lundi 16 décembre 2019

Brexit : Westminster contre Holyrood… et Stormont ?

Brouillard en mer d’Irlande, l’Angleterre isolée

Retour en zone de couverture, and back to Brexit. D’accord, c’est du réchauffé…
Alors que l’Australie va sans doute battre ses records de chaleur avec une température grimpant à 50° pour une semaine ou plus, le Brexit, les grèves en France, &c., c’est quelque peu dérisoire.
Le rythme de la déforestation a doublé en un an au Brésil, et ce n’est pas parce que le bush en flammes et la forêt amazonienne mitée, c’est loin, que les (lourdes) conséquences ne vont pas se rapprocher.
Mais revenons au Royaume-Uni resté sous de fortes pluies.
Depuis mercredi dernier, j’étais hors de portée d’un point d’accès Internet (enfin, si, le McDo distant de six kilomètres en est doté). Quant à trouver un Monde de l’avant-veille, ce n’était pas mission impossible, mais tendre le pouce sous l'averse adverse…
Bref, je ne vais pas vous apprendre grand’chose et mettons que ce qui suit soit une sorte de pense-bête à usage interne. Quoique…
Victoire de Boris Johnson ou défaite de Corbyn ? Plutôt net succès des conservateurs et Bérézina de Jeremy Corbin. Les sondages post-électoraux sont souvent plus fiables et celui d’Opinium le paraît. Les électeurs travaillistes ont déserté le Labour surtout en raison de la personnalité de Jeremy Corbin et de sa camarilla à la tête du Labour. Ils furent 37 % à préférer voter conservateurs ou libéraux-démocrates pour cette raison tandis que le programme économique a fort peu influé (6 % des défections). Le Brexit en a fait fuir 15 % vers le Lib-Dem et 31 % chez les Tories. Corbyn passera donc la main. Et il n’est pas garanti que les travaillistes écossais se rallient à qui lui succédera.
À Holyrood, le parlement écossais, ils semblent plutôt se déclarer favorables à un second référendum que réclame le SNP (48 sièges à Westminster, 13 de mieux) et partant à la perspective de rejoindre l’Union européenne.
Pour mémoire, le Lib-Dem a perdu un siège, celui de sa présidente, Jo Swinson, qui se présentait en Écosse, et le Labour, 60 (avec près de 8 % de voix en moins). C’est cela, le système à un seul tour : avec 1,2 % du total des voix en plus, les conservateurs gagnent 48 sièges d’un coup.
Débrayage avant transition et point mort : le nouvel-ancien Speaker (Lindsay Hoyle, remplaçant pour un jour de John Bercow), ne pouvant de présenter que sous sa seule bannière emménagera bien à Westminster (il dispose d'une suite de fonction).
Où on ne sait combien de députés nord-irlandais siégeront. Si 22 ont été élus, soit huit pour le DUP (-2), sept pour le Sinn Féin et deux pour le SDLP (soit neuf pour la réunification et le maintien dans l’UE), on ne sait trop qui va ou non bouder Westminster. La priorité est de siéger à Stormont (le parlement de la fantomatique assemblée locale, dans les limbes depuis trois ans) où cinq partis devraient être représentés. L’un est « neutre », l’Alliance, l’autre, l’UUP est unioniste. Vers la fin de la semaine, on saura si l’assemblée sera ou non revitalisée mais il semble qu’elle soit en passe de l’être.
Et ce qui se profile, si un référendum en Écosse conduisait à l’indépendance, c’est qu’un autre sera réclamé en Irlande du Nord. Avec peut-être trois questions (statut quo, réunification, autonomie).
En fait, la moitié des Britanniques considèrent que l’actuel Royaume-Uni ne le sera plus à l'identitque dans un avenir incertain. Et selon les modalités du Brexit à la fin de la période de transition (fin 2020 selon Boris Johnson, bien plus tard selon Bruxelles), l’échéance pourrait se rapprocher. Plus dur sera ressenti le Brexit, plus forte sera la tentation de prendre le large. À l’inverse, les questions de politique(s) intérieure(s) joueront davantage. Au pluriel car la politique plutôt sociale de l'Écosse est perçue tel un boulet coûteux au sud, surtout côté conservateurs anglais de Chez Albion.
En revanche, le Plaid Cymru a conservé ses quatre sièges du Pays de Galles (avec seulement 10 % de l’électorat). Ses députés voteraient bien sûr pour l’IndyRef2 écossais (le second référendum) que les conservateurs repoussent formellement.
Mais l’opinion évoluera et les conservateurs comptent maintenant 109 nouveaux députés inexpérimentés. Un peu moins d’un tiers (sur 365). Pouvant hésiter si le Brexit tourne vinaigre, mais pas au point de faire défection car provenant en majorité des secteurs (nord et centre) pro-Leave de l’Angleterre. La situation semble donc bloquée. Durablement figée ?
Pas si sûr. Pour Gina Davidson, du Scotsman (unioniste en 2014), Boris Johnson « n’est pas réputé pour sa subtilité » et pourrait agiter des chiffons rouges face au taureau écossais. Si Nicola Sturgeon et le SNP se sont refusés à organiser un référendum autonome jusqu’à présent, cela pourrait évoluer.
Tout comme d’ailleurs en Irlande du Nord.
Cependant, pour Andy Maciver, du Herald (idem en 2014), même si le SNP n’est pas aussi chaud qu’il le proclame et ne veut pas risquer un IndyRef2 en 2020 (les sondages restant indécis, donnant une très faible majorité pour l’indépendance), les résultats du vote national de 2021 pourraient changer la donne si le SNP se renforçait encore. Du fait, aussi, de la perception des conséquences du Brexit.
Et dans ce cas, « les Tories ne pourront pas continuer de dire non à l’Écosse », considère Maciver. De même, son confrère Mark Smith remarque que, pour beaucoup d’unionistes, il a été préféré de choisir entre deux maux (Brexit ou SNP) le moindre, et ce fut un vote SNP en traînant les pieds mais…
Cela s’est moins produit en Irlande du Nord, mais le DUP n’étant plus indispensable aux conservateurs à Westminster, et devenant moins écouté, moins influent, une partie de sa base pourrait faire défection lors du renouvellement de Stormont (aussi en 2021). Dans les six comtés, on se considère moins protestant-unioniste et catholique-réunificateur qu'auparavant, et sensiblement davantage européen, comme les voisins du sud. À cela s'ajoute la progression démographique « catholique » qui commencera à se faire (faiblement) sentir lors des élections de 2021.
Au nord les Gilets bleus, à l’ouest les Gilets verts… Mais beaucoup plus déterminés et soudés que les Gilets jaunes français. Ce n’est pas durablement tenable.
Et puis, et puis, si le Royaume-Uni se réduisait à l’Angleterre et au Pays de Galles, les conservateurs seraient quasiment assurés de conserver très longtemps une majorité et Boris Johnson pourrait envisager peut-être trois-quatre mandats de suite. Tentant… Et après tout, le Bojo, qui a tourné sa veste Remain pour endosser une Leave afin de piquer sa place à Theresa May, pourrait retourner son trench pour montrer une doublure en tissu écossais (en tartan du clan Maguire, du comté nord-irlandais de Fermanagh, par exemple).

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