La Trumpland satisfaite par son débatteur de Donald
Cette
fois, j’ai veillé tard pour visualiser le second et ultime débat présidentiel confrontant
Joe Biden à Donald Trump. Le Donald se révéla, pour la circonstance, à son meilleur,
mais c’est sans doute en coulisses que se jouera l’issue de l’élection dans x
jours.
C’est simple, Trump sait toujours mentir avec un indéfectible aplomb, soit qu’il soit persuadé de la véracité de ses arguments, même mensongers, soit qu’affabulations ou exagérations outrancières parfaitement assumées sur le ton de la plus forte conviction et sincérité lui donnent presque toujours l’avantage en matière de spectacle. Cette fois, de plus, il a su se couler dans le personnage capable d’assumer la fonction présidentielle. Il a su se retenir de gesticuler, invectiver, vociférer (aidé par le fait qu'alternativement, les micros des deux hommes étaient coupés).
Bien
évidemment, la Trumpland se dispense totalement de se livrer à la fastidieuse
vérification des faits qu’il avance, ou si, par hasard, ses partisans se
trouvent confrontés à des informations recoupées, les évidences sont
immédiatement disqualifiées. Joe Biden n’a pas démérité, fort peu bredouillé, n’a
pas commis de gaffe majeure, et il conserve donc son avantage dans les sondages
un tant soit peu sérieux. On sait ce que valent les sondages quand, en fait,
seuls ceux portant sur une demi-douzaine d’États doivent être réellement pris
en considération avec une marge d’erreur d’autant plus importante que les taux
sont serrés.
Mais à
moins de deux semaines du jour de clôture du scrutin, tout peut encore se jouer
en périphérie.
Les
accusations fondées visant Hunter Biden, le fils de l’ex-vice-président (présumé
par Trump de s’être considérablement enrichi en se servant de son nom à l’étranger,
allégations en partie fausses ou fabriquées et formidablement exagérées) forment
un nuage de fumée épaisse qui n’est que le précurseur d’un autre feu bouté.
Très longtemps, avant même sa nomination, Joe Biden était soupçonné de nourrir
un faible pour le charme des mineurs des deux sexes. Ce fut le “pizzagate”
visant les démocrates soutenant Hillary Clinton. Des orgies dans le sous-sol d’une
pizzeria. L’accusation ne reposait sur rien, il en est de même pour Hunter
Biden mais il suffit de répandre que son présumé ordinateur contenait des photos
compromettantes et de le répéter sans cesse, ce que fait, selon NBC et d’autres
sources, des sites créés par des ex-associés de Steve Bannon (l’un de ces sites
est Revolver News), et que des supports de presse plus crédibles y fassent
simplement allusion pour que la rumeur, relayée à des dizaines de milliers de
messages sur les réseaux sociaux finisse par passer pour une certitude. Et si
Joe Biden soutient publiquement son fils, dément, « c’est bien la preuve
qu’il en est ». Trump se fait d’ailleurs l’agent commercial de Revolver
News auprès de la Trumpland. La fumée s’épaississant, dans le doute, faute de
ne plus voter pour Biden, une partie de l’électorat indécis ou faiblement
démocrate pourrait s’abstenir.
L’autre
facteur en coulisses, aussi pointé par une
tribune parue sur le site de NBC, c’est qu’une forte croissance d’actions
judiciaires menées par les républicains visent à faire invalider ou ne pas
prendre en compte une partie notable des votes par correspondances. Et sur les
400 actions judiciaires entamées, près d’une centaine sont déjà diligentées
dans trois États cruciaux pour Trump (Texas, Caroline du nord, Pennsylvanie). À
cela s’ajoute les décisions de gouverneurs républicains de limiter le nombre de
« boîtes posiales électorales » publiques (on dépose son enveloppe de
vote) et les inévitables délais de l’US Postal Service (délais sciemment
allongés par la direction nommée par Trump).
Certains
bulletins postés avant ou le 3 novembre pourront donc être poubellisés car parvenant
trop tard.
Là où le
résultat serait serré, ce ne sera pas du tout un facteur marginal.
Or, les
démocrates, en raison du covid, ont dans un premier temps incité leur électorat
à voter par correspondance.
Enfin, on connaît
l’adage étasunien “if it ain’t broke(n), don’t fix it”. Or l’extraction
pétrolière et du gaz de schiste maintien des emplois. Joe Biden en a pointé les
inconvénients sanitaires et répété que la transition énergétique créerait
beaucoup plus de nouveaux emplois. Et si Biden est donné en tête dans les
sondages globalement (en raison du virus et d’autres sujets), sur l’économie,
Trump le domine (de peu, mais l’électorat croit toujours que sa fortune
provient de ses immeubles et golfs et non pas de ses anciens juteux contrats
publicitaires, très peu d’électeurs peuvent se faire une idée de ses dettes et
de la fragilité de son groupe). Dans un
pays où neuf petits États, en majorité ruraux, cumulent autant de grands
électeurs (55) que la Californie à populations respectives inégales (40
millions pour la Californie, moins de 30 pour ces neufs États réunis), Trump
conserve de fortes chances de l’emporter.
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