mercredi 4 septembre 2019

Brexit : l’Union européenne devrait accorder une prolongation ?

Le Parlement britannique demande un report du Brexit à janvier 2020

C’était prévisible, mais c’est plus net que prévu… Avec 29 voix d’écart, les députés britanniques ont repoussé l’éventualité d’une sortie de l’Union européenne sans accord. Reste à savoir, tard cette nuit, si la tenue d’élections générales sera ou non possible (une majorité des deux-tiers est requise).
Les débats à Westminster ont tourné rapidement au psychodrame (le pugilat autre que verbal a été évité). Boris Johnson a invectivé rudement son opposition élargie et le chef de file travailliste, Jeremy Corbin, en particulier. Un long débat a précédé le vote confirmant le refus de la majorité d’aboutir à une sortie sans accord. Surprise, alors que le Bojo avait été désavoué, en première lecture, la nuit dernière par 328 voix contre 301, l’écart s’est creusé (329 contre 300).
D’emblée, Boris Johnson avait éjecté 21 conservateurs… Ils n’ont pas rejoint les bancs des indépendants, ou ceux des libéraux-démocrates (l’un d’eux l’avait fait hier) mais sont restés à leurs places… D’où vient donc cette défection supplémentaire ? Theresa May, qui n’a pourtant pas été expulsée de son parti ? Non pas, mais Caroline Spelman (une ancienne secrétaire d’État, de 2010 à 2012).
Les conservateurs privés d’investiture et se représentant en cas de nouvelles élections ont quelques chances d’être réélus. L’électorat de leurs circonscriptions s’était prononcé pour le maintien dans l’UE, ou fut partagé à parts égales entre le Leave et le Remain, ou à une faible majorité pour le Leave, sauf une poignée (Margot James, ancienne ministre des Affaires culturelles, est en fait la seule dont le sort semble compromis). Car depuis le referendum, l’opinion s’est quelque peu retournée… contre non forcément la rupture, mais une rupture sans le moindre accord…
Reste à savoir (sans doute vers 23 heures) si Boris Johnson convaincra de la nécessité d’organiser de nouvelles élections. Il doit réunir une majorité des deux-tiers (434 votes). Le parti indépendantiste écossais veut des élections, une majorité des travaillistes veut attendre que la chambre haute, les Lords, ratifie la décision des Commons, puis que la reine l'entérine… De fait, ils se partageront sans doute. Ils voteront pour, contre, ou s’abstiendront. Deux députés travaillistes sont au nombre des 300 (285 conservateurs, les dix unionistes d’Irlande du Nord, trois indépendants). Mais les autonomistes gallois (du Plaid Cymru) ne veulent pas retourner devant leur électorat…
Farage, du Brexit Party, a chaudement approuvé la décision de Johnson d’expulser les 21 conservateurs « rebelles ». Un compromis entre les partis Tory et Brexit semble en bonne voie : les candidat·e·s n’iraient pas trop chasser sur les terres (les circonscriptions) gagnables des autres.
En attendant, les conservateurs promettent la Lune : plus de policiers, des fonds supplémentaires pour tout et n’importe quoi, et d’autres encore destinés aux circonscriptions favorables à un Brexit sans accord. Ces promesses resteraient à être concrétisées.
Resterait à savoir, si, comme lors du référendum, les Brexpats (les Britanniques résidant à l’étranger) pourront ou non voter, si leurs votes seront pris en considération ou non.
Voici peu (20:30, heure de Paris), les députés discutaient divers amendements…
Mais que Boris Johnson obtienne ou non des élections générales, ce qui est sûr, c’est qu’il a perdu beaucoup de sa superbe.
Il lui reste deux options… Intimer aux Lords de faire durer leurs débats indéfiniment (les Lords conservateurs se relayant pour jouer la montre), ne pas présenter la loi à la reine : elle n’entrerait pas en vigueur…
Et puis, si jamais il était désavoué encore cette nuit, il lui resterait à tenter de défier à nouveau la majorité parlementaire, en proposant une autre loi visant à ce que des élections se tiennent. Cette loi, pour entrer en vigueur, n’exigerait qu’une simple majorité. Dont il ne dispose plus, vraisemblablement.
La position de l’Union européenne reste ferme. Tout peut être discuté, sauf le backstop qui permettrait de ne pas rétablir une frontière entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord. À moins bien sûr que le Bojo sorte de sa poche une solution-miracle alternative que personne, en trois ans de négociations, n’a pu esquisser.
On en était là, et puis, peu avant 21 heures (Paris), coup de théâtre : le plan de Theresa May (incluant le backstop) a été revivifié par un amendement soutenu par Sarah Champion (Labour). Il pourrait être remis sur la table, après avoir été retoqué par trois fois.
Boris Johnson a repris la parole, affirmant de nouveau qu’on l’empêchait de négocier à Bruxelles en position de force, mais qu'il ne céderait sur rien… Il réclame que des législatives se tiennent le 15 octobre…
Corbin a rétorqué que, tant que la loi exigeant un report n'obtiendra pas l'approbation de la reine (donc deviendra effective), il s'opposera à toute convocation de l'électorat.
Il n'y a que Donald Trump à rester confiant... Il a déclaré à des journalistes que le Bojo s'y entendait pour l'emporter au final : « ne vous inquiétez pas pour lui ». Pas si sûr, à présent.

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