Roger Vailland snobé par le ras Hailou Tecla Haimanot
Cet Aïlou auquel Roger Vailland, signant Étienne Merpin dans
Paris-Soir, rend visite en sa demeure
de la capitale de l’Éthiopie est alors le leul (prince, titre supérieur à celui
de ras) de la province de Godjam. En 1940, Aïlou est assigné à résidence et
Vailland le considère hors-jeu ; la suite lui donna tort…
Robert François, Étienne Merpin, Georges Omer, autant de pseudonymes
de Roger Vailland journaliste avant son passage à la littérature. Avec ce portrait
du présumé « dernier des “rois
nègres” », Vailland/Merpin ne fait pas dans le subtil. Il est possible
que, pour préparer son reportage sur le couronnement du Négus, le jeune
Vailland ait lu le comte Arthur de Gobineau (lequel évoqua Gondar, capitale du
royaume éthiopien d’Amahara). Lorsqu’il dépeint Aïlou de mémoire, dix ans plus
tard, il se peut qu’il ait lu les carnets africains de Michel Leiris (qui
séjourna à Gondar). Il se souvient d’un roitelet richissime plus soucieux de l’éblouir
que de lui livrer ses pensées sur ce qu’implique l’accession au pouvoir du
Négus pour le pouvoir féodal qu’il détient.
En 1940, Vailland
ne pouvait prévoir que, selon les Italiens, Aïlou ambitionna l’année suivante
de devenir Négus avec leur appui, avant de se retourner contre eux, ce qu’il
finit par faire. Empochant à chaque retournement de copieuses prébendes… Il eut
été possible, si cela avait été le cas, qu’il en aurait dressé un tout autre
portrait. Mais il s’en tient à ce qu’il avait ressenti, sans trop s’interroger…
Il est vrai qu’il a d’autres préoccupations puisque, parallèlement, sous le
même nom de Merpin, Vailland/Robert François va publier son Suède 1940, une suite de portraits d’éminents
Suédois qu’il traite avec fort peu de désinvolture. Il peut sembler que, de 23 à 33 ans, le regard que Vailland porte sur l'Afrique n'ait guère évolué. La guerre, d'autres voyages lointains, modifieront ses perspectives sur les pays de l'ex-monde colonisé ou se dégageant de l'emprise des puissances occidentales. Il n'en est pas encore là, comme en témoigne cette esquisse simplificatrice d'un grand seigneur féodal africain...
P.-S. – Sur cette photo du couronnement du Négus, il se pourrait que le dignitaire l'accompagnant eut été Aïlou/Hailou Tecla Haimanot (ou Tekle Aymanot). Il correspond à l'homme que décrit sommairement Roger Vailland (un « Hercule »).
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