mercredi 12 août 2020

Le stilton empuantit le traité Japon-Royaume-Uni

 Un anglo-bleu qui doit puer plus bleu que bleus (continentaux)

Selon le Nikkei Asian Review, les négociations d’un traité de libre-échange entre le Royaume-Uni et le Japon bloqueraient sur la question des fromages. Car, pour faire valoir ses talents, la négociatrice britannique voudrait trouver pour les stiltons de meilleures conditions tarifaires que celles en vigueur entre le Japon et l’Union européenne.

Liz Truss a posé le stilton sur la table
Pour les voitures, ce serait réglé… en 2026, entrée libre pour les voitures japonaises au Royaume-Uni. Oui, mais auparavant, le Royaume-Uni voudrait obtenir un meilleur droit d’entrée pour ses bleus au Japon que celui bénéficiant aux bleus continentaux (ceux de l’Union européenne). Pour la presse britannique tout tourne autour de l’emblématique stilton (la variété bleue, étant plus connue que la confidentielle blanche). Et pourquoi pas ne pas obtenir en plus que les stiltons destinés au Japon puissent être refabriqués au lait cru (et non plus pasteurisé comme l’impose la totalitaire obligation européenne) ?

En fait, Liz Truss, chargée du commerce international, est une ardente partisane des producteurs de fromages anglais. Pour ceux à pâte dure, elle aurait obtenu gain de cause avec 2023 pour échéance. Mais pour les pâtes molles et en particulier le stilton, ce serait le fromage de discorde.

Le Japon ne voudrait pas que le Royaume-Uni bénéficie de meilleurs quotas et tarifs que ceux en vigueur avec l’Union européenne pour les fromages. En sus, la date devrait être repoussée à 2033 pour ces variétés concurrentes des bleus d’Auvergne et de Gex (entre autres).

Bizarrement, les titres les plus véhéments en faveur d’un Brexit sans accord, comme le Daily Express, ne se sont pas du tout attardés sur ce type de détail. Après avoir proclamé qu’un accord commercial avec les États-Unis était dans la poche incessemment sous avant peu, les négociations avec le Japon ont été constamment vantées. Mais voici qu’il y aurait quelque chose qui pue au royaume de la Queen.

Megahan Markle, non, read my lips, it’s the stilton, stupid! Hautement symbolique, vu depuis « le pays des fromages qui puent ». 75 ans après Hiroshima, il est grand temps de rappeler aux Britanniques que pour avoir raison du Pays du Soleil levant, le largage de tonnes de stilton suffira-t-il pour l’empuantir ? Ou ne faut-il pas le renfort des roqueforts, bleus d’Auvergne et de Gex ? Le Vatican, combien de divisions ? Le stilton, combien de tonnes ? Il fallait y réfléchir avant le Brexit.

Je pourrais filer plus loin la métaphore, remémorer les Monty Python et Sacré Graal, qui vit Arthure Kuninge, confié. Ma formation diplomatique me retient.Mais il faudra bien répliquer à l’invasion des choux shi par la promotion des choux de Bruxelles.

Je ne sais plus où j’ai retrouvé des estampes japonaises mettant en scène des duels de flatulences (authentique, je n’invente rien). Messieurs les Japonais, flatulez les premiers ! Le sieur Charles Hay et le comte d’Antochee, des Gardes françaises, lors de bataille de Fontenoy, s’invectiveraient ainsi. Face au barrage nippon  des stiltons, il faudrait s’en souvenir.

En fait, le Brexit a tellement été vendu comme l’espérance de lendemains mieux chantants qu’il faut absolument faire valoir des avantages supérieurs à ceux obtenus via l’Union européenne. Le Japon absorbe environ pour  18 millions de livres de stilton. Contre 2,13 millions d’euros de fromages à pate persillée français (divers bleus, roquefort, saint-Agur, persillé des Aravis, carré d’Aurillac…).

En 2034, l’accord européen prévoit que ces fromages ne seront plus taxés au Japon (ils le resteront à hauteur de 27,0 % jusque là, ce qui vaut aussi pour les stiltons jusqu’au 31 décembre, date d’entrée en vigueur du Brexit). Et quoi pour le haggis, la panse de mouton farcie ?

Sur un autre front, le Royaume-Uni s’est mis à dos Ben Cohen et Jerry Greenfield (crèmes glacées Ben & Jerry, filiale Unilever) au sujet des migrants traversant illégalement la Manche. On ne sait si, en mesure de rétorsion, le glacier prépare une glace « goût roquefort ». “Freeze them out” a titré le Daily Mail qui prêche déjà le boycott. Pas de quoi cependant bloquer les négociations avec les États-Unis, pour le moment au point mort.

Pour paraphraser le Courrier international, il faudra « comté (pardon, compter) » de nouveau ave le stilton qui devra affronter l’Humboldt Fog californien qui plagie le morbier et le Maytag blue cheese de l’Iowa qui s’inspire du roquefort.

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