mercredi 27 novembre 2019

De l’hypocrisie des sociétés « musulmanes »


Pédophilie : deux lanceurs d’alerte afghans en prison

Inversez titre et sous-titre : vous serez moins lu. D’ailleurs, tant mieux, mais il s’agit d’un test. Diverses considérations ayant pour prétexte l’arrestation de MM. Musa et Hamadi, ayant dénoncé un vaste réseau pédophile de la province afghane de Logar…
Je n’ai pas du tout envie de « draguer » un lectorat religiophobe dont je partage la plupart des convictions (et non tous les modes d’expression).
C’est simple : dès que des prêtres, mais encore mieux, des imams, ou Tariq Ramadan, sont incriminés pour des faits à connotations sexuelles, vous avez tout un réseau de gens bien intentionnés pour vous rabâcher des faits largement traités par la presse.
En sus, je ne considère pas que le coran initial (s’il existât) prônait la pédophilie. Autre considération, renvoyant au Coran des historiens (cherchez…).
Incidemment, quand je vois, sur Facebook et ailleurs, soit d’autres réseaux sociaux, des personnes relayer des gros titres de la presse, je me demande si leur principal souci n’est pas de se pousser du col et d’obtenir leurs deux-trois secondes de dérisoire célébrité.
D’ac’, moi aussi, je me pousse du col. Mais je ne vais pas blablater sur des choses abondamment traitées par ailleurs, ou, du moins, sans avoir quoi que ce soit de plus (de mieux, c’est discutable) à mettre en relief (si, et uniquement si, j’estime que cela me paraît en valoir vraiment la peine, car, par ailleurs, I got, I still have a life). Ainsi sur le Brexit. Soit je devance, soit j’attire l’attention sur les à-côtés, les faits secondaires mais ô combien significatifs (enfin, à mes yeux).
Très facile (et racoleur), d’énoncer que, par exemple, on parle beaucoup de la pédophilie au sein de l’église catholique apostolique romaine (une parmi d’autres catholiques) et bien moins des cercles d’autres sectes (suivez mon regard : d’une obédience mahométane ou d’une autre).
Pratiquement toute société théophile est hypocrite. En priorité, celles monothéistes, ou cultivant le plus de tabous. Lieu commun, topique usé. Cela étant, voyez ce qui se passe en Inde. Mais je ne pas vais classer les sectes selon leur degré d’hypocrisie.
Mais amis de cultures musulmanes (athées ou musulmans) m’assurent que, de leur côté, c’est le pire du pire. Bien, nous avons toute une littérature des sociétés chrétiennes affirmant, pour elles-mêmes, l’identique. Classique. C’est quoi, le baromètre du pire ? La Shoah ou les Amérindiens (et massacres antérieurs) ?
Venons-en au fait. Je reprends un article du Guardian, repéré par Slate et le New-York Times dont, sauf erreur, je n’ai pas vu la presse française se gargariser.
Mohammed Musa et Ehsunullah Hamidi, de l’association Logar Youth, sont séquestrés par les autorités afghanes. Ils avaient le culot (j’allais écrire : l’inconscience, mais je présume qu’ils étaient persuadés des risques) de dénoncer des enseignants et des notables puisant dans le vivier de six établissements scolaires de la province. Caciques locaux filmant aussi les viols d’enfants pour exercer un chantage sur leurs victimes et leurs familles (qui, au passage, pour certaines, ont peut-être lavé leur « honneur », fui la province, ou mis à la porte la jeune victime : c’est cela aussi, la culture musulmane ; pas que, heureusement, voyez les jeunes algériennes, musulmanes ou non, se dévoilant).
Bref, inutile de paraphraser Slate. Et le résumé de Robin Tutenges. Vous suivrez ou non les liens, inutile que je poursuive : qui me lit habituellement sait grandement faire par soi-même.
Vous pouvez aller voir aussi du côté de Causeur (qui ne s’étend pas trop sur la pédophile dans le monde judaïque, mais bon, qui le ferait le cas échéant, si un rabbin, une rabbine, défrayait la chronique). Causeur cite l’imam Khattabi : « dans l’islam, la question, ce n’est pas une question d’âge, c’est une question pubère ou non pubère ». Comme chacun sait, il revient au pédophile de déterminer la puberté du garçonnet ou de la fillette. Ah bon, je me serai trompé, ben zut alors…
Hypocrisie aussi : dans les années 1960, au Maghreb ou Proche-Orient, je voyais fréquemment des adolescents se tenir par le petit doigt. Ce qui ne voulait pas dire qu’ils se masturbaient sous leurs aisselles respectives. Je n’en vois plus. Pernicieuse influence des sociétés occidentales obsédées par le sexe ? Conduisant à censurer des comportements autrefois couramment admis ?
Je sais : je déforme, je surinterprète. Car je m’exprime du côté du « Grand Satan ». Bonne blague.
Je ne suis pas plus islamophobe qu’autre chose. Je bouffe très modérément du curé, de l’imam, encore moins du pasteur calviniste ou luthérien (pour la plupart, des gens de bien, mais on en trouve partout), davantage du pasteur des autres sectes protestantes (et pour cause…).
Cela étant, on peut aussi être athée et pédophile (ou attiré par des jeunes gens ou jeunes filles de moins de 16 ans, sans pour autant rechercher leur compagnie plus que celle de personnes plus âgées). Ou succomber à un·e Lolita se faisant les dents, quelles que soient ses réticences initiales.
Je n’ai pas jeté la première pierre à Gabrielle Russier, ni la suivante ; j’aurais volontiers succombé au(x) charme(s) et à l’intelligence d’une Emmanuelle Macron (ici mentionnée pour le test : rédigé pour Google).
Suborneuse d’un adolescent ou cédant à son insistance (idem) ? Harceleur, va…
Revenons à nos moutons (ou plutôt boucs émissaires). Vous imaginez les féministes du monde entier les soutenir, ces deux lanceurs d'alerte ? Certaines, oui, assurément. La majorité ? Ah, ben non, d’autres chats à fouetter, des causes plus prioritaires.
Ce qui peut se concevoir. D’autant qu’on ne sait si les fillettes victimes prédominaient. Savant dosage.
Je ne manifeste plus, je ne signe plus de pétition (ou alors, ultra-parcimonieusement ; et laissé tomber l’appel pour un référendum sur les aéroports de Paris : quatre impasses, rejets, j’ai une vie par ailleurs). Mais je signale à toutes et tous que la tentation de vivre et laisser crever est alimentée par l’hypocrisie des unes et des autres.
Parfois, un sursaut : par exemple si Mohammed Musa et Ensunullah Hamidi, sortis des geôles, passant en France et « dublinés » se voyaient refuser l’asile. Je me contenterai de brandir une pancarte ou de signer une pétition. Hypocrisie : ou trouille, comme vous voudrez. De risquer de me faire tabasser si l’Afghanistan regorgeait de métaux rares exploités par des consortiums du CAC 40. Bon, je vais me coucher, comme je l’ai fait beaucoup plus de temps que j’ai fait preuve de courage, de conscience, d’esprit citoyen. Hypocrisie… Et prudence. Saluer le hirak risquerait d’être mal interprété
Et zut, je vais rater mon test : ceci ne sera pas fortement répercuté car trop ou pas assez ceci ou cela. Et surtout froissant Unetelle ou Machin.
Allez, c’est l’heure de la promenade du chien-chien (un coton de Tuléar, pour qui l’aurait oublié). Pourvu qu’il défèque sans trop souiller son chemin de crotte, ça, c’est essentiel.

mardi 26 novembre 2019

Paiement sans contact et calcul mental

Plus de monnaie rendue, plus de calcul élémentaire

Je me glorifie (je devrais m’en désoler) de mon 0,5 au bac, coef. quatre, en maths (pas besoin de calculer : 2 sur 80, je m'en souviens). Et je lance Google pour faire une règle de trois. Mais quand même, je sais quand même encore faire une simple addition ou soustraction. Jusqu’à ce que j’adopte le paiement sans contact ?
À l’oral de maths, au bac, le prof finit par me demander d’effectuer une division. D’un nombre à vingt-trente chiffres ou plus par un autre à une bonne dizaine, assorti d’une virgule… Stylo mâchouillé, puis reposé. Marooned.
Bon, il a doublé ma note, et cela n’a pas changé grand’ chose (reçu sans problème). Ce qui me qualifie fort mal pour déplorer que, présumément, l’extension du paiement sans contact s’accompagne d’une régression de la capacité d’effectuer de simples opérations (d’ac’ les XPonts résistent peut-être).
Depuis quelques mois et semaines, prenant une noisette à la terrasse de cafés, et payant en espèces, soit je fais le compte assorti ou non d’un pourboire, et tout va bien, soit je tends un billet.
Pour m’entendre plus fréquemment répondre :
— « désolé, je n’ai pas de monnaie, vous auriez une carte ? ».
Initialement, j’ai imaginé que le jeune garçon ou la jeune serveuse (bref des moins de trente ans ne semblant pas sortir de l’école de Lausanne ou du bureau de placement) rechignait à retourner à la caisse. Finalement, je me suis rendu compte qu’elle ou il était embarrassé d’avoir à rendre de la monnaie sur dix ou vingt euros…
Le summum, ce fut une jeune fille. Nous étions deux, prenant chacun une noisette à 2,60 euros. Sur 20 euros, elle rend je ne sais plus quoi… Mais pas 14,80 € (j’ai bon, là ?). On le lui fait remarquer. Nouvelle tentative, nouvelle erreur. À la troisième, nous restons coite et coi (cois, quoi !). Et même comme deux ronds de flan (de monnaie ou de dariole, comme vous voudrez). Elle aligne 17,40 €. Soit qu’elle nous offre une consommation sur deux.
Ma sympathie pour tout être encore moins doué pour le calcul mental qu’un chien de cirque ou une pieuvre sachant au moins recenser ses tentacules valut que, après un temps de latence, je la rejoigne pour lui tendre 2,60 € (en fouillant dans nos poches, nous trouvâmes 20 centimes). Étonnement non feint de la demoiselle.
Je tente d’expliquer :
   « Ah bon, ben… »
La logique arithmétique (je n’ose dire mathématique) me faisant défaut, je ne peux affirmer que trois-quatre exemples de ce type, plus un sensiblement différent, établit « l’équation » que payer sans contact (à partir d’un euro dans la supérette proche de chez moi) conduit à ne plus savoir compter mentalement.
N’empêche, je ne dois pas être le seul à m’interroger sur les répercussions de cette envahissante habitude. En témoigne ce visuel de la revue Private Eye
Légende : « du cash… Qu’est-ce que je peux bien en faire ? Je ne paye que sans contact. ».
Pas si grave. Quand l’intelligence artificielle permettra de nous implanter une puce, que la reconnaissance vocale ou de mouvement (pour 2,60 : ouvrir deux doigts, refermer la main, la rouvrir et lever le pouce de l’autre) sera devenue plus performante, le calcul mental aura disparu des émissions de jeux télévisés (l’émission « Des chiffres et des lettres » de Max Favalelli n’est plus mais « Le Compte est bon » subsiste… ou se survit). J’admets, pour qu’une ou un vocalement handicapé puisse diviser une fraction par une autre (ce dont je suis bien incapable), il faudra adopter des conventions gestuelles (peut-être enseignées en première année de Polytechnique, plus précocement en instituts spécialisés).
Pour le moment, même en cherchant bien, via Google, je ne parviens pas à savoir de combien le niveau de l’eau dans une cuvette cylindrique d’un diamètre d, contenant x litres, monte si on plonge un train miniature de poids p. Le site mathématiquesfaciles propose encore des problèmes de trains (pour ceux de baignoire, préférez peut-être lesplusbellesmaths), mais pour mon train miniature, je ne trouve pas la formule (que je pourrai contempler longuement sans trop comprendre ; fort euphémisme). Mais j’ai confiance en la technologie et chéris les vertus du progrès. Même plus la peine d’apprendre des formules « en dormant » (avec un micro haut-parleur ou un téléphone portable sous l’oreiller), un implant fera de moi un docteur Cosinus… Ce qui me fera une belle jambe et le teint rose avant de diriger le robot sèche-cheveux sur mon train miniature…

Brexit : Jeremy Corbin, idéale tête à claques

Corbyn, ou l’épouvantail de la presse pro-Leave

Amusant de voir Jean-Luc Mélenchon et LFI approuver la création d’un conseil déontologique de la presse française. Outre-Manche, Jeremy Corbin et le Labour n’oseraient pas. Et pourtant…
Je ne sais ce qu’il adviendra du futur Comité Machin-Bidule de déontologie journalistique qui rassemblera, semble-t-il, des apparatchiks syndicalistes retraités et des membres d’obscures associations corporatistes.
Cela ne vise personne en particulier (il n’y aura pas, loin de là, que des médiocres à siéger et déjeuner à nos frais à l’occasion). Cela sera-t-il un Comité Cachez-ce-sein-que-je-ne-saurais-voir (sanctionnant surtout la publication de photos de paparazzi par la presse pipeule) ?
Allez, je retire tout cela, ce n’est en fait qu’une mise en jambes, afin de mettre dans le ton des titres populaires ou « de caniveau » britanniques.
Lesquels, même faisant dans l’outrance, n’occultent pas tout à fait les infos contredisant leur ligne éditoriale, ne les dénaturent totalement qu’à l’occasion d’éditoriaux annonçant clairement la couleur.
De facto, l’IPSO (Independent Press Standards Organisation), chargée de faire respecter l’Editor’s Code of Practice — cette association est largement majoritaire mais The Guardian et le FT ont un équivalent de leur côté — est surtout un organe de médiation, sanctionnant peu. En général, il appuie surtout les demandes de droits de réplique ou réponse (de la famille royale, par exemple). C’est une sorte de club. Qui ne participe pas en tant que tel à la levée générale de boucliers dès que le gouvernement veut se mêler de mieux réguler la presse britannique…
Laquelle, surtout la presse populaire, ne mâche pas ses mots. Et se prononce clairement. The Sun, pour ne citer que lui, titre “Boris needs your vote (…) register today” (sur les listes électorales). Ce qui n’empêche pas ses journalistes de faire état de l’avis du Muslim Council accusant les conservateurs de « tolérer l’islamophobie ».
Ce qui survient après que le grand rabbin britannique ait considéré que les Juifs sont « noués d’angoisse » par la perspective de voir Jeremy Corbin devenir Premier ministre. Corbyn serait « antisémite ». Ah bon ? Aussi quand il exprime sa sympathie pour les sémites du Hamas ? Judéophobe ? En fait, pour une partie de la communauté juive (et non toute, voyez l’opposition de Juifs étasuniens à l’expansion des colonies israéliennes), toute critique de la droite israélienne vaut blasphème. Mais, admettons que Corbyn a souvent cherché des verges pour se faire fouetter. Sur une multitude de sujets (Cuba, Israël, &c.). Par comparaison, Mélenchon ferait presque figure de rad-soc méridional à l’ancienne.
Mais j’avoue que le traitement de l’épouvantail Corbyn est réjouissant. Même sur un tel blogue-notes, je n’aurais pas osé réserver le même à Jean-Marie Le Pen (que je ne me suis pas gardé de critiquer, et même dénoncer, avec vigueur). C’est dire.
The Sun encore : le Labour est une secte, formée autour du néfaste (toxic) Corbyn.
Pour le Daily Express, il se passe peu de jours sans qu’il ne soit remémoré que de très nombreux travaillistes fuient le Labour ou complotent pour renverser Corbyn. Car ultragauchiste, stalinien, dictateur en puissance si élu, machiavélique.
L’archevêque de Canterbury s’alarme en termes mesurés de ce que le grand rabbin s’alarme ? La presse pro-Leave conclut que, lui aussi, redoute que le Labour l’emporte. Mais n’en publie pas moins in-extenso ses très sobres déclarations totalement exemptes d’appel à voter pour un quelconque parti.
Ou elle fait état de l’avis de Lord Dubs (israélite tchécoslovaque réfugié à temps au Royaume-Uni alors que les nazis, après les Sudètes, s’emparaient de la Bohème et de la Moravie), exonérant Corbyn de tout racisme ou judéophobie.
Bref, la bagel belt (mettons « le vote juif ») n’est pas si unanime dans sa détestation de Corbyn. Même The Telegraph relaie l’info.
Autre angle d’attaque. Le Labour voudrait que les programmes scolaires éclairent de manière plus approfondie la période de la colonisation britannique. Donc, Corbyn veut embrigader les chères petites têtes (blondes, brunes, rousses) et leur inculquer la repentance des “evils of the British Empire”. En Égypte et Palestine aussi ? En sortant la déclaration Balfour des programmes ?
Le Telegraph et l’Express dénoncent le plan forcément secret du programme du Labour visant à faire en sorte que les futurs retraités retardent de près de trois ans et demi leur départ en retraite. Soit à l’approche de leur soixante-dixième année (âge envisagé par les conservateurs, selon une fuite d’un service gouvernemental, ce qu'on oublie de rappeler).
Corbyn « sème la haine » visant tous les patrons et les propriétaires (de l’autoentrepreneur à la mémé de la villa Sam’Suffit et jusqu’au sommet). Il faut admettre que la dernière vidéo de Momentum (le panel de campagne du Labour) n’y va pas non plus de main morte. Mais, selon cette presse caustique, l’électorat travailliste déserte ou votera, en substance, « la honte au front » et yeux baissés en « se bouchant le nez » pour le Labour.
Cela ne pourra que s’accentuer car près de trois millions de personnes viennent de s’inscrire sur les listes électorales, dont de très nombreux jeunes (aux deux-tiers de moins de 35 ans). Et que, de ce fait, le Labour grimpe dans les sondages (enfin, dans certains).
Tony Blair a appelé à voter « tactique » (pour le candidat Remain en tête, Labour ou autre, et contre les conservateurs). Traduction : Blair veut barrer la route à Corbyn et appelle de ses vœux un hung Parliament (sans nette majorité). Même le Daily Star (qui ne traite de politique qu’incidemment, dans un coin, bien après vous avoir régalé de potins et de bimbos) ne retient des propos de Blair (qui votera localement pour un libéral-démocrate) que ceux visant Corbyn (mais place une vidéo permettant de consulter l’entretien de Blair en son intégralité).
En plus subtil, Boris Johnson dénonce la duplicité de Corbyn qui, s’il devenait Premier ministre, prendrait pour second Nicola Sturgeon (donc, pour chancelière ?), la Première écossaise et cheffe de file du SNP. Ce dont le Daily Mail fait ses choux gras. Le Mail, qui tape systématiquement sur le Labour, ne fait pas tout à fait de Corbyn une « bête immonde » (mais cherche tous les poux dans sa tête).
Cela donne par exemple, mais en termes soigneusement pesés, que Corbyn, en élargissant les droits à l’avortement, donne le feu vert à l’élimination préventive des fœtus féminins — mais il n’est pas écrit : sous la pression de pères issus de minorités ethniques —, voire à l’élimination des prématurés (ce qui est subtilement sous-entendu).
The Times adopte en général un ton moins virulent, mais son caricaturiste ne fait guère dans la dentelle (visuel supra) : Bojo, c’est le plus beau, Corbyn un extrémiste et un bras cassé.
Et bien sûr, il est partisan de la Brexeternity ou du Brino (Brexit in name only).
Il n’y a guère que The Independent à ne pas taper systématiquement sur Corbin, et bien sûr The Guardian ou encore The Mirror (traditionnellement proche des travaillistes). Quant au Financial Times, il laisse ses seuls éditorialistes dénoncer le programme du Labour, mais en personnalisant : « Le programme de Corbyn est une tragique trahison du pays » (of Britain). Quant au programme de Boris Johnson, c’est “Safety first”.
Il n’empêche que la presse britannique (hors FT) est beaucoup plus rigolote à lire que la française. D’ailleurs, le lecteur de The Independent ou du Guardian, les ex-broadshits (devenu tabloïds quant à leur format), formé par Oxbridge (Oxford-Cambridge) se régale aussi en douce avec la presse « de caniveau ». Voire regrette en son for intérieur la disparition de l’ébouriffant News of the World.
Reste le quinzomadaire satirique Private Eye qui tape sur tout ce qui bouge (et vaut bien l’IPSO pour dénoncer les dérives des médias).
Je ne sais si l’instauration d’un comité d’éthique français aura ou non des effets pervers, soit que la presse française se rapprochera, dans son traitement de l’information, de la britannique. Si les consœurs et confrères prendront un malin plaisir à se rapprocher des limites à ne pas franchir. Ou si l’adage, une info, une sanction, deux infos et un surcroît de notoriété, s’appliquera.
Bref, je suis plutôt contre ce comité. Sauf si... Sauf si le dit organe de surveillance m'adoubait au poste d'échanson, chargé des vins des buffets et repas. Tiens, histoire de pousser ma candidature, où est donc ma liste des patrons de presse détenant des vignobles ?

Algérie : Raphaël Glucksmann, taisez-vous !

Quoi qu’on dise depuis la France sur l'Algérie, on aura tort

« Taisez-vous, Elkabbach » (Marchais, Georges, † nov. 1997, Antenne 2, 1978, apocryphe). Taisez-vous, Donald Tusk, Verhofstadt, sur le Brexit. Et à présent, taisez-vous, Raphaël Glucksmann, sur le hirak algérien !
Voici quelques temps que « j’intime » (comprenez que je pisse dans un violon…) aux responsables de l’Union européenne de ne pas se prononcer sur le Brexit, les élections britanniques du 12 décembre…
Bon, de nécessaires rappels, anonymes, off the record, pourquoi pas. Mais toute déclaration, hormis celles, mesurées, calibrées, de Michel Baroin, ou de, par exemple, Leo Varadkar, le Taoiseach irlandais, qui pèse soigneusement ses mots, sont contre-productives. Lisez, bon sang, ce qu’en fait la presse anglaise pro-Remain.
V’la-t-y pas que Raphaël Gluscksmann, un eurodéputé français, se mêle, sur Twitter, de souhaiter que le Parlement européen se prononce sur le hirak en Algérie. Palsembleu ! Il ne pouvait pas trouver, dans son groupe à Strasbourg, un Slovaque, un Estonien, pour lancer cette initiative ?
En sus, Gluscksmann… Je ne le connais ni d’Ève, ni d’Adam (pourtant présumés aussi sémites que les Algériens), mais il porte un nom alsacien, non ? qui pourrait prêter à confusion dans les kasbahs et les douars.
Quoi qu’un Français dise sur la situation algérienne, il aura toujours tort. D’accord, les manifestants savent à quoi s’en tenir sur les déclarations des généraux dénonçant les menées venues de l’étranger (ou des Kabyles se faisant emprisonner, au mépris de toute règle de droit algérien, pour avoir défilémunis d’un drapeau Amazigh). Oh, zut, j’aurais mieux fait de me taire. Mais bon, vu que Tusk ou Verhofstadt n’ont même pas daigné me répondre, poursuivons…
Lambda, Breton de surcroît, je ne parle pas au nom de la France, mère des armes, &c. (du Bellay). Je peux donc me lâcher.
Les Algériens, certains, pas tous, les Algériennes, certaines… restent persuadés que la France soutient le régime des généraux. D’ailleurs, la preuve, ils ont tous été formés en France, sont en fait pour partie des Marocains binationaux, disposen tous de somptueuses villas en France (et des comptes en banque) et quoi que des Français disent, fussent-ils descendants de porteurs de valises pour le FLN, de gauche (comme feu Siné, pote de jeunesse de Boutef), de droite, d’eau froide, d’eau chaude, d’eau mitigée (Lapointe), s’ils se mêlent des affaires intérieures algériennes, c’est pour… Nous, Algériennes et Algériens, néo-coloniser.
Récemment, je visualisais un cartoon :
« Vous êtes uniques ! ».
Réponse :
« Cela suffit, les généralisations ».
Bien vu.
Tollé en Algérie après la déclaration de Gluksmann. Pas de tout le monde, padamalgam.
En fait, mon analyse (au petit pied), c’est qu’au final, les généraux et les islamistes, comme au Maroc (le Maghzen et les islamistes), vont museler le hirak. Avec l’assentiment muet de la France ? Déjà, cette supputation hasardeuse ne repose sur rien, mais imaginez que je sois quelqu’un auquel on tend des micros ?   Buzz, vrombissements, à la c...
M’sieu Glucksmann, faites comme moi : taisez-vous. Réservez ces considérations (ou d’autres) pour les dîners en ville, pour la troisième mi-temps de session en winstub (ou en brasserie, une fois).
J’ai aligné des ragots ? Des considérations de comptoir ? Dont acte ! J’ignore tout de la situation en Algérie ? C’est à peu près cela… Ce qui ne m’empêche nullement de l’ouvrir toute grande (contamination de la culture française : le Breton est plutôt taiseux).
Brève de comptoir : le hirak, c’est un peu comme les Gilets Jaunes. Beaucoup de bonnes intentions, des grugé·e·s par dizaines de milliers au final (là, j’écris pour Google : tu cases « Gilets Jaunes », on te lit un poil davantage, genre trois visites de plus sur une cinquantaine quotidienne).
N’empêche, Glucksmann n’a pas tout faux. Le pouvoir algérien va stipendier des candidatures, histoire soit de se prolonger, soit d’obtenir l’immunité. Oh là, qu’ai écrit là ? De Paris, métropole, ex-puissance coloniale…
On peut dire cela au Mouton Blanc, ou au Loulou Bar, au Taylor, dont les patrons, n’ayant écouté que d’une oreille distraite, rétorqueront : « je te ressers quoi ? ».
Il faudrait que j’aille « à la halle », par exemple au Bab’Ilo, rue du Baigneur, pour interpréter les silences consécutifs à mes questions ou dires.
Silences, parce que « la maison accepte l’échec ». C’était une digression, du publirédactionnel ? Accordé.
Revenons au sujet. Que lis-je sur le compte Twitter de R. G. ?
« Si vous êtes sincère dans votre soutien au #hirak, débattez sur les privilèges accordés par la France à la kleptocratie algérienne ! ».
Bon, une autre soif (euh, non autre fois), je vous raconterai ma rencontre avec « l'illustre » (épithète d'un jeune irakien d'un fondouk proche d'une raffinerie bombardée par des Mirages israéliens, à l'été 1967), Ben Bella.
En attendant, M’sieur Glucksmann, écoutez et surtout, taisez-vous. Ou pas. Mais comme aux échecs, prévoyez mieux les coups d’après.

lundi 25 novembre 2019

Quelques perles d’Octave Mirbeau à propos d’huîtres

Mirbeau : Libre penseur ou apologiste du conformisme ostréicole ?

Allez, n’avalez pas ce sous-titre tout cru… Il semble pourtant qu’Octave Mirbeau, le « vitrioleur », se soit parfois trompé — partiellement — de cible. En témoigne sa savoureuse, mais quelque peu injuste « Apologie des huîtres » parue dans Le Figaro de décembre 1903.
Bientôt Noël… Nombre d’entre vous qui répugneraient à ébouillanter un homard remuant encore ses antennes goberont sans doute des huîtres.
Cela tient à une tradition dont la signification s’est peu à peu transformée. Mets considéré maigre autrefois, entrant dans la composition d’un frugal dîner ou souper de la veille de Noël, l’huître, devenue plus onéreuse, a désormais rejoint le foie gras, les truffes, &c., pour les réveillons de fin d’année.
Je ne poursuis pas : l’huître est un marronnier journalistique, vous serez gavés d’articles avant même d’en consommer à l’approche des fêtes.
Autres sujets « gavants », les trop récurrentes recommandations nutritionnelles vantant ou dénigrant tel ou tel aliment… « Faites ceci-cela chaque jour », lit-on de plus en plus fréquemment, découvrez les bienfaits de… évitez de manger trop de… Où ce « … », selon les uns ou les autres, est paré de toutes les vertus ou accablé d’opprobre. Dans son « Apologie des huîtres », Mirbeau ne manque pas de se gausser de ces recommandations contradictoires.
Pourquoi me réintéresser tout à coup à Mirbeau et à un sujet somme toute trivial ? Sérendipité et désœuvrement. Puisque je vous signalais le colloque « Littérature et Libre Pensée », qui fera belle part à l’œuvre d’Octave Mirbeau (incidente : j’apprends que les places sont limitées à 120), il me vint la curiosité de réexplorer le fonds journalistique que le site Retronews consacre à l’auteur.
Et je constate, en ouvrant la coquille, que le « gentleman-vitrioleur » cher à Alain (Gerorges) Leduc, n’avait pas hésité à encenser un rapport de commande gouvernementale de soutien à la conchyliculture et aux ostréiculteurs. Bien, il faut modérer cette appréciation total abusivement hypothétique. Mais il est certain qu’au tournant du siècle dernier, la « crise de l’huître », découlant de mises en garde sanitaires largement relayées par la presse, incita le gouvernement, fortement sollicité par les professionnels, à dresser un contre-feu.
C’est ce qui ressort de divers documents, dont le plus synthétique est celui de Daniel Faget, paru dans Provence historique, nº 221, 2005. « La Découverte d’un risque sanitaire lié à l’alimentation : fièvre typhoïde et consommation de coquillages en Méditerranée… » montre que Mirbeau fit preuve d’un optimisme hors de propos, si ce n’est de franche mauvaise foi ou de crédulité.
Il n’avait cependant « pas tout faux ». Mais ô combien injuste sa diatribe, tournant totalement en ridicule le professeur Chantemesse, qui avait incriminé les huîtres, ou plutôt la manière dont elles étaient élevées et commercialisées. Mais Chantemesse était médecin, et Mirbeau ne les portait pas tous en son cœur, ce qui est un fort euphémisme. C’est un chef-d’œuvre de rosserie. Aussi délectable que disproportionné.
En regard, le rapport Giard, qui occulte moins que Mirbeau les liens de la faculté de Montpellier avec les producteurs ostréicoles, et reste fort mesuré à l’égard des travaux de Chantemesse, est encensé sans réserve.
Alors, Mirbeau, à l’occasion séide et sicaire du pouvoir en place ? Il serait totalement farfelu de le soutenir, cela ne tient pas la route, mais il serait plaisant de faire semblant d’adopter ce point de vue, en pastichant Mirbeau pour le prendre à contre-pied, la main dans le sac, à la botte d’un ministère.
Il semble qu’en fait, Mirbeau fut amateur d’huîtres, vantant, par exemple celles « nourries des plus grasses algues de la Zélande » (La 628-E8). En mauvais cuistre négligeant, j’ai eu la flemme de me lancer dans une pseudo-savante étude sur les huîtres dans l’œuvre de Mirbeau, mais j’imagine qu’on trouverait d’autres références…
Ce qui n’empêcherait pas de louer son inventivité… Ses goûteuses exagérations (un médecin lui assurant que les fraises sont le principal vecteur du tétanos, comme « tout ce qui pousse (…) dans ce foyer d’infection tétanique qu’est la terre »). Autant et au temps pour les fanatiques végans d’à-présent. Régime algues et plancton uniquement.
J’en profite, avec cette « Apologie des algues », que vous trouverez intégralement reproduite par mes soins ici, pour remarquer abusivement sans doute que nombre de spécialistes d’auteures et d’écrivains pourraient avoir tendance à ne se pencher que sur la qualité littéraire des textes sans trop se soucier de vérifier si les faits, notamment dans les écrits journalistiques, sont fondés.
J’avais tort… À peine avais-je atteint la conclusion de ma dérisoire contribution que, pris d’un scrupule, je lançais une rapide recherche sur un point de détail. Ce qui me permit de découvrir que Les Cahiers Octave Mirbeau (nº 21, mars 2014), avaient déjà reproduit l’intégralité de cette anthologie, assortie d’une note à laquelle, faute de place (ou d’envie d’ajouter une page), je ne fais qu’une rapide allusion dans le document PDF (supra).
Voici cette note 28 (expurgée de détails peu significatifs) attestant que mirbelliennes et mirbelliens ne sont pas tout à fait aveuglés par leur héros ou sujet de prédilection :
« Le lendemain de la parution de l’article, le 2 décembre 1903, Le Figaro fera paraître la rectification suivante : “Dans l’article de notre collaborateur Octave Mirbeau, une erreur s’est glissée (…). Il s’agit de Lucien Mühlfeld, mort l’an dernier des suites d’une typhoïde (…). Il n’est pas inutile de dire qu’aucun médecin n’a songé à attribuer aux huîtres la maladie qui l’a emporté. D’autre part, le professeur Chantemesse n’a pas été appelé auprès de Mühlfeld, il ne lui a jamais donné ses soins… ». &c. Ce qui vaut net, formel démenti des allégations (ou affabulations) de Mirbeau, ayant reproduit une rumeur douteuse ou l’imaginant…
Reste à savoir si Mirbeau a tiré cette anecdote (Chantemesse persuadé que l’ingestion d’une seule huître fut létale) du rapport de Giard (elle y figure brièvement) ou si Giard, sur la foi des dires de l’écrivain, l’ayant inventée de toutes pièces, s’est laissé abuser… L’huître fait lever un lièvre. Bon, mettons un lapereau pas encore levraut sevré.
Bien, que tout cela ne vous fasse pas renoncer à savourer des huîtres. Plates indigènes ou creuses « du Portugal ». Mais si crues, encore vivantes, alors que Mirbeau semble les croire servies mortes.
Et tentez de vérifier si possible leur certificat sanitaire…

dimanche 24 novembre 2019

Roumanie : Iohannis réélu à la présidence


Un résultat sans surprise mais plus net que prévu

Bien sûr, la mort du maréchal Pétain fut annoncée deux fois de trop (la troisième fut la bonne), et à cette heure (presque 21 heures passées à Bucarest), je ne dispose que de sondages sortis des urnes. Mais pas vraiment de suspense…
L’un des enseignements de ce second tour du scrutin présidentiel roumain, c’est l’importance de la participation des expats…
Ils seraient (auraient été) en :
• Italie : 185 000 ;
• R.-U. : 155 000 ;
• R.F.A : 150 000 ;
• Espagne : 125 000 ;
• Moldavie : 51 000.
C’est bien sûr estimé à la louche, et je ne sais trop si les Roumains de Moldavie sont ou non surtout des binationaux. Quant aux Roumains établis en France, Adevarul ne les distingue pas, mais donne un chiffre global, tous pays confondus (donc, Canada, Australie, &c., inclus) de 900 000. Allez, je risquerai 45 000, pour la France, sans trop savoir.
Soit une participation sans doute supérieure à la nationale (de « l’intérieure ») approchant les 48 %. Assez faible, donc, et c’est plutôt dans les grandes villes que la participation a été forte (entre 50 et 58 %). Même sans voir les estimations de sorties des bureaux, je risque : le sortant est reconduit.
Avec sans doute 65 % des suffrages. Cela étant, la suite pourrait être, en fonction des résultats définitifs, que Viorica Dăncilă n’ait plus qu’un rôle mineur au sein du PSD. Pour qui est peu au fait de la situation politique roumaine : l’ex-Première ministre était considérée pour ce qu’elle a démontré être, une marionnette, une potiche. Mais le PSD n’avait grand’ monde de net à présenter face à Klaus Iohannis.
Alors, le PSD, pourtant souvent accusé de fraudes électorales, renvoie l’ascenseur. L’un de ses députés a estimé que le vote des Roumains de l’étranger a été manipulé car « deux personnes votaient à la minute ».
Cela s’affinait peu avant la proclamation des résultats : 66,5 contre 33,5 %.
Et comme le commentait une journaliste de Libertatea, ce pourrait être plutôt plus proche de 67 %.
Ce qui est sûr, c’est que la diaspora a voté massivement pour le président sortant. Les implications seront progressives : ce résultat, si l’économie roumaine renforçait son attractivité, si les services publics s’amélioraient, pourrait favoriser le retour au pays de nombreuses Roumaines et Roumains… Actifs ou retraités.
Et c’est un véritable enjeu pour ce pays qui, jusqu’à présent, continue de se dépeupler. Ce vote est aussi une revendication anti-corruption, anti-népotisme.
Il faut prendre en compte que les «  sociaux-démocrates », le parti ayant changé quatre fois d’appellations, en 1990, voyaient Ion Iliescu élu avec plus de 85 % des suffrages. Une première défaite (de peu : 49,6 %), en 2004, portait Trian Basescu à la présidence. L’effritement fut moindre avec Victor Ponta (45,4 %) perdant contre Iohannis en 2014. Mais, là, c’est la débâcle, et peut-on espérer, un début de la fin d’un système clientéliste. Reste à espérer qu’il ne sera pas remplacé par un autre…
Mise à jour (25 nov.)
Il s'agit toujours cette fois d'estimations, mais officielles, provenant du Bureau électoral central... Finalement, Iohannis n'a frôlé que 66‌ % des suffrages, avec un apport massif des voix de la diaspora (94 %) et des jeunes. « Forte » de ce résultat (un peu plus de 34,10 %), son adversaire à décidé de se maintenir, estimant que les municipales (dans six mois) corrigeront ce score médiocre (euphémisme).
Fait surprenant, relevé par Libertatea : « 1,6 % des électeurs d'Iohannis au premier tour ont voté Dancila au second. ». On se gardera d'en conclure que le PSD a acheté des voix pour sauver les meubles. Ce qui semble se dégager, c'est que l'électorat PSD a davantage voté pour les maires de ce parti que pour la candidate. Laquelle se maintient à la tête du parti mais est très fortement fragilisée.   

Brexit : et voici le Bojo manifesto nouveau

Love Boris and get Brexit done

Je ne suis pas tenu ici à l’impartialité, et si j’avais quelque peu détaillé le programme des travaillistes, je me contente de survoler celui des conservateurs.
Déjà, alors que le « petit livre rouge » des travaillistes met fort peu en avant Jeremy Corbin, celui des conservateurs, sous-titré “The Conservative and Unionist Party Manifesto 2019", c’est un peu, toutes proportions gardées, « ma bobine partout ».
Soixante pages, avec une quatrième de couv’ montrant des travailleurs du BTP casqués montrant une pancarte “We Love Boris”, et sept photos grand format de Boris Johnson.
Bien sûr, les programmes du Front National de J.-M. Le Pen faisaient beaucoup mieux. Mais nous sommes au Royaume-Uni où, hormis les photos des membres de la famille royale, il n’est pas commun de mettre autant en avant le portrait d’un·e chef·fe de file politique.
Pour qui connaîtrait peu la vie politique britannique, je signale que, depuis Theresa May, le terme « unioniste », dérivé de la fusion entre les Tories et les libéraux unionistes (en 1912) a été fortement mis en valeur : la dénomination officielle est bien Conservative and Unionist. Ne pas y voir la subsistance de l’alliance entre conservateurs et unionistes nord-irlandais du DUP.
Le mot d’ordre est donc “Get Brexit DoneUnleash Britain’s Potential“. Britain n’est pas ici ambigu, il s’agit bien du Royaume-Uni et non de sa seule Grande-Bretagne. Le programme met aussi l'accent sur les identités écossaise, galloise et anglaise. La langue galloise, formidable ; les parlers écossais, magnifiques... Tous ensemble, tous ensemble, air connu.
Or donc, hors Brexit, les principaux points sont plus de personnel infirmier, médical et policier. Effort éducatif, environnement (le net zero, plus aucune émission néfaste en 2050), pas de nouveaux impôts ou taxes, et relèvement du plafond pour bénéficier d’une couverture sociale.
Et le Brexit ? Rupture d’avec l’Union européenne dès début janvier, d’avec la Cour de Justice, restauration du contrôle total des droits de pêche, instauration d’un système de contrôle de l’immigration à l’Australienne (dit par points). Et une promesse fortement réitérée : ne pas prolonger les négociations d’un traité commercial au-delà de la fin 2020. Ce qui semble utopiste (« même pas en rêve », commente-t-on à Bruxelles ou Strasbourg) et laisse entendre qu’à l’issue de la période de transition, ce sera une sortie sans accord (et des tractations s’éternisant ensuite, tandis que le Royaume-Uni aura instauré les tarifs douaniers de son choix, à rediscuter un par un).
Cela revient à couper l’herbe sous le pied de Farage et du Brexit Party et fédérer le camp du Leave.
Rien de bien original dans ce programme si ce n’est de consacrer des millions pour combler les potholes, les nids de poule, dont les photos s’étalent fréquemment dans les pages de la presse populaire. Aussi, la révocation de la loi (Fixed Term Parliaments Act) voulant que le gouvernement change tous les cinq ans (remaniement automatique). Sinon, c’est assez flou et pas vraiment chiffré. Ou sujet à interprétation (comme sur l’abolition de la redevance télévisuelle pour les plus de 75 ans).
Réplique de Corbyn : « c’est le manifeste des milliardaires (...) On ne peut faire confiance à Boris Johnson » (sous-entendu : le hâbleur). Convenu, déjà dit et redit. Plus gênant, l’Institut pour les études fiscales (IFS) considère ce programme plutôt raplapla et difficile à financer sans sacrifier des services publics.
Cela étant, la moyenne des sondages donne encore les Tories en tête (à 43 %, 13 points devant les travaillistes, avec les Lib-Dem à 15, le Brexit Party fléchissant à 4). L’un des derniers sondages n’accorde aux conservateurs qu’une avance de dix points, mais cela leur assurerait cependant une confortable majorité au Parlement.
Le Sunday Express met en avant les nombreux jeux de mots et blagues du Bojo et appuie surtout sur la menace pesant sur les pêcheries britanniques si Emmanuel Macron obtient de Bruxelles ce qu'il souhaite pour les pêcheurs français. The Sun titre sur la fin de l'austérité pour les familles travaillant dur (cela restera à concrétiser, et on ne voit pas trop comment). The Mirror (resté pro-Labour) considère que beaucoup de chiffres avancés sont truqués. The Independent (pro-Remain) estime que ce programme sera bien accueilli par les entrepreneurs et les milieux d'affaires mais relève surtout que négocier en parallèle avec les États-Unis, l'Australie, le Japon et l'Union européenne relève de la mission impossible : chaque accord influe sur l'autre... implique un va-et-vient incessant.
En fait, hormis le camp Remain, plus ou moins bien rassemblé et solide (Plaid Cymru, SNP, Verts, Lib-Dem), mais n'ayant que fort peu de chances de l'emporter, personne, côté travailliste et conservateur, ne peut donner de garanties solides sur ce qu'il adviendra des relations du Royaume-Uni et de l'Union européenne. Quant à savoir quand les choses clarifieront réellement, autant consulter une boule de cristal (si possible reliée à une imprimante ou à un logiciel de reconnaissance vocale). 

samedi 23 novembre 2019

Pour une autre garde nationale parisienne (et autres)


Vous avez dit « police de proximité » ? Comme c’est bizarre

Or donc, il n’y aura pas de véritable police municipale à Paris avant… Déjà, je croyais qu’il en existait une, et de deux, ce qu’il conviendrait, c’est une (autre) garde nationale… municipale.
L’Assemblée nationale vient de retoquer la proposition de former une police municipale parisienne, Anne Hidalgo s’offusque, &c. Voyez la presse…
Déjà, j’avais cru comprendre qu’une police municipale, en tenue ou en civil, infligeait des amendes à qui ne ramasse pas les crottes de son, ses chiens, ou jette ses mégots sur la voie publique…
Je ne sais quel type de policiers a infligé deux amendes à un bistrotier dont les ardoises de menus (ou de cocktails, j’ai oublié) dépassaient d’un poil ou deux les limites de son emprise sur la voie publique (il règle je ne sais quoi pour une terrasse). Ni celui de ceux qui, constatant qu’un autre allait fermer, évacuer les dernières et derniers attardés célébrant le beaujolais nouveau, ont fait preuve d’indulgence… Relevant de la préfecture de police ou de l’hôtel de ville ?
Mais pourquoi pas, pour Paris, et quelques autres agglomérations, une garde nationale ? Superflue puisque, de mémoire, il me semble que tout citoyen peut se porter supplétif de la police nationale (citoyen réserviste ; comme Alexandre Benalla gendarme réserviste).
Voui. Mais affecté quand et à quoi au juste ?
La véritable police de proximité serait, à mon sens, constituée de membres d’une garde autrefois dite « nationale », de fait, communale.
Une milice ? Oui, ce serait un risque. Mais il ne s’agirait pas de recruter des gens adulant les uniformes (je ne sais quoi de voyant, genre gilet fluorescent, suffirait), ni d’en laisser l’encadrement à des supérieurs élus ou plébiscités. Des policiers ou gendarmes pourraient former et accompagner ces gardes, armé·e·s de dispositifs de défense non seulement non létaux, mais ne pouvant occasionner des blessures, et non chaussés de brodequins à semelles cloutées (blessant des contrevenants).
Bien sûr, il se produirait des « bavures » (aux deux sens, laxisme ou sévérité exagérée, volontaires ou involontaires). Bien sûr, ce serait un corps répressif. Mais pas seulement : le temps d’intervention d’un service policier ou de secours est fonction de multiples facteurs. Résider au plus proche d’une personne à secourir offre une capacité de réactivité sans égale. Pour, par exemple, faciliter l’accès des pompiers ou d’un service d’urgence médicale… Bref, former des supplétifs de la Défense civile, formés par la Croix Rouge ou d’autres, ne serait pas superflu.
Chaque Parisienne, chaque Parisien, constate une insécurité croissante (pas forcément insupportable : tags, dégradations, nuisances mineures diverses…) et s’en alarme.
De plus, la formation d’un tel ensemble favoriserait, à mon sens et humble avis, un regain de confiance en la participation citoyenne (illustrée d’ores et déjà par divers comités de quartiers, associations d’initiatives locales).
En tant que membre d’un conseil syndical de copropriété, je mesure les difficultés.
Non insurmontables.
Milice ? Non, « pompiers volontaires » d’un autre genre. Susceptibles d’apaiser des conflits. De faire en sorte que des services d’urgence médicale ne soient pas encombrés de victimes de bagarres pouvant être jugulées.
En fait, sous l’appellation « garde nationale », sont regroupées, depuis 2016, les réserves de la gendarmerie et de la police nationales. Mais elle a peu à voir avec celle dissoute en août 1871. Et encore moins avec une réelle police de proximité (très) rapprochée. Même si police et gendarmerie peuvent déléguer à l’actuelle des missions similaires (d’investigation, notamment ; de surveillance des hortillonnages d’Amiens, pour ne mentionner que cet exemple).
Ce qui serait souhaitable, c’est que des habitants connus de (presque) tout un quartier, un îlot, puissent avoir une présence manifeste.
Est-ce utopique ? Plutôt qu’une police municipale, la création de comités d’entraide et de sécurité (ou toute autre appellation) ne semble pas une tâche insurmontable. À moins bien sûr que les édiles se méfient de leurs administré·e·s. Voire réciproquement.
Et c’est bien, au-delà de cette proposition dont je ne sais en fait estimer la validité, ce dont il est question. Pourquoi Anne Hidalgo, initialement encline à refuser la création d'une police municipale (voire hostile), s’est-elle finalement prononcée pour en doter la capitale ? En prévision des Jeux olympiques emportés faute de concurrence, dont elle excluait la tenue à Paris au début de son mandat ?
Comprenez-le ainsi : matière à réflexion… Pourquoi n’a-t-il pas été laissé aux Parisiennes ou Parisiens l’opportunité de se prononcer pour ou contre l’instauration d’une police municipale, sous une forme ou une autre ? Je continue à m’interroger.

Colloque « Littérature & Libre Pensée »

Anticléricaux : reste-t-il de vieilles gens en colère ?

Il me semble quelque peu prématuré de faire état d’un colloque qui se tiendra les 14 et 15 février 2020. Mais comme j’y reviendrai, en temps plus utile, effleurons. Littérature et libre pensée ? Vaste programme…
La Libre Pensée et la Société Octave Mirbeau, avec de cette dernière, Alain (Georges) Leduc pour cheville ouvrière, ont mis sur pied un savant colloque portant sur l’athéisme et la libre pensée dans la littérature. Il se tiendra le vendredi 14 février 2020 à la Bourse du Travail de Paris, puis le lendemain au Palais du Luxembourg (avec en interlude, le vendredi soir, la projection du film de Jean-Pierre Mocky, Le Miraculé, au siège de la Libre Pensée).
Parmi les oratrices et orateurs, prédominance de vieux hommes blancs, mais quand même présences de Nicole Aurigny, Élizabeth Legros-Chapuis (qui traitera de Roger Vailland), Marie Bat, Anita Staron, Lucia Campanella (trois… mirbelliennes ?), Julie Palussière (qui s’intéresse toujours à la littérature soviétique). Six sur une vingtaine, ce pourrait être pire.
Pourquoi cette incongrue remarque ? Comme cela… Histoire de tenter de justifier un sous-titre farfelu, et peut-être trompeur (je n’ai pas cherché à déterminer la moyenne d’âge de ces « gens » ; on peut être libre penseur et a-clérical autonome), qui m’est venu en lisant l’intitulé de l’intervention de l’angliciste Fabien Jeannier portant sur le mouvement des Angry Young Men (Royaume-Uni, années 1950 et 1960). Je retirerai bien ce sous-titre, mais aucun autre, quelque peu incitatif, ne me vient à l’esprit. Alors…
Vous trouverez sur ce blogue-notes diverses choses sur l’athéisme d’Octave Mirbeau et de Roger Vailland ; donc, je glisse pour le moment…
Pierre Roy traitera de l’individu dans les littératures de la Renaissance aux Lumières, Pierre-Yves Ruff d’Höderlin, et Raymond Roze des Ordons brossera un tableau plus large de l’anticléricalisme dans la littérature.
Michel Sidoroff reviendra sur Les Châtiments de Victor Hugo. Ne les ayant pas relus depuis des lustres, je ne m’attarde pas. Et comme je n’ai aucun souvenir de La Revue blanche (1889-1903, Liège, Paris), si ce n’est qu’y parurent Le Journal d’une Femme de chambre et Bubu de Montparnasse, je ne vais pas risquer de déraper en augurant de ce qu’en dira Paul-Henri Bourrlier (sans doute l’état de ses recherches postérieures à la parution de son La Revue blanche chez Fayard, en 2007).
Gilles Candar abordera Jaurès et Jules Renard. Alain (Georges) Leduc évoquera Anatole France (je ne l’attendais pas sur ce sujet). Sur Mirbeau, Lucia Campanella, universitaire uruguayenne, dressera l’état de lieux de sa postérité en Amérique hispanophone (et sans doute au Brésil, présumerai-je). Laurent Doucet s’attardera (pas trop longuement) sur les surréalistes et Christophe Bidaud sur BHL, Onfray, Finkielkraut et d’autres…
Dans la mesure où vous trouverez le PDF du programme pas loin, et que l’ami Leduc me fournira des précisions orales l’un de ces soirs prolongés ou petits matins naissants, consultez la brochure, and stay tuned.
Transition faiblarde, je le concède, pour évoquer Fabien Jeannier et les Angry Young Men (« dans l’Angleterre conservatrice »). Ah bon, je croyais Jeannier plutôt spécialiste de l’Écosse, peut-être de l’urbanisme d’East-Kilbride (présupposé gratuit de ma part). Les Jeunes Gens/Hommes en colère… J’ai bien dû lire antan quatre ou six de leurs bouquins ou pièces, dont je ne me souviens aucunement. Je subodore encore que Colin Wilson, auteur de The Angry Years: The Rise and Fall of the Angry Young Men (Pavillon pub., 2014), fut plus ou moins rattaché à ce courant. On le dit oublié, ce mouvement. Pas du tout l’expression « jeunes gens en colère », s’appliquant à présent (surtout en anglais, évidemment) à un peu tout, voire son contraire, et à divers groupes mixtes ou non, des deux côtés de l’Atlantique.
Oui, il s’agissait très majoritairement des jeunes hommes, romanciers et dramaturges, que l’on pourrait qualifier de nouveaux pauvres ou de « déclassés » (selon l’expression de Jean-François Bizot, ultérieure). Voire, « d’établis » (Daniel Rondeau) en exagérant (s’établir, en France, fut surtout un choix, pas toujours car les boulots auxquels destinaient les études ès lettres, langues, sciences humaines, étaient déjà rares dans les années 1970). Des Jules Vallès ? J’approxime grave, mais cela peut donner une vague idée qu’absorbe le sable au ressac moribond. Pas vraiment des Down and Out (Orwell), parfois pas loin non plus. Mais, se remémore Wilson dans son ouvrage, Chris Logue, copain de Kingsley Amis, séjourna un temps à Paris. En Jack-of-all-trades (factotum, saisonnier, arpète, manœuvre) ?
Jeunes hommes en rogne. Je retrouve en ligne des noms comme celui d’Arnold Wesker (auteur de Chips with Everything ; lesquelles ? Bintje ou Peter Marris ? Avant que me parvienne ce programme, je m’intéressai aux ingrédients des frites pour accompagner un coq au vin ou un steak and ale pie au paleron d’âne, passons…). Pour me rafraîchir un peu la mémoire, je retrouve diverses pistes, dont celle de Pete Townshend (The Who) qui ne doit être au mieux qu’une impasse de traverse. Il fut classé des leurs, un temps. Aussi ce morceau des Kinks, Where Are They Now :
Where are all the angry young men gone?
Barstow and Osborne, Waterhouse and Sillitoe
Where on earth did they all go?
Ben, par après, si athées ou agnostiques, au purgatory ou to hell, selon que vous y accordiez foi ou non. Ou au paradis (celui de Fred Zeller, par exemple, ou de Michel Polnareff).
Cela pour vous signaler que, qu’il réunisse de vieilles ou moins vieilles gens, désabusées, apaisées ou toujours fâchées à la Siné, assister à un tel colloque n’est pas systématiquement lassant. Parfois on rigole longuement. On s’exclame, on s’étonne. Il y a de la verdeur là-dedans (avec Mirbeau, aux divers sens du terme, avec Vailland aussi).
Enfin, notez que l’inscription est gratuite, ou plutôt la participation laissée à votre gré, mais que 20 euros vaudront souscription à l’exemplaire des Actes.

vendredi 22 novembre 2019

Destitution de Trump, version dîners en ville

Pour ne pas rester muet sur la révocation de Donald Trump

Franchement, je n’ai suivi que d’un œil distrait les tribulations de Donald Trump dans l’affaire ukrainienne. Donc, afin de ne pas rester coi si des conversations s’engageaient là-dessus, je me suis concocté un résumé partiel de secours.
Comme, pour intervenir sur la mise en accusation (impeachment) de Donald Trump qui pourra (surtout ne pourra pas, en raison de la prédominance des républicains au Sénat) conduire à sa révocation ou destitution (là, au choix), je me suis ménagé une botte secrète… Soit botter en touche et évoquer la gaffe d’Ivanka Trump.
J’ai donc appris par cœur ce passage d’Alexis de Tocqueville (De la démocratie, éd. Pagnerre, 1848, t. 1, chap. 7, « du jugement politique », p. 176). « On doit remarquer, en premier lieu, qu’aux États-Unis le tribunal qui prononce ces jugements est composé des mêmes éléments et soumis aux mêmes influences que le corps chargé d’accuser, ce qui donne une impulsion presque irrésistible aux passions vindicatives des partis. ».
C’est cette phrase qui inspira au juge John Innes Clark Hare, dans son American Constitutional Law (vol. 1, Boston, 1899), ce commentaire à propos de la mise en accusation du président Andrew Johnson (mai 1868). Selon Tocqueville, consigne Clark Hare, « le déclin de la moralité publique (…) sera probablement marqué par l’abus du pouvoir de mise en accusation en tant que moyen de broyer des adversaires politiques ou de les éjecter de leur poste. » (crushing political adversaries or ejecting them…). C’est prêter à Tocqueville une opinion prolongeant ses considérations, en fonction des besoins de sa propre démonstration.
Et que fait l’Ivanka Trump, cette niaise..? Elle reprend la phrase de Clark Hare suivie de la mention « Alexis de Tocqueville, 1835 ». Effectivement, le premier tome parut en août 1835. Mais on doute très fort que la fille du Donald ait retrouvé elle-même cet exemplaire à la Bibliothèque du Congrès. Quelqu’un a dû dénicher pour elle le manuel de Clark Hare (ou un article du Wall Street Journal en faisant état le mois dernier).
On peut donc embrayer : Ivanka est aussi mal entourée que son père (là, faire allusion aux multiples limogeages de très hauts-fonctionnaires, membres du gouvernement, porte-paroles, par le paternel…).
Si cela ne suffit pas pour me tirer d’affaire, je m’en reporterai évasivement aux derniers développements. Sûr de se voir tiré d’affaire par le Sénat, voilà que Donald Trump s’en remet à sa majorité sénatoriale : lavez-moi de toute présomption de quid pro quo (de « donnant-donnant »), concluez au quiproquo mal intentionné de la part des démocrates qui déforment tout.
Autre angle d’attaque, les mensonges du Donald. Qui hurle à la machination, à la chasse aux sorcières, fait état d’un complot contre lui. Avec des arguments fallacieux. Comme d’affirmer que le serveur d’une compagnie américaine (CrowdStrike) a été cédé aux services ukrainiens, et non, comme en réalité, aux russes.
Le truc : ne plus nier qu’il y ait eu la moindre interférence étrangère dans la campagne électorale présidentielle, mais l’attribuer aux Ukrainiens, et non aux Russes. Raté, la déposition de Fiona Hill, ex-haute fonctionnaire chargée de la Russie, contredit cette allégation. Après la déposition de Gordon Sondland, plénipotentiaire auprès de l’Union européenne attestant que Trump s’est bien livré à un chantage auprès du président ukrainien, cela équivaut à enfoncer un nouveau clou dans le cercueil de la piteuse défense de la présidence.
Je présume que vous avez aussi survolé les épisodes précédents, donc, je n’insiste pas…
Et puis, il est beaucoup plus cocasse d’évoquer les derniers à-côtés. Trump s’emmêlant une fois de plus les pinceaux lors d’un entretien téléphonique de près d’une heure avec Fox News (émission Fox & Friends)… Déclarant : “I do want, always, corruption”. Sa langue fourchue a de nouveau trébuché.
Mais faire remonter à la présidence Obama le complot contre lui dirigé n’est pas mal non plus. Assurer que les avocats de Gordon Sondland sont les mêmes que ceux d’Hillary Clinton, et qu’en dépit de sa donation à la campagne de Trump, c’est un faux nez des démocrates, n’est pas malvenu, c'est du tout Trump.
Pissotant aussi de le voir se plaindre de Marie Yovanovitch, de l’ambassade US à Kiev, qui aurait refusé de suspendre son portrait présidentiel officiel dans les locaux. « Cette femme n’est pas un ange », sous-entend le Donald (il est vrai aussi qu’elle n’avait pas débarqué à Omaha Beach, de même que les combattants kurdes, mais, là, il n’a pas osé l’avancer).
Bien aussi, ce commentaire sur la démocrate Pelosi : « aussi foldingue qu’une punaise de lit ». Sur Adam Schiff, présidant les débats et auditions, ayant déclaré que Trump a fait pire que Nixon : « un chiot dérangé » (constipé de la tête).
Les diatribes contre la presse valent leur pesant de cacahuètes. Le Washington Post est un quotidien contrefait, fallacieux (phony), le New York Times, qu’il ne lit pourtant plus, assurait-il, lui fait chaque jour lever les yeux au ciel.
« Concussion et extorsion », a résumé un ancien procureur du Watergate à propos de l’affaire ukrainienne (bribery and extortion ; mais placer concussion au lieu de corruption dans une conversation est toujours du meilleur effet et personne ne vous reprend habituellement).
Bon, si botter en touche ne suffit pas, digressez total (sur le Brexit, par exemple). Vous pouvez aussi citer les titres de divers journaux se fondant sur des documents officiels, et résumant ainsi : au cours des cinq premiers mois de la présidence Trump, les services secrets ont versé 2 000 dollars par jour dans les escarcelles des sociétés du group Trump (dont 40 versements au Trump National Golf Club). Le Donald et ses suites ont passé déjà 224 jours à jouer au golf ou se rendre dans l’un des clubs du groupe. C’est un peu comme si Emmanuel allait un jour sur trois dans les pâtisseries-chocolateries de la famille de Brigitte Macron, et gavait ses escortes de friandises (personne ne vous reprendra sur ce décompte farfelu).
Le Donald, ou le gavé gavant… le public de tweets affriolants.