Encore un
spécial copinage canin !
Jusqu’à
tout à l’heure, j’ignorais tout de Nicole Esterolle. Autant dire que ma fin
prochaine m’adviendra un tantinet moins idiot. Je le dois encore une fois à l’ami
Jiji (Jean-Jacques) Tachdjian des éditions de La Chienne. Comme tout prétexte m’est
bon pour faire sa réclame, je saisis illico celui-ci.
Je ne sais si Jiji Tachdjian est l’un des plus grands artistes mondiaux synchrones (de ce siècle et de la seconde moitié du précédent) ou l’un des plus géniaux graphistes-illustrateurs actuel depuis diverses civilisations fort anciennes. Je l’avais, enthousiaste, découvert en tant que prolifique créateur de polices de caractères. De ce point de vue, son talent est reconnu par les plus exigeants. Je ne suis pas pour autant un fanatique de toute sa surabondante création. Je salue à chaque fois le talentueux saltimbanque, mais pas au point de m’écrier bis ou ter constamment. Vu la fréquence qu’il s’impose, je ne vais pas risquer l’extinction de voix, si ce n’est le carcinome laryngé (l’ablation de mes amygdales sous anesthésie insuffisante m’incite encore à la prudence).
En fait,
je suis un admirateur mitigé (j’en prends, j’en laisse, de La Chienne et du
reste). L’art, en général me laisse d’ailleurs aussi tiède que l’eau du Tube
de Toilette de Boby Lapointe). Je me suis un temps intéressé à la gravure,
car si la terre ment rarement, la gravure dure… durablement. Le figuratif
décoratif conserve mes ringardes préférences. Or donc, le foisonnement de
Tachdjian s’en écartant fréquemment, je m’autorise quelques réserves à l’occasion.
En revanche,
j’ai été bluffé par les chroniques de Nicole Esterolle, contemptrice non point
de l’art contemporain dans son ensemble, mais de la plupart des créations des financial
artists prisés des « grands circuits élitistes de l’art muséal »
dont les plus riches collectionneurs poussent les cotes (par réflexe mercantile,
souci d’optimisation fiscale, ou goût d’épater la galerie, allez tenter de
comprendre). Bon, l’Angel Bear de Richard Texier, sur le parvis de la gare du
Nord n’offense pas mon regard mais le baratin sentencieux le faisant valoir me
donne encore plus envie de lire Nicole Esterolle. Vacharde. Vous trouvez ses
textes sur le site du Vadrouilleur
urbain, ou celui du Magazine du Schtroumpf émergent.
Entre autres car il advient que la presse la sollicite. Cela donne, pour ne
citer qu’un exemple, ce commentaire d’une sorte d’installation de Mac Adams :
« cette œuvre avec pot de fleur renversé est celle que je préfère car
elle est la plus illustrative de la violence symbolique et de la puissance
terrorisant d’un discours capable d’imposer en tant qu’art une telle évidente
stupidité » (c’est en tout cas l’une des dernières en date mais comme
son prix n’est que de 8 300 euros, elle ne devrait pas tarder à régresser
dans le palmarès).
Bien,
Nicole Esterolle peut écrire ampoulé-classieux à propos des artistes « conceptualo-bidulaires ».
Mais aussi qualifier d’étrons grotesques deux sculptures transportant vers un « au-delà
de la laideur ». En gros, elle s’insurge contre le courant daubiste,
lequel repousse les limites du « gaucho-duchampisme bidulaire »,
qu’il soit soumis ou insoumis, peu lui chaud, et autres tendances magnifiées
par divers esthéticologues. Parmi ses têtes de turc, Buren, ou Koons et ses
croquignolades.
Pour résumer,
même hors de la compagnie complice de Tachdjian (dont La Chienne fournit les exemplaires
imprimés de ses gazettes, consultables sur le site yumpu.com), elle tient
sacrément la route, la Nicole. Ses gazettes renommées niouzes en sont au
trentième numéro, daté d’août.
Elle enrichit
aussi un Nicole’s Museum (en ligne), un blogue-notes, une page
FB. Sur laquelle je constate que Cécile Carière (artiste « singulière »,
quand vous n’êtes pas du milieu des critiques d’art, casez l’épithète, on vous
le reprochera rarement) est du nombre de ses abonnées. Vous êtes ici aussi chez
vous, Cécile, revenez quand vous voulez...
Un autre
ami, l’écrivain Alain (Georges) Leduc, qui finalise un livre fort peu complaisant
sur Yves Klein, a peut-être consulté l’ouvrage La Bouffonnerie de l’art
contemporain (J.-C. Godefroy éd.), de la dite. Je ne sais s’ils se trouvèrent
des goûts en commun, mais des dégoûts, assurément.
Pour en revenir à Jiji Tachdjian, créateur déconcertant (c’est comme singulier, vous pouvez abondamment le caser sans risque), je constate avec plaisir qu’il sait toujours judicieusement s’acoquiner (entendez : copiner). Qu’il en soit ici, une fois de plus (et là, de mieux encore) remercié. Il déplaît aux tartufes mais est apprécié aussi dans les HLM (clin d’œil à Pierre Perret, poète sensible — pardonnez l’apparente redondance, certains le sont peu). Mais comme il est susceptible de plaire aussi aux publics d’un Patrick Sébastien, auquel je rends aussi hommage au passage en raison de sa grande culture éclectique) ou des films du regretté Jean-Pierre Mocky, on se doute bien que le ministère de la Culture ne lui commandera pas une fresque urbaine ou l’habillage de Beaubourg lors des prochains travaux d’entretien. Le pire est qu’il s’en honore. Ce qui n’est pas le moins du monde respectable. Bien au contraire, comme pourrait sans doute le conclure Nicole Esterolle. Mes compliments, Madame !
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