Senior : avec mon macaron j’avais l’air infect
On savait Raymond Queneau fort dévot et nul doute qu’il
aurait adressé des prières à saint Glinglin afin d’obtenir miséricorde pour les
citadins confinés là « où s’étend la cambrousse dans toute son horreur
(…) ces tapis pouilleux des herbages ».
Aussi me suis-je mis la recherche d’un autel, d’une statue de saint Glinglin afin
d’allumer un cierge en suppliant que le confinement prenne fin. Quand ?
Eh bien, si saint Glinglin a entendu ma prière, ce sera peut-être
pour la prochaine mercuriale (15 mai). Mercure, dieu des voyageurs, intercédera
aussi afin que le grand rapatriement des Parisiens, depuis la Côte de Granit et
les îles bretonnes (ou voisines) retrouvent des activités citadines normales.
J’ai bien cherché, en vain, une église catholique romaine,
un temple évangéliste, hélas, pas le moindre sanctuaire. Qu’à cela ne tienne. Tel un
Coréen adepte de l’église Schincheonji de Jésus resté attaché au culte confucéen
des ancêtres, je me suis confectionné un saint Glingin et gravé mes vœux sur
des tablettes. Un Ken de Mattei revêtu de la bure de saint Pérègrin Laiosi, un
servite gangreneux miraculeusement guéri, a fait l’affaire. Chez nous, soyez prince, saint Glinglin, qu'on prie à genoux, chez nous, chez nous...
Or donc, avec un peu de chance et l’intercession de saint
Glinglin, le déconfinement progressif serait entamé pour la prochaine
mercuriale.
Progressif, car sans doute, les enfants et jeunes adultes d’abord,
les seniors ensuite. Oui, mais comment reconnaître une senior : c’est le
problème que Brigitte Macron a fait valoir au Comité d’éthique élyséen réuni
pour débattre de la question. Demander incessamment aux dames de plus de x années
de révéler leur âge serait inconvenant. Les seniors sont donc priés de se
conformer aux mesures envisagées sur la base du volontariat.
Leur faire (faire faire pour les plus chenus) coudre une étoile ou un triangle sur le revers de
leur habit rappelerait trop les heures —
antérieures — les plus tragiques de notre histoire. Il a donc été opté pour un
macaron. Pour la teinte, le caca d’oie l’a emporté, ce jaune verdâtre a été
choisi en hommage au défunt président Jacques Chirac, car chez nos ami·e·s helvètes
il est dénommé caca pomme. On sait ô combien Jacques Chirac appréciait les
pommes. Le macaron officiel de teinte #cdcddOd, se rapproche du vert artichaud de Pantone
ou du Pantone™ 4448C mais aussi du Feldgrau, dont nos amis allemands conservent
des stocks de colorants. Ainsi, la question de l’approvisionnement ne se posera
pas.
Porteuses et porteurs se verront assignés des périmètres de
déambulation accessibles lors de plages horaires déterminées. Lesquels espaces de sécurisation seront
surveillés par des agents des services publics afin d’en interdire l’accès aux
plus jeunes, aux immunisés certifiés, et empêcher les évasions.
Évidemment, le préfet Didier Lallement a été prié de ne pas
gaffer en déclarant « celles et ceux qui portent le macaron à présent ont
trop bien respecté les consignes depuis le début du confinement ; pas de
chance, ils n’ont pu contacter le virus et doivent rester à l’écart du reste de
la population. »
De toutes façons, c’est bien connu, les seniors en ont vu d’autres,
s’accrochent à leurs petites habitudes, et perdent plus vite que d’autres la
notion du temps.
Restera à se pencher sur la moyenne d’âge des suppléantes et
suppléants du Sénat, où la moyenne d’âge est de 61 ans. Contre 49 pour la
chambre des députés.
Mais pour ce faire, on saura donner du temps au
temps..
Excellent mon Jeff, c'est l'un de tes meilleurs ! Bon, sauf quand tu te livrais à la critique de mes books ! MDR !
RépondreSupprimerUn grand bravo Jeff, depuis l'Afrique de l'Ouest, pour cette perf. Je constate que tu ne perds, ni ton sens de l'humour ni de la répartie.
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