vendredi 27 novembre 2020

Animosité policière : les policiers voulaient-ils tuer « Michel » ?

Le  voisin ayant filmé a-t-il voulu  nuire à la police ?

Le site Loopsider diffuse une nouvelle vidéo de l’intervention contre Michel Zecler. Elle provient d’un voisin qui a filmé d’autres policiers. Sera-t-il (autant que Loopser) poursuivi par la justice ?


Non, assurément, la police n’est pas raciste (d’ailleurs, si certains policiers tabassaient une petite blonde, cela ne ferait pas de toute la police une institution sexiste). J’ajoute que puisqu’il nous est répété que les violences policières n’existent pas et que les évoquer risquerait d’étouffer un ministre, employons à présent l’expression d’animosité policière (au singulier, car le pluriel laisserait penser à une généralisation abusive, alors qu’il s’agit toujours d’un cas isolé).

J’ai écouté Monsieur Darmanin expliquer que sur la masse des interventions policières, il n’y en aurait que 0,3 % suscitant des récriminations (fondées ou infondées, il n’a pas précisé). Je parle de mémoire, mais je considère qu’il s’agit là d’un argument recevable.

Or donc, sous le titre « Nouvelle pièce dans le dossier de l’agression de Michel Zecler », le site Loopsider diffuse une vidéo supplémentaire de l’intervention. Elle est pris en extérieur, par un voisin. On entend « dernière sommation après on tire » après qu’une voix déclare « justement, je sors maintenant ». On ne sait pas quels sont les policiers qui plaquent le sortant au sol ainsi que de nombreux autres, en arrière, restent en retrait tandis que l’un ou l’autre d’entre eux rejoignent leurs collègues.

La question n’est pas de savoir s’il y a automatiquement distinction entre un quelconque justiciable et un membre des forces de l’ordre : rester en retrait relève-t-il du délit de mise en danger de la vie d’autrui ? La question est absurde puisque la police ne peut par définition, mettre en danger la vie d’autrui (en cas de risque immédiat de blessures).

Ce qui m’inquiète davantage, c’est que ni ce voisin, ni les responsables du site n’ont pris la peine de flouter les visages de tous ces policiers. Certes, ils sont nombreux à être masqués, certes il fait sombre, non, un visionneur lambda ne saurait mettre le moindre nom sur un seul de ces visages. D’autant que certains sont trop loin de l’objectif et d’autres sont filmés de dos. Mais en agrandissant ? Allez savoir...

L’absence de floutage vaut-elle intention de nuire à des policiers, donc à encourir d’être poursuivi ?

Et puis, dire, comme on l’entend « je n’ai rien fait, je n’ai rien fait du tout, monsieur » constitue-t-il un outrage ? Ou une incitation à quoi que ce soit ? Employer un simple « monsieur » n’est-il point cavalier ?

Ce riverain déclare « ils auraient pu le tuer ». Par inadvertance, bien évidemment.

Je n’étais pas sur place, donc je ne me prononce pas, mais je me demande quand même si se poser des questions ne soulève pas le soupçon d’être un élément subversif et si le fait d’avoir exercé la profession de journaliste n’est pas une circonstance aggravante.

Évoquons aussi ce délit « de se maintenir dans un attroupement ». Qui doit estimer le maintien dans un tel attroupement et à quelle distance ? Refluer à la fin d’une manifestation, en groupe, même en respectant les règles de distanciation constitue-t-il une manifestation de se maintenir dans un groupe et à partir de combien constitue-t-on un groupe ?

Un éditorial du Monde met en cause la hiérarchie policière. C’est en accès libre.

Comment ne plus se maintenir dans un attroupement. En s’éloignant en marchant au risque de susciter l’idée que l’on nargue la police, ou en courant, au risque d’indiquer qu’on pourrait avoir quelque chose à se reprocher ?

Le mieux, évidemment, serait de ne plus s’approcher du moindre attroupement, de ne jamais prendre en photo ou de filmer un ou des policiers. Je suggère donc de ne plus couvrir le moindre attroupement, à commencer dans les stades où jusqu’à 22 ou 30 personnes se réunissent, et de ne plus diffuser d’images de la moindre manifestation policière, que ce soit lors d’une commémoration ou d’une remise de décoration. Et puis, pour les faits divers, ne plus mentionner le moindre nom d’un policier devrait s’imposer. Un principe de précaution maximal devrait s’imposer de lui-même.

Relevons quand même les réactions de divers syndicats de police qui, même sans avoir entendu leurs collègues, les désavouent. L’un avait ouvert le ban, d’autres ont suivi. C’est assez insolite car nous étions plus habitués à des propos tels que ceux tenus par David Jacob, d’Alternative police (syndicat affilié CFDT) qui, ne connaissant pas le début de l’interpellation, appelle « à la plus grande prudence sur l’interprétation » qu’on peut faire des images diffusées.

J’aimerai signaler au camarade (je fus délégué du personnel journaliste CFDT) que le fond du problème est que, même si je peux imaginer que Michel Zecler aurait pu avoir un comportement, voire des paroles (semble-t-il du mode « je rentre chez moi », mais encore une fois, je n’y étais pas), on en vient à se demander comment interpréter cet appel à la « plus grande prudence ». J’ai eu à faire avec, professionnellement et individuellement, des policiers et des gendarmes affables, et ce n’est pas par crainte que je le redis. Aussi avec d’autres, mais cela restait dans l’acceptable ou l’excusable.

Et puis, Cher Camarade, la liberté de la presse consiste par exemple à pointer que des politiques ont favorisé des expressions communautaristes (notamment islamiques, voire islamistes) et d’estimer que, parfois, des responsables syndicaux, pour ne pas s’aliéner des votes, peuvent éluder les questions qui pourraient fâcher. Est-ce bien prudemment énoncé ou considérez-vous que c’est à vous seul d’en décider en votre qualité de policier ?

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