samedi 15 juin 2019

Brouille littéraire entre Roger Vailland et Robert Brasillach : irréconciliables ?

Anciens de la veille et post-modernes du lendemain : Brasillach et Vailland

Parfois, les pires titres vous viennent d'un coup. Comme celui qui précède. Mais bon... la fatigue. De quoi est-il question ? D'un article de Roger Vailland s'en prenant vertement à Robert Brasillach...

Nous sommes en 1931. La littérature ayant marqué les « Années folles » n'a plus tout à fait l'heur de plaire à l'heure des lendemains de la crise économique de 1929 et de la montée des menaces de guerre. Du passé littéraire récent, Robert Brasillach veut faire table rase. Mais voilà que Vailland, pourtant en froid avec nombre de surréalistes (on l'aurait été à moins) fustige son ex-ami...
C'est presque un procès en « révisionnisme » qu'il lui intente. Vailland aurait-il pressenti les autodafés nazis de 1933, ceux des franquistes d'avril 1939 (et pourquoi pas celui d'Histoire d'O par des étudiantes féministes américaines en 1980, pendant que j'y suis ! ou celle de tomes d'Harry Potter par des prêtres polonais fin mars 2019) ? L'éradication d'une littérature « malsaine », immoraliste ? Sans doute pas. Vailland a rompu avec les disciples de Georges Gurdjieff, avec Daumal et Gilbert-Lecomte (au fait, saviez-vous que Tania Visirova rencontra Gurdjieff ? Ce que je n'indique pas dans le document sur Leïla et La Visirova que vous retrouverez peut-être ?).
La prescience, ce n'est plus sa tasse de thé.
En revanche, et c'est mon hasardeuse hypothèse, il voit en Brasillach un « traître » et emploie à son endroit, sans le moindre égard pour l'amitié qui les liait, les procédés que lui firent subir, à lui, Vailland, Aragon et Breton. J'exagère ? Je suis à bonne école avec cet article de Vailland de 1931.
Bon, allons-y d'une analogie douteuse... Je pourrais prendre au hasard, yeux bandés, un mot au hasard dans chacun de mes volumes d'une de mes éditions imprimées du Grand Robert, et vous les caser ici (ce que je fis autrement, demandant à mes confrères de m'imposer des mots farfelus pour un article politique, et j'y parvins). En dadaïste ou surréaliste à la petite semaine (ou plutôt minute). Brasillach considère que ce genre de divertissement n'est plus d'actualité, qu'il faut faire place à une littérature sérieuse, blindée d'idéaux musclés (en chemises noires ou brunes ? Non, pas déjà). L'encore jeune Vailland, déjà vieux car nostalgique de Gide et des surréalistes, du Grand Jeu, prend le contre-pied. Aussi parce qu'il se souvient que Brasillach, quand il lui apportait des écrits de la sorte à Louis-le-Grand, s'extasiait, se montrait enthousiaste, voire dévot vis-à-vis de lui.
Mais qu'est-ce que la littérature (le bac de français est passé ? dans l'incertitude, je me garde de répondre, ne voulant pas influencer les candidats), s'interrogent l'un et l'autre... Ce qui est pissotant (je ne sais si Maxence Van der Meersch employa ce vocable — que je considère angevin typique — dans Corps et âmes), c'est que Vailland, par la suite, en certains de ses romans militants, prônant l'engagement, les luttes sociales, se rallia quelque peu aux vues de Brasillach (sur le sérieux en littérature, n'extrapolons pas au-delà). Pour l'édification des masses... Transposez. À l'époque des « Grands » (Réchauffement, Remplacement...), il n'y aurait que littérature nombriliste (Breton, Nadja) ou loufoque, déjantée, érotico-fantastique (ou de vieux hommes blancs vous bassinant avec La Virisova et les Folies-Bergère ? Sauf que Tania Visirova, ce n'était pas que cela, ce n'était pas que Lido, Radio, Casinos, mais les pavés de Chisinau, l'Ukraine de la guerre, et des « universités  » à la Philippe Clay). Un peu d'indulgence pour Brasillach, s'il vous plait (ou non)... 
Mais j'exagère et le confesse. Que voulez-vous, formaté par un journalisme des années 1980, bien loin de celui des années 1930, je reste émasculé, incapable d'écrire à la manière d'un sicaire Vailland lardant d'ironie un Brasillach. Je ménage chèvre-chou Vailland et chou-chèvre Brasillanch. C'est beaucoup moins rigolo que ce « Une enquête "objective", la "fin de l'après-guerre" » de Vailland dans Paris-Soir du 16 septembre 1931. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire