attractivité d'une économie. Et le Royaume-Uni se classe au huitième rang pour  2020 (la France est cotée 32), devant la Norvège et la Suède (Nouvelle-Zélande, Singapour, Hong-Kong restant en tête, suivis du Danemark, de la Corée, des États-Unis et de la Géorgie ; la France se situant derrière le Japon, l'Espagne et la Chine pour la « facilité de faire des affaires » et au 37e rang pour « la création d'entreprise »).
Cela n'empêche que les conséquences néfastes du Brexit pourraient être accentuées, tant bien même le protocole Johnson serait ratifié... Kwasi Kwarteng, le ministre de l'Économie (Business) a laissé entendre qu'une sortie sans accord resterait possible car les négociations se poursuivraient jusqu'à fin 2020, soit l'expiration de la période de transition.
C'est pourquoi l'ex-Premier ministre Tony Blair suggère aux Commons d'adopter une loi ad hoc imposant un accord ferme et définitif, ce avant de s'engager sur la voie d'élections anticipées. Le maire travailliste de Londres, Sadiq Kahn, s'exprimant dans La Reppublica, incite Jeremy Corbin à expliquer à l'électorat que « toutes formes de Brexits sont pires que de rester dans l'UE ». Il doit sortir de l’ambiguïté et se déclarer pour la révocation de l'article 50 (ce que le Royaume-Uni peut faire unilatéralement). 
Pour des raisons opposées, les dix députés unionistes Nord-Irlandais opposés au protocole Johnson « le pire de deux mondes », font sécession de l'alliance avec les conservateurs. Quant à Nigel Farage, du Brexit Party, il soutient que le protocole Johnson n'améliore celui de May qu'à la marge : « La Cour européenne de Justice reste garante des traités (...) pourra remettre en cause les lois britanniques (...) nous ne pourrons contrôler les droits de pêche » (adaptation libre). L'amélioration, selon lui, se limite à 5%.
20 "One Nation" conservateurs (Brexiters) — sur 41 —, proches des thèses du DUP unioniste nord-irlandais, feraient défection lors du vote sur les élections, lundi.
Lundi soir, France et Pays-Bas pourraient soit faire tilter le billard électronique (puisque les Britanniques ne parviennent pas à s'accorder, pourquoi prolonger l'attente ?), soit considérer qu'un court délai serait insuffisant (le Parlement britannique ne parvenant pas à ratifier le protocole Johnson) et donc espérer qu'en laissant du temps au temps, les Remainers pourraient finalement l'emporter.
Comme souvent, quand on ne sait trop comment tournera le vent, on s'en remet aux bookmakers. Ils annoncent des cotes assez proches. Paddy Power penche pour des élections avant Noël (15/8), Ladbrokes aussi, à deux contre un (selon The Sun). Cela peut changer d'un jour à l'autre, et lundi, d'heure en heure.




     

vendredi 25 octobre 2019

Brexit : le report encore... reporté

 Sortie de l'UE du Royaume-Uni : du 29 mars à... la Brexiternity ?

Finalement (ou provisoirement ?) la décision sur la possibilité donnée ou non au Royaume-Uni de prendre le large muni d'un accord — et la durée du délai accordé — ne sera annoncée que lundi soir ou mardi... Mais cette forte déclaration d'intention présente quelque faiblesse.
La nuit dernière, je supputais à tort que ce matin, la France se rallierait à l'option majoritaire parmi les 26 autres membres de l'UE. Soit que serait communiqué aux Britanniques qu'un délai pour accorder leurs violons s'étendra jusqu'au 31 janvier 2020. Pourquoi cette date ? Parce que c'est celle retenue par la majorité parlementaire britannique. Alors que la France voulait arrêter le chronomètre beaucoup plus tôt. Admettons qu'en début de semaine prochaine il... en sera ou non ainsi.
Car comment une partie de la presse britannique interprète ce report du report ?
Pour le Daily Express, c'est clair : « Le Labour fait chanter le Royaume-Uni : l'UE n'accordera pas l'extension tant que Corbyn ne consentira  pas aux élections. ». Même appréciation, moins belliqueuse, du Guardian.  « L'UE reporte sa décision jusqu'à ce que le Parlement se décide sur les élections ».
Après Brexpat, Brexiternity, un nouveau terme est apparu : la flextension. Cette extension accordéon est un gage de bonne volonté de la part des 27. Auparavant, le Royaume-Uni devait contribuer aux finances de l'Union jusqu'au 29 mars, puis jusqu'au 31 octobre. Là, si un accord était ratifié avant la date butoir, le royaume serait libéré de ses obligations.
Le « chantage » imputé au chef des travaillistes, c'est de vouloir d'un examiner soigneusement les termes du protocole d'accord, et de deux que la perspective d'une sortie sans accord (no deal) soit formellement écartée. La nouveauté, c'est que les Lib-Dem (20 sièges, mais davantage de voix si celles de conservateurs dissidents s'ajoutaient) et le SNP (35 sièges) se soient ralliés à cette position. Ce « chantage » est en fait la réplique d'un autre, celui de Boris Johnson qui ne veut pas dévoiler les détails du  protocole (donc de laisser débattre sur ses conséquences), et même tenter de paralyser le Parlement. Soit en mettant le Cabinet (le gouvernement) en « grève ». Il a l'initiative des lois et ne soumettrait au Parlement que les décisions « les plus strictement nécessaires », s'il en était. 
En gros, les parlementaires pourraient s'égosiller ou tourner en rond dans les couloirs de Westminster.
Cette menace a été retirée. Mais Boris Johnson déclare toujours qu'une sortie au 31 octobre reste envisageable et Downing Street a écarté l'hypothèse d'une telle grève (pour le moment ?).
En fait, la France (voire aussi, sans le dire, Michel Barnier et d'autres) s'est montrée adepte du wait (pas trop longtemps) and see (ce qui se trame outre-Manche). 
Pourquoi les 27 se prononceraient-ils lundi soir ou mardi matin ? Parce que lundi les Commons devraient voter pour ou contre des élections anticipées. L'issue est incertaine. Il n'est en fait que le SNP a désirer, en fonction des sondages, une élection rapide censée lui assurer de nets gains de sièges (et éliminer tout député conservateur écossais). Boris Johnson espère, lui, mordre sur l'électorat du Brexit Party. Mais tous les conservateurs n'estiment pas que sa stratégie soit la meilleure. Il savent que si Jeremy Corbin est impopulaire, Boris Johnson, considéré clivant, n'a pas non plus une cote de popularité confortable. Le dernier sondage YouGov laisse penser que la cote de Johnson n'est que de 38 % (54 % contre), et celle de Corbyn pire (20 contre 70 %, avec des indécis versatiles en sus).
Boris Johnson concède qu'il laisserait les Commons débattre de son protocole jusqu'au 6 novembre si et seulement si il obtient le feu vert pour des élections. 
Comme l'exprime Cécile Ducourtieux, du Monde : « Brexitland vire à l'Absurdland ».
Selon le club de réflexion Eurasia Group, Boris Johnson n'obtiendra pas lundi la majorité élargie (aux deux-tiers) lui permettant de déclencher des élections. Il pourrait alors soumettre son gouvernement à une motion de censure ou faire adopter une loi ad hoc à la majorité simple.
Quoi qu'il en sera, l'union douanière, en ses grandes lignes, restera applicable jusqu'en juillet 2020. Ensuite, il faudra négocier les termes d'un accord commercial : l'UE et la Suisse ont mis cinq ans pour aboutir à un accord... On n'a pas fini d'entendre parler du Brexit, des droits de pêche, &c.
Reste que, lundi soir ou mardi, on ne sait pas non plus si la position française s'adoucira, voire se durcira. Selon Reuters, une source proche de l'Élysée a indiqué, peu après l'annonce du report de la décision sur la flextension, qu'un nouveau report (jusqu'au 31 janvier ou plus tôt) n'était plus garanti car « n'allant pas de soi » (not a given).
Car, en admettant que des élections soient décidées, comment le Bojo ferait-il campagne ? Sans doute en promettant d'obtenir d'autres concessions européennes (ce à quoi l'UE se refuse). Ce que désire la France, en fait, c'est mettre la pression pour que le protocole d'accord soit entériné totalement par le Parlement britannique au plus vite. Reste à convaincre les 26 autres pays membres ou à refuser tout report (l'unanimité des 27 est requise) en arguant que ce serait devenu vain.
Bref, l'indécision pourrait, une fois de pire, l'emporter.
La position française n'est confortée que par celle des Pays-Bas. Elle est motivée par le fait que Boris Johnson avait menacé l'UE de saboter son fonctionnement. Si le Royaume-Uni reste membre jusqu'au 31 janvier 2020, il doit entre-temps nommer un commissaire européen (sans lui, juridiquement, le travail de la commission est bloquée), et conserve son droit de veto sur les prévisions budgétaires européennes et d'autres décisions débattues.
Ira-t-on vers un Brexmas (un Brexit avant Christmas, Noël) ? Possible, si le Parlement britannique ratifiait le protocole dans les prochaines semaines. Mais, voir plus haut, France et Pays-Bas pourraient forcer une sortie sans accord en obtenant une date butoir rapprochée (vers la mi-novembre), et on ne serait trop comment les Commons se détermineront. Parfois, un amendement décisif peut passer « par défaut » (par manque de vigilance de ceux capables de s'y opposer). Cela s'est déjà vu.     


   

Brexit : les parlementaires britanniques serrent leurs fesses...

Report, élections, et pugilats pour/contre le Brexit ?

N'oublions pas que, lundi, Boris Johnson cherchera à déclencher des élections générales... Mais est-ce, vu de ce côté, après la crise des Gilets Jaunes, le plus important ? Un sondage inquiétant laisse penser que la majorité des Britanniques estime que le recours à la violence pour parvenir à leurs fins est légitime...

Évacuons la question des élections anticipées... Lundi, Boris Johnson le proposera aux députés des Commons. Il a deux options pour tenter de les obtenir. Une motion de censure, qu'il perdrait en faisant voter la défiance aux conservateurs (mais ces derniers seraient partagés moit-moit sur l'opportunité de déclencher des élections). Un vote classique, nécessitant une majorité de deux-tiers des voix. On ne voit pas le SNP écossais se déjuger et repousser cette perspective... Mais les travaillistes ? 
Les travaillistes n'ont jamais dit qu'un report de la date de sortie du Royaume-Uni de l'UE était la seule condition conditionnant leur accord pour engager des élections anticipées (au 12 décembre, seule date possible pour les organiser avant 2020).
Ils veulent que soit définitivement écartée la possibilité d'une sortie sans accord. Encore faut-il débattre, aux Commons, chez les Lords, de cet accord en toute connaissance de cause. Or Boris Johnson subordonne un examen minutieux de son projet d'accord au déclenchement de ces élections...
Les travaillistes sont aussi divisés sur la question. Ils ont reçu une consigne de vote pour celui de lundi : abstention.
Toutes et tous ne suivront pas cette consigne, mais cela signifie qu'il faudra passer à cette paradoxale motion de censure voyant la majorité des conservateurs cherchant des alliés pour renverser leur propre gouvernement.
Cela reste conditionné au délai qu'accordera l'Union européenne... De quinze jours, comme la France fait savoir qu'elle le souhaite, jusqu'au 31 janvier, comme sans doute la majorité des 27 l'envisage ? Il semble douteux que la France, ce vendredi, maintienne sa position, mais sait-on jamais ?
Pour être clair : les positions respectives reposent sur des sondages britanniques. Soit sur l'espoir estimé ou non illusoire de voir les conservateurs défaits, une nouvelle majorité ratifier un accord très proche de celui projeté par Boris Johnson, ou déclencher un second référendum... En attendant, le Royaume-Uni contribue au fonctionnement de l'Union européenne (verse sa « redevance »).
Surprenant
N'oublions pas non plus qu'une députée britannique fut tuée, en raison de ses prises de position anti-Brexit, par un dérangé-extrémiste (rayez la mention inutile)... Et que, ces derniers jours, d'autres parlementaires ont été l'objet de menaces, obligés d'être escortés par la police, violemment pris à partie.
Une enquête des université de Cardiff et d'Édimbourg (ce n'est pas anodin que ce soit des universités galloise et écossaise) et on sondage YouGov concluent que, tant les Leavers (pro-Brexit) que les Remainers considèrent que le recours à la violence contre les parlementaires est légitime.
On a connu cela en France avec des saccages de domiciles ou de permanences d'élus lors de la crise des Gilets Jaunes. Là, il s'agit aussi — un cran au-dessus — d'atteintes aux personnes.
Côté Remainers, majoritairement urbains et classes moyennes, les pourcentages sont les suivants : 57 en Angleterre, 56 en Écosse, 57 au Pays de Galle... Quant à l'Irlande du Nord, qui a voté majoritairement pour le maintien dans l'Union européenne, on ne sait. 
Versant Leavers, c'est pire : Angleterre 69, Écosse 62, Pays de Galles 70.
Sortir de Westminster sous escorte policière, fastoche. Mener campagne dans les circonscriptions pourrait exposer à des risques de se retrouver pris en des rixes, ou guetté au coin de la rue.
Entre l'enquête universitaire et le sondage, on constate des écarts. Le sondage YouGov donne des pourcentages encore plus alarmants (71 % des Leavers anglais estiment que le recours à la violence serait "worth paying", justifié). Pour les Remainers, l'écart est moins marqué (58 % en Angleterre).
Et bien évidemment, les parlementaires ne seraient pas les seuls visés.
Ce n'est pas que surprenant, c'est, sauf erreur (si des études antérieures ont porté sur des sujets voisins), inouï. Et même atterrant...
« Black » blocks, contre « White » blocks ? La ligne rouge allègrement franchie ? Action directe, Rote armee fraktion, brigadisti... face au SAC, et ultras d'extrême-droite ?
Reste à estimer ce que l'étude et le sondage entendent par « violence ». Intimidations, menaces ou pire ? Blessures ou décès ? Attentats, explosifs, comme aux temps de l'OAS et des ratonnades, des fellagas égorgeant des familles ? Non, tenez-vous bien : il ne s'agit que de grièvement blessés... Une paille...
En réalité, une large majorité des Britanniques ne veut plus entendre parler du Brexit, s'en tient à ne plus parler à des proches ou des voisins, et hormis ce meurtre, celui de l'honorable Joanne Cox, députée travailliste Remainer (tuée en juillet 2016), les cas de lynchage sont restés rares (quoique... la police n'a pas forcément consigné les motivations et des ministres conservateurs ont évoqué un risque de civil war, et la possibilité d'instaurer les pleins pouvoirs pour faire face à d'éventuelles révoltes, comme je l'avais précédemment signalé sur ce blogue-notes).
Jo Cox, Anna Lindh (ministre suédoise) assassinées... Pour des raisons, mettons, voisines (je vous laisse élucider cette approximation).
C'est plus qu'inquiétant alors même que la partie la plus droitière et souverainiste des conservateurs et le Brexit Party de Farage se sont distancés de la fachosphère britannique (elle subsiste, reste, comme en France, marginalisée). Mais inspiré par cette étude et de ce sondage, un « homme fort » pourrait être tenté d'en tirer profit. Non le Bojo. Sauf bien sûr s'il en tirait prétexte à faire décréter par la reine l'état d'urgence. Mais il ne mènera pas une campagne incitant à la haine. Enfin, cela reste plausible.
Non, la Grande-Bretagne (pour l'Irlande du Nord, restons circonspects) n'en est pas revenue au temps d'Oswald Mosley et de la Britsih Union of Fascists. Quoique... Allez comprendre.
Revenons à nos moutons : Boris Johnson a fait approuver son programme législatif (détaillé par le discours de la reine, The Queen Speech) par 310 voix contre 294. Les unionistes irlandais (DUP) et les conservateurs évincés revenus (provisoirement) au bercail lui ont accordé ce sursis. La suite reste incertaine...

  









jeudi 24 octobre 2019

Real Donald Trump : un président très distancié

Trump rapproche, Trump déplace, Trump remplace...

Safelite repair, Safelite replace... Avec Donald Trump, c'est un peu la même chose, il rafistole l'histoire, et est doté de la latitude de rapprocher des lieux situés à des milliers de kilomètres. Quel homme, quel génie (lui-même s'est qualifié ainsi), c'est le président magicien des États-Unis.
Les pataquès, bourdes, confusions du Donald se succèdent à un rythme toujours soutenu. Toutes ses idées ont du génie, et tel Carglass™, il répare, dépare, place et remplace...
C'était la semaine dernière à Rome... La traductrice italienne de Donald Trump eut un moment d'hésitation, voire de sidération. Elle s'est reprise et ayant entendu le Donald énoncer que les États-Unis (fondés en 1776) et l'Italie (constituée un siècle plus tard, devenue république au siècle dernier) sont liés "by a shared cultural and political heritage dating back thousands of years, to ancient Rome'', elle a, sans plus sourciller, donné sa version de cette alliance datant «dai tempi degli Antichi romani».
Comme on ne prête qu'aux riches, il lui est aussi attribué le fait (erroné) qu'il aurait évoqué un certain président Mozzarella (en fait Sergio Mattarella). Il Messaggero l'affirme, ainsi que d'autres, mais il semble bien que le Donald à la langue fourchue aurait bien prononcé correctement par quatre fois le nom de son homologue. 
En revanche, on ne sait trop à qui attribuer ce singulier retour vers le futur... Donald Trump a tellement viré de collaboratrices et collaborateurs qu'on ignore qui lui rédige des discours pour ses visites officielles à l'étranger.
C'est le légendaire des siècles, au verbe à l'occasion hugolien (de Victorino, euh, Vittorio Hugo).
Dans un cadre plus informel, le Donald se lâche, improvise. Il rapproche les lieux presque à la vitesse du mur du son...
"We're building a wall in Colorado", s'est-il félicité. Le Colorado, The Centennial State, s'y prête : ses limites forment un rectangle quasi-parfait. Mais c'est du mur frontalier du Mexique qu'il s'agissait. Lequel s'érige au sud de la Californie, de l'Arizona, du Texas et du Nouveau-Mexique.
La distance entre Denver, Colorado, et El Paso (Texas, mais jouxtant le Nouveau-Mexique) n'est que de... près de 900 km à vol d'oiseau (et plus de 1 100 par les meilleures routes).
Le gouverneur démocrate du Colorado s'est, lui, félicité que les enfant du primaire, dans son État, peuvent apprendre la géographie.
Cette singulière remarque n'est pas tombée dans les oreilles de sourds, qui se sont empressés de la répercuter. Mais en fait, Donald Trump a peut-être confondu l'État et la Colorado River, qui longe la frontière sur environ 30 km. Un mur la base dans l'eau, cela s'est déjà vu. 
Donald Trump a ensuite lâché un tweet selon lequel il se serait exprimé «​ facétieusement » (kiddingly).  Et farceur, avec cela...
Voici deux jours, en conférence de presse, il affirmait avoir perdu entre deux et cinq milliards de dollars depuis son accession à la Maison Blanche. Il s'en balance. Il préfère servir son pays plutôt que d'amasser des millions quotidiennement. Sauf que sa fortune est estimée à 3,1 milliards de dollars (contre 4,5 en 2015 selon Forbes). Bah, il n'en est pas à cent millions près (ce qui lui resterait, à moins qu'il ne soit déjà surendetté).
Il va bientôt falloir réécrire la fameuse blague sur les blondes... C'est dans un grand stade, des milliers de blondes sont réunies pour assister à un jeu-concours. La finaliste est une blonde à laquelle est posée des questions plutôt faciles. Genre « où se situe Denver ? ». Réponse « en Alaska ». Mine consternée du public entendant énoncer la bonne réponse puis s'élève une clameur : « Laissez-lui une chance ! Laissez-lui une chance ! ». Les questions se succèdent, de plus en plus élémentaires... Puis celle-ci « un plus un égale... ». Réponse : « deux ». Et avant même que l'animatrice se soit prononcée, la clameur reprend : « Laissez-lui une chance ! ». 
En fait, avec la procédure de destitution en cours motivée par l'affaire ukrainienne, et la succession de témoignages toujours plus précis et accablants, c'est ce que réclament les partisans de Donald Trump. Gaffe après gaffe, mensonge après mensonge.
Aux deux astronautes, Jessica Meir et Christina Kock, sorties ensemble de la station spatiale vendredi dernier, le Donald adressait ainsi ses félicitations : « Vous êtes des femmes très courageuses (...) les premières à le faire ». Elles sont respectivement la seizième et dix-septième à l'avoir fait.
Lui peut se targuer d'avoir été le premier président à pouvoir converser par téléphone avec Kim Jong-un (alors qu'il soutient que Barack Obama avait tenté par onze fois, sans succès). Le dictateur nord-coréen lui adresserait de magnifiques cartes postales. Un vrai « gentleman », comme la qualifié le Donald.
Il accuse aussi la marque Renault d'inonder le marché américain d'automobiles (« eux, ils nous envoient des Mercedes, des BMW, des Volkswagen, des Renault, dans le cas de la France »). Pour Renault, qui s'est retiré du marché en 1989, il est difficile d'estimer combien de voitures de collection  au losange roulent encore sur les highways.
Chaque jour, voire, à point d'heure, toutes les trente minutes environ, le Donald fait des siennes. Et encore, on ne peut savoir ce qu'il raconte en privé ou ses proches collaborateurs.
Mais il semblerait que l'électorat américain lui laissera sa chance... Selon Moody's Analytics, Donald Trump sera réélu, confortant même son avance en remportant les votes des grands électeurs du New Hampshire et du Minnesota. La ou le candidat démocrate ne l'emporterait que si une très forte participation était constatée (condition difficile à réaliser).
Sa toute dernière ? Enfin, tout le monde a du mal à suivre. Voici quelques heures, USA Today rapporte que Trump a estimé qu'en vertu du deuxième article de la constitution, il avait, en tant que président « le droit de faire tout ce qu'il souhaitait ». Il ne s'en prive pas. Ce qui remémore la fameuse déclaration de Richard Nixon de mai 1977 : « si le président le fait, cela veut dire que ce n'est pas illégal ».
Il a cependant renoncé à accueillir le futur sommet du G7 dans le Trump National Doral, son complexe de Miami. La facture (dans les 40 millions d'euros, estimation basse) aurait été encaissée par la famille Trump et adressée à la Maison Blanche. Ce pourrait être finalement Camp David, propriété fédérale, équivalent de La Lanterne ou du fort de Brégançon, entretenue par la marine américaine. Car, c'est évident, le Donald se contrefiche de perdre des milliards...








Fermetures d'églises en Algérie : la presse, &c.

Médialogie : du sectarisme évangélique des détracteurs des médias

La preuve qu'une information est vraie   les médias n'en font pas état. Alors que celles et ceux qui le soutiennent ont eu vent de l'info par les médias qu'ils dénoncent, parfois véhémentement...
D'où je cause ? Journaliste, ô combien non-conforme. Ou plutôt ex-journaliste encarté et expurgé pour cause de non-conformité (enfin, aussi... pas seulement... On cause burn-out, mais auparavant, dans la presse, ce fut aussi « marche ou crève », je ne m'étends pas).
Cette précision sibylline, furtive, me semble nonobstant nécessaire. De quoi sera-t-il question ? Accessoirement, des fermetures d'églises de diverses confessions en Algérie. Fondamentalement, de ce nouvel adage : si seul le hors-média en fait état, c'est que c'est vrai (pour résumer).
Préambule tardif. Échange amène avec Claude Vautrin. Estimé confrère. Nous avions tous deux une haute estime de la presse municipale, institutionnelle, celle que nous défendions, puis de la presse régionale (et de la « presse libre d'expression régionale », pour résumer drastiquement). L'auteur de Grand Reporter : le pas de côté (Kairos éd., 2015) n'a pas commis d'impair en estimant, le 20 octobre dernier, que les manifestations des foules libanaises ne retenaient guère l'attention des médias (à cette date). Je le cite : « Les médias français n'en parlent pas beaucoup depuis vendredi ». Exact. Mais je doute qu'il ait été sensibilisé initialement par le site de L'Orient-Le Jour (que lui, comme moi-même, consultons à l'occasion, comme d'autres, celui d'Hürriyet Daily News dernièrement). Il me répondra ou non, peu importe.
Franchement, je ne savais pas que des Algériens de France manifestaient régulièrement place de la République à Paris depuis des semaines (et nettoyaient les lieux en fin de manifestation). C'est Ali B., en France depuis plus de quatre décennies, qui m'en a informé. En ajoutant : « et les fermetures d'églises en Algérie, la presse n'en parle jamais parce que... ». Car, Ali B. consulte prioritairement et presque exclusivement des sites qui tapent sur la presse mainstream, dominante, dont, forcément, les journalistes sont contraints (ou complices) des patrons de presse.
Je conçois. Mais les apparences sont trompeuses. La plupart des sites hors-média puisent leurs infos dans les médias... Et accommodent leur tambouille à leur sauce. 
De même pour la presse encore qualifiée d'alternative (pas toute la presse alternative) genre Charlie Hebdo. Pas d'investigation. Ce n'est pas du ressentiment (Cabu voulait me dépanner quand j'étais tricard, Philippe Val m'a dit, à juste titre d'ailleurs : « Jef, je ne peux pas repousser les murs », manière de dire qu'il avait son plein de pigistes). Au moins, SinéMensuel tente encore l'investigation. Ce qui ne veut pas dire que ces deux titres ne puissent, grâce à un réseautage, sortir des infos comme peut le faire Le Canard enchaîné (saine lecture).
Je ne veux pas non plus soutenir que toute critique des médias provenant de l'extérieur du « cénacle » serait nulle et non avenue (la grégarisme de la « confraternité » est une réalité).
Mais je réfute que, sur les fermetures d'églises chrétiennes (ou assimilées), en Algérie, les médias français aient posé une chape de plomb (avec l'assentiment tacite du Vatican, de je ne sais plus quelles obédiences confessionnelles, de la diplomatie française, et de qui sais-je encore).
Certes, ce n'est pas, jusqu'à nouvel ordre, un thème récurrent de BFMTV — soutien sans faille aux consœurs et confrères de cette chaîne qui font leur boulot le plus honnêtement et déontologiquement possible — ou ce qui fait les unes des principaux quotidiens.
M'enfin, Ouest-France (hors titres du Crédit mutuel, le plus gros tirage du SPQR), et LCI,  et non pas uniquement RT (ou Sputnik News aussi ?) se font fait au moins l'écho de ces fermetures de lieux de culte chrétien (enfin, chrétien.. ? Vraiment ? Ou marchands de leurs temples...).
Les mêmes encensant Trump et Orban s'offusquent. Ali B. me soutient que Kabyles (et Berbères divers) sont les premiers visés. Coïncidence ? Je m'autorise à ne ne pas chercher à vérifier. C'est en tout cas l'opinion de Said Salhi. Il s'agirait, selon lui, « d'affaiblir le mouvement de protestation nationale ». Recevable jusqu'à collection d'indices contraires. Mais tamurt.info indique que jamais un chrétien ne sera policier, gendarme ou fonctionnaire, et que les commerçants chrétiens sont traqués par le fisc. Possible.
Il est bien évident que si les autorités algériennes ne condamnent pas l'apostasie, mais uniquement le prosélytisme, il y a deux poids, deux mesures (le prosélytisme musulman est plus que toléré, et le pouvoir des généraux a favorisé l'érection de la Grande Mosquée d'Alger dont le coût est estimé à près de deux milliards d'euros en réalité). Mais là n'est pas la question.
Qui reste que la source des médias français ayant répercuté l'information (x églises protestantes évangéliques fermées) fut sans doute El Watan. Concluez.
Et comprenez ma lassitude quand j'entends ou lis : « Ils vous cachent tout, on vous le dit (et plus encore) ». C'est prendre Ali B. pour une poire. Qui ne le mérite aucunement. Mais qui, de bonne foi, peut vous soutenir que tous les lieux de culte chrétiens (catholiques apostoliques romains et autres) d'Algérie vont y passer, vont voir leurs portails condamnés par des scellés. Ce n'est pas exclu. Mais il reste prématuré de l'affirmer. En fait, tant que l'alliance du sabre et du « goupillon » musulman algériens ne sera pas garantie par des versements de dinars sonnants et trébuchants, il ne se produira rien de crucial. Mais comment voulez-vous que les médias en soient avertis sur le champ ?