dimanche 8 novembre 2020

É.-U. : Trump propage encore sa pensée universelle

 Le trumpisme et la cocoricologie mineront  encore longtemps les É.U.

C’est relativement simple, lorsque, Breton de Paris, petit Blanc pauvre, je deviendrai l’un des dispensables « indigènes » de ce que deviendra la France (ou je ne sais trop quoi), eh bien, je m’y ferai. Car trop vieux pour aller me réfugier dans un réduit breton, en Guyane ou ailleurs, j’aurai fait mon temps. Mais je peux comprendre, et non approuver, que cet état d’esprit ne soit pas partagé par la Tumpland. Tentons donc, faute de mieux, d’en sourire. Mode Pensée universelle.


Je ne vais pas vous rabâcher que l’Associated Press (AP) ayant donné Joe Biden président des États-Unis d’Amérique, selon les usages de cet étrange État fédéral, c’est plié pour le Donald. Mais j’attire l’attention sur deux autres titres de cette même agence. « Les partisans de Trump refusent d’accepter la défaite » et « Trump a perdu, mais pas le trumpisme ». Trump, c’est Obélix sans Astérix. Et l’irréductible Donald va sans doute se voir un jour convaincu par une Falbala-Ivanka qu’il peut encore assommer des taupes avec des balles de golf bien ajustées. Certes, le Donald, sachant qu’il en est bien incapable, va plutôt tenter de persuader l’univers qu’il va avoir des milliers de taupes à son futur tableau de chasse (car Trump ne cherche pas à améliorer son par, mais à occire des taupes sur le parcours). La Trumpland fera sans doute quelques temps semblant de le croire. Puis une ou un autre viendra, plus persuasif. Une ou un plus convaincant, plus hargneux, encore plus pugnace.

L’ernnui, tel que je le pressens, et qui n’est pas un minime inconvénient, est que Trump va s’accrocher, si ce n’est à la Maison Blanche, à l’idée qu’il dispose d’une base suffisante pour reconquérir le pouvoir. Et il se trouvera bien quelqu’un·e pour faire semblant de le conforter dans cette certitude avant de le coiffer sur le poteau et convaincre la Trumpland qu’il a fait son temps, mais qu’elle ou lui réussira mieux que lui à l'incarner, cette envahissante et exportable Trumpland.

Biden et Harris savent qu’ils vont se retrouve héritiers d’une Trumpland pour laquelle c’est elle face au reste du monde. Et que pour que se la concilier, ce qui est d’autant plus nécessaire que même dans leur électoratdes fondamentaux de la Trumpland restent partagés, il leur faudra maintenir que le principe de l’Amérique d’abord (America first) les guide.

Trump va s’accrocher, s’enraciner autant qu’il le pourra dans sa « société du spectacle ». Il ne jettera pas le gant, quelqu’un·e le lui ravira. Biden-Harris devront faire avec, et ce, aux dépens, ce me semble, du réduit (ou rebut) européen, avec sans doute un peu plus de doigté que leurs prédécesseurs.

Ne vous déplaise, je suis fort conscient de divaguer, de vaticiner, sur le mode the end is near. Mais d’un, ce qui semble plausible, c’est que des gens qui vraiment cru qu’ils descendaient des Gaulois (en fait d’un peu tout le reste du monde) ont fini par se persuader qu’un Pétain, avec l’aide de Dieu, rétablirait l’ascendant des Gaulois. Il suffit de voir les réactions de la Trumpland aux tweets du Donald pour se rendre compte qu’après Trump, elle en adulera un autre.

Et de deux, je n’écris pas pour que vous vous lamentiez avec moi, mais pour tenter de nous faire rigoler.

C’est pourquoi je cesse de me prétendre expert en géopolitique pour céder la parole à un véritable expert. J’ai nommé, sous vos applaudissements, Mohammed Madjour. Comme il se définit sur son profil Facebook, c’est un « homme de science et Expert au service de la vérité et de la Justice » (sic, je préserve les capitales qu’il emploie). Il reste peu sceptique à propos de la fraude électorale imputée aux démocrates car il attribue la défaite de Trump à… l’Élysée. Tout s’éclaire.

En réponse à Donald Trump, il compatit avec lui, victime d’un complot international fomenté rue du faubourg-Saint-Honoré. C’est là qu’a été conçu le programme « Rendre l’Amérique misérable ». À un moment, je me suis dit, ce gars est comme moi, il écrit un peu tout et n’importe quoi, mais ne le pense pas vraiment. Ou, tel un Trump, s’auto-persuade qu’il peut penser, réfléchir sainement (prétention que je partage avant de me pincer pour revenir à une raison raisonnante). Eh bien non. Il est fort sérieux.

Son compte Twitter aligne des interventions du même tonneau. C’est « la désinformation et la manipulation française depuis 2016 » qui étaient à l’œuvre pour détruire Trump. La « Sorcellerie de l’Élysée » fut la plus puissante, en déployant les maléfices de la « cocoricologie ». Je n’invente rien. Car Trump n’a aucune chance : “Biden, will apply to him the program of the Elysee which wants to lock up the whole world in his comedy of cocorioco-logy of 2015!”. « Drôle d’époque», s’exclame Madjour. Eh oui, “les médias de l’Elysée avaient investi tout leur énergie négative. L’Amérique a succombé sous la puissance de la propagande et de la désinformation. ». Tout s’explique, tout devient clair.

Ce qui semble surtout limpide, c’est que ce monsieur a sans doute cherché en vain à se faire publier en France et que faute de trouver un éditeur, il lui faut une explication plausible, laquelle c’est évident provient de « la clandestine tribu de l’Élysée qui vit de la sorcellerie ».

Avant l’an 1996, une maison d’édition publiait à compte d’auteur, tous les délires qu’on lui adressait. La Pensée universelle a déposé le bilan. Je me souviens avoir reçu l’un de ses auteurs (une blague des confrères sans doute ou du chargé de l’accueil au siège du journal) qui me soutenait qu’il recevait des émissions de télévisions du monde entier derrière ses rétines. Une révélation qu’il avait tenu à partager grâce à La Pensée universelle. De 1970 à mars 1996, cette maison publiait environ 400 ouvrages chaque année. Les seuls manuscrits refusés (à peu près 4 %) l’étaient pour des raisons légales (écrits susceptibles de faire condamner l’éditeur). La plupart des livres publiés étaient des témoignages, des autobiographies, qui ne manquaient pas d’intérêt. C’est d’ailleurs pourquoi certains figurent encore aux catalogues de diverses bibliothèques publiques.

Madjour, comme Trump, n’est pas tout à fait ce qu’on appelait « un simple d’esprit ». Croyez-le ou non, voici seulement une heure, Trump s’est de nouveau exprimé pour redire que l’élection lui a été volée (on peut le croire sincère, il s’en est vraiment persuadé). Malheureusement, il attribue sa défaite aux traficotages des “big city machines” démocrates, et non pas à la sorcellerie élyséenne (qui peut contrôler à distance les machines à décompter les bulletins de vote, chacun sait bien cela).

Ce qui est gênant dans cette histoire, c’est que, voici encore quelques jours, nombre de démocrates ou indépendants voulaient émigrer à l’étranger (principalement au Canada). Depuis l’élection de Biden, nombre de trumpistes veulent se relocaliser en Alaska (État républicain). Pour tenter d’avancer une idée un peu sérieuse, espérons que l’administration Biden pourra faire en sorte que la pollution de l’Alaska n’aura pas de répercussions lamentables jusqu’au faubourg Saint-Honoré avant le plus longtemps possible.

Ce qui me semble raisonnable (cela m’advient parfois), c’est que la tâche de Biden-Harris devra consister à faire en sorte que la Trumpland, qui se sent annointée par un dieu à son image, puisse être convaincue que ce dieu n’a pas pour dessein de voir la planète qu’il est supposé avoir créé finir submergée, anéantie par la pollution. Ce n’est pas gagné d’avance.

Histoire de quitter l’avant-scène en beauté, Trump a réussi à faire passer un sondeur étasunien pour un britannique. En fait, le britannique Sunday Express avait confié une tribune à Patrick Basham, résident de Washington. Lequel soutient que les Afro-Américains et les femmes caucasiennes des banlieues sont restés jusqu’au bout des électeurs silencieux de Trump, faussant les sondages. Et que dans ce cas, seule la fraude électorale explique la victoire de Biden. Cet Étasunien pro-Trump devient, sous la plume de l’ex-président le “best pollster in Britain”. Pour tous les trumpistes ayant réagi à ce mensonge, c’est parole d’évangile. Jusqu’au bout, Trump ne croira que ce qui l’arrange, ne dira que ce qui l’avantage et quelle que soit l’évidence contraire, la Trumpland l’ovationnera. Et accordera une confiance absolue à qui lui succédera en utilisant les mêmes méthodes. Pour mémoire, c’est exactement ce qui se produit au Royaume-Uni avec le Brexit. Tous ses partisans restent persuadés qu’il instaurera leur paradis sur terre. Et si cela tournait mal, ne cherchez pas plus loin : les satanistes de l’Élysée peuvent toujours tout tenter, au final, le Mal sera terrassé. Mohammed Madjour, en ce dimanche de confinement, you made my day. J’ai bien ri. Demain ou après-demain, il sera toujours temps de pleurer si, en France, les complotistes de cet acabit deviendront majoritaires. Rappelez-vous le film Dead Poets Society (Cercle des poètes disparus). Carpe diem. Cueille le jour présent sans te soucier du lendemain (quam minimum credula postero diei).

vendredi 6 novembre 2020

Soutenir la librairie Shakespeare and Company (Paris)

 Anglicistes, avant de chercher sur Amazon…

Bien, je ne vais pas plagier le papier de Thoimas Adamson d’Associated Press faisant état de l’appel de Sylvia Whitman qui cherche à survivre aux conséquences de la pandémie et sauver sa librairie parisienne anglophone, Shakespeare & Company. Juste quelques souvenirs.


J’admets, j’ai plus fourgué des livres en anglais à Shakespeare & Company que j’en ai acheté là, alors que pourtant, j’adorais parcourir les rayons ou feuilleter gratis, confortablement assis, au premier étage. Le lieu est internationalement célèbre à plusieurs titres (consultez la page en français du site de la librairie pour comprendre qu’avouer en ignorer l’existence c’est proclamer qu’on connaît fort peu Paris).

Quand j’étais un jeune grand voyageur (autostoppeur, tendance beatnik ou du moins m’y assimilant), à chaque fois que je montais à Paris depuis ma province pour solliciter un visa dans une ambassade ou une autre (j’ai encore une page de visa du Royaume d’Afghanistan), je passais aussi à cette librairie, par exemple pour simplement consulter les petites annonces déposées sur des panneaux en façade (colocations, bons plans d’hébergement, tuyaux divers), ou dans le vague espoir de dragouiller dans un anglais encore approximatif.

En revanche, mon dernier souvenir marquant de la librairie remonte à environ une décennie. Le révérend Billy Hults, un ami, beaucoup plus connu en ses qualités de joueur de planche à laver, libraire d’ancien et journaliste-éditeur de Cannonball (Oregon) que de « religieux » agnostique (ou vaguement théiste) fut l’un des hôtes de la librairie. Comprenez qu’après tant et tant d’autres, il déroulait son sac de couchage sur le sol après la fermeture et le rangeait dans son sac à dos à l’ouverture. J’imagine qu’après le déconfinement, il sera possible de consulter sa page autobiographique sur place (les hôtes étaient conviés à en rédiger une).


Deux manières de soutenir cette véritable et vénérable institution. Commander des livres via son site (à venir se voir remettre sur place, 10, rue Saint-Julien-le-Pauvre, ou commander pour livraison à domicile), ou un café à emporter (37, rue de la Bûcherie, rive gauche, face à Notre-Dame). Question choix de livres, certes, c'esst plus restreint que sur Amazon (j’ai fait un test avec les livres de Tom Corraghessan Boyle ou TC Boyle). Mais tentez donc de vous faire héberger ou de lire gratuitement dans un entrepôt d’Amazon…

Vous pouvez aussi commander un bon d’achat (de 15 euros, par exemple, qui vous permettra d’acquérir, à réouverture, la tasse en céramique frappée du logotype de la librairie).

Bien, ce n’est pas que toutes les librairies indépendantes mériteraient moins votre soutien que celle-ci, mais franchement, l’imaginer être transformée en un Starbucks quelconque serait un crève-cœur.

Un mot sur l’article de l’agence AP cependant. Sylvia Whitman, à la suite du premier confinement, a épuisé toutes ses économies. Si les ventes en ligne ont fortement progressé, il semble que ce soient les dons sans contrepartie qui assurent l’ordinaire et les perspectives de reprise de l’activité.

J’avais déjà effleuré l’histoire de cette librairie à l’occasion d’une approche d’un article de Roger Vailland (alias Geores Omer), « la grande dame anglaise ». Puisque, confinés, vous avez du temps à tuer, je vous convie à le consulter. Histoire de vous replonger dans l’ambiance des débuts de la librairie. Cela devrait suffire à vous persuader que, vraiment, ce lieu et ses activités multiples restent essentiels à la vie parisienne ; n’en déplaise à un certain Stéphane Bern, je préférerai voir Notre-Dame rester en ruines que de constater que cette librairie soit reconvertie en une quelconque boutique (de mode, de restauration rapide). Et puis, Notre-Dame pourra attendre au-delà de cinq ans pour se faire refaire, tandis que pour Shakespeare & Co, il y a urgence.

É.-U. : une évangéliste fait parler les anges pour Trump

 Dieu a parlé à la conseillère spirituelle du Donald

Dur d’employer l’écriture inclusive pour « l’aumonier » de Donald Trump. Laquelle a feint de reproduire les propos (on ne sait si c’est en Tsonga, en Ndébélé ou Zoulou) des anges d’Afrique qui l’ont assuré que Dieu avait choisi Trump. Le Donald a trouvé sa Jeanne d’Arc, une linguiste polyglotte en transes.


Évidemment, le New York Post (pro-Trump) l’a soigneusement mise en valeur. Paula White-Cain, une télévangéliste évangéliste a martelé, en transes, à ses ouailles d’Apopka (Floride), que seules des forces démoniaques avaient pu faire remporter l’État du Wisconsin par Joe Biden. Mais que les États-Unis d’Amérique se rassurent, Dieu, par la bouche d’anges africains, s’est exprimé. Le Donald Trump, son élu, sera réélu.

Paula White-Cain est multimillionnaire, et un peu comme une Kardashian, deux fois divorcée, elle est à présent l’épouse d’un musicien de rock, Jonathan Cain (goupe le Journey), lui aussi sans soucis financiers. Il est présumé qu’elle fut choisie pour être la conseillère spirituelle de Trump et de la Maison Blanche parce qu’elle soutient qu’orpheline de père et abandonnée par une mère alcoolique, elle fut régulièrement violée dès l’âge de six ans jusqu’à son adolescence (pratique pour chanter les louanges d’un homme accusé maintes fois d’abus sexuels). Comme elle le serine depuis, « dire non à Trump, c’est refuser d’obéir à Dieu ». Passe encore. Mais, là, elle est montée de plusieurs crans.

Les évangélistes sont présumés pouvoir parler « en langues ». Et en pleine transe, la Paula s’est mise à entrecouper ses propos véhéments d’un charabia de vocables énigmatiques. C’est bien la preuve, veut-elle faire croire, que ces propos sont ceux d’anges africains. Mais d’autres « les voilà qu’ils viennent, les voilà qu’ils viennent ici », cette fois, « au nom de Jésus », mais d’Amérique du sud. Alors, archanges zoulous puis anges sud-américains survolant les États-Unis et bourrant les urnes pour Trump (par le truchement de réels électeurs vraiment chrétiens) ?

« J’entends le son — elle a su se retenir d’employer les mots trompettes ou cors — de la victoire. Le Seigneur dit que c’est dans la poche. Car j’entends victoire, victoire, victoire, victoire dans les corridors du ciel » (lesquels lui sont bien entendu familiers). Elle s’est retenue de faire parler en espagnol les anges d’Amérique du sud qui sont « envoyés à présent, dès cet instant. ». Sentez leur divine présence.

Les confédérations sataniques viendront-elles à bout des archanges et des nuées d’anges latinx ? Les démons démocrates égorgeront-ils les chérubins et autres séraphins (Qanon dépeint les démocrates en pédophiles sanguinaires) ? Dans ce cas, il appartiendra au peuple divin de la Trumpland de les venger, est-il de fait insinué.

Cela peut paraître tarazimboumant, abracadabradantesque, et ce l’est effectivement. Mais le site de l’hedomadaire protestant Réforme, fort sérieux, étaye en quelque sorte la « démonstration » de la pasteure néo-charismatique. Trump est peut-être un individu spirituellement imparfait, mais, à l’instar du roi perse Cyrus le Grand, il peut être l’instrument du divin. Réforme expose le raisonnement de Paula White, non pour l’étayer ou l’approuver mais en exposer le fondement crédible pour les évangélistes de la Trumpland. Pour eux, Trump peut arrêter le bras des « ennemis de Dieu » et faire en sorte que « leur plan échoue ». Certes, du côté des baptistes et d’autres, Paula White est plus que controversée. Mais pour elle et ses ouailles, il s’agit forcément d’hérétiques s’excommuniant d’eux-mêmes qu’il faudrait exorciser comme le soutiennent « les catholiques pour Trump ». Satan, sort du corps de Joe Biden et de ceux de ses cohortes d’incubes et de succubes.

Paula White a su aussi, dans sa transe, évoquer celles des rites vaudous en soignant sa gestuelle. Car il ne faut pas s’aliéner l’électorat afro-américain., mais au contraire le séduire. De même, faire intervenir des anges latinx est une bonne trouvaille. À la Maison Blanche, Paula White dirige une équipe de 35 religeux, tous rétribués par les contribuables étasuniens. Elle prêche une « théologie de la prospérité » car Dieu enrichit en dollars les plus fidèles d’entre ses fidèles et punit les tièdes, les mièvres, les timorés, qu’il plonge dans la misère tôt ou tard. Mais si on n’a pas le temps de rester confit en dévotions, une donation peut faire l’affaire.

Juste avant que Trump intervienne depuis la Maison blanche, cette nuit, selon CNN, l’un de ses conseillers aurait estimé que les perspectives (de réélection) sont faibles et « qu’il nous [la Trumpland] faudrait un signe de Dieu pour inverser la tendance ». Homme de peu de foi ! Mais enfin, le signe est venu, et Paula White a entendu les voix l’annonçant. Depuis, le bruissement des ailes des anges n'est pas devenu assourdissant. Mais pour qui veut l'entendre le moindre acouphène se transforme en certitude.

jeudi 5 novembre 2020

É.-U. : Trump se reconvertit en aboyeur de foire

 

Joe Biden va-t-il lui accorder une grâce présidentielle ?

Non, tout n’est pas plié et Joe Biden n’est pas déjà prévu parvenu à la Maison blanche en janvier. Mais le Donald doit déjà songer à sa reconversion en amuseur de tréteaux. Failli, il saura se trouver des parrains publicitaires.


Un ancien gouverneur-adjoint de Pennsylvanie a trouvé la bonne locution pour qualifier le Donald hurlant qu’il a vaincu son adversaire démocrate : a carnival barker. Soit un crieur de fête à Neuneu ou un aboyeur publicitaire de tréteau de centre commercial vantant des promotions à ne pas manquer.

Je me souviens des équivalents de mon enfance beuglant « petite jeunesse, ne vous bousculez pas, les tours seront plus longs » (auto-tamponneuses), ou « Et voici Louana, notre ravissante suédoise, dans le déshabillé de la Parisienne » (strip-tease), et encore « Alors, le militaire du bataillon de Joinville relève le gant du Bucheron des Ardennes » (combat de catch truqué). Jusqu’à la dernière minute (qui peut se prolonger longtemps), Trump le bateleur d’estrade s’égosillera.. En témoignent ses derniers messages sur Twitter, fort contradictoires. Pourquoi cesser de dépouiller des bulletins s’il est si sûr de l’avoir remporté ? Vous connaissez la réponse, je ne vais pas vous rabâcher mes précédentes explications.

Mais on peut s’interroger et enfoncer le clou. Dans l’Arizona, des trumpistes armés s’en sont pris à un bureau de vote de Maricopa pour exiger… que le dépouillement se poursuive jusqu’à son terme. Ce dans l’espoir que le vote pour Trump rattrape son retard. Dans une moindre mesure, des réclamations similaires ont été prononcées dans le Nevada. Mais dans le Michigan, c’est l’inverse, les pro-Trump réclament la fin du dépouillement. Bref, c'est “count the votes” là où cela arrange, et “Stop the steal” (arrêtez le décompte, cessez le dépouillement) là où cela dérange.

Il était, ce jeudi soir, effectivement envisageable que Tump puisse empocher les grands électeurs de l’Arizona, mais pour l’agence AP (qui donnait déjà 264 grands électeurs à Biden contre 214 à Trump), les projections en Pennsylvannie et en Géorgie semblaient problablement donner l’avantage final à Trump, provisoirement du moins. De toutes façons, comme Hillary Clinton, Biden remporte l’élection en voix (ou le popular vote, selon l’expression en cours).

Même cela, Trump, comme précédemment, vociférera que c’est faux, qu’il l’a emporté, que seuls les votes en sa faveur sont légitimes et tous les autres frauduleux, trafiqués, ou injectés en douce.

L’ennui, c’est que cela durera encore et encore. Certes, un juge de Géorgie a débouté les trumpistes de leur recours qui ne portait que sur un prétexte (53 bulletins présumés invalides, ce qui est contesté par les autorités locales). Mais ne serait-ce que pour sa postérité le « vrai Donald J. Trump » (son pseudo pour Twitter) voudra battre les estrades en se dénommant le « vrai président », le seul, l’authentique, celui qui n’a jamais rien perdu (mis à part quelques immeubles restant partiellement vides et quelques litiges réglés ensuite en coulisses). Donald Trump ne doit pas sa fortune à ses affaires foireuses mais à ses émissions de télévision, des contrats publicitaires (un peu quand même, plus récemment, à des nuitées dans ses hôtels ou golfs payés par les contribuables américains ou des évangélistes, des solliciteurs d'aides publiques).

Pour préserver l’avenir, certains élus républicains du parti d’avant désavouent « leur » président, et même Mitch McConnell, son âme damnée au Sénat, prend quelques distances. Même FoxNews (pro-Trump de longue date) crédite déjà Biden de 264 grands électeurs. Et laisse entendre qu’au Nevada et même en Arizona, dont on connaîtra les résultats dénitifs cette nuit, Biden devrait logiquement l’emporter. Mais il ne faut pas négliger la capacité de nuisance de Trump.

La perspective d’une défaite de Trump ne fait pas que des malheureux dans la Trumpland. Comme le relate le site The Daily Beast, de nombreux sites de soutien au Donald en appellent à des donations afin, prétendent-ils, de l’aider dans ses combats judiciaires à venir. Les casquettes pour Trump, « le vrai président » ou « Trump 2024 » (à moins que ce ne soit « Ivanka 2024 ») ne sont pas encore confectionnées, mais cela ne saurait sans doute trop tarder. J’avais reçu autrefois un maillot « la pêche aux moules »’(chanson popularisée par Jacques Martin), Trump en labellisera peut-être d’autres avec pour slogan « la pêche aux nouilles » et il les placera sur les marchés. Comme il le proclamait : « je pourrais tuer quelqu’un sur la 5e avenue et ne pas perdre des partisans ». Cela, il l’a prouvé, d’une élection à l’autre, il a progressé en nombre d’électeurs.

É.-U. :Trump l’escroc sait qu’il a perdu l’élection

La Trumpland soutient la triche de son veau d’or

Le parti républicain n’existe plus, ne subsiste que la formation trumpiste. Laquelle approuve sans réserve les manœuvres frauduleuses de Donald Trump, lesquelles ne datent pas d’hier.


La première mesure frauduleuse de Donald Trump remonte à juin 2020 avec la nomination de Louis DeJoy à la tête du service postal public (USPS). Déjà, Trump savait que les démocrates, en raison de la pandémie, pousseraient à voter par correspondance. DeJoy s’est donc attelé à démanteler les infrastructure du service postal (mise au rebut de centres de tri, suppression de boîtes postales, &c.). Donc, en dépit d’injonctions judiciaires, tout a été mis en œuvre pour que les bulletins de vote (provenant même d’un même État fédéré, a fortiori d’un autre et évidemment de l’étranger) ne puissent parvenir à temps dans les centres officiels de vote. Il en est d’autres, soit des « urnes » (boîtes de dépôts réservés) que les républicains ont multiplié dans des endroits sûrs (genre boutique vendant la paraphernalia Trump-Maga) et tenté de faire supprimer les autres, situés dans des comtés démocrates, surtout urbains. Ajoutez à cela, en vue de conserver une majorité au Sénat, le gerrymangering (charcutage électoral).

Quant à l’exigence de ne pas prendre en compte les bulletins de vote parvenus après le 3 novembre dernier dans les États qui en autorisent le dépouillement, la manœuvre est limpide. Le graphique de NBC portant sur ces États est plus que parlant.

Dans les districts ruraux, présumés voter massivement pour Trump, on a surtout voté en personne (moins de risque de contracter le virus, ou d’avoir à rester longuement en file pour voter). Donc, dans ces districts ou comtés peu peuplés, les résultats ont été plus rapidement proclamés, laissant penser que Trump l’avait emporté. Et la grande, parfois colossale masse de bulletins présumés démocrates provient des agglomérations urbaines.

Bien évidemment, pour un État comme l’Alaska – Ankorage et son aire ne concentrent que quelque 400 000 h, sur un peu plus de 730 000 pour tout l’État – , le phénomène est marginal car même les urbains votent fortement pour les républicains. En revanche, en Pennsylvanie, Georgie, Arizona et Nevada, il est évident qu’une majorité de la population réside dans des villes et agglomérations importantes (c’est un peu moins marqué en Caroline du nord).

Les Trumpistes savent fort bien qu’il en est ainsi. Mais voyez ce que les bons chrétiens (évangélistes, fondamentalistes) et les nuques rouges (les « bouseux ») soutiennent. Le titre du New York Post (pro-Trump) est éloquent : « Biden peut bien voler une élection au profit des élitistes, mais les démocrates vont le regretter »). Cette tribune de Miranda Devine serait à hurler de rire ; elle soutient en substance que les milliardaires, les patrons de la Big Tech, de la presse généraliste de portée nationale sont tous des communistes, des antipatriotes, mais que, quoi qu’il advienne Trump (présenté tel le Sauveur, le Prophète), grâce au Sénat et à la Cour suprême, paralysera les « traîtres », et que ce n’est que partie remise (elle ne va pas jusqu’à indiquer que ce sera avec Ivanka Trump dans quatre ans ou auparavant, avec des milices lynchant les dirigeants démocrates). J’exagère à peine mais il ne faut pas être grand clerc pour lire entre les lignes de la prose pro-famille Trump.

Ce qui est indéniable, c’est que même si la Trumpland parvenait à ses fins (maintenir Trump au pouvoir), comme lors de l’élection précédente, même si Trump a effectivement progressé en voix (c’est assez simple, du moment qu’on fait beaucoup d’argent, présumément car Trump est au bord de la faillite, même Al Capone aurait passé pour un bon président capable de relancer l’économie), il perdra le « vote populaire » comme ce fut le cas précédemment face à Hillary Clinton. C’est déjà patent avec 89 % des bulletins validés. Le dépouillement tardif devrait accentuer l’écart. La Trumpland le sait, n’en a cure, car elle se persuade d’être d’essence patriotique divine : la secte est devenue une religion.

C’est Trump-Jésus contre Biden-Satan donc si des compatriotes ont voué leurs âmes à Satan, il faut les sauver malgré eux. Sauf que pour la Trumpland, l’exorcisme, c’est souvent avec un colt en guise de goupillon. Certes l’intégralité de la Trumpland n’en est pas à ce point, mais si les milices entraient en action, elle entonnerait Onward Christian Soldiers et applaudirait chaudement, avec Trump en meneur de claque, comme il l’a déjà fait.

Cela peut sembler insensé mais un vieil ami, vétéran du Vietnam dans les Marines, prof d’histoire en fin de carrière, résolument anti-Trump, m’écrivait voici deux jours “my guns are loaded, and I’m ready”. Non pas à provoquer les trumpistes mais à se défendre et forcer leurs barrages s’il le faudra. 

vendredi 23 octobre 2020

Biden-Trump : le pire de Trump reste toujours son meilleur

 La Trumpland satisfaite par son débatteur de Donald

Cette fois, j’ai veillé tard pour visualiser le second et ultime débat présidentiel confrontant Joe Biden à Donald Trump. Le Donald se révéla, pour la circonstance, à son meilleur, mais c’est sans doute en coulisses que se jouera l’issue de l’élection dans x jours.


C’est simple, Trump sait toujours mentir avec un indéfectible aplomb, soit qu’il soit persuadé de la véracité de ses arguments, même mensongers, soit qu’affabulations ou exagérations outrancières parfaitement assumées sur le ton de la plus forte conviction et sincérité lui donnent presque toujours l’avantage en matière de spectacle. Cette fois, de plus, il a su se couler dans le personnage capable d’assumer la fonction présidentielle. Il a su se retenir de gesticuler, invectiver, vociférer (aidé par le fait qu'alternativement, les micros des deux hommes étaient coupés).

Bien évidemment, la Trumpland se dispense totalement de se livrer à la fastidieuse vérification des faits qu’il avance, ou si, par hasard, ses partisans se trouvent confrontés à des informations recoupées, les évidences sont immédiatement disqualifiées. Joe Biden n’a pas démérité, fort peu bredouillé, n’a pas commis de gaffe majeure, et il conserve donc son avantage dans les sondages un tant soit peu sérieux. On sait ce que valent les sondages quand, en fait, seuls ceux portant sur une demi-douzaine d’États doivent être réellement pris en considération avec une marge d’erreur d’autant plus importante que les taux sont serrés.

Mais à moins de deux semaines du jour de clôture du scrutin, tout peut encore se jouer en périphérie.

Les accusations fondées visant Hunter Biden, le fils de l’ex-vice-président (présumé par Trump de s’être considérablement enrichi en se servant de son nom à l’étranger, allégations en partie fausses ou fabriquées et formidablement exagérées) forment un nuage de fumée épaisse qui n’est que le précurseur d’un autre feu bouté. Très longtemps, avant même sa nomination, Joe Biden était soupçonné de nourrir un faible pour le charme des mineurs des deux sexes. Ce fut le “pizzagate” visant les démocrates soutenant Hillary Clinton. Des orgies dans le sous-sol d’une pizzeria. L’accusation ne reposait sur rien, il en est de même pour Hunter Biden mais il suffit de répandre que son présumé ordinateur contenait des photos compromettantes et de le répéter sans cesse, ce que fait, selon NBC et d’autres sources, des sites créés par des ex-associés de Steve Bannon (l’un de ces sites est Revolver News), et que des supports de presse plus crédibles y fassent simplement allusion pour que la rumeur, relayée à des dizaines de milliers de messages sur les réseaux sociaux finisse par passer pour une certitude. Et si Joe Biden soutient publiquement son fils, dément, « c’est bien la preuve qu’il en est ». Trump se fait d’ailleurs l’agent commercial de Revolver News auprès de la Trumpland. La fumée s’épaississant, dans le doute, faute de ne plus voter pour Biden, une partie de l’électorat indécis ou faiblement démocrate pourrait s’abstenir.

L’autre facteur en coulisses, aussi pointé par une tribune parue sur le site de NBC, c’est qu’une forte croissance d’actions judiciaires menées par les républicains visent à faire invalider ou ne pas prendre en compte une partie notable des votes par correspondances. Et sur les 400 actions judiciaires entamées, près d’une centaine sont déjà diligentées dans trois États cruciaux pour Trump (Texas, Caroline du nord, Pennsylvanie). À cela s’ajoute les décisions de gouverneurs républicains de limiter le nombre de « boîtes posiales électorales » publiques (on dépose son enveloppe de vote) et les inévitables délais de l’US Postal Service (délais sciemment allongés par la direction nommée par Trump).

Certains bulletins postés avant ou le 3 novembre pourront donc être poubellisés car parvenant trop tard.

Là où le résultat serait serré, ce ne sera pas du tout un facteur marginal.

Or, les démocrates, en raison du covid, ont dans un premier temps incité leur électorat à voter par correspondance.

Enfin, on connaît l’adage étasunien “if it ain’t broke(n), don’t fix it”. Or l’extraction pétrolière et du gaz de schiste maintien des emplois. Joe Biden en a pointé les inconvénients sanitaires et répété que la transition énergétique créerait beaucoup plus de nouveaux emplois. Et si Biden est donné en tête dans les sondages globalement (en raison du virus et d’autres sujets), sur l’économie, Trump le domine (de peu, mais l’électorat croit toujours que sa fortune provient de ses immeubles et golfs et non pas de ses anciens juteux contrats publicitaires, très peu d’électeurs peuvent se faire une idée de ses dettes et de la fragilité de son groupe).  Dans un pays où neuf petits États, en majorité ruraux, cumulent autant de grands électeurs (55) que la Californie à populations respectives inégales (40 millions pour la Californie, moins de 30 pour ces neufs États réunis), Trump conserve de fortes chances de l’emporter.

L’autre facteur, c’est qu’entre la perspective de mourir ou de rester handicapé du fait du covid (cela n’arrive qu’aux autres d’ici l’élection) et celle de devoir vendre son véhicule ou son habitation pour toute autre raison, les promesses de Trump peuvent sembler plus attrayantes que celles de Biden. Les deux risques sont pourtant liés,  mais les illusoires assurances de Trump (vaccin, traitement imminents, majorité de cas bénins, essor économique). Tandis que Biden, les républicains et affidés le martèlent, ce sera forcément l'apocalypse économique. 

jeudi 1 octobre 2020

Biden-Trump, un débat révélateur du déclin étasunien

De quoi vouloir quitter cette foire d’empoigne

C’est à tête reposée que j’ai visionné le prétendu « débat’ » entre Joe l’endormi et le Donald vociférateur. L’issue de ce désespérant spectacle semble claire, ce pays devient encore moins vivable.


Vous trouverez sans doute assez de commentaires sur le pugilat verbal entre Trump et Biden dans la presse française, donc, autant vous épargner d’autres détails sur les manières des deux adversaires. En revanche, ce que n’ai pas trouvé relevé par la presse française, mais que la presse anglophone a su mettre en relief et vaut, je crois qu’on s’y attarde.

Jusqu’à hier, il fut fort rare qu’un débat électoral étasunien porte sur l’environnement. À propos des incendies des États démocrates de la côte ouest, Trump s’est contenté de mettre en cause une mauvaise gestion forestière, ce qui n’est pas totalement faux. Biden s’est abstenu de relever que les États républicains bordant le golfe du Mexique ou faisant face aux Bermudes et exposés aux ouragans dévastateurs ne savaient pas gérer l’Atlantique. Trump a justifié le retrait de l’accord de Paris par sou souci de préserver les revenus des entreprises et d’éviter aux ménages des surcoûts exorbitants en dépenses d’énergie. Biden a clairement rétorqué que les énergies propres renouvelables généreraient des emplois par milliers et feraient baisser les factures, ce qui reste à démontrer mais peut être envisagé. Trump s’est engagé à faire planter un milliard d’arbres (voire mille milliards). Pour le moment, celui qu’il avait lui-même planté en compagnie d’Emmanuel Macron face à la Maison blanche en avril 2018 n’a pas survécu. Trump proclamait déjà la même ambition en février dernier. Mais pour le moment il a surtout proposé d’ouvrir le parc national de Tongass, en Alaska, à l’exploitation par les scieries. Mais glissons… Toujours est-il que Biden s’est sans doute rallié des opinions écologistes (du moins chez les abstentionnistes, car son électorat est déjà plutôt écolo).

Sur le sujet de la loi et de l’ordre, Trump s’est targué du soutien du sheriff de Portland. Le journaliste chargé d’arbitrer le débat n’a pas relevé que Portland n’avait pas de sheriff mais la modération est venue par apprès avec un tweet du sheriff du comté de Multnomah, qui inclut Vancouver et Portland en Oregon, lequel sheriff a précisé qu’il n’avait jamais et partisan de Trump et même qu’il le désavouait.

Apparemment, soutenir des milices blanches suprémacistes ne vaut pas à Trump le soutien inconditionnel de toutes les forces de police, comme il le prétend sans cesse.

De toute façon, la Trumpland n’accorde aucun crédit aux propos de Biden et a considéré que le journaliste, pourtant employé par Fox News, avait favorisé Biden. Trump a d’ailleurs estimé par après qu’il avait débattu à deux contre un (lui contre Biden et Wallace, le journaliste).

J’avais déjà remarqué précédemment un article du Devoir portant sur la très forte croissance de l’immigration au Canada depuis les États-Unis tout au long de la présidence Trump. Le Tech Times a relevé qu’au court du débat, les questions sur Google portant sur les moyens de s’installer au Canada ou d’en obtenir la nationalité avaient afflué. Les courbes Google Trends ont révélé des pics (provenant surtout des États limitrophes, en particulier les frontaliers de la région des grands lacs, mais aussi dans une moindre mesure de ceux du Sud, Texas et Floride inclus). Divers sites de presse en ont fait état mais pour la Trumpland, soit il s’agit d’une fausse nouvelle, soit la réaction est du type « bon débarras ». Ce type de questions aurait cru constamment durant les quatre heures du pugilat. L’ennui, pour les candidats à l’émigration est que la situation sanitaire due au covid rend difficile le passage à l’acte. Et Trump semble vouloir les prendre en otages, au moins jusqu'au printemps quand, selon lui, le virus s'évanouira ou qu'un vaccin sera distribué largement par l'armée.

D’un point de vue européen, les deux candidats ont davantage perdu que gagné avec ce non-débat qui évoque davantage deux monologues entrecoupés d’invectives. Pour la Trumpland, sans surprise, le Donald a largement dominé le débat (avec un léger bémol de la part d’un chroniqueur du New York Post qui a estimé que Trump s’est montré un peu trop agressif sans parvenir à entraîner Biden sur son terrain). Trump s’est évidemment auto-congratulé et a estimé que Biden avait perdu l’appui de la fraction ultra-gauchiste de son électorat (ce qui semble discutable, du moins, électoralement à court terme). Je retiens surtout, mais ce n’est pas une surprise, que Biden a esquivé le sujet de la politique étrangère et que Trump a omis de se déclarer futur Prix Nobel pour la paix. Boris Johnson a sans doute été déçu par ce débat, un accord commercial avec le Royaume-Uni ne semble pas prioritaire..

Théoriquement, il reste deux occasions de débats. Théoriquement, car même si les démocrates affirment vouloir maintenir les deux rencontres suivantes, ils pourraient changer d’avis et laisser Trump faire le paillasse (Biden l’a qualifié de clown) dans son coin. Pourquoi débattre avec un sociopathe, s’est interrogé un journaliste, ajoutant que l’image des États-Unis à l’étranger avait été écornée.

Mon ressenti est que Trump peut remporter l’élection. Certes, le débat a favorisé les fonds de campagne de Biden, car les dons ont afflué (3,8 millions d’USD en à peine une heure). Mais je ne suis pas sûr que les donateurs iront aux urnes entourés de miliciens pro-Trump lourdement armés et agressifs. Et s’ils votent pas correspondance, Trump est fort capable de maintenir que leurs bulletins sont truqués.

Mais si on peut estimer que Trump fut pareil à lui-même, et que Biden a su se maintenir à peu près calme, il n’est pas sûr que ce dernier a vraiment pu enthousiasmer ses électeurs ni convaincre les indécis. Cela étant toute la stratégie de Trump a consisté à pousser Biden à la gaffe, à bredouiller, à paraître sénile, confus, et il n’y est pas parvenu. Autre élément notable, Trump s’est senti, par après, obligé de se distancer des Proud Boys « je ne sais pas de qui il s’agit », a-t-il déclaré, sans doute embarrassé par diverses réactions dans les rangs républicains traditionnels. Autant avouer qu’il a, lui, gaffé. C’est en tout cas ce que son équipe de campagne a estimé après avoir constaté que d’éminents républicains souhaitaient une clarification ou un désaveu de sa part. Si les deux autres débats sont maintenus et que Trump commet d’autres bourdes sans que Biden en aligne, cela pourrait changer marginalement la donne. Et cette élection sera serrée en dépit des sondages donnant, comme autrefois à Hillary Clinton, à Biden l’avantage.

mercredi 30 septembre 2020

Le rouge « les anglaises débarquent » révélé par Pantone

 

La menstruation a sa couleur dans le nuancier

Histoire de tuer le temps avant le débat Trump-Biden (03 :00 à Paris), parlons colorimétrie tout en nuances. Un rouge Period (menstruation) vient d’être ajouté au nuancier Pantone. Ttès proche du rouge républicain de la Trumpland, à mon humble avis.


Ouvrez Photoshop, et vous verrez que divers nuanciers sont proposés. Mais le plus connu reste le Pantone (qui en version papier, coûtait un bras). Cela ne sert pas que pour choisir une peinture, mais pour l’impression (en particulier des publicités : le logotype ne respectant pas le Pantone™ pouvait être un motif de négociations des futures annonces, ou justifier de ne pas payer). Je sais : qui ne fut pas du ou des métiers du graphisme ne peut imaginer ce que tout cela peut encore impliquer. Cela va du choix des écrans, des sondes chromographiques (ou je ne sais plus quelle appellation), aux profils PDF certifiés pour l’impression.

Or donc, voici un rouge règles ou ragnagnas, labellisé Pantone. Paraît-il afin de rendre les femmes fières de leurs menstruations. Perso, n’ayant jamais accordé d’importance à la question (pour être clair : ayant toujours considéré que du sang est du sang, et n’a rien d’impur d’où qu’il proviennet), il est bien clair que je me contrefiche qu’un rouge soit déposé, et je ne vais pas polémiquer à propos de sa position sur une roue chromatique. Ni chercher quelle est sa complémentaire, a priori, un truc écolo, vert ou verdâtre.

Pour paraphraser Jacques Chirac, cela ne me remue ni l’une, ni l’autre. Cela tout en trouvant cette initiative publicitaire pas si mal venue. Car je me souviens de ces publicités pour des tampons ou des serviettes montrant un liquide bleu présumé mieux absorbé par les produits de telle ou telle marque. Après je ne sais plus quoi lavant plus blanc, je ne sais plus kekchose absorbant plus bleu.

Les couches des bébés translucides et les serviettes hygiéniques teintées de bleu. Hilarant.

Bien quel lien avec le débat Trump-Biden. Carrément aucun. Encore que… Je ne sais quelle couleur Trump va invoquer pour stigmatiser Biden, « dément sénile » selon la Trumpland, incapable de tenir un débat sans prompteur ou oreillette, trop vieux pour tenir la durée du débat sans petite sieste, et piqûres d’amphétamines ou je ne sais quoi. Biden n’est plus, aux yeux de Trump, bleu (couleur des démocrates), mais rouge (ou plutôt noir et rouge, anarcho-staliniste ;genre Mélenchon, qui fut un socialiste très centriste modéré auparavant)

Je ne sais si vous êtes comme moi, mais j’ai l’impression très forte de vivre dans mon monde, celui que je préserve pour ma santé mentale, et un monde parallèle. Sur lequel je n’ai plus la moindre illusion d’influer.

Autre digression. Pour moi, la liberté de la presse est une cause perdue. Dans un premier temps, la presse écrite a voulu faire comme la presse télévisuelle. Un angle, un seul. Des radio-trottoirs à la Pernault. Puis est venu l’Internet. Et désormais de plus en plus d’articles réservés aux abonnés. Donc, vu le prix des quotidiens et hebdomadaires, plus personne ne lit les supports papier, et presque que personne ne s’abonne aux versions en ligne. Et de toute façon, une majorité de personnes ne sachant plus lire ne croient plus que ce qui s’affiche sur Twitter (facile à lire, car ultra-court). Ou mieux, audible sur YouTube (plus besoin de lire). Un angle, un seul, trois minutes d’antenne suffisent. Faux, bien sûr, la vie, les événements sont bien plus complexes. Mais les patrons de presse écrite, qui ne juraient un temps que par USA Today, ont tué leurs titres.

Mais revenons à Trump. Bien avant 20126 nous savions que c’était un failli en puissance. À présent, il es patent que son train de vie est celui d’une Kardashian, due à la publicité associée à sa renommée. Trump, c’est un peu comme un footballeur vedette. Toute la publicité qu’’il génère est payée par le consommateur, qu’il assiste ou non à des rencontres de balle au pied ou non, qu’il joue au golf ou non.

Tant que nous n’aurons pars compris que nous avons fait (ou laissé faire) Trump, nous en financerons d’autres. En France, le prochain Trump sera un Fillon ayant prétendument réussi dans l’immobilier ou toute autre activité.

lundi 28 septembre 2020

Amy Coney Barrett aussi catholique que Dupont de Ligonnès

L’élue de Ttrump (« élu par Dieu »), un choix électoral

Pas davantage quElysstal, Joan Walsh ou d’autres journalistes de The Nation, je ne vais comparer la secte catholique intégriste à laquelle se rattache Amy Coney Barret, People of Praise, de la secte familiale de Xavier Dupont de Ligonnès, l’Église de Philadelphie, en dépit de similitudes. En revanche, pointer que la nomination de “Notorious Barrett” est d’abord un argument de campagne électorale à court terme de Trump me semble valoir d’être relevé.


J’ai benné, poubellisé une précédente contribution, développant, par des exemples précis, la chronique de Pierre Lellouche dans Marianne « L’élection du chaos », qui emploie l’expression « guerre civile larvée ». Je développais pourquoi deux amis de longue date, Chuck et Donna, de Placerville (Californie du nord, proche du Nevada), envisageaient de s’installer en Europe (Espagne ou Bretagne) en cas de réélection de Donald Trump. Mais bon, hormis cet exemple personnel, un peu tout le reste est plus ou moins relayé par la presse française, alors, bof.

Mais c’est dans ce contexte qu’il faut envisager la nomination à la Cour suprême d’Amy Coney Barret, non pas, comme la presse française le souligne, dans la perspective d’un Trump voulant s’accrocher (“Twelve more years” à la Maison blanche), ou dans celle des révocations des lois sur l’avortement ou l’Obamacare. Ami Coney Barret est avant tout un argument électoral à court terme, un élément de sa campagne immédiate.

Je ne cherche pas à rapprocher sous l’angle théologique People of Praise et l’Église de Philadelphie, dite « Le Jardin », de Xavier Dupont de Ligonnès. Ce sont deux mouvements charismatiques cherchant à ratisser large. Mais aussi deux mouvements familiaux. Amy C. Barret et son mari, qui se sont connus à l’Université Notre-Dame (un temps jumelées avec la Catho d’Angers, ce qui me valut d’aller retrouver des amis sur le campus de Notre-Dame), sont tous deux des enfants de fondateurs de People of Praise. Des gens bien « rodés » et sur lesquels Trump peut durablement compter.

Sans doute surtout de parfaits hypocrites. Par exemple, opposée à la peine capitale, Amy Barret incite les magistrats partageant cette opinion à se récuser, ne pas siéger. Il ne lui est pas venu à l’esprit d’inciter les magistrats favorables à la peine de mort de faire de même. Autant laisser le champ libre à ces derniers.

Mais l’essentiel, pour Trump, c’est de provoquer les démocrates afin qu’ils s’opposent le plus fermement possible à cette nomination, si possible de manière outrancière. C’est d’ailleurs ce que les chroniqueurs de The Nation (aussi catholiques de formation qu’Amy Barrett) redoutent. Soit que les démocrates se focalisent sur l’appartenance religieuse de la future juge suprême.

Que désire Trump, exactement cela, afin que marteler que les démocrates sont des athées, « contre Dieu », voulant détruire les valeurs familiales, imposer une éducation areligieuse aux enfants, désireux de mettre fin aux libertés de culte, persécutant le clergé comme aux temps du stalinisme et de Mao. Plus les démocrates protesteront, plus il les comparera à des séides de Castro et de Maduro (qu’importe que la religion catholique soit tolérée à Cuba ou au Venezuela ou que Maduro favorise une partie du clergé catholique). Nous avions, en France, des plénipotentiaires pour les Pôles (et les pinguins). Les États-Unis ont Sam Brownback, ambassadeur extraordinaire pour la liberté religieuse internationale.

Bref, Trump est pro-Dieu, et cette nomination le proclame, partant ses opposants sont contre Dieu. Cela peut même aller plus loin, les Barrett ont adopté deux enfants haïtiens créoles. Si on les critique, c’est qu’on est raciste, en dépit de dénégations.

Ttump, pour cette nomination, avait d’autres choix, dont des personnes dites de couleur. La nomination de Barbara Lagoa, d’origine cubaine, aurait sans doute valu à Trump des voix de Latinx, mais elle ne s’est pas affirmée résolument pro-life et contre l’avortement, contrairement à Amy Barrett. En fait, Trump mise sur le cœur de sa base, nationaliste blanche et évangéliste. Un candidat juif, comme David Stras, était aussi envisageable. Trump a choisi une candidate « plus blanche que blanche » et surtout plus portée à réaliser le coup de lessive législatif réclamé par les évangélistes.

Trump s’appuie sur une base galvanisée, très physiquement présente dans chaque voisinage ou presque, et intimidante. Voire dissuasive. Ses partisans tentent aussi de retourner les arguments des démocrates sur la réponse face au covid en jouant sur l’exaspération due au confinement. On pourrait aussi penser que sa volonté affichée de contester les résultats d’une élection lui étant défavorable lui coûtera des voix. Le message est en fait « c’est plié », plus la peine d’aller voter, de voter par correspondance, abstenez-vous, quoi qu’il advienne, voter contre moi ne servira à rien.

Trump est persuadé que rien, aucun fait ne fera fléchir la détermination de sa base, persuadée que tout argument démocrate est une fausse nouvelle fabriquée par les médias de l’état profond. La campagne de Trump mise sur la peur du voisin et de la voisine. Et quand la voisine semble aussi propre sur elle et décente qu’une Amy Barrett, oui, il y a de quoi être effrayé. Élue par Trump qui s'est déclaré l'élu de Dieu (vous pouvez vérifier), on peut s'attendre à l'entendre inciter à prendre les armes pour assurer que son prophète (Trump) sauve l'Amérique. Exagération de ma part ? Mes amis californiens veulent encore le croire. Ils n'en croisent pas moins leurs doigts.

dimanche 20 septembre 2020

Retour sur Fornax et ses fourneaux des cours de l’Industrie

La Semaest voudrait renouer le dialogue ?

Je vous avais précédemment entretenu des tribulations de Christian Laudcou et Catherine Chauvel, sis, pour le moment, au 37 bis, cour des Industries, rue de Montreuil, à Paris. Je me dois d’apporter un rectificatif d’importance. La directrice générale de la Semaest, Emmanuelle Hoss, réfute sur Twitter que leur atelier de reliure et typographie (210 m²) un vrai musée de la typo et de la reliure, « serait en passe d’être expulsé ». Fort bien, mais autant en faire part aux intéressés.

Depuis mondernier article sur Fornax et Gutenberg & Cie, j’ai obtenu des précisions sur l’évolution de leur dossier auprès de la Semaest. Il importait de vous en faire part et c’est pourquoi j’ai mis en ligne un fort mauvais (du point de vue typo-graphisme) document résumant l’historique du lieu.

Pour les intéressés, avec lesquels je me suis entretenu au téléphone, leur situation reste inchangée. Ils signalent que, « le 23 septembre prochain, un expert nommé par le tribunal vient évaluer le montant de l’indemnité d’éviction. Notre inquiétude est au comble, nous avons deux enfants. ».

Mais tout espoir n’est pas perdu. Déjà, vous pouvez signer la pétition sur Change.org, pétition signalée sur le site de l’AEPM (Association of European Printing Museums). onglet « nouvelles ». Mais surtout, surtout, s’il faut en croire Emmanuelle Hosse, DG de la Semaest, cette pétition n’aurait plus lieu d’être.

Je n’ai, a priori, aucune animosité ou antipathie à l’endroit de cette sympathique patronne, que je conviais, dans mon précédent article, à exercer un droit de réplique. L’offre tient évidemment toujours. Mais puisque les informations étaient fausses, je fais part de ma totale contrition.

Ce droit de réplique, elle l’a déjà exercé à l’encontre et pour l'édification, sur Twitter, d’un certain Maître de conf’ (@Maitre_de_conf).
Son texte était : « Un atelier de reluire d’art (meilleure ouvrière de France) et de typographie, rue de Montreuil, en passe d’être expulsé par la SEMAEST (gestionnaire pour la ville de @Paris). ».

Réponse sur le même fil  d’Emmanuelle Hoss : « c’est faux, et je suis à votre disposition par mp pour vous en dire plus. C’est toujours difficile de lire des contrevérités et de voir le travail de toute une équipe engagée mis à mal de cette façon. ». Dont acte.

Qu’est-ce qui est faux, et contredit la vérité ? D’une part, on ne voit pas où et comment l’interlocuteur ou moi-même auraient mis à mal le travail de toute une équipe engagée, c’est là une interprétation. D’autant que tout le monde convient que la Semaest a de vastes tâches dont le sort de l’atelier Fornax et de Gutenberg & Cie n’est qu’un aspect. Un élément, mais surtout pas un détail de l’histoire du Livre, de la typographie et des métiers du Livre en leur ensemble. C’est, pour Paris, un élément essentiel et unique depuis le transfert des locaux de l’Imprimerie nationale, et pour l’Europe, ce n’est vraiment pas le moindre.


Pour Christian Laucou et Catherine Chauvel, c’est tout simplement vital. Ils donnent des cours, réalisent des animations, animent des ateliers. Toutes leurs principales relations commerciales et autres sont sur Paris. Le télédéménagement d’un tel patrimoine n’est pas à l’ordre du jour. Si Emmanuel Hoss a des solutions de télétravail pour la composition au plomb et la reliure, je suis aussi preneur. Et puis, comment transmettre ces savoirs par téléconférence ? Des cours et sessions de formation théoriques, oui. Le tour de main, c’est autre chose.

Si je comprends bien Emmanuelle Hoss, « c’est faux », non, l’atelier « n’est pas en passe d’être expulsé. ». Par conséquent, le tribunal n’envisage plus, le 23 prochain, d’évaluer le montant d’une indemnité d’éviction qui n’a plus lieu d’être. Je ne polémique pas, je certifie que, pas plus tard que tout à l’heure (18 heures, ce 20 septembre 2020), à trois jours de la date fixée par le tribunal, les intéressés ignoraient tout de ce revirement.

Sans préjuger de la sincérité d’Emmanuelle Hoss et de la Semaest je n’en attendrai pas moins qu’ils m’annoncent eux-mêmes la bonne nouvelle qui ne devrait pas tarder à leur être communiquée. En cette attente, qu’il soit constant qu’aussitôt ayant eu connaissance du message d’Emmanuelle Host, je me suis empressé d’en faire part, comme il se doit. Tous mes compliments à « toute l’équipe engagée » de la Semaest.