lundi 8 juillet 2019

Les trois soulèvements de Denis Guénoun

Trois soulèvements : après ceux de Denis Guénoun, celui de Patrick Corneau

Il sera question ci-dessous beaucoup moins du livre de Denis Guénoun (Labor & Fides éds), Trois soulèvements, que d'autres choses, et en particulier de la présentation de cet essai par Patrick Corneau...
Procrastiner, c'est mon dada. Auquel je peux m'adonner d'autant plus aisément, et intensément, que je ne m'intéresse plus sérieusement à rien. Plaisamment, c'est tout autre... Et là, toutes affaires cessantes, je m'élance, vite et mal, pour rédiger ce qui suivra, à propos de la chronique d'un certain Patrick Corneau, titrée sobrement, en réunissant les titre et sous-titre du livre de Denis Guénoun : « Trois soulèvements — judaïsme, marxisme, et la table mystique ». Parce qu'épaté...
  Je me suis intéressé à Denis Guénoun à la suite d'un hasard pas si fortuit qu'il pourrait y paraître, ou tout à fait si l'on s'en tient à la définition de la fortuité (vu qu'en général, je ne cherche rien, j'attends que cela advienne...). J'aurais sans doute fini par oublier Denis Guénoun, certes pas durablement, mais rien ne me pressait de lire son Trois soulèvements.
  J'eus en mains ce compact essai de 140 pages en petit format — réparti en trois « actes » (apostoliques ? assurément peu romains) de huit à dix « scènes » chaque — pratiquement lors de sa sortie (avril ? mai dernier ?), le laissant en d'autres, de fort bonnes, assuré de le retrouver en temps utile. Lequel n'est pas venu, quoique il pourrait surgir plus tôt que prévu, soit que je n'attende pas qu'il me soit prêté...
  J'ai d'abord « rencontré » Denis Guénoun, homme de théâtre, surtout en sa dimension d'ex-directeur de La Comédie de Reims (un Centre dramatique national), en quelques dizaines de pages de la thèse d'Annette Gardet sur la dite (elle couvre le théâtre de la décentralisation à Reims et alentours jusqu'en 2002). Puis par deux-trois fois, en « visu » et correspondance. Très, très forte impression : un homme, un personnage, un érudit, &c., d'une rare bienveillance, d'une forte capacité d'écoute et de dialogue (pour un auteur dramatique, cela peut paraître une évidence, mais j'en ai connu d'autres... ). Et si j'en crois Patrick Corneau, son monologue (son ouvrage), serait d'une large portée conversationnelle (anglicisme).
  Mais Denis Guénoun « se » rappela à moi, encore par l'entremise d'Annette Gardet qui l'a invité à une rencontre à la Médiathèque de Reims, le 5 octobre prochain, en fin d'après-midi... Laquelle me glissa : « tu vas quand même me faire quelques lignes sur ton blogue-notes ». Oui, bon, pas le feu, et je lui conseillai d'ailleurs de ne pas se précipiter à balancer des communiqués de presse, sauf en fonction de la périodicité des publications (pour certains mensuels, mieux vaut s'y prendre deux mois à l'avance). Eh bien, j'y reviendrai, vers tout début octobre. Revenir sur le livre, l'ayant lu ? Le trac me saisit....
  Car j'ai lu ce qu'en écrivit Patrick Corneau, dit « Le lorgnon mélancolique ». Et franchement, quand tout semble dit, et avec quel talent, autant parler d'autre chose, de plus accessible (au pif, le livre de Galla Ackerman, Le Régiment mortel – La guerre sacrée de Poutine, Premier parallèle éd.). Sacré Poutine, sacrée Grande Russie... Et peut-être qu'il se pourrait qu'un rapprochement, un vague apparentement, m'autoriserait à évoquer le long soulèvement monarcho-soviétique en me référant à la trilogie (sans doute pas antitrinitaire, ou alors mode anglican) de Guénoun. Lequel, comme le cite Corneau, a opté, sur un mode « qui pourrait mériter, si l'on parvenait à le dépouiller de toute bimbeloterie religieuse, le somptueux terme de conversion ».
  Je savais, m'étant documenté, Denis Guénoun de culture mixte : israélite séfarade par son grand-père (ou autre aïeul ?) rabbin, farouchement laïque par son père, genre hussard noir athée et militant communiste. J'ignorais qu'il était passé des philosophes allemands (et autres) au marxisme, et en reste probablement intellectuellement proche. Autant dire que l'ouvrage peut être placé dans la bibliothèque d'un libre-penseur, en tous sens de l'appellation.
  Lire « ce » Corneau, soit dit en passant, donne envie de prendre davantage connaissance de textes (et romans, récits) de cet autre auteur. 
  Les deux ont en partage une attention rigoureuse à la signification des mots, aux étymons, sens dérivés... Qui est patente ou non (pas trop fortement marquée dans ce « Jean Grenier et la Bretagne – Le perpétuel et son bruit de source », d'abord — d'un abord — moins ardu que d'autres). Assurément une vaste connaissance des philosophes. Et c'est d'ailleurs pourquoi j'avais buté sur ce « sans éclectisme » de la quatrième de couverture des Trois soulèvements.
  Au fait, j'allais idiotement oublier. Denis Guénoun alimente un site personnel : denisguenoun.org. Sur lequel je vois que sa pièce, X ou le petit mystère de la passion, reparaît avec une nouvelle préface « post-soulèvement(s) », et c'est là : « Préface (2019) ». La dédicace de la pièce est sans doute l'originale (« Il y a deux athéismes, dont l'un est la purification de la notion de Dieu. » — Simone Weil ; à mon sens, il doit s'agir de l'aînée, en date, de l'autre).
  Ce que je pressentais de ce livre, et ce sans avoir lu Courneau, j'imagine que j'aurais pu me le formuler en soliloque, c'est que la partie proprement autobiographique est réduite à l'essentiel en rapport avec le propos, le dessein (la table des matières, actes et scènes, est consultable en ligne), et sa morale, au sens des fabulistes, serait peut-être : sois au moins charitable avec toi-même, et accorde-toi l'espérance. En « précisément ce monde-ci » (ou celui d'à côté, là, du proche, des autres, ou du lointain) et non en un incertain « autre », du-delà (un monde qu'Andréas Dettwiler, s'adressant à Matthieu Mégevand, un Suisse comme Chessex – et zut, voilà que ma non mono-maniaquerie me reprendrait ? — vaillandement ?  sait évoquer « en un langage proche des gens »).
  Ce que je m'imagine, en visionnaire de comptoir, comme Jean-Marie Gourio, c'est qu'alors qu'ici j'écris pour moi (un peu pour d'autres quand même, celles et ceux décryptant, et surtout sachant poursuivre, voulant savoir qui sont ces Dettwiler et Mégevand...), Denis Guénoun écrit pour tu, elle, il, nous, vous, elles, ils (même s'il s'agit de la col. « Lignes intérieures »). Retour à Reims (Didier Eribon) : tous les chemins mènent à la ville des sacres, pourquoi pas pour le 5 octobre, au rendez-vous (16 h), de la Médiathèque ? Casé deux fois : j'ai bon ?
 J'ai eu la curiosité d'aller voir quelle était cette maison, genevoise, Labor & Fidès. En vedette, l'Olivier Abel, Le Vertige de l'Europe. Genève, ville sale ; les Suisses, « au mœurs sauvages » : « un Kirghize dans sa yourte vit plus proprement qu'ici » (Dostoïevski). A y-est : l'apparentement — tiré par les cheveux — est fait (voir supra). Fiodor haïssait les Européens. Guénoun vous dit : en vérité, en vérité, va... et ne te haïs point. Le chemin n'est pas si long, et Trois soulèvements est sans doute un raccourci à emprunter. Direction Reims, 5 octobre, Médiathèque (16 heures). Par trois fois (Matthieu, 16, 19 ; ou à proximité). Élève fantasque mais de bonne volonté, appliqué à l'occasion, pourra mieux faire (Annette est prof'). Après avoir lu Trois soulèvements

Médialogie : police pourrie, justice aléatoire, presse…


Presse et police : la presse moins que… l’IGPN ?

Eh bien voilà : titre incitatif ou racolage ? J’écris pour moi, un peu pour vous, et à l’occasion «  pour Google  »… Là, j’ai le rouge de la honte au visage, mais j’assume, titres pour Google. Or donc, et c’est le fait significatif relativement nouveau ; Jean-Michel Décugis et Jérémie Pham-Lê, du Parisien (ex-Libéré) mentionnent un media en ligne, Les Jours, en tant que source initiale de leur enquête sur des ripoux de la Bac du 18e ar. de Paris.
« Écrire pour être lu ». Stage au CFPJ d’un confrère strasbourgeois et d’autres (prédécesseurs, successeurs). Pas « putassier » (au sens de racoleur, avec titres incitatifs, genre gutter press britannique). Que ce soit en ligne (mon papier sur Alexandre Langlois, ici-même, sur ce blogue-notes) ou dans la presse prédominante, de toute façon, nous pissons dans un violon. Enfin, pas tout à fait. Sur le moment, oui. À la longue, peut-être, pour un temps très court, parviendrons-nous à ce que le ménage soit fait dans la police (même un Pierre Joxe finit par baisser les bras, et un Chevènement s’inquiéta surtout de son aura et de ses ambitions ultérieures).
Comment fut recruté Karim  M., à présent 35 ans ? Au détriment de candidats largement plus qualifiés, mais estimés devenir moins dociles, moins conformes aux souhaits de…
Rackett rima avec Roquette (commissaire jetant l’argent de la drogue prélevée par ses subordonnés, se servant très largement pour lui-même et ses plus proches affidés, descendu — exécuté — dans un parking souterrain et l’IGPN d’alors oublia de solutionner). Et la presse ferma les yeux. Val, Philippe, notamment, de Charlie. Ce n’est pas qu’il pensait déjà à cirer les bottes de Nicolas Sarkozy, mais qu’en patron de presse responsable, il savait ce que cela signifiait de s’en prendre aux mafias (de l’époque, car bien sûr, fondations x-y du ministère de l’Intérieur, legs de Pasqua, &c., tout cela est révolu…) pouvait coûter. Aucun ressentiment de ma part.
Vous ne comprenez rien à ce qui précède. C’est que vous le voulez bien. Ou avez d’autres chiens à fouetter, ou préférez rester obtus, ce que je respecte.
Voici donc que deux confrères citent un « site Internet », le nomment, alors qu’il se passe d’annonces publicitaires. Les Jours. À propos d’un policier, qui « n’aurait dû jamais entrer dans la police », mais que sa hiérarchie protégea (pas tout à fait comme Alexandre Langlois, enfin, pas toute sa hiérarchie). Divers pauvres types, des flics, des poulets (en cage, pauvres volatiles servant la République) vont peut-être écoper (leurs supérieurs, non, présume un Alexandre Langlois). Sauf qu’au fond, assure Me Claire Doubliez, avocate d’un Karim (dont je pourrais retrouver le patronyme si je m’en donnais dix minutes la peine), son client ne se serait jamais livré à de la corruption. Partant, jamais partagé le moindre profit avec sa hiérarchie. Insolite. Contre-exemple ? Je n’ai aucun élément pour l’affirmer. Et bien sûr, sur le commissariat de La Roquette, j’ai tout inventé : toute ressemblance avec des faits réels et ayant existé est purement fortuite.
La peur. La peur qui me taraude encore pour revenir sur la mort du chauffeur d’Alain Peyrefitte, maire de Provins. La peur, car, quoi qu’ils puissent en dire, au pouvoir ou de l’opposition, pour certains et la plupart, les intérêts communs priment sur d’autres considérations. La peur, car, comme l’énonce Alexandre Langlois, rien ne vaut le droit pour rendre légal l’illégitime, l’extorsion, le léonin, l’abject. La trouille. D’accord, je suis négligeable. Donc je risque peu. Mais j’en ai connu de moins insignifiants qui… Or donc, oubliez donc ce qui précède. Je retire « justice pourrie » (car j’ai connu tant et tant de magistrates et magistrats intègres), police je ne sais quoi, car je m’honore des amitiés de policiers probes, et que, que vous l’admettiez ou non, la déontologie des journalistes vaut ce qu’elle vaut (risquer d’être tricard au commissariat expose à…). De temps à autres, quelques enquêtes approfondies surgissent (là, où est celle voisinage ?). À l’occasion, quelque consœur, largement des crans au-dessus d’un Roger Vailland, creusent (mes respects à ma voisine de la rue d’Enghien, Florence Aubenas, auteure du Quai de Ouistreham, entre autres). Et nous, ben, on s’obstine bêtement. On a tenté (Rémi Lainé et d’autres). Des « moindres » (Catherine Daudenhan, parmi tant d’autres dont « la » Vaudrey, Danièle, n’ont rien de moindre, juste deux exemples, et Isabelle Horlans en garde à vue, en fut une autre) et d’autres. On nous conchie (« presse pourrie »). Ben, journaleux un jour, journaleux toujours. Avec la trouille, aussi. Et vous ? Peur du gendarme, salutaire. Peur de la police ?

dimanche 7 juillet 2019

Libye : dans l'incertitude, s'abstenir

Libye : une guerre entre fractions islamistes ?

Bien malin qui pourrait vraiment dire ce qui se joue — ou déjoue, et délite — en Libye. L’expérience, ou plutôt le recul, laisse suggérer que l’inexpérience conduira les appuis étrangers des parties en présence à favoriser l’aggravation d’une situation peu contrôlable.
La presse relate les faits (une cinquantaine de personnes tuées lors d’un raid aérien à l’est de Tripoli) et relaye les déclarations des uns et des autres, dont celles du Vatican qui suggère une sorte de couloir humanitaire pour exfiltrer (vers ou  ?) tous les migrants cherchant à transiter via la Libye.
Déjà, on ne sait trop qui était vraiment visé (réfugiés « économiques », « politiques », ou venant d’autres zones de guerre, leurs exploiteurs ou chefs libyens liés à des milices, des stocks de munitions ?), ni trop quel pilote, de quel bord, était aux commandes de quel appareil…
Électrons crochus
Je ne reviens pas en détail sur les conclusions de la commission tripartite d’enquête parlementaire en Libye en mars 2011 (rapport publié en septembre 2016). Deux choses cependant : les Britanniques (membres du gouvernement, très hauts fonctionnaires, élus éminents) les plus favorables à l’intervention furent les plus jeunes et les plus marqués par le massacre de Srebrenica, commis par les forces serbes en 1995 (p. 16) – et non par les rodomontades de Bernard-Henri Lévy –, les plus réticents étant les plus âgés. De deux, la profonde méconnaissance des protagonistes libyens, l’absence quasi générale de sources fiables (multiples pages). Bref, Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, David Cameron, Lord Hague of Richmond, &c., ont foncé tête baissée, avec déjà l’appui de nations du Moyen-Orient. On se souvient de la « dissidence » d’Angela Merkel qui finit par accorder un soutien quasiment de pure forme à l’intervention, des hésitations de Barack Obama.
Il semble que la conscience de l’inexpérience soit désormais plus forte du côté de l’Élysée et du Quai d’Orsay, alors même que l’expérience (aux deux sens du terme ?) de l’intervention au Mali a sans doute contribué à réduire l’inconscience (Jean-Yves Le Drian, ex-ministre de la Défense, est sans doute plus pondéré que le fut Michèle Alliot-Marie).
Je ne suis aucunement qualifié pour m’aventurer dans une véritable analyse de l’actuelle situation ; mais je subodore que France, Italie, et autres puissances européennes, tentent vaguement d’influer comme elles le peuvent celles qui paraissent engagées dans l’actuel conflit…
En gros, il s’agirait d’un côté des Émirats et de l’Égypte (Benghazi et ?), de l’autre du Qatar, de la Turquie et, au gré des événements, de la Russie (Tripoli et… ; voire en fonction de l’issue ?). Ainsi résumé, cela semble clair. En réalité, ni les uns, ni les autres ne savent sans doute vraiment qui seraient ceux qu’ils appuient. Je ne saurais d’ailleurs dire de quelles milices (islamistes d’un bord ou d’un autre) le maréchal Khalifa Haftar est… quoi ? Faux-nez, redevable ? Quant au gouvernement « d’accord national » — les guillemets de distanciation s’imposent —, ne sachant qui est qui, qui roule pour qui (lui-même, telle ou telle autre milice tout aussi islamiste ou territoriale, tribale, clanique, mafieuse), je reste incapable de me prononcer.
En sus, il se peut qu’il y ait aussi des électrons dont on se sait trop s’ils sont libres ou liés : Daech et Al-Quaïda, sans doute, quelques autres obédiences, de fidélités incertaines. Qui peuvent jouer leur propre partition ou celles d’autres (pas forcément toujours les mêmes, des retournements ont été ou sont peut-être possibles).
Sur un point « de détail » (idem supra), on se demande si Erdogan n’adopte pas la posture d’un Sarkozy… Soit, en perte de vitesse, se hisser dans le rôle du chef de guerre. Détail qui a son importance, peut-être mineure, car la Turquie a des intérêts actuels et prévisibles pour entrer dans la mêlée. L’expérience de la Syrie n’a donc pas, ne suffit pas encore. Dans un premier temps, Erdogan avait facilité les menées de l’État islamique (à la doctrine à peu près compatible avec celle de certains Frères musulmans un temps), avant de se raviser et de déplorer des attentats. L’Égypte suit les Émirats et l’Arabie qui la soutiennent économiquement et qui ont, elles et ils, aussi compris que financer et armer des sectes islamistes n’était pas durablement rentable. On ne sait trop si la Russie observe seulement comment le vent tournera ou agit (pas trop ouvertement, ni fortement) en sous-main.
Ce qui est sûr c’est que l’unité nationale libyenne n’a tenu que 40 ans, conditionnée par une dictature dont c’était l’intérêt. Et puisque l’on parle des Russes, il faut mentionner Saïf Kadhafi, présumé totalement libre de ses mouvements depuis juin 2017 contre… on ne sait trop quoi et en faveur de qui outre lui-même. Et il n’est même pas sûr que le Kremlin le sache. 
Fumeux ? J'assume...
Je voudrais bien que tout ce qui précède ne soit que balivernes, billevesées et calembredaines (en particulier sur les affinités de la Russie, pas vraiment limpides). Relire quelques proclamés « experts » s’étant exprimés en 2011 me placerait en assez large compagnie. Et Trump dans tout cela ? Soutient-il le, les plus solvables ou le, les plus prometteurs ? Il n’est pas sûr qu’il puisse compter sur lui-même pour se le dire… America first, certes, mais peut-être avec des intérêts contradictoires, antagonistes. Une firme américaine a signé un accord avec Benghazi pour doter la Cyrénaïque d’un grand port à Susah.
Ankara serait aussi engagée coté Tripoli dans l’espoir de signer un accord sur les eaux territoriales (dont les fonds pourraient receler du pétrole exploitable) tandis que la Grèce et Chypre pencheraient pour Benghazi.
Il y a aussi quelques à-côtés découlant de la situation antérieure : par exemple, des pays détenant des fonds libyens gelés les imposent (Kadhafi & sons avaient placé beaucoup de millions un peu partout hors de Libye). Des dividendes seraient versés à la Libyan Investment Authority (une institution apparemment opaque). Et on ne sait pas trop où une partie du pétrole produit en Libye « fuit ».
Ah, au fait, pour finir : trop chercher à en savoir sur la Libye exposerait à se voir infecter par des virus. Selon diverses sources semblant fiables, il y aurait eu près de 50 000 utilisateurs de Facebook (dont le Premier ministre « tripolitain » Fayez al-Serraj) ayant visité de fausses pages d’Haftar ou d’autres personnages, auraient été infectés. Facebook aurait fait le ménage fin juin dernier… La Libye, épineux problème… empoisonnant.
J'avais écrit « pour finir » ? Nan !
Revenons aux faits, et laissons là mes élucubrations. Les offensives, défensives, contre-offensives ont débuté le 4 avril dernier. On doit en être à plus d’un millier de morts (sur env. six millions d’habitants). Aux dernières nouvelles, la milice Front Populaire (présumée proche de Kadhafi fils, mais allez savoir… aurait fait allégeance à «​ Benghazi »). La Cyrénaïque n’a pas réussi son offensive sur la Tripolitaine. La France est présumée — ce qu’elle dément — soutenir la Cyrénaïque (d’où drapeaux français brûlés, gilets jaunes endossés par des manifestants en Tripolitaine). Et il est question d’élections prochaines (où ? comment ? autre histoire…). Et pour tout vous dire mon sentiment profond (pas forcément lucide), quand la chienlit libyenne se projettera sur les pâles (et pales) du ventilateur mondial, de migrantes éclaboussures nous maculeront la figure…
La faute à qui ? Aux « Juifs », à Soros, aux adorateurs du nombril, l’Opus Dei, les yakuzas, aux desseins d’un dieu ou d’un autre ? Ou aux incompétences des parties en présence ? Qu’on se rassure, les victimes seront oubliées, et les irresponsables, pour la plupart, couleront des jours heureux dans le luxe. Ceux-là auront « sauvé le monde » d’un péril plus grave encore. C’est vrai : quand des hommes et des femmes et des enfants meurent, la diversité animale bénéficie d’un sursis.

samedi 6 juillet 2019

Neiges sanglantes, « mauvais film » pour Roger Vailland

 Vailland, critique cinématographique... au pied levé

Affirmer que Roger Vailland fut un critique de cinéma, autre que d'occasion, serait exagéré. Mais il fut, dans le rôle, parfois bon, parfois moins. Avec ce film, Neiges sanglantes, on pourrait l'estimer médiocre. Mais non pas mauvais journaliste, car son compte-rendu tient du prétexte pour aborder un tout autre sujet.
Je ne vais pas vous résumer, ici, la critique du film Neiges sanglantes, paru dans L'Européen (trente-septième numéro). Elle est reproduite dans un document PDF, lequel donne d'autres points de vue sur ce film soviétique. Ni vous indiquer que, ça et là, sur ce même blogue-notes, vous trouverez d'autres articles de Vailland en rapport avec le cinéma (le sujet du rapport de Vailland, scénariste et en d'autres rôles, avec le cinéma, est notamment traité sur le site qui lui est spécifiquement consacré, roger-vailland.com). Sa critique du film ne vise pas à mettre en valeur telle ou telle comédienne qu'il aurait courtisée ou séduite (on aurait sans doute maints autres noms à évoquer), ni à faire étalage d'une réelle connaissance du septième art. Pour cela, voyez Scarpetta, et d'autres éminents critiques lui ayant succédé dans les colonnes des journaux, revues, et magazines (l'ami Baudou, autre Rémois, n'est pas mal non plus...).
Certaines et certains que je ne nommerai pas ramènent beaucoup de ce que put écrire Vailland à la brouille avec Aragon et Breton... À tort ou à raison. C'est un angle qui se conçoit. Mais si j'y fais allusion, c'est furtivement. Parce que, cette présentation d'un, et de « mauvais » films en général, y incite.Cela étant, je suis peut-être à côté de la plaque, de l'arrêt sur image, ou plutôt du plan. Vailland a d'ailleurs tapé latéralement à propos du traitement de ce film historique (il s'agit de la révolte des décabristes, qui n'est, pour les réalisateurs, peut-être qu'un prétexte pour... comme Vailland avec son article).
Il n'empêche, pour le jeune Vailland, qui n'a pas encore professé que l'ironie, c'est de l'espoir qui... (vous trouverez), le sujet ne prête pas à ironiser, mais à se proclamer... Insurgé, insoumis, réfractaire, français, mutin, anarco-éthylique, conforme, iconoclaste, insermenté (rayer la ou les mentions inutiles, chasser le ou les intrus). Voire apyre à l'attraction des trop bons films ? Justement, c'est là que réside l'énigme. 
Ce n'était pas trop boute-feu ou risqué (par rapport à ses employeurs plus réguliers) que de s'exprimer ainsi dans L'Européen. Ce titre s'inscrit vaguement dans la mouvance que, plus tard, développera la revue Esprit. Marqué plutôt pacifiste, progressiste, mais point trop n'en fallait. Bref, il — Vailland –ne risque pas d'être relégué aux archives de Paris-Midi ou France-Soir (euh, lapsus de saisie, surtout si tant était que les titres, dont Paris-Soir, s'étaient déjà dotés ou d'un service de documentation).
Je me souviens d'un temps doublement révolu où les « journalistes » (encartés par ailleurs – par la Commission, dans un parti — ou non) d'Uss'm Follik bénéficiaient d'entrées gratuites illimitées au cinéma d'art & d'essai de Strasbourg, situé en face de la librairie-dépôt de presse où parvenait Le Monde fort tard le soir (je l'avais gratis quand je le vendais à la criée, il m'arrivait de sortir de l'une des salles pour aller l'acheter « en face » avant la fermeture). Puis la carte de presse suffisait en province (Belfort, Niort... pour mon compte). C'était donnant-donnant puisque nous parlions à l'occasion des films et que, surtout, un journaliste qui ne lirait pas des romans, ne verrait pas des films, exercerait autrement son métier.
Du temps de Vailland pigiste à L'Européen, c'était surtout des films muets. Quant aux romans, hélas, ils en lisaient trop et y faisaient trop fréquemment référence à l'intention d'un lectorat qui ne les avait pas lus. Mais il était de bon ton ton de s'adresser au lectorat « éclairé », en cuistre. Celui qui n'irait pas forcément voir Neiges sanglantes, mais plutôt (certains articles assez peu féministes de Vailland le laissent fortement penser) de certes belles réalisations, propres à faire sortir le mouchoir (larmes de rires, d'émotion). Comme quoi, il n'est pas sûr que ce fut mieux avant, ni pire.
Où voudrais-je en venir ? À une chute journaliste qui « pète ». Que je ne trouve pas. Zut. Alors, en attendant que cela vienne (ou hélas pas), je digresse. Sur la curiosité journalistique... Vous retrouverez dans ce document une évocation d'un recalé d'une école de journalisme parisienne qui fut l'une des premières en France à pouvoir doter ses stagiaires d'une carte de... journaliste stagiaire. Un pote de piste (L'Échiquier, Le Mouton blanc, ce dernier étant l'un des derniers bars kabyles de Paris à n'avoir pas vendu de fonds à un, une patronne chinoise ou assimilée), de rencontre fortuite. Moi, je suis quasiment sûr que je l'aurais admis... Transition à propos d'Alexandre Langlois (précédente entrée de ce blogue-notes). Je lis, sur l'un des « réseaux sociaux », une déploration : les jeunes journalistes seraient trop formatés par les écoles. C'est plutôt vrai, et j'ai vu d'ex-jeunes, devenus syndicalistes tout comme ceux (majoritaires) de la police, se faire remarquer pour obtenir des postes et devenir des chiens de garde du service des ventes, de celui de la publicité, et de la haute-direction issue du monde bancaire...
Vailland fut formaté sur le tas par Lazareff et autres. Formé aussi à Louis-le-Grand. Je subodore que cet article sur Neiges sanglantes est révélateur de tas de choses caractérisant la presse de l'époque. Que je retrouve trop peu dans la presse actuelle, si ce n'est sous la plume de quasi-éditorialistes qui ont quitté le terrain depuis belle lurette (si tant était qu'ils, qu'elles, ne l'aient jamais pratiqué).
Alexandre Langlois, flic réfractaire, Vailland, journaliste complaisant ET réfractaire. L'un cite Euripide, l'autre citait Suétone. Peu importe lequel. Vous voyez mieux ou je veux en venir ? Moi pas. Je ne sais si Vailland mourut désespéré ou non. Pour moi, j'ai des doutes. C'est une chute comme une autre. Pas si profonde : l'ironie, c'est de l'espoir... mais tout dépend de la température. Tant qu'on a le sang chaud... Merci, Roger Vailland, pour cette imparfaite chronique de Neiges sanglantes.

P.-S. — L'ami Denis Robert interpelle : « où est Steve ? ». J'ai envie d'interpeller: où est le papier de Vailland sur la police qui tire sur les manifestants dans le programme des écoles de journalisme ? J'y reviendrai. Ce n'était guère mieux avant... C'est plutôt mieux à présent : moins de morts. Moins de Papon. Mais oserai-je écrire que la sanction visant Alexandre Langlois fait le jeu des black blocs si utiles ? Euh, non, je n'aimerais pas qu'une garde à vue (si utile pour l'avancement) se prolonge pour un motif futile. Nous en sommes là... On vous place à présent en garde à vue pour un rien. Pour les statistiques. Cela étant, merci aux gardiennes et gardiens de la paix qui font leur travail en conscience, comme aux consœurs et confrères qui en prennent plein la figure (dans les côtes aussi) de tous côtés. Et ce n'est pas, heureusement, pour me prémunir, que je l'indique.

Médialogie : Affaire DGPN contre Alexandre Langlois (Vigi Police)

Alexandre Langlois : tiens, pour le moment, rien dans L’Humanité ou Le Média

Ce qui va suivre est sans doute à prendre avec plus de recul que celui qui l’exprime… Cette affaire de sanction contre le secrétaire général, Alexandre Langlois, du syndicat Vigi-Ministère de l’Intérieur (et non « Vigi Police ») mérite peut-être plus d’attention…
Qui est Alexandre Langlois ? Franchement, je n’en sais rien. Quelqu’un « en recherche d’opportunités pour valoriser [ses] compétences acquises dans le milieu du renseignement, des ressources humaines… » (source : l’intéressé sur LinkedIN) et si j’en crois la presse dite prédominante (mainstream), un policier syndicaliste privé de toute ressource pour six mois (douze d’exclusion de la police, dont six assortis de sursis).
Ce pour des propos outranciers, injurieux, infamants visant la hiérarchie policière…
Je ne vais pas trop revenir sur le fond de l’affaire sinon pour estimer qu’effectivement, Alexandre Langlois n’avait pas trop mâché ses mots mais qu’à mes yeux, la sanction est lourde, si ce n'est non conforme à la loi. Ce d’autant que le conseil de discipline ne s’était pas clairement prononcé et que la sanction vient de la Direction générale de la police nationale (sans doute en toute indépendance par rapport au ministre Christophe Castaner). Opinion fondée sur les apparences et la lecture, voici quelques petites heures (deux, trois ?) du site du Figaro.
En bonne place, on trouvait ce titre « Un syndicaliste policier suspendu pour ses “critiques outrancières” contre l’institution ».
Ce midi, pour retrouver cet article, il fallait effectuer une recherche interne au site du Figaro.
Mais quand même, première remarque : comme très souvent, c’est bien la presse prédominante (et crois-je pouvoir présumer, le site de L’Express avant quelques autres), qui fournit les informations avant que les réseaux sociaux les relayent…
Cela étant, il est possible que des réseaux sociaux aient, avant les sites de presse, répercuté les informations présentées sur le site du syndicat (vigimi.fr).
Donc, ayant lu l’article d’Alexandre Loch (Le Figaro), je tente de trouver d’autres sources. Et quels sites remontent en premier (circa 10:00) ? Boulevard Voltaire et SputnikNews. Avec d’assez longs entretiens avec l’intéressé et rien d’autre.
Que le site du Fig’ ait relégué son article en archives n’ai rien de choquant : RTFrance (aussi proche du Kremlin que SputnikNews) a fait de même (mais l’affichait encore en pied de page d’accueil vers 12:30).
Soutiens divers
Pour le reste, je ne vais pas vérifier toutes les 30 minutes si le site de L’Humanité a été actualisé, si MediaPresse (salutations amicales au passage à Denis Robert), vont ou non faire état de cette affaire Alexandre Langlois. Il convient aussi de signaler que le député Ugo Benalicis (FI-dpt. du Nord) avait lanterné alors que le policier passait en conseil de discipline : La France insoumise n’a pas tout à fait lâché son ex-consultant.
Pourtant, pourtant, quand Vigi-Ministère de l’Intérieur restait affilié à la CGT, son secrétaire général était fort bien accueilli dans les colonnes de L’Humanité. Et côté Mélenchon, quand Alexandre Langlois servait de consultant police à la France insoumise, ses quarts d’heure de notoriété ne lui étaient pas trop comptés sur les sites proches de FI…
Qu’est-ce que Vigi-MI ? À première vue et au conditionnel, sous toutes réserves, un syndicat ultra-minoritaire. 0,4 % aux élections de 2018, aucun siège dans les instances trustées par les trois formations majoritaires. Ce en raison d’un tripatouillage des suffrages, comme le dénonce Vigi-MI ? Peut-être, mais de cette ampleur, qu’on me permette d’imaginer que le phénomène soit resté marginal et que Vigi-MI n’était pas en passe d’égaler les scores d’Alliance (17 sièges) ou d’Unité(idem), voire de l’Unsa (six sur un total de 41 ; source : le site d’Alliance, créditant la CFDT d’un siège). Je ne sais s’il reste des syndicats policiers affiliés étroitement à l’une des deux grandes centrales que sont FO et la CGT (le site CGT-Police est inactif depuis 2017, celui la CGT-Police Île-de-France reste actif, mais a soigneusement effacé toute référence au camarade Alexandre Langlois ; en tout cas, « Désolé, mais rien ne correspond… » à une recherche interne portant sur lui). Unité SGP, selon Vigi, resterait affilié à FO.
Alexandre Langlois a reçu le soutien d’une pétition et de divers Gilets jaunes. Peut-être parce que, soucieux de voir des collègues se faire taper par des autonomes, et d’autres électrons libres dits d’ultra-gauche, il avait réclamé une meilleure gestion des manifestations. Et puis un temps proche de la mouvance Mélenchon et consorts, il avait critiqué non pas trop fort l’action des policiers de la Bac en civil, mais le fait qu’ils auraient pu (en gros, et au conditionnel) avoir reçu « des consignes pour laisser faire des dégâts matériels, mais surtout pas de blessés » (fausse citation que je lui prête, non verbatim, donc pas d’italique). De fait, depuis la fin des années 1990, il est très difficile, voire impossible, d’établir la présence de policiers-casseurs dans les manifestations en France. Cela étant, sur Sud-Radio, il avait utilisé « chiens fous » pour désigner de jeunes policiers n’ayant pas été suffisamment formés (c’est du moins ce que je retrouve mentionné). Et il s’était alarmé des « images catastrophiques d’un McDonald’s qui brûle avec nos collègues qui le regardent brûler ».
Deux poids, démesure ?
Ce qui est patent : un autre Alexandre (Benalla) avait écopé le 2 mai 2018 d’une mise à pied de deux semaines (avec « solde », sans traitement ?), très inférieure aux six mois de celui-ci qui lance une cagnotte sur le site Le Pot commun (1 036 participants ce jour à 13:30, 1 046 à 14:00). Bizarre : à ce moment T, tous les participants sont des anonymes. Mais la plupart des gens (163) ayant laissé des messages ont usé de leur patronyme (au pif : moins de la moitié). Pas le moindre signataire se déclarant policier, ou syndicaliste, et un seul pseudonyme (« un petit fonctionnaire » ; non policier) fait état d’une… fonction.  Peur du « gendarme » ?
Et cela me… quoi ? Interpelle ? Désole ? Inquiète ? Le pire, excusez que je ne me contente pas de m’en tenir aux faits, c’est que cela ne me surprend guère.
Sur le fond, il y a défaut d’information de la part d’un peu tout le monde… Il est clair qu’Alexandre Langlois, ayant usé de termes comme « criminels » (délictueux, contrevenants aurait sans doute suffi), évoqué une « complicité de meurtre de fonctionnaires » (visant la DGPN au sujet de suicides de policiers ; ce qu’il aurait fallu peut-être mieux démontrer, ou employer d’autres qualifications), syndicaliste ou pas, y est allé fort, même si des points d’interrogation atténuaient ses écrits. Ce qu’on aimerait savoir, c’est pourquoi ce n’est que récemment qu’un conseil de discipline a été réuni, et quels autres moyens graduels (genre blâme, avertissement…) furent ou non employés.
L’intéressé (ou Vigi en tant que personne morale ?) fait aussi l’objet d’une plainte en diffamation de la part d’un médecin inspecteur de la région Grand Est, sanctionné lui aussi hiérarchiquement et par le tribunal de Reims, après avoir fait l’objet de dix plaintes « de jeunes recrues de la police nationale » (de l’école de Reims ou déjà en poste, signalait Catherine Daudenhan, de L’Est Républicain). Cette affaire en diffamation sera débattue devant le tribunal de Metz (audience prévue le 10 juillet prochain).
En fait, Alexandre Langlois affirmait à Boulevard Voltaire : « ils ont fait ce conseil de discipline parce qu’à chaque fois qu’ils nous ont envoyé devant un juge, ils ont perdu. » (« ils » étant sans doute la DGPN). Il serait souhaitable d’en savoir plus…
Enfin, plus de clarté sur les suites des enquêtes menées par l’IGPN serait souhaitable. Il semble que la sanction infligée soit le double de celle dont écopa « un cuisinier CRS » ayant prélevé « trois steaks périmés pour son chien ». Gourmand, le mâtin !
Je ne saurais vraiment (car non assez documenté) me prononcer sur cette sanction ni sur son traitement… Ce que je remarque, c’est que le site Profession Gendarme la relate en reprenant deux pages, l’une de SputnikNews, l’autre du site LGS (Le Grand Soir, pas vraiment droitier). Et met en bonne place « L’Appel à l’aide d’Alexandre Langlois ». Je serais ministre de l’Intérieur ou patron de presse vendant encore du papier, cela me donnerait du grain à moudre (et food for thought). Non ?
Frédéric Carteron, magistrat honoraire, ancien policier, enseignant en droit, se déclarant « gaulliste social » a confié une tribune à Profession Gendarme. « Je n’en salue pas moins le courage et les convictions de Monsieur Langlois. ».
Comme des fuites...
Rien à voir ? Il y avait une page Facebook, « Citoyen solidaire », qui, semble-t-il, publiait un compteur des suicides de policiers ou gendarmes. Certaines familles l’ayant mal pris, ce compteur a été arrêté (vers 56 décomptés). On en trouvera trace sur la page FB (@collectifpoliciersidf). Un collectif sans doute pas trop proche de Vigi… Si ce n’est dans la critique des syndicats majoritaires. Son porte-parole, Jean-Pierre Colombies, se déclare à présent « comédien et auteur ». J’en ai connu d’autres, des policiers qui ont rangé la casquette ou rendu l’écusson. Loin d’être les moins compétents, les moins humains, les moins intelligents (au contraire, même). Certains ont pu atteindre 57 ans (retraite décotée, sauf pour les « actifs » avec 25 ans de service), d’autres pas. Eh oui, dans la police, ce sont rarement les pires qui s’en vont…
Ce qui serait vraiment attristant… Ce policier syndicaliste est diplômé bac+5 (master de droit), et gardien de la paix… Comme nombre de bac+x (le concours est ouvert aux titulaires du baccalauréat ou équivalent, aux sportifs de haut niveau, aux parents d’au moins trois enfants, aux pompiers, militaires, &c.). Le filtrage à l’oral l’aurait-il laissé passer par erreur ? Bon, je retire : bien sûr que les plus diplômés ne sont pas systématiquement recalés lors de l’entretien mené avec le jury (quoique j’ai connu un docteur l’ayant été, reçu à un autre concours de la fonction publique, il finira peut-être sous-préfet, comme un certain ex-inspecteur des impôts devenu secrétaire d’État à l’Intérieur). Et puis, je digresse… Mais imaginez le pauvre capitaine, la pauvre commissaire, devant s’adresser à un gardien de la paix lui répliquant par une citation d’Euripide… Pitié pour la hiérarchie policière  !

jeudi 4 juillet 2019

Roger Vailland journaliste... Oui, mais lequel ?

L'ubiquité de Roger Vailland, journaliste de « Midi » au « Soir »

Roger Vailland ne se coupa pas en quatre, mais se dédoubla deux fois pour livrer sa copie à Paris-Midi et Paris-Soir.
Ces titre et châpo fumeux, voire fumistes, ne visent qu'à vous inciter à lire le document « Miscellanée » réunissant divers articles mineurs de Georges Omer. Miscellanée (car resurgissant au singulier d'outre-tombe, cherchez « gondolier », et souvenez-vous de Dalida... d'Aristide, d'un château ; ceci  étant un aparté pour répondre à qui me posa la colle : « Quel Goncourt mentionna abondamment Angers ? ». Bonne vanne du pré près de la rivière, ou meersch, pour assécher le sujet). Lequel journaliste n'est autre qu'un certain Merpin, un François, et un Roger Vailland. Le compte est bon, quatre. Mais après une suite de Merpin, ou d'Omer, ou de Robert François, s'intercalait parfois un article signé Roger Vailland. Je ne reviens pas sur la décision de Vailland, conspué par Aragon et Breton, d'user de pseudonymes. Vous trouverez (ici-même). 
Vailland ne fut pas tout à fait un « journaliste complet » : les collaborations aux titres du SPQR, rien à voir avec le Senatus Populus, lui furent épargnées. Donc, pas de formation aux « chiens écrasés », aux « auto contre vélo », qui font qu'un journaleux se bonifie durablement. Anecdote. Je traite un fait-divers et emploie le vocable « poulet ». Droit de réponse glissé sous la porte de la rédaction : « vous me traitez de flic ». Ce monsieur avait usé de son droit de réplique de manière identique précédemment (d'où l'emploi de « poulet ») pour signaler je ne sais plus quoi (qu'il avait heurté le vélo dans telle ou telle circonstance, que cela pouvait importer à son agent général d'assurances ?). Eh bien, ce type de rodage manqua à Vailland (et je pourrais l'établir, mais vous comme moi avez d'autres chiens éclopés, ou des chats patraques, pour priorités). Et cela parfois se ressent.
Mais il fut chargé de traiter des sujets de « petite locale » (ce dont se chargent les correspondants d'arrondissement du Parisien, ex-Libéré). Et j'estime que leur traitement est tout aussi significatif du style et de l'évolution de Vailland que ce sur quoi s'appesantissent d'autres universitaires (j'en fus, mais aussi praticien). Sauf que... Remarquer que « le regard froid » de Vailland fut tiède un temps, voire chaleureux, ne vous mène pas loin et peut vous disqualifier aux yeux de la gentdelettre (surtout si un doctorat de complaisance... mais je n'insiste pas... car nul déni, nul ressentiment ne s'est tapi, rouge ou gris, sous cette remarque qui tient de la compote de pommes de reinette et d'api).
Bref, quatre-cinq-six petits articles de Vailland en révèlent parfois davantage que de longs discours et je vous invite à les consulter. En plus, c'est souvent cocasse, et quant à perdre son temps, autant le faire agréablement.
En retrouvant par exemple Piolan, comédien transformiste. Raymon Duncan et sa tunique apollinienne. Et puis divers mots que les candidats au « bac à l'oréat » (authentique : enfin, selon René Chiche, professeur, se confiant au Figaro : « Baccalauréat : quand l’illettrisme s'invite dans les copies », édition de ce quatre juillet). Rigolo, Étienne Campion emploie « calamiteux » dans son entretien avec ce distingué membre du Conseil supérieur de l'Éducation... Exagéré, une calamité est un désastre, et mais nous n'en sommes pas moins navrés (au sens de blessé, transpercé, et au figuré).
Bon, ce n'est pas tout ça, mais, coïncidence, une chaîne de l'étrange lucarne diffuse ce soir La Soupe aux choux, celle dont se régale le de Rastignac de la pension de rue Tournefort et dont Vailland-Omer relève que cette « odeur bien familiale (...) emplit le couloir et la cage d'escalier jusqu'au quatrième étage. ». Et ce soir, c'est truites-patates au menu avant de se caler devant « le poste » (et j'ai des pluches qui me réclament).  


lundi 1 juillet 2019

Référendum d’initiative partagée (ADP) : l’arnaque (bis)

Se prononcer sur la privatisation des Aéroports de Paris ? Impossible ! (bis)

Enfin, bis, bis… Non, mea maxima culpa… La première fois, j’avais manqué d’objectivité en employant « se prononcer contre… ». Pour un journaliste retraité, ce n’était pas fameux. Mais sur le fond, je récidive : tenter d’utiliser le site dédié à ce RIP (in pace ; in bello [ou bellum ? Jacques Brel, réponds d’où que tu sois !] ) tient de la gageure…

Or donc, jeudi 13 juin, je plaçais en ligne, ici-même (promptement, et non à la Tardi, comprendra qui voudra), un billet aux titre et sous-titre (à peu près) identiques. Depuis, je lis dans la presse que les ergonomes du site en question ont pris en compte les innombrables (ô combien) réclamations similaires à la mienne : à tous les coups l’on perd (exagération : selon Le Monde daté de ce jour, hier, 30 juin, 466 900 et quelque soutiens avaient été exprimés, dont ceux des vainqueurs du parcours du combattant de la ligne de front du site).
Or donc, le 13 juin, première tentative… Je me répète (persevere placent angelicum disait mon vieux recteur bas-breton) : « Tenter avec le numéro de carte d"identité, de passeport... Rien à faire... C'est comme sur le site de Carrefour : il vous faut rentrer un numéro où les 0 et les O sont énigmatiques. Vous pouvez tenter tout ce que vous voulez, varier, &c., vous ne pourrez pas valider. ». Soit vous pouvez toujours vous brosser et brandir votre rosalie, vous resterez au fond de la tranchée sans pouvoir vous élancer vers le glacis suivant et sa frise de barbelés… La date de délivrance de mon titre d’identité me fut fatale…
Ce jour, 1er juillet 2019, remonté sur le front en première ligne, blessures pansées par le médecin-major, nouvelle tentative. Hélas, hélas… Je n’ai plus pu dépasser la ligne du premier tir de barrage… Blessé une première fois par des shrapnels (and other shell-bursts) je parvins nonobstant à consigner le nom de la commune où je vote : la troisième tentative fut fructueuse alors que précédemment, j’avais franchi l’obstacle au pas de charge…
Stupeur, tremblements, sidération : j’ai pris en pleine gueule ce « nous ne sommes pas parvenus à vous retrouver » : Nous ne sommes pas parvenus à vous retrouver sur la liste électorale de (…). Vous ne pouvez donc pas soutenir cette initiative référendaire. Vérifiez que les données que vous avez saisies correspondent bien à l’état civil avec lequel vous êtes inscrits sur les listes électorales. Vous pouvez aussi solliciter votre inscription sur les listes électorales en utilisant la téléprocédure disponible sur https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R16396. ».
Donc, le 13 juin, on me localise mais me rate ; le 1er juillet, le scharfschütze d’en face fait mouche. Retour à l’arrière sur civière…
Comme l’aurait relevé le Conseil constitutionnel, rapporte Le Monde, « la démarche nécessite, en outre, une très grande minutie dans les informations à fournir pour s’identifier ». Litote, euphémisme ou understatement ?
C’est pire que Candy Crush (je bute sur le niveau 4 153, mais j’ai encore de l’espoir).
Combien de niveaux (ou étapes ?) sur referendum.interieur.gouv.fr/soutien/ ?
Parviendrai-je à ne pas capituler avant le 12 mars prochain ?
La page « initiatives clôturées » restera-t-elle inchangée au xxiie siècle et au-delà ?
Je prends les paris… Un paquet de cousues (de tiges d’officiers) en jeu (si possible des Craven A en boîte ronde de 50 des Canaiens ou des Tommys ou une can de bully beef à la rigueur). Je remonterai vers les lignes, et il ne manquera pas un seul bouton à mes guêtres… Et je finirai bien par pendre mon linge sur le Westwall avant de reprendre Roissy-Charles-de-Gaulles et Orly après être ressorti de l’hôpital de campagne de Paris-Mauvais (Tillé pour les pékins).
N'en déplaise aux planqués de l'arrière qui, défaitistes, me serinent : « c'est fait exprès, t'arrivera pas... », j'y parviendrai, en taxi s'il le faut (« Taxi ! à la Marne », Savary, Jérôme)... Ou à pied, à cheval, ou en voiture (jusqu'au Bourget et au-delà, Debré, Michel). 

dimanche 30 juin 2019

Quand Vailland imaginait les Chleuhs menaçant d'envahir Paris

Roger Vailland et l'Islam de France... en 1930


On ne peut pas dire que le jeune journaliste Vailland se soit fort intéressé à l’immigration maghrébine… Il faudra attendre son voyage en Égypte puis sa collaboration avec le photographe Marc Garanger (son album, Femmes algériennes 1960, attendra les années 2000 pour paraître aux éds Atlantica), en 1962, pour qu’il marque un très net intérêt.
Certes, lors de sa période militante communiste, soit bien après les années 1930, il se peut — c’est fort probable, je n’ai pas recherché soigneusement (pour l'instant) —, qu’il ait évoqué la décolonisation de l’Afrique du Nord, le traitement des « rebelles » maghrébins.
Ce n’est pas que l’immigration ne devint pas un sujet pour lui. En témoigne Beau Masque (pseudonyme de son personnage principal, Belmaschio), roman de 1954, porté à l’écran par Bernard Paul en 1972. Et on retrouverait certainement, en se souvenant bien, des personnages secondaires d’immigrés, ça et là dans son œuvre. Voire principaux, dans ses articles : mais il en publia près de 3 000 jusqu’à l’ultime (« Éloge de la politique »), et retrouver des desoccupati (désoccupés, en italien, soit chômeurs et autres, vocable employé dans La Loi) maghrébins, ou africains, dans ses écrits, tiendrait de la gageure… L’immigration, il l’évoqua certes à propos de La Réunion, mais en termes généraux. En revanche, dans ses Chroniques (rassemblées aux éds Éditeurs français réunis, en 1983), on trouvera des références aux conditions de logement des ouvriers immigrés des usines Renault. Ce n’est pas qu’il se soit désintéressé des immigrés en général, mais, il reste surtout marqué par l’immigration européenne (de nombreux immigrés polonais et italiens participèrent à la reconstruction de Reims et dans Un jeune homme seul, il évoquera notamment un ouvrier Polonais ; il s’intéressa aussi aux mineurs de fond en comptant de nombreux, &c.). En fait, ce n’est que plus tard (1952), en Égypte, qu’il s’intéresse au prolétariat musulman (ou copte), démontrant une réelle empathie.
Mais bref, aux débuts et au cours des années 1930, sauf erreur de ma part due à une insuffisance de recherches, le jeune Vailland voit la question de l’immigration maghrébine de manière fort détachée. Je n’ai retrouvé que deux courts articles qui ne semblent pas l’avoir incité à se lancer dans un reportage quelque peu plus approfondi (qu’il aurait pu suggérer, mener de sa propre initiative, en marge des sujets assignés). Il s’agit d’ailleurs davantage de billets que d’articles développés. Qui s’insèrent dans une suite d’autres billets, de courtes chroniques, sur des sujets à mille lieues des questions sociales (échos mondains, de la vie artistique, des lieux fréquentés par les noceuses et noceurs, &c.).
Pour négligeables (et fortement superficiels) qu’ils puissent paraître, ces deux articles m’ont semblé valoir d’être réunis, ne serait-ce que dans l’espoir qu’une recherche universitaire portant sur la figure de l’immigré maghrébin dans la presse française des années 1930 puisse les replacer dans leur contexte. Vaste entreprise que je ne saurais (ni pourrai) mener à bien. Une porte sur « La construction de l’islam en France : du côté de la presse » (Constant Hamès) à partir des années 1980. Ne serait-ce aussi que pour remémorer l’appellation sidi (dans Beau Masque, compagne de Belmaschio, Pierrette lancera : « Vous êtes les macas et les bicots… »). Ce sidi ne semblait pas avoir la portée péjorative (voire haineuse) de celles qui suivront dans les années 1950-1960, en dépit du fait que dans les années 1930, les « dissidents » maghrébins faisaient déjà fréquemment parler d’eux. Sur eux, Vailland porte déjà « un regard froid », distancié : il a aussi d’autres préoccupations, drogues et pistes dans les bars (en vogue ou plus intimistes, comme celui de l’Américain Shoecraft, faubourg Saint-Germain, précurseur du Nuage de la rue Palissy en 1970).
Et puis, on ne lui demande pas d’analyser l’étude de Louis Massignon (« Répartition des Kabyles dans la région parisienne », Revue des Études islamiques, n° 1-1930) ou l’enquête de d’Adolphe Gérolami, directeur de l’Office des affaires indigènes nord-africaines, qui vient de paraître. Massignon fait allusion au « scandale du sous-sol Vinel aux Grésillons » (à Gennevilliers). Mais aussi à « l’européanisation du costume (casquette) ». Vailland ignore ce scandale, mais s’intéresse aux casquettes… Il insiste sur les Chleuhs (Berbères marocains) car, semble-t-il, son informateur en est spécialiste (certaines usines remplaceront les Kabyles par des Chleuhs, d’immigration plus récente, sans doute plus « malléable »). Cet informateur, le lieutenant-colonel Justinard, avait élaboré, en 1928, deux cartes sur « Les Chleuhs de la banlieue de Paris  » (R.E.I., op. cit., 4-1928). Il semble que Vailland ait survolé cette étude dans la réédition des éditions Geuthner de 1930 et soit resté sur la mention « de cette région à peine soumise du Sud-Ouest marocain » et l’ait considérée encore d’actualité. À moins qu’il ne se soit inspiré que des articles de ses confrères en ayant rendu compte (ainsi celui de Robert Garric, « Esprit colonial », paru dans La Nouvelle Revue des Jeunes, en juillet 1930).
Certes, dans le courant des années 1920, des Chleuhs procédaient encore à des enlèvements de touristes, demandant des rançons (ou ravissant des femmes « indigènes » à leurs parents ou époux). Mais si Abd el-Krim, chef de la révolte du Rif, au nord, avait tenté de faire alliance avec les Chleuhs, ces derniers avaient décliné la proposition (« La montagne n’eut pas confiance dans le Rifain et demeura paisible », Henriette Célarié, Le Temps, 26 oct. 1927). Mais Vailland « tympanise » (comme on disait encore… pour « enfler ») la « menace » latente des Chleuhs aux portes de Paris tels des « loups » de la chanson de Reggiani en 1967. Ces Chleuhs banlieusards ou des quartiers est de Paris n’étaient nullement des membres de tribus encore « dissidentes ». Mais il reste que, oui, en 1930-1931, les Marocains étaient assez fortement implantés à Gennevilliers, les Kabyles algériens s’étant précédemment établis à Asnières, Clichy et Levallois, plus proches de Paris. Cela étant, il ne faut pas lire le Vailland de 1930 au travers du prisme actuel : ce qui peut paraître limite xénophobe à présent ne caractérise pas du tout ses écrits de l'époque (ou de celle du Grand Jeu).
P.-S. – la photo illustrant cette contribution est largement postérieure aux articles de Vailland... D'ailleurs, pas de casquette sur la tête des résidents.

samedi 29 juin 2019

Roger Vailland-Robert François au chevet de la chanteuse Eva Busch


Quand Vailland — une fois de plus — rajeunit une belle étrangère…

De Tania Visirova, Roger Vailland fit une éternelle « écolière », voire une « fillette ». Avec Eva Senta Elizabeth Zimmermann (Berlin - 22 mai 1909 ; Munich - juillet 2001), épouse Busch, son nom de scène, il se contente de la rajeunir de cinq ans. Ce à l’occasion d’une évocation de son escapade Outre-Atlantique en compagnie de l’escroc international Siegfried Wreszinsky (diverses orthographes dans la presse française).
La plupart des entrées ou contributions de ce blogue-notes relatives à Roger Vailland incluent des liens vers des documents PDF rédigés d’une manière un peu plus « sérieuse » ou s’efforçant de le paraître en regard de ce que que je consigne ici. Au passage, je ne serais pas fâché (je ne haïrais pas, litote, euphémisme, understatement, au choix…) que les chercheuses et chercheurs indépendants, voire des universitaires, s’intéressant à Roger Vailland, rapatrient ces documents dans leurs archives. Google ne renvoie plus « qu’environ 3 500 résultats » pour mon patronyme en cet été 2019. Ayant pratiqué l’Internet depuis 1992, puis sa version graphique (ouaibe-ouone-ziro, then two zero), c’est un millier de moins que circa… 2000 ? C’est dire que, même si l’étiage des mers et océans restait constant, je crains fort que tout cela parte en brumes (mes écrits de fumiste peuvent partir en fumée) et vapeurs évanescentes.
Mais revenons à notre Eva Busch voguant au-dessus des « blancs moutons » de l’Atlantique et de Charles Trenet. Elle fut autant, sinon davantage, célébrissime que Tania Visirova, et le resta surtout — largement— plus durablement. Vailland, en 1939, ne pouvait l’ignorer : elle avait été chanteuse récurrente pour Radio 37, avait déjà enregistré pour Columbia, &c. Bien sûr, il ne pouvait prévoir la suite, notamment qu’en 1947, elle sera la cible d’une manifestation d’épurateurs (elle vit déjà avec la consœur de Vailland, George — comme Sand — Sinclair, qui forma la Françoise Giroud et d’autres). Et il était où, le Vailland, qui avait siégé au comité d’épuration des intellos ? En 1947, peut-être prit-il fait et cause pour l’apatride Eva Busch, farouchement antinazie, ex-pensionnaire du camp de Gurs et de Ravensbrück, qui avait été forcée, après une libération obtenue à la (très) longue, de se produire devant les troupes de la Wehrmacht. Ce parce que Goebbels, alors qu’elle était internée, faisait diffuser ses chansons (en omettant de faire signaler que ses paroliers ou compositeurs étaient des Juifs). Son répertoire d’avant était d’inspiration plus libertaire que communiste, alors que son mari, communiste notoire, interprétait des chants révolutionnaires (il prit part aux Brigades internationales en Espagne). Il se peut que Vailland protesta en coulisses (ou par voie de presse, je chercherai ultérieurement).
Quant à Wreszinsky, c’était un anti-Maurice Joffo. Maurice faisait passer des gens en loucedé en zone libre, prenant de terribles risques. Wreszinsky, ashkénaze, promettait de faire sortir d’Allemagne des coreligionnaires contre de très fortes sommes, puis prenait la poudre d’escampette. J'ai un peu connu Maurice, vaguement aigrefin à la petite semaine à ses heures (encore que... c'était la thèse d'un certain jeune magistrat, Jean-Louis Debré, qui voulait se faire un nom : il y parvint très bien). Mais, s’il fut jamais indélicat, ce fut à mille lieues d’un Wreszinsky et la seule similitude les réunissant reste que Maurice Joffo fit dans la ferraille, comme peut-être Siegfried à Dantzig. Autre histoire (celle de Maurice, nègre de son cadet Joseph, pour le Sac de billes) que j’ai consignée et que les moteurs du Ouaibe ont peut-être fait s’évaporer. Siegfried mérite des diminutifs, Maurice, tout merlan qu'il fut, des superlatifs.
Je m’intéresse à Vailland, journaleux, en journaliste « honoraire » (totalement dédaigné de faire passer mon matricule, 47640, de mémoire, au stade de l’honorariat). Nous en sommes quelques « autres » : Lacoche, Rondeau… Mais ceux-ci (amicales salutations au passage), écrivains par ailleurs (et des meilleurs) ont parfois tendance à magnifier le défunt confrère (comme le regretté René Ballet). Mesquinement, je le replace dans un contexte. Je puise à sa gamelle en écornifleur indélicat. Pas au point de cracher dans ses gaspachos (voyez, sur ce blogue, ses reportages en Espagne républicaine), mais remettant diverses choses en place. Comparant à l’occasion les conceptions d’un Kessel avec ce que les écrits journalistiques de Vailland révèlent. Confronté à Kessel, Vailland-journaliste fut un temps plus faible (Prouvost et Lazareff trouvèrent en lui un plumitif plus docile, car davantage désinvolte, détaché, distancié, à mon humble avis).Cela évolua.
Mais cela, c’est de l’écume, bave de batracien n’atteignant pas les rémiges du falconidé aux mues multiples. Cependant, Vailland bidonna (moi pas, sauf une fois, à l’insu de mon plein gré, aiguillonné par des inspecteurs de police voulant la peau d’une connaissance d’Aïcha Lacheb, devenu écrivain reconnu à la suite de son abusivement longue détention).
Eh, je n’ai pas eu l’opportunité d’être embauché par un Lazareff… Je n’aurais peut-être pas tourné syndicaliste comme chez un Hersant... J’évoquais par ailleurs Morvan Lebesque passant de Je suis partout au Canard enchaîné (avec étapes intermédiaires). Vailland eut quelques faiblesses (à l’égard de « Jean-Fesse », le préfet Chiappe, peut-être aussi pour faciliter aux consœurs et confrères l’accès aux mains courantes de l’époque).
Bon, brisons-là. Goûtez plutôt la prose de Vailland traitant d’Eva Busch ; lisez « En marge des crédits gelés (…) Eva Bush a juré de mourir
». Promis, proféré, c’est beaucoup plus drôle que ce qui, ci-dessus, précède…

mercredi 26 juin 2019

La Loi de Roger Vailland, roman d’un « écrivain libre »


Avec La Loi, prix Goncourt 1957, Vailland a-t-il rompu avec Vailland ?

Vaste question, à laquelle de multiples réponses ont déjà été apportées… Elle sera donc ci-dessous esquivée… Mais la critique d’Émile Biollay dans Le Nouvelliste valaisan du 13 janvier 1958 me l’a remémorée et il m’a semblé, par ce temps de canicule, judicieux de tenter de m’en entretenir.
Autant l’avouer : ce qui suit doit tout à ma paresse aggravée par la température quasi sub-saharienne qui engloutit Paris. Je me devais (ainsi qu’à d’autres…) de reprendre le document « Les lieux de Vailland » – enfin, celui portant sur les principaux que fréquenta Roger Vailland – mais la tâche m’a semblé trop fastidieuse. D'où cet énième écart qui fait qu’au lieu de chercher à préciser où fut écrit La Loi (certainement près de Gargano, dans les Pouilles, ce qu’Élisabeth Vailland indiqua à Daniel Rondeau), je remonte à la relative fraîcheur de Sion et de son Nouvelliste (1903-1960, depuis 1968 Le Nouvelliste & Feuille d’avis du Vailais).
Cela parce que je venais de redécouvrir un avis de Morvan Lebesque portant sur Un jeune homme seul, dans Climats (« hebdomadaire de la communauté française » ; « grand hebdomadaire colonial », créé par Maurice Chevance, dit « Bertin » en 1945) : « Quel écrivain pourrait être M. Roger Vailland si seulement il était un écrivain libre… Je sais bien que ce livre est destiné à me convaincre, à me démontrer la supériorité d’une idéologie sur les autres… Mais, enfin, je voudrais bien qu’un jour M. Vailland écrivît selon son cœur, et rien de plus. ». C’est l’époque à laquelle Vailland recommence à faire de l’entrisme pour adhérer au PCF (ce qu’il obtient l’année suivante).
Survient le rapport Khrouchtchev puis l’écriture de La Loi, roman qui fut dit formaté pour remporter un prix littéraire. Le vœu de Lebesque est partiellement exaucé comme en témoigne cet article d’Émile Biollay : Vailland « s’est refusé à l’engagement ». D’autres, qui ne s’y étaient pas refusés, suivront, comme Lenù Greco, l’héroïne d’Helena Ferrante (la saga napolitaine L’Amie prodigieuse). Or Vailland n’a jamais cessé d’être engagé et l’année – 1964 – où Vailland publie son « Éloge de la politique » dans Le Nouvel Observateur, il promet à Lucien Bodard son soutien alors que ce dernier est vivement critiqué en raison de son livre La Chine du cauchemar (1961) et des articles qu’il publie sur Mao et le maoïsme… Bodard et lui se retrouvent au bar du Port-Royal et… Zut, encore un lieu revenant à la surface.
Le lieu de La Loi, c’est Porto-Manacore… Proche du golfe de Manfredonia… Et peut-être, mentalement, ce Gargano isolé, inspire cette appellation qui évoque, à une voyelle près, le monachorum (des moines et moniales) : exposant l’élaboration de La Loi avec Madeleine Chapsal, de L’Express (12 juillet 1957), Vailland insiste sur l’ascèse du temps de l’écriture ; pas d’alcool, juste du café, pas de distractions, et retour à la fréquentation des autres « quand le roman est fini ». En fait, j’extrapole car un lieu-dit Baia di Mancore se situe à proximité de Peschici (et est devenu Manacore del Gargano).
Émile Biollay (qui signait parfois Paul Herbriggen) est un ancien professeur d’université au Caire devenu enseignant au lycée cantonal de Sion, historien et chroniqueur. C’est un écrivain « progressiste », proche d’Albert Béguin (des Cahiers du Rhône puis successeur d’Emmanuel Mounier à la tête de la revue Esprit en 1950) et de son épouse, Raymonde Vincent.
La Loi (et sa traduction La Legge, sa transposition à l’écran, qui irrita les censeurs italiens) a suscité d’innombrables commentaires. Je tiens celui d’Émile Biollay pour l’un des meilleurs, en dépit d’une conclusion sévère et que j’estime erronée. Peut-être parce que divers personnages féminins me font penser à Lina Cerullo, l’alter ego de la Lenü Greco de Ferrante : ces femmes se mobilisent dans leur village comme elle, Lila, pour son quartier, pour les siennes et les siens.
Vailland ne cotisa plus au PCF mais il resta proche des militantes et militants de son entourage. Et puis, j’en viens à me demander si, sans La Legge, les Lenù-Lila de Ferrante seraient devenues ce qu’elle en fit. Et quand je lis dans la presse italienne que Vailland et ses œuvres seraient à présent “quasi dimenticati” (oubliés, délaissés), je me dis que c’est fallacieux mais aussi que cette approximation outrancière est toute provisoire. Le temps est propice à lire ou relire La Loi dans la fraîcheur d’un trullo de l’Aia Piccolla d’Alberobello. En attendant de vous y rendre, consultez peut-être l’article d’Émile Biollay dans Le Nouvelliste valaisan