Aux É.U.,
c’est Daesh version chrétienne
Donald
Trump a laissé entendre que Koyle Riettenhouse, qui a tué deux personnes à
Kenosha, avait tiré en légitime défense. Bien sûr il ne savait pas que son
protégé avait, le premier juillet, tabassé une jeune fille pour le plaisir. La
Maison Blanche et la police s’enferrent dans le déni pour assurer la réélection
de Trump.
Restons maîtrisés et non véhéments : que le jeune Rittenhouse, 17 ans, ait rossé davantage une jeune fille prise à partie par les copains d’une autre n’implique pas la suite de ses actes. Et que Donald Trump veuille trouver des alibis à tous ses partisans n’a rien de nouveau. Cet autre fait divers n’en reste pas moins significatif d’un mouvement d’ensemble. Une large étude portant sur les adhérent·e·s aux thèses complotistes dégage une forte majorité d’hommes blancs, mysogines, se croyant ou se voulant supérieurs aux autres (en particulier aux élites libérales) et inquiets du pouvoir ascendant des femmes dans la société étasunienne. Bref, ils ont tout pour reconnaître Trump pour l’un des leurs.
Quant aux
hiérarchies policières couvrant leurs subordonnés en cas notamment non de
bavures mais d’exactions criminelles, tout argument est bon, réel bien sûr,
partiellement réel ou carrément fabriqué. Parmi les récents exemples en date,
le cas de Breonna Taylor, abattue dans son appartement. Elle avait un ami d’enfance
qui se livrait possiblement à des trafics de drogue. Au départ, ce dernier
déclare que Breonna n’avait aucune part dans ses activités illicites. À
présent, il a été sollicité pour déclarer le contraire et impliquer Breonna et
bénéficier de faveurs judiciaires, rapportent NBC et d’autres médias. Des
avocats de la famille Taylor ont pu produire un document en ce sens. Bien sûr,
le parquet du comté de Jefferson a totalement démenti que cette manœuvre visait
à dédouaner la police.
À
Portland, dimanche dernier, la police a maté violemment des manifestants qui se
livraient effectivement à des dégradations. On voit notamment des policiers
frapper un homme à terre à coups de crosse de fusils. Que fait le chef de la
police de Porland. Chuck Lovell, de sa propre intiative (c’est un Afro-Américain)
ou sous la pression de ses effectifs interpelle le maire démocrate de Portland
qui avait dénoncé tous les types de violences. Le policier réclame des
sanctions visant les manifestants et tait tout rapport de cause à effet entre
les violences policières et l’exacerbation des (enfin, non pas des, de certains,
mais il ne le précise pas) manifestants.
En fait,
un peu partout, la police — ou du moins les policiers estimant que la réélection
de Donald Trump leur vaudra des primes ou des revalorisations — incitent les
milices d’extrême-droite et ceux qui s’y assimilent pour se faire valoir à
leurs propres yeux et ceux de leurs proches connaissances, à des affrontements
avec les mouvements BLM ou associés. En gros, c’est « venez avec nous
casser des rouges et des criminels ».
Au-dessus,
Trump laisse entendre que les milices bénéficieront de l’immunité voire laisse
présumer qu’il accordera une grâce présidentielle à ses partisans risquant d’être
poursuivis et condamnés.
Cela
devrait suffisamment fonctionner dans nombre d’États, surtout les moins
peuplés, mais qui envoient davantage de grands électeurs que les États
favorables aux démocrates.
De leurs côté,
les hackers russes tent de dissuader l’électorat démocrate proche de Bennie Sanders
et d’autres catalogués radicaux d’apporter leurs voix au tandem Biden-Harris.
Ils continuent aussi, avec des comptes fictifs, d’entretenir des thèses
complotistes. Ce qui revient à une collusion de fait avec Trump et la
Trumpland.
Bien sûr
qu’ils soient athées ou simplement financièrement intéressés (le milicien de
Portland tué était spécialisé dans les livraisons et déménagements de
coffre-forts pour armes à feu) se réclament du christianisme et du nationalisme.
À Kenoscha, Trump a fait une tournée des destructions. Comme un commerçant dont
la boutique a été incendiée ne voulait pas poser à son côté, l’équipe de
communication de Trump est allée dénichée son prédécesseur, le présentant tel l’actuel
exploitant.
C’est dans
la presse et sur les sites de presse, mais toute la presse n’étant pas
systématiquement pro-Trump est discréditée et les complotistes ne font
confiance qu’aux réseaux sociaux les renforçant dans leurs convictions. Il se
targue d’avoir conversé avec le révérend de la famille de celui auquel les
policiers ont tiré dans le dos, la famille défend formellement, mais peu
importe. La Trumpland retient que Trump est un excellent chrétien et que Biden
pousse aux violences et aux destructions. C’est d’ailleurs son seul argument
électoral : faites-moi confiance pour restaurer l’ordre et l’application
des lois. Tout opposant à Trump étant un terroriste en puissance (sa dernière :
armé de boîtes de conserves de soupe lancées contre les policiers).
Trump a
carrément admis que déplacer l’ambassade de Tel Aviv à Jerusalem ne visait pas
à fidéliser un électorat juif qui s’étiole, mais à sécuriser celui des évangélistes.
De toute
façon, la Trumpland se moque de savoir que son herault conforte l’islamiste
Erdogan en Lybie et contre la Grèce pour fragiliser l’Union européenne, en plein
accord avec Poutine. L’avortement (sauf bien sûr quand la maîtresse ou une
gamine enceinte pourrait réclamer des subsides), les armes, les églises et le
drapeau sont ses seules préoccupations. Comme le rêve américain s’éloigne pour
celles et ceux (surtout ceux) qui sont laissé pour compte, le complotisme
devient un refuge, une compensation pour l’amou-propre malmené par les faits et
la dèche (toute relative). Trump invente que des milliardaires affrètent des
avions pour amener des terroristes perturber la convention républicaine (tiens,
ils ne prêtent pas leurs jets privés : comme la presse dément, c’est que
cela doit être vrai, forcément. C’est le réflexe : vous avez des diplômes,
une meilleure situation que moi, mais moi, je sais ce qui se trame et avec
Trump, je vais retrouver le pouvoir de changer les choses à mon avantage.
Cela ne s’est
pas produit en quatre ans mais, c’est évident, en quatre ans supplémentaires,
cela adviendra.
Comme, en
face, une majorité ne pense pas que Biden fera beaucoup mieux qu’Obama, beaucoup
restent la tête dans le sable. En fait, Trump applique les méthodes de Daesh et
galvanise la Trumpland. La conjonction des deux semble en passe de lui valoir
sa réélection.
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