Vailland : jeune homme des cinémas « permanents » du Sébasto
Allez, j’extrapole… Je vois dans Georges Omar ce jeune homme,
Roger Vailland, en proie à des angoisses (dues aussi aux stupéfiants) se
réfugiant dans les cinémas permanents des boulevards Sébastopol et Saint-Martin…
C’est mon quartier… J’allais parfois à L’Albatros de
Jean-Pierre Mocky dont je connaissais le projectionniste (L’Albatros, c’est Le
Brady, boulevard de Strasbourg). Roger Vailland fréquentait d’autres salles et
en restituait les ambiances pour Cinémonde.
J’ai donc réuni trois
de ses articles cinématographiques dans un document PDF... Assortis sans
doute de commentaires ahurissants, purement hypothétiques. Pas seulement, car
ils sont en partie documentés, remémorant les cinoches de quartiers qui ont
trop bien ou trop mal changé, c’est selon… les avis qui se succédèrent, se succèdent
et se succéderont.
Se rappeler la littérature d’hier ou d’avant-hier (Michel Picard
l’a exprimé bien mieux que moi), c’est ce reprojeter dans son passé, et jusqu’à
un certain âge, préfigurer son avenir. Ce que fit Vailland, en lisant, mais
aussi en allant voir des films. Je laisse à d’autres, véritables spécialistes (serait-ce
un appel du pied à Guy Scarpetta ? Je ne l’imagine pas enseignant à Reims
et ne se penchant pas un peu sur les scénarios de Vailland…), le soin de
disserter des rapports de Vailland avec le cinéma. Ce fut fait, cela se refera.
J’essaye de le voir tant par le petit que par le gros bout
de la lorgnette… Déformant. With a narrow view ; no mas allà de mi narices ; mit tunnelvisie hebben… Bah. Il
fut, reste, sera bien écrit d’autres inepties sur Roger Vailland. Il ne m’objectera
aucun droit de réponse, et tout autre est nul et non avenu (quoique… il se peut
qu’il y en soit de recevables, que je ne tairai pas).
1929, pas encore né. 1964, l’ami Ségalou (le grand Ségalou)
avait pour père l’exploitant de deux salles angevines. L’une près de la gare, l’autre
dans la Doutre. Aussi, le jeudi, avec l’ami Chabasse et d’autres, on voyait des
westerns, des Maciste, gratos. Émois. Je ne sais si un Vailland trentenaire
ressentait quelque chose de similaire devant un grand écran. Pour nous, encore
mioches, le cinoche, le parlant, c’était de consommation courante. Pour Vailland
en 1929, itou. Mais pas vraiment le même. Pourtant… Peut-être se retrouvait-il
dans cet enfant du premier rang qui « n’avait
pas même pensé à ôter son capuchon ».
Connaissez-vous l’histoire de ce Mexicain au large sombrero
et aux longs pistoleros qui prend place
au premier rang ? Toute la salle, d’abord inquiète, puis s’enhardissant,
réclame, dès les premières images du film, qu’il se décoiffe. « Señor, por favor, el sombrero ! ».
Et alors, il se lève, se retourne, et profère : « À la demande générale, je vais vous chanter El Sombrero ! ». C’est un peu comme la
blague du type qui demande un whisky dans un speakeasy et voit un chimp
se rincer les testicules dans son verre. La chute : le pianiste lui dit « fredonne-la, cela va me revenir ».
Cryptique, n’est-il point ? Cela me vaut un flop à chaque fois. Eh bien,
mes divagations sur Vailland m’en vaudront un autre. Mais j’me comprends. Et
peut-être qu’on s’comprend, lui et moi. Et puis, quel mal y aurait-il à c’que j’me
l’imagine ?
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