lundi 28 décembre 2020

Eh Patate(s) ! Qui ça ? Anna ou Lorette ?

 Pom-pom-pom-pom, tagada

On se croit mollement érudit (enfin, cuistre documenté), et voilà qu’un Rosbif vous rabat votre caquet. J’ai nommé le Britannique John Reader, auteur de Potato : A History of the Propitious Esculent. qui m’en bouche un coin avec une recension des plats à base de pommes de terre (reprise par CNN).


Comment traduire ? Le comestible propitiatoire ? Pompeux. C’est la trêve des confiseurs, et pour remplir les pages (des publications, dont les sites), la presse ressort des rogatons, réchauffe du recuit. Moi de même. Et la gente journaleuse tire à la ligne. Ou fait semblant de découvrir ce que tout le monde sait déjà. Pardonnez que je me vautre dans la facilité (devant laquelle je ne saurais résolument reculer, même pas peur), en faisant l’étalage de mon ignorance, et de souvenirs.

Comme cette réunion des confréries gastronomiques et vineuses qui me fit découvrir, ébahi, les Compagnons de la Dive Tubercule, à la seyante robe de bure (enfin, de sacs à patates). Ébloui, je postulais auprès de ces trop sélectifs Lyonnais. Recalé d’emblée. Qu’à cela ne tienne, je me rattrapais en me faisant introniser chevalier du Boudin Blanc de Rethel. Voici peu, j’en faisais encore part aux bistrotiers ardennais de Saint-Brévin-les-Pins. Il est fort possible que je m’en infatuerai derechef en compagnie de Charly Châpo (Charles Duchêne) en y retournant de conserve.

Histoire d’embrayer sur les spécialités culinaires ardennaises à base de patates. Les pommes de terre à l’ardennaise (belge, française ?) sortes de baeckeoffe au lard et à la salade et au vinaigre, semblent avoir échappé à la sagacité de John Reader (ou avoir été négligées par la conseur Rebecca Wallwork de CNN listant The world’s best postato dishes, et pompant allégremment John Reader).

Honte, honte ! Je n’ignorais rien du Sheperdherd’s pie, des cazzilli, des patatas bravas, des latkes, du rösti, du caldo verde, des poutines (restaurant spécialisé, rue d’Enghien à Paris, pour ne pas aller se geler à Montréal), voire de la blitva (commandée à l’aveugle en Croatie), des blintzes (idem à Tel Aviv), des gnocchi (on en trouve un peu partout). Et bien sûr des pommes sarladaises (je recommande celles de Lidl, surgelées, abordables).

Mas des pommes Lorette (non celles de Michel Delpech, Laurette, dont j’ai longtemps cru que c’était la tenancière du bar à billard électrique d’en face de la caserne des pompiers d’Angers), inconnues au menu des colonies de vacances, j’ignorais tout. Idem pour les pommes Anna, attribué à l’Adolphe Dugléré, nommées en l’honneur d’Anna Deslions ( la Lionne des boulevards qui fréquentait le Café Anglais). L’impasse. Le cul de sac dont je me recouvre la tête de honte.

Confus (non de canard, mais cancanant toujours comme celui de Robert Lamoureux), les Lorette et les Anna m’en ont bouché un coin-coin. Anna était une cocotte, d’où sans doute l’appellation. Quant à Lorette, c’est aussi le surnom d’une grisette (« jeune femme élégante et facile » me dit mon Grand Bob).

Lorette, « mot décent inventé pour exprimer (…) la fille d’un état difficile à nommer », écrivait Honoré (de Balzac). Des pommes à frous-frous, quoi. Padamalgam’, il ne s’agit pas des mêmes pommes, plutôt, cette fois, des pommes d’amour caramélisées.

Berthe Silva n’a point chanté la pomme de terre, contrairement à tant d’autres.

À entonner en buvant la vodka des Patates Dolbec (distillerie Ubald du Québec). L’Écossaise Ogilvy en produit aussi. Tout comme la distillerie Arbikie (Angus). À déguster sur du haggis (panse de mouton farcie) et de la purée.

Vous ai-je assez soulé ? Sans doute, mais pour me rattraper, attendez-vous à lire, avec l’aide d’Alain (George) Leduc, une passionnante incursion dans le domaine de la patate dans l’art contemporain (ici, en illustration, pour vous allécher, l’œuvre mortelle, car dépérissante, de Giuseppe Penone, du courant Arte povera). J’ai lu quelque part que chez Subodh Gupta, « les pommes de terre sont devenues un motif récurrent, au même titre que l’était la couleur bleue pour Yves Klein ». Ne me remercie pas, Alain, paye ta tournée de vodka écossaise. Santé, bonheur, pipe à toute heure et meilleurs vœux à toutes et tous.

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