Mais Malot à Pornic en famille sans aucun doute
Résidant désormais à
Kerverner-Raetz, j’avais, en présomptueux, me placer dans les foulées d’Émile
Boutin. Soit de contribuer à la suite de ses écrits (voir sa page Wikipedia), à
enrichir la connaissance historique du Pays de Retz. Gageure, il a trop peu
laissé de champ à d’éventuels émules. Restent des périphéries, comme le rappel
du séjour d’Hector Malot à Pornic. Déjà pourtant amplement balisé.
Françoise Boutin (épouse Pierre-Jean Le Douarin) m’ayant fourni les livres de feu son père que je n’avais pas antérieurement lus, j’abandonne l’espoir d’enrichir ses recherches, quasi-exhaustives, et me retranche sur une position largement consolidée par Agnès Thomas Vidal (retrouvez « Le séjour d’Hector Malot à Pornic et le roman Paulette »). L’Association des Amis d’Hector Malot (amis-hectormalot.fr) vous éclairera plus amplement. Naguère, quand je vous entretenais d’Octave Mirbeau et de Roger Vailland, ou plutôt de leur prose journalistique, je vous aurais transcris celle de Malot dans Le Rappel (des 19 octobre 1882 et éditions suivantes). Est-ce l’air iodé ou l’approche du grand âge, j’ai la flemme et je résume, condense. Les férus retrouveront sur le site annexe de la BnF (retronews.fr). On le sait Émile Boutin et d’autres l’ont établi, les habitants de l’actuelle Côte de Jade, jusqu’à l’actuelle Villeneuve-en-Retz (Bourgneuf et localités voisines) penchèrent plutôt pour la République que pour le ci-devant vendéen Charette. Or donc, à Pornic, c’est la disette. Mais tandis qu’un sieur des Moutiers leur propose de les ravitailler en blé, un Pornicais royaliste signale que la défense de Pornic a rejoint Les Moutiers. Du coup, la ville sans défense est conquise, puis reprise. Mais « brulée en partie ». Reconstruite, Pornic attire le bourgeoisies nantaises, angevines et vendéennes (et la noblesse de Vendée qui dédaigne qui n’est pas bien né). Malot constate (ou suppute) que « la noblesse angevine et vendéenne guindée dans sa fierté, ne pouvait admettre les prétentions de la bourgeoisie nantaise, épanouie dans sa vanité, ses airs flambants, son ostentation et son importance (…) l’on se regarda en chiens de faïence. Ce fut la ruine du casino qui dut éteindre ses lampes et fermer ses portes. ». Conclusion : l’ambition de Pornic « se borna à devenir le rival de Dinard. ».
C’était là quelque peu faire fi
de la vitalité pornicaise : vers la fin des années 1930, la Côte de Jade
compte quatre casinos proches de Pornic (ceux de la Noëvillard, du Môle, de la
Source et de la Côte de Jade). S’ajoute, à La Bernerie, celui de la Plage, et à
Saint-Brévin, le Casino des Roches. À Tharon, il est fait état d’un Casino
Lebreton. Toutefois, il semble que la fréquentation n’est pas aussi huppée
qu’au casino de Monaco. Il semble effectivement que le casino du Môle périclita
avant d’être repris en juillet 1929 (relate Le Phare de la Loire du 17
septembre 1929) par un « gros négociant parisien » et des banquiers de
Paris et Tours. Le dix de cette année, le directeur des jeux part sans laisser
d’adresse, puis ce fut le caissier, puis le directeur général, ce alors que le
personnel portait plainte pour non règlement des salaires. Ce casino est fermé
avec « apposition de scellés sur les portes ».
Alors, Hector Malot à La
Bernerie ? Improbable. Il est fort possible qu’il se rendit, par
curiosité, aux Moutiers… Donc, peut-être et non assurément, qu’il prit une
rapide collation à Kerverner (La Bernerie), et peu importe. Lire Paulette
ne renforce pas cette supposition (accès libre sur le site de Gallica.bnf.fr),
car il y est surtout question de la plage « de la Noveillard ».
Pour en revenir aux casinos, notons que La Vague de le côte pornicaise et du
pays de Retz, datée du premier janvier 1928, signalait que « l’orchestre
Duran s'est rendu directeur du Casino de la Plage ».
En fait, La Bernoche (surnom
local), hormis le peintre Edgar Maxence, ne peut guère se targuer d’avoir
inspiré des personnalités littéraires de tout premier plan (même si le poète
René Guy Cadou fut un résident fréquent). Le seul — à ma connaissance –
écrivain à fréquenter assidûment Kerverner fut sans doute Jules d’Herbauges (soit
Julie Rousseau de Saint-Aignan). Mais, hélas, dans sa Poursuite de l’idéal,
elle qualifie la localité de « pauvre village » et ses invités
la pressent de s’établir à Pornic. Elle y consent d’autant mieux que son ami,
le musicien Anatole Schaf était décédé (je n’ai pas retrouvé sa tombe au
cimetière local). Cela étant, il est possible de supputer que la plupart des
littérateurs nantais (tel Marc Elder, né Marcel Auguste Tendron, voire Michel
Ragon, ami de Cadou) ont fréquenté La Bernerie. Et que le capitaine Lacroix,
historien de la marine, eut nombre de visiteuses et visiteurs illustres. Je
mentionne aussi Marie Sizun (Marie Dahlquist) dont le roman Les Sœurs aux
yeux bleus, fait état de Kerverner. J’en omets sans doute (Ivan Jablonka, Sophie
Pietra Roussel, notamment), voire non des moindres.
De médiocre foi, je suppute que
de très nombreuses personnalités des arts et des lettres ont fréquenté La
Bernerie, en se préservant soigneusement d’en faire la promotion. Mais même en
cherchant bien, je n’ai trouvé, que le peintre Maurice Denis, venu en famille
en août 1903. Il peint des baigneuses, quelques paysages, et un moulin encore
en activité, que je peine à resituer (peut-être celui, à présent désaffecté,
proche de la gare). Je ne saurais dire si sa Plage au cerf-volant s’y
situe. En fouillant le site de la BnF, Gallica, j’ai retrouvé quelques noms de
littérateurs oubliés (tel Victor-Lucien Tapié, auteur d’une centaine de
titres). Plus proche dans ce siècle, je ne vois que Charlotte Gainsbourg, venue
sans doute assez fréquemment en voisine (elle résida à Pornic). De toute façon,
si Kerverner reste une station toujours qualifiée de « familiale »,
elle ne fut jamais très mondaine ; même si The New York Herald
signala en septembre 1907 la présence de la comtesse Eugène de Bocandé « where
she will remain until late in October », et si au moins un député de
la Seine, le docteur Henri Marmottan, qui fut maire du seizième arrondissement
de Paris, venait y rejoindre fréquemment sa famille.
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