Les femmes (Noires incluses) voteront-elles plus Trump que Harris ?
Je ne prévoyais
pas la victoire de Donald Trump en 2016, contrairement à Michael Moore qui
vient de récidiver. Si le documentariste se fonde sur l’écart qui se comble
dans les sondages entre Trump et Biden dans les États cruciaux, ses explications
du phénomène sont faibles. Le survolté Trump sait enthousiasmer ses partisans,
et non l’ensommeillé Joe (comme le qualifie le Donald). Certes, mais c’est
oublier plus crucial, le vote féminin pour la sécurité au quotidien.
Féminists for Trump proclamait une épinglette de 2016. Ce n’était pas totalement inexact. Et le fait qu’Hillary Clinton n’enthousiasmait pas vraiment les électrices ne fut qu’un élément d’appréciation. En fait, nombre de femmes s’estimant féministes (au moins à leurs propres yeux) ont voté Trump en 2016. Certes, il ne se prononçait pas du tout pour l’avortement, mais ce n’est qu’un problème que pour plus pauvre que soi, et c’est ce qui compte avant d’autres considérations.
En 2020,
Trump clame qu’il protégera la banlieusarde et c’est ce qui importe en priorité
à la banlieusarde blanche, celle qui votera. En sus Trump, même s’il s’agit
surtout de promouvoir sa fille Ivanka, qu’il verrait bien lui succéder dans douze
ans (ce serait anticonstitutionnel, de se maintenir au-delà de deux mandats ; mais
le Donald s’en contre-fiche), l’électorat féminin a été sensible à ce que la convention républicaine à mis nombre de femmes en avant. Les oratrices se sont même faites plus
remarquer que les orateurs.
Bien
évidemment, les mêmes considèrent aussi que les vies noires comptent, mais d’abord
les leurs. Et que la vie d’une policière de couleur, mère de trois enfants,
abattue froidement à New York par un homme de même couleur, alors qu’elle était
assise sur son siège de la voiture de patrouille, leur importe tout autant et
plus que celles d’un George Floyd, plusieurs fois condamné précédemment, y compris
pour avoir agressé une femme enceinte. Candace Owen, femme de couleur, sut le
mettre en avant pour se distancer du mouvement BLM. C’est une influenceuse conservatrice
qui ne se définit pas moins féministe que d’autres.
Quant à l’exécuté
de Kenosha, Jacob Blake, la police sait faire valoir qu’il était recherché pour
harcèlement, violences sexuelles, et autres faits. Aucune mère de famille de
couleur ne va bien sûr pas soutenir publiquement que cela justifie son
exécution, mais il s’en trouve suffisamment pour déplorer publiquement les
émeutes et les incendies. Et déclarer préférer voter pour Trump.
La rousse
Ann Coulter, une autre influenceuse, tout aussi conservatrice à fait d’ailleurs
état de son soutien au jeune blanc ayant tué des manifestants de Kenosha (elle a depuis élimininé son tweet).
Que de
très nombreuses électrices se fourvoient ou non sur Donald Trump n’est plus à présent
à tenir en ligne de compte. La réalité de la suite importe moins que ce qu’elles
peuvent considérer à présent et au moment d’aller voter. La campagne de Trump a
semble-t-il réussi à les en assurer, et il est fort possible que la suite en
découlera.
L’économie ?
Allons donc, Ivanka Trump est une successful businesswoman (pas tant que
cela, même avec les coups de pouces appuyés de son daddy, mais l’important,
c’est qu’elle le paraisse). La crise du covid ? Très bientôt près de 180 500
décès. Mais au-delà de 100 000, ce n’est plus qu’une statistique à
laquelle les citoyennes et citoyens des grandes villes restent sensibles, mais beaucoup
moins les États rouges (de la Trumpland). Certes, l’État le plus peuplé, la
Californie, désigne 55 grands électeurs, et les moins peuplés n’en désignent
que trois.
Trump fut
élu grâce à ce système mais aussi parce que des femmes de tous âges, se disant
féministes, dont certaines avaient voté pour Obama (voire pour le couple Obama), ont contribué à le porter au pouvoir. En croyant qu'il était pour l'empowerment féminin. D'ailleurs, il revendique (certes à tort, mais qu'importe, il a vraiment l'air de le croire et s'en est sans doute auto-persuadé) qu'il a promu plus de femmes dans son administration qu'Obama l'avait fait.
En 2016, Camille
Paglia, que les féministes se définissant plus conformes que d’autres conspuent,
avait fort bien analysé le vote des femmes pour Trump. Aux dernières nouvelles
certains de ses étudiants voudraient la voir remplacée par une autre
enseignante transgenre mais « de couleur » (a queer person of
color). Elle se prononçait certes pour Bernie Sanders, mais comme elle est
athée en tout. Elle rejoint Michael Moore en estimant que Trump est un meilleur
comédien et bonimenteur forain que ses adversaires.
Estimer qu’une
majorité de femmes applaudiront le meilleur artiste serait faire preuve d’une
mysoginie qui ne voudrait pas s’avouer telle : le problème, c’est que Trump
n’a pas besoin d’une majorité d’électrices pour se faire reconduire, simplement d’une
minorité suffisante.
Mettons
que j’ai d’autres types de préjugés. Ainsi, je considère que l’ex-Québécoise
(anglophone) Kamala Harris et Karine Jean-Pierre (Haïtienne et Martiniquaise
francophone) sont intellectuellement et humainement considérablement supérieures à
un Donald Trump. Mais face au métier de la scène d’une Melania ou d’une Ivanka
Trump, elles ne font guère le poids. Moralement, on pourrait s’en réjouir.
Elles tenteront de faire réfléchir et les Étasuniennes et les Étasuniens,
parviendront même peut-être à les convaincre, mais pas automatiquement de se
rendre aux urnes.
Si vous
ajoutez à cela que certaines féministes « plus dévotes que toutes les
autres » seraient bien capables de les désavouer, le risque que le féminisme
étasunien devienne incarné par une Sarah Palin (celle du Tea Party) ou
similaire ne peut être écarté.
Or la
critique de Harris d’un point de vue féministe a commencé avec des articles dans
divers médias. Ces critiques qui ne sont pas totalement sans fondement, restent
cependant contenues, minoritaires. Bien, je préfère aussi le style d’Ocasio-Cortez,
qui avait soutenu Bernie Sanders. Non parce que Latinx, mais plus « verte »,
plus sociale, plus pugnace face à Trump (ou Zuckerberg qu’elle a su moucher).
Il reste
que les démocrates vont aussi montrer qu’elles et ils savent promouvoir les
femmes. Selon le New York Post, le maire démocrate de New-York, Bill de
Blasio, pourrait tenter de passer le relais à l’Afro-Américaine Maya Wiley.
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