Tiens, oui, Who's afraid of Michel Doury?
Je ne suis pas peu satisfait d'avoir commis un article sur Michel Doury, « trop absent des dictionnaires », et beaucoup moins fier en le comparant avec ceux des autres neuf contributeurs (dont une, Sylvie Doizelet) de ce dossier d'hommage à l'écrivain et traducteur, Ardennais d'adoption...
J'ai éprouvé comme une légère frayeur en découvrant le titre de l'article de Sylvie Doizelet dans le numéro 63 de la revue Les Amis de l'Ardenne. J'étais près de lui donner un dressing-down pour qu'elle ait an earful (pas au point de battre the tar out of her) : quoi, titrer sur le vin ! Alors que chacun sait que Michel Doury était un pilier du Roy de la Bière à Sedan, où on le trouvait plus fréquemment que dans le bahut qui l'employait à enseigner l'anglais. Sylvie Doizelet est romancière et traductrice, et certes, tout comme le derrière d'Arletty fut « international » et que l'amour de la patrie, en littérature, on s'en contrefout (je ne sais plus quel maître gendelettre au procès de Brasillach), il reste quand même des choses que l'on ne saurait admettre. Mais, bon, il était difficile de s'étendre sur la traduction de beer en mousse puis digresser sur celle d'Alsace comparée au linceul de Lorraine ; ce qui aurait été hors de propos. C'est donc de la transmutation traductologique de wine en pinard, jaja, picrate, reginglard, et dérivés (guinguet, rouquin... j'en passe), voire de noms de marques lexicalisés (Goulou®, Kiravi™, &c.), dont elle traite, non point en goujate imprécatrice mais avec justesse et concision. Comme je l'envie !
Autres participants à l'évocation des mânes de Doury, himself (« La Chasse », « À propos de Chandler »), Philippe Mellet, le chaleureux Thierry Doudoux, Daniel Casanave, Hervé Carn, Édouard Gaède, Patrick Mouze (que je salue au passage), sans oublier bien sûr Stéphane Balcerowiak, qui, en rubrique « Livres et revues » cisèle une critique élogieuse du dernier Gisèle Bienne (La Malchimie, Actes Sud, « livre en tout point vital »). De quoi pâlir du voisinage...
Tiens, Mouze, à propos du Mallory de Doury (La Chasse en octobre), évoque le regard froid de Roger Vailland. Il est notoire que Vailland... Manchette, Djian, Queffélec, Madeleine Chapsal, évidemment Philippe Lacoche, tant d'autres... J'y reviendrai, mais cela attendra (procrastination ET impossible tentative d'exhaustivité qui m'occupera un moment). Celui de Doury, qui laissait entrevoir la flamme de son feu intérieur, mériterait aussi de figurer plus souvent dans la prose des littérateurs.
Édouard Gaède revient sur les échanges entre André Dhôtel et Doury. Bon, je ne vais pas vous détailler le sommaire, ni vous éclairer sur Michel Doury. Parcourez donc La Toile, faites grimper Doury au classement de Google et des autres.
Les Amis de l'Ardenne, c'est une association trilatérale, un peu comme le groupe Blderberg, mais son influence, patente, n'a rien d'opaque. Elle couvre et couve l'Ardenne (la Belge, la ducale, la celte hexagonale...), et c'est Les Amis de l'Ardenne, « revue trimestrielle », qui comporte cette fois 122 pages dont pas moins de 75 canonnent sur Doury. Quelles salves pour l'ex-officier de la Royale !
On ne monte pas en ligne pour rejoindre la revue. Il faut envoyer un chèque à Stéphane Collet (72, av. Charles-Boutet, 08000). Mais en bas de casse sans espace, voyez Facebook (« À propos », page de contacts). Si Yannick et Daniel Gaucher lisent cela... (aparté). C'était comment déjà le prénom du colonel Gaucher, l'Ardennais, l'évadé, le condamné à mort par le préfet (pas Papon, un autre...). Mémoires d'Ardennes...
Les Ardennais... En tant que membre de la diaspora bretonne, j'ai pu les apprécier à Reims. Quand je débarquais en Alsace, ce furent les Lorrains. Mais dans la Marne, ils (pas les Lorrains) sont presque partout, et se lient facilement aux allophones (ne pratiquant pas le champenois), tandis que les autochtones sont souvent plus lents à la détente. Souvent adeptes de la « chouille champennoise », ils fraternisent à l'aise, et ne sont guère long(ue)s à vous adopter. Je m'honore toujours d'être chevalier du Boudin blanc de Rethel, son berceau, à peine plus coloré que d'autres, mais qui les fait tous pâlir (d'aucuns se bourrent d'éclats de truffe, de cèpes, pour vous la jouer parvenus, en vain). De quoi snober la Confrérie du pied de cochon de Sainte-Menehould et tant d'autres gastronomiques & vineuses. La patrie de Louis Jouvet vous accueille aussi bienveillante qu'elle le fût pour maints autres, et Jean-Claude Drouot s'en souvient, pour n'en citer qu'un... Parfois d'ailleurs aux sons des cornemuses locales (mais je m'étendrai plus tard... cherchez... trouvez...).
Allusif, fin pratiquant de l'understatement, tel était Michel Doury, qui pourtant ne mâchait guère ses mots (ses élèves, Philippe Mellet en particulier, s'en souviennent). C'était un homme, ou plutôt un personnage qui, que, quoi, dont et pas trop ou, car entier.