lundi 7 octobre 2019

De sac et de Kurdes...

Grandement merci à une famille kurde

Un blogue-notes perso, c'est pour certains l'occasion de parler de soi abondamment ; pour moi d'évoquer d'autres choses. Mais petite entorse avant d'aborder le lâchage-largage des Kurdes de Syrie par les États-Unis d'Amérique, ou plutôt ceux de ce frappadingue de Donald Trump.
Je ne sais plus quand je vous ai évoqué la fameuse 309 Chorus du triangle axonais des Bermudes (Chauny-Tergnier-La Fère). Et son enjoliveur aux abonnés absents. Merci à André, de Reims (pour simplifier) qui en a déniché un, mint state, sous emballage d'origine dans le sud de la France. Sans doute auprès d'un ex-concessionnaire Peugeot. 
L'ennui, c'est que pour le fixer sur la roue de secours qui remplace celle avant-droit... Mais, bon, je ne vais pas vous bassiner avec cela. Une solution sera trouvée.
Or donc, retour de la 309 avec sa conductrice et le coton de Tuléar (dont il fut aussi ici question, mais je ne m’appesantirai pas). Coton d'appellation malgache embarqué à bord à Fargniers (idem à propos de la maison de Fargniers) en... posant le sac à main sur le toit de la dite Peugeot 309 Chorus (parfait état, à peine plus de cent mille au compteur, mais je m'égare). Direction Chauny.
Vous devinez la suite...
Conductrice livide, coton (de Tuléar) ouvrant de grands yeux désolés...
On remonte donc dans la 309 (Peugeot Chorus, 30 ans aux cerises). Parcours inverse à vitesse réduite.
Tout à coup, une voiture dépasse, s'arrête.
Une famille de « Français moyens » : véhicule courant pas trop onéreux, conducteur et sans doute son père vêtus comme tout le monde dans le secteur (genre bonnes affaires d'Aldi ou de Lidl). Pas des rupins.
— « Vous cherchez un sac ? ».
— « Et même à main et à quatre mains », me retins-je d'ajouter.
Chauds remerciements, quasi-effusions, et refus d'accepter un billet de banque sorti quasi de lui-même de mon portefeuille. Le sac est, avec son contenu, portable, clefs d'habitations axonaises et parisiennes, documents divers, d'identité et assimilables, autres légaux (des histoires administratives), et somme assez rondelette retirée de la veille afin de durer toute la semaine. Mettons de quoi s'offrir à quatre ou cinq une formule dans un sympa restaurant routier.
On se quitte sur un « shoukran » (ou choucran ou...) de ma part.
« Non, nous ne sommes pas des Arabes, nous sommes Kurdes. ».
Franchement, depuis presque un quart de siècle dans le quartier parisien kurde (et turcophone), je me suis certes enquis de savoir dire « merci » en turc ou kurde, mais cela m'a échappé depuis. Penaud.
L'ami Ali (Algéro-marocain pour résumer), lui aussi habitué de longue date du quartier Strasbourg-Saint-Denis, ne s'est pas plus étonné que moi de l'attitude, pourtant assez exceptionnelle en France de nos jours (ah, ma pôv' dame, c'était mieux avant), de cette famille.
Pourquoi donc, alors que l'Assemblée débat de l'immigration, s'étonner encore que souchiens, ou immigrés de telle ou telle génération, puissent avoir les mêmes valeurs, faire partie de cette, de ces minorités prenant encore au mot la devise républicaine : « Liberté, Égalité, Fraternité ». On l'a amplement constaté par le passé (et « aux heures les plus tragiques de notre histoire », comme on dit), nous le constatons encore récemment, ce n'est pas la première fois (et nous nous souvenons d'actes héroïques d'Africains ayant porté secours à des adultes et des enfants ces dernières années).
Voici pas si longtemps, dans le Sentier Turc, ou La Petite Turquie, près de l'un des centres culturels kurdes de Paris, nous formions une sorte de communauté assez peu communautariste composite. Beaucoup de « Filles de l'Est » serveuses dans les bars maghrébins ou turcophones (pour résumer, approximativement, à l'intention des étrangers au secteur). Des nounous, des techniciennes de surface à équivalents bac+ (jusqu'à huit). Il y eut des mariages mixtes. Mes copines russophones (provenances ukrainiennes et autres incluses) sont reparties ou sont restées. Ont ou non obtenu la carte de séjour longue durée renouvelable ou la nationalité française. Elles reviennent parfois en « touristes » au Kibelé (fameux restaurant-espace d'expositions-petite salle de concerts et autres spectacles fréquenté par toute une diversité de gens d'origines diverses, françaises dominantes). Nostalgie du « bon temps » de celui des vaches maigres et d'une authentique convivialité. Avec aussi des Serbes, des Croates, des Kosovars, &c. D'authentiques réfugié·e·s politiques ou fuyant des massacres (et aussi, soyons lucides, des conditions de vie lamentables.
Le ton montait vraiment très, très rarement. Et on finissait par s'offrir des tournées.
La dispersion qui s'ensuivit fait que les Ukrainiennes et les « Russes » se battent froid parfois. C'est franchement dommage, mais cela s'apaise. Mais la solidarité de naguère s'étiole.
Ici, dans le quartier, elle subsiste. Avec une nouvelle composante, les Chinoises (ou assimilables de loin pour qui ne connaît pas grand' chose à l'Extrême-Orient). C'est bon de les avoir pour nouvelles voisines. 
D'accord, le quartier reste « privilégié ». Ce n'est pas le melting pot des siècles derniers à New-York (révisez Dos Passos, West Side Story, et le melting pot des années 1970 dans le Lower East Side laissait franchement à désirer : j'y étais, au retour dans la Grande Pomme, j'ai préféré fuir).
Ce qui m'amène au Donald. Au film de Fourest, Sœurs d'armes, qui ne sera sans doute pas projeté en Caroline (septentrionale et méridionale). Et digression, aux traducteurs afghans de l'armée française auxquels le statut de réfugiés fut dénié.
La morale de ce « De sac et de Kurdes » ? Attendez, ce n'est nullement une fable. Du factuel. 
J'entends parfois, je lis surtout des « qu'ils retournent chez eux ». Vas-y, chez elles et eux.
Je lis que le Donald laisse les coudées franches à Erdogan. En Ponce qui ferait bien de se faire des séances de pilates pour ne pas sombrer dans la sénilité ratiocinante. Le Donald s'en lave les pognes au désinfectant, des Forces démocratiques syriennes, des Unités (kurdes) de protection du peuple... L'ancien prévaricateur s'étant rempli les poches avec Daech (on ne sait combien Daech l'a rétribué, lui et sa famille, pour laisser passer des convois, d'armes, de vivres, de carburants, depuis la Turquie) peut faire foncer les chars, les jets de chasse et bombardements, faire jaillir le mélange des lance-flammes, transformer le terrain en brûlis vides de toute habitation.
Bref, refaire aux alliés des Jeunes Turcs les coups portés aux Arméniens.
Ingérence humanitaire un jour, repli économique et diplomatique celui d'après.
Cynique.
Johnson-Trump, Macron-Trump ? Franchement, je ne sais, je ne peux me prononcer. Je ne crois pas que les troupes françaises sont en mesure de faire semblant de remplacer les étasuniennes sur le terrain convoité par Erdogan (qui s'étendra bien au-delà d'un no-man's land). Je ne sais non plus si la France et l'Outre-Mer peuvent, selon l'expression de Michel Rocard, accueillir toutes les misères du monde. Je reste désemparé. Impuissant par lâcheté, autruchisme (impropre, l'autruche fuit et ne met la tête dans le sable que pour couver par la suite), ce que vous voulez.
Je voudrais simplement rappeler Denis Guénoun, invité par Annette Gardet à Reims et concluant son intervention à la médiathèque – c'était samedi dernier – en citant je ne sais plus qui : « ce que vous avez fait au dernier des miens, c'est à moi que vous l'avez fait ». Si je ne crois pas au jugement dernier, je crois que des erreurs vous reviennent à la figure. La passivité revient parfois en boomerang. C'est tout. Et s'il y a une prochaine fois, il n'y aura peut-être plus de famille kurde à s'arrêter...







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