vendredi 6 novembre 2020

É.-U. : une évangéliste fait parler les anges pour Trump

 Dieu a parlé à la conseillère spirituelle du Donald

Dur d’employer l’écriture inclusive pour « l’aumonier » de Donald Trump. Laquelle a feint de reproduire les propos (on ne sait si c’est en Tsonga, en Ndébélé ou Zoulou) des anges d’Afrique qui l’ont assuré que Dieu avait choisi Trump. Le Donald a trouvé sa Jeanne d’Arc, une linguiste polyglotte en transes.


Évidemment, le New York Post (pro-Trump) l’a soigneusement mise en valeur. Paula White-Cain, une télévangéliste évangéliste a martelé, en transes, à ses ouailles d’Apopka (Floride), que seules des forces démoniaques avaient pu faire remporter l’État du Wisconsin par Joe Biden. Mais que les États-Unis d’Amérique se rassurent, Dieu, par la bouche d’anges africains, s’est exprimé. Le Donald Trump, son élu, sera réélu.

Paula White-Cain est multimillionnaire, et un peu comme une Kardashian, deux fois divorcée, elle est à présent l’épouse d’un musicien de rock, Jonathan Cain (goupe le Journey), lui aussi sans soucis financiers. Il est présumé qu’elle fut choisie pour être la conseillère spirituelle de Trump et de la Maison Blanche parce qu’elle soutient qu’orpheline de père et abandonnée par une mère alcoolique, elle fut régulièrement violée dès l’âge de six ans jusqu’à son adolescence (pratique pour chanter les louanges d’un homme accusé maintes fois d’abus sexuels). Comme elle le serine depuis, « dire non à Trump, c’est refuser d’obéir à Dieu ». Passe encore. Mais, là, elle est montée de plusieurs crans.

Les évangélistes sont présumés pouvoir parler « en langues ». Et en pleine transe, la Paula s’est mise à entrecouper ses propos véhéments d’un charabia de vocables énigmatiques. C’est bien la preuve, veut-elle faire croire, que ces propos sont ceux d’anges africains. Mais d’autres « les voilà qu’ils viennent, les voilà qu’ils viennent ici », cette fois, « au nom de Jésus », mais d’Amérique du sud. Alors, archanges zoulous puis anges sud-américains survolant les États-Unis et bourrant les urnes pour Trump (par le truchement de réels électeurs vraiment chrétiens) ?

« J’entends le son — elle a su se retenir d’employer les mots trompettes ou cors — de la victoire. Le Seigneur dit que c’est dans la poche. Car j’entends victoire, victoire, victoire, victoire dans les corridors du ciel » (lesquels lui sont bien entendu familiers). Elle s’est retenue de faire parler en espagnol les anges d’Amérique du sud qui sont « envoyés à présent, dès cet instant. ». Sentez leur divine présence.

Les confédérations sataniques viendront-elles à bout des archanges et des nuées d’anges latinx ? Les démons démocrates égorgeront-ils les chérubins et autres séraphins (Qanon dépeint les démocrates en pédophiles sanguinaires) ? Dans ce cas, il appartiendra au peuple divin de la Trumpland de les venger, est-il de fait insinué.

Cela peut paraître tarazimboumant, abracadabradantesque, et ce l’est effectivement. Mais le site de l’hedomadaire protestant Réforme, fort sérieux, étaye en quelque sorte la « démonstration » de la pasteure néo-charismatique. Trump est peut-être un individu spirituellement imparfait, mais, à l’instar du roi perse Cyrus le Grand, il peut être l’instrument du divin. Réforme expose le raisonnement de Paula White, non pour l’étayer ou l’approuver mais en exposer le fondement crédible pour les évangélistes de la Trumpland. Pour eux, Trump peut arrêter le bras des « ennemis de Dieu » et faire en sorte que « leur plan échoue ». Certes, du côté des baptistes et d’autres, Paula White est plus que controversée. Mais pour elle et ses ouailles, il s’agit forcément d’hérétiques s’excommuniant d’eux-mêmes qu’il faudrait exorciser comme le soutiennent « les catholiques pour Trump ». Satan, sort du corps de Joe Biden et de ceux de ses cohortes d’incubes et de succubes.

Paula White a su aussi, dans sa transe, évoquer celles des rites vaudous en soignant sa gestuelle. Car il ne faut pas s’aliéner l’électorat afro-américain., mais au contraire le séduire. De même, faire intervenir des anges latinx est une bonne trouvaille. À la Maison Blanche, Paula White dirige une équipe de 35 religeux, tous rétribués par les contribuables étasuniens. Elle prêche une « théologie de la prospérité » car Dieu enrichit en dollars les plus fidèles d’entre ses fidèles et punit les tièdes, les mièvres, les timorés, qu’il plonge dans la misère tôt ou tard. Mais si on n’a pas le temps de rester confit en dévotions, une donation peut faire l’affaire.

Juste avant que Trump intervienne depuis la Maison blanche, cette nuit, selon CNN, l’un de ses conseillers aurait estimé que les perspectives (de réélection) sont faibles et « qu’il nous [la Trumpland] faudrait un signe de Dieu pour inverser la tendance ». Homme de peu de foi ! Mais enfin, le signe est venu, et Paula White a entendu les voix l’annonçant. Depuis, le bruissement des ailes des anges n'est pas devenu assourdissant. Mais pour qui veut l'entendre le moindre acouphène se transforme en certitude.

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