lundi 2 janvier 2023

Et le chancelier chancela

 Salmigondis de billevesées et calembredaines

Hallucinai-je ou ricanai-je ? « Les enfants chancelants sont nos meilleurs appuis » (V. Hugo), seraient, selon des postulantes et candidats au professorat des écoles, veinards, lumineux, &c. Fort peu, selon les rapports des jurys de 2022, furent capables de définir correctement l’adj. pouvant signifier faible ou sur le point de chuter. Mais un peu d’humilité : je suis incapable de nommer la figure de rhétorique (Occismore ? Adynaton ?) employée.

Au train où vont les choses, j’écrirais peut-être « je riz jaune » quand sera publié le bêtisier de l’agrégation des années 2020. On y trouvera peut-être des andouilles cambrésiennes d’aspect cintré. L’andouille et la bêtise sont à Cambrai ce que le calisson aquisextain est à la Provence, le millason au bordelais, le chancelier à l’échiquier, et je vous en passe… De nos jours, pour beaucoup, une chancellerie évoque davantage une confrérie gastronomique et vineuse (du fait de la distinction de chancelier) que le secrétariat d’une ambassade. La langue évolue, les dictionnaires s’appauvrissent et s’enrichissent, les significations évoluent. Ainsi, en mercatique, on emploie le terme de démarquisation, qui n’a aucun rapport avec le démontage de la timonerie d’une péniche, ou le fait de démasquer un imposteur. Soit, jadis, un aigrefin, alors un roturier se faisant passer pour un aristocrate, si possible, pour mieux qu’un chevalier (d’industrie), un marquis.

Si j’énonce que les raies des chattes à l’arrêt empuantissaient, n’y voyez pas que l’intention d’introduire une figure de style salace : ici, en Retz, au sens littéral du littoral, une chatte était une embarcation qui pouvait transporter le sel et la marée dans l’arrière-pays. Boby Lapointe l’aurait fait piloter par des maris niais. Cela étant, en toute humilité, en dépit de mes deux diplômes bac+5, je ne saurais affirmer que je serais capable de réussir le concours de prof des écoles. Certes, j’ai encore quelque restes, puisque pour moi, « le lait de la laie » est un exemple d’homonymie et non d’un truisme. Mais si on me demandait de commenter la phrase de Flaubert, « la littérature est un vésicatoire qui me démange », je ne saurais quoi inventer. S’entretenir avec des mots fléchés ou croisés reste largement insuffisant. L’âge n’aidant pas, mon niveau de français est devenu vacillant et de moins en moins scintillant. Sur le site cap-concours.fr, on trouve les sujets soumis aux postulants du CRPE et leurs corrigés. Je vois que, pour le texte de Giono, il fut estimé de bon escient de signaler qu’un freux est un corbeau, une hase la femelle du lièvre, et des lagremuses des lézards. Pour les deux premiers, je me souviens, pour les troisièmes, larmuses (ou larmeuses chez Pagnol), je n’aurais pu deviner. Je m'en excuse car plus peu que prou, les lagremuses sont aux Provençaux ce que les chattes sont aux Paydrets (gentilé issu du gallo, me semble-t-il). Consulter les corrigés porte un coup salutaire à ma cuistrerie. À narquois, railleur et demi (l’adage veut qu’à malin, malin et demi, tout comme à bon chat, bon rat). J’avais naguère confusément subodoré qu’exiger un master 2 pour devenir instit visait à offrir des débouchés au nombre croissant d’étudiants ainsi diplômés. L’effet pervers est que plus on avance dans les études, plus on oublie des fondamentaux, et que les jurys s’attendent à ce que le niveau corresponde à la durée des études. Dans mes jeunes années, un brevet (ou BEPC actuel) suffisait pour intégrer l’éduc’ nat’. Et c’est, ai-je la faiblesse de croire,  davantage à mes maîtresses et maîtres d’école de bac moins cinq qu’à mes profs agrégés ou universitaires émérites que je crois de pouvoir encore à peu près comprendre les corrigés et les sujets de ce concours.

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