vendredi 24 février 2023

Palmade, le lycéen luzien et l’ex article 64

 Mansuétude et compassion à contours variables (médialogie sauvage)

Pierre Palmade et le lycéen de 16 ans de Saint-Jean-de-Luz. Pôv, pôv gamins. Ce n’est pas ce qu’estiment les détenus expédiés direct en détention carcérale pour des faits similaires ou apparentés. Ils sont la règle et non l’exception, ces détenus. L’ex chroniqueur judiciaire que je fus ne va pas vous gaver avec ce dont il n’a aucune qualité ou élément pour éclairer quoi que ce soit. Mais évoquons autrement ces choses.


Le conducteur de la Clio qui a percuté par l’arrière le véhicule des principales victimes, un homme de 80 ans, va-t-il être incarcéré ? Allez, absence de contrôle de son véhicule, non-assistance à personne en danger, il y a de quoi condamner avec amende et prison avec (ou sans) sursis. Son ou sa commise d’office pourrait-il plaider l’article 122-5 du CP (qui a succédé à l’art. 64) et que du fait de son grand âge, il était sous le coup d’une « altération temporaire de son discernement » ? La défense de Pierre Palmade pourra, elle arguer que son altération résultait d’une consommation involontaire de « substances psychoatives ». En effet, tout comme Richard Virenque, peut-être, cette fois, fut-il drogué « à l’insu de son plein gré. ». Pour Palmade, un consentement atténué pourrait le tirer d'affaire. Et ce brillant collégien luzien, qui a trucidé une prof, voilà qu’il nous est soutenu qu’il était sujet à des troubles divers. Eh bien, oui, tout est possible, probable, c’est autre chose.

Dans les prisons où vont sans transition des prévenus pour des cas approchants, bien sûr, le ressenti diverge de cette approche. Et je relève au passage l’absence de réflexion et d’enquêtes des médias traitant de ces diverses affaires. Car, figurez-vous que du temps de l’ancien article 64, j’ai recueilli les confidences d’experts psychiatres m’expliquant que faute de lits et de moyens, ils déposaient en un sens excluant l’irresponsabilité des accusés. J’ai connu des cas où, en raison du rang social de la personne incriminée, de son âge avancé, la détention devenait exclue. Je me souviens du notaire de Bruay-en-Artois (affaire Brigitte Dewèvre, 15 ans), en 1972, et des errements d’alors sur « la justice de classe ». Palmade et ce lycéen me sont indifférents, jamais rencontrés, ou même croisés, donc, ni empathie ou antipathie, aucun sentiment de vindicte ne m’anime. Comme quoi, le, les ressentis, diffèrent du ressentiment.

Le lycéen avait, aurait-il argué, « entendu des voix ». Comme avant et après Jeanne d’Arc, tant et tant d’autres. Son avocat précise qu’il est placé en garde à vue dans un établissement qui prendra en compte « les soins dont il a besoin. ». En chambre individuelle ou non ? Sa famille en a-t-elle les moyens ? Je le vois mal partager celle de Palmade. Mais je constate qu’alors que maints demandeurs et demanderesses de soins sont aux mieux refoulés en régime ambulatoire (les soignants en psy étant transformés en distributeurs de médocs aux patients se présentant aux rendez-vous, j’en ai eu des témoignages récents), des cas médiatisés libèrent des prises en charge hospitalières. La réclame médiatique sur ces affaires aura eu au moins cela de bon : attirer l’attention sur les arcanes judiciaires et les troubles de comportements aux causes multiples et variées. Mais ces affaires nous éclairent davantage sur la société du spectacle que sur le fond. Au moins, Frigide Barjot (belle-sœur de Karl Zéro) et Marion Maréchal nous auront-elles épargné une marche blanche à la mémoire de l’enfant de la passagère kurde victime de Palmade (ou des addictions, de la fatalité, allez comprendre…). D’ici à quelques semaines, j’aurais, nous aurons oublié tout cela si ce n’est que les prisons sont surpeuplées, les HP de même, et qu’il vaudrait mieux rester claquemuré chez soi (pour qui dispose d’un chez lui). Du coup, je vais faire un tour dehors : pour vous épargner de prolonger mon bavardage.

samedi 28 janvier 2023

Incorrections endormies :« Alla linea», sclama-t-il !

 Irréflections absconses sur l’éveillisme

Mes écrits n’ayant ni queue, ni tête, je prie la lectrice ou le lecteur (je doute de la pertinence du pluriel) de commencer par un approximatif milieu. Au hasard : la première ligne…


Après ma chancelante envolée (de moucheron, dont les ailes de nabot rabaissent le plafond, pour beaudelairiser dérisoire) sur le vers de V. Hugo (« Les enfants chancelants son nos meilleurs appuis », voir antérieurement), j’ai atteint la dernière marche de l’escalateur en panne. Mais avant de pondérer mes irréflections sur l’éveillisme, retour sur ce sujet. Au sens passé au lave-linge, un Hugo unijambiste contemporain n’aurait jamais osé, et au figuré, songeons que ô combien de gâteux, partis esbaudis pour relever un chiard pas trop loin se sont cassé un col du fémur). Le concours du professorat des écoles s’apparente à un géant badigeon (coton, quoi). Mais entrons dans le morne sujet qu’évoque ce titre employant le désuet jargon des protes. Lesquels, libres penseurs, éludent la hache d’Allah pour s’exclamer (en levant le poing). À ce propos, j’ai narré jadis comment un « passe encore » encadré de guilles de distanciation m’avait valu un poulet assassin d’un lecteur âgé (l’autre, plus jeune m’ayant répliqué qu’il n’était pas de la police, c’est une autre anecdote versée alors au bêtisier du journal). Mais, au préalable, furtif hommage à feu Jean Méron, orthotypographe furibond, qui traquait la moindre incorrection dans les écrits administratifs. Entre ici, Jean Méron, qui pour figurer à l’oral les guilles de distanciation, élevait ses coudes à hauteur de sa bouche, deux doigts écartés pour évoquer les doubles chevrons français (et non repliés à hauteur des oreilles, ce qui est un anglicisme gestuel fâcheux).

Eh bien, la question est posée : l’éveillisme est-il un méronisme ? Au jeu du méli-mélo farfouillé (je francise là une marque de négoce bien connue), il sera désormais licite de combiner un wu (vocable dialectal) et un woke, voire un wokisme. Mattel s’ éveilla à point d’heure et trancha dans le lard des expressions haineuses ou discriminatoire. Le Scrabble™ les voue à l’endormissement. Il faudrait aller plus loin et ne plus dire un·e Pdg, mais dire un gaigé ou une gaigère. L’éveillisme revêt un effet escalatoire (ou amplificatoire, pourrait dire Emmanuel Macron). Déjà, à mi-étage, on se dit qu’on aurait dû s’en prendre à tel ou tel autre mot, et parvenu à l’étiage supérieur, la crue des arrière-pensées devient débordulatoire. Cela étant, j’ai admis temporairement l’écriture inclusive, et je ne jette pas tout chiard avec l’eau de son bain. Mais le meilleur présumé est souvent l’offensif du mieux si trop prolongé et pour employer une raffarinade, les bornes franchies estompent les limites acceptables. En espingouin, Franchute, Tirafresa, Gabocho, désignent ironiquement un Français, et le prénom fridolin (issu de l’all. frido et lind, paraît-il, selon les uns, de l’irlandais selon d’autres), fut-il si xénophobe et péjoratif que l’actuelle dictionnairique veut nous le faire croire ? Le mot n’est rien, c’est le contexte, voire l’intonation, qui priment. Les féministes hédonistes n’auraient jamais pensé tisser le linceul de la cagole méridionale (c’est aussi une marque de bière, de mousse). Et l'éveillisme qui déboule n'amassera pas durablement mousse.

lundi 2 janvier 2023

Franglais : Pelé, le bouc de la balle au pied

 Et Benoît, la chèvre de la papauté ?

M’ennuyant ferme à La Bernoche (d’autant que le Breizh Pub, réclame gratuite, est fermé), je réalimente parcimonieusement mon blogue-notes. En espérant vous distraire avec mes calembredaines (au risque de frôler les gaudrioles).


Je ne sais si vous l’avez remarqué, mais les capotes médiatiques comparées des décès du pape Benoît et du libero Pelé m’ont interpellé. Pour moi, le bouc de la balle au pied reste JPP. Non pas que j’en fus un « éventail » affectionné, mais en raison de la rengaine des Guignols de l’Info : « Reviens JPP reviens, parce que la France, elle a besoin de toi, tralala ». Il paraît d’ailleurs qu’en 2004, Pelé lui-même en fit un bouc (source Wikipedia). Les papinades de ce Boulonnais canonnaient, dit-on. J’dis cela, j’dis rien, m’enfin, ce futlaskékésa… Et il semble que l’expression It is what it is serait à bannir, selon l’univ. du lac supérieur du Michigan. Laquelle voue aux gémonies les caprins acronymes, entendez, en « bon » français inclusif, les caprines et les caprins, les goats. Ou les plus grands d’entre toutes et tous de tous les temps (immémoriaux inclus). En regard, on se sent bien peu de chose, et je ne suis même plus sûr d’être le meilleur galéjeur de mon canton. Tous ces « boucs » éphémères ne le doivent qu’aux tartarinades des plumitifs (dont je fus), en quête de superlatifs. L’obsolescence les guette. Assez tôt dans ma carrière, j’employais le verbe sublimer, depuis mis à toutes les sauces des réclames. Je gage, augure et présage que, bientôt, voire sous peu, on en reviendra au (« vieilli » selon déjà Vaugelas) magnifier. Ou à je ne sais quel néologisme du moment. Les vocables sont de pauvres acteurs agités sur les planches de la PAO avant de disparaître (pour paraphraser le barde de l’Avon, les mots sont des bouffons, des Chicot de Dumas, Alexandre). Pensez aux chansonniers, devenus des comiques (et au Québec, des chanteurs à textes). Je doute d’ailleurs fort que les facéties d’un Fernand Raynaud, d’un Robert Lamoureux, voire d’un Coluche, d’un Boby Lapointe, d’un Jean Yanne, d’un Bedos, passent encore la rampe dans moins d’une demi-décennie. Schmoll (Claude Moine, né en 1942) a déjà rejoint le cimetière des éléphants. En ce sens que je ne suis pas sûr que mes petits-enfants puissent décrypter la métaphore. Pour les « boucs », l’un chassera l’autre. Il ne me reste qu’à espérer que ce ne sera pas mon dernier barrissement.

Et le chancelier chancela

 Salmigondis de billevesées et calembredaines

Hallucinai-je ou ricanai-je ? « Les enfants chancelants sont nos meilleurs appuis » (V. Hugo), seraient, selon des postulantes et candidats au professorat des écoles, veinards, lumineux, &c. Fort peu, selon les rapports des jurys de 2022, furent capables de définir correctement l’adj. pouvant signifier faible ou sur le point de chuter. Mais un peu d’humilité : je suis incapable de nommer la figure de rhétorique (Occismore ? Adynaton ?) employée.

Au train où vont les choses, j’écrirais peut-être « je riz jaune » quand sera publié le bêtisier de l’agrégation des années 2020. On y trouvera peut-être des andouilles cambrésiennes d’aspect cintré. L’andouille et la bêtise sont à Cambrai ce que le calisson aquisextain est à la Provence, le millason au bordelais, le chancelier à l’échiquier, et je vous en passe… De nos jours, pour beaucoup, une chancellerie évoque davantage une confrérie gastronomique et vineuse (du fait de la distinction de chancelier) que le secrétariat d’une ambassade. La langue évolue, les dictionnaires s’appauvrissent et s’enrichissent, les significations évoluent. Ainsi, en mercatique, on emploie le terme de démarquisation, qui n’a aucun rapport avec le démontage de la timonerie d’une péniche, ou le fait de démasquer un imposteur. Soit, jadis, un aigrefin, alors un roturier se faisant passer pour un aristocrate, si possible, pour mieux qu’un chevalier (d’industrie), un marquis.

Si j’énonce que les raies des chattes à l’arrêt empuantissaient, n’y voyez pas que l’intention d’introduire une figure de style salace : ici, en Retz, au sens littéral du littoral, une chatte était une embarcation qui pouvait transporter le sel et la marée dans l’arrière-pays. Boby Lapointe l’aurait fait piloter par des maris niais. Cela étant, en toute humilité, en dépit de mes deux diplômes bac+5, je ne saurais affirmer que je serais capable de réussir le concours de prof des écoles. Certes, j’ai encore quelque restes, puisque pour moi, « le lait de la laie » est un exemple d’homonymie et non d’un truisme. Mais si on me demandait de commenter la phrase de Flaubert, « la littérature est un vésicatoire qui me démange », je ne saurais quoi inventer. S’entretenir avec des mots fléchés ou croisés reste largement insuffisant. L’âge n’aidant pas, mon niveau de français est devenu vacillant et de moins en moins scintillant. Sur le site cap-concours.fr, on trouve les sujets soumis aux postulants du CRPE et leurs corrigés. Je vois que, pour le texte de Giono, il fut estimé de bon escient de signaler qu’un freux est un corbeau, une hase la femelle du lièvre, et des lagremuses des lézards. Pour les deux premiers, je me souviens, pour les troisièmes, larmuses (ou larmeuses chez Pagnol), je n’aurais pu deviner. Je m'en excuse car plus peu que prou, les lagremuses sont aux Provençaux ce que les chattes sont aux Paydrets (gentilé issu du gallo, me semble-t-il). Consulter les corrigés porte un coup salutaire à ma cuistrerie. À narquois, railleur et demi (l’adage veut qu’à malin, malin et demi, tout comme à bon chat, bon rat). J’avais naguère confusément subodoré qu’exiger un master 2 pour devenir instit visait à offrir des débouchés au nombre croissant d’étudiants ainsi diplômés. L’effet pervers est que plus on avance dans les études, plus on oublie des fondamentaux, et que les jurys s’attendent à ce que le niveau corresponde à la durée des études. Dans mes jeunes années, un brevet (ou BEPC actuel) suffisait pour intégrer l’éduc’ nat’. Et c’est, ai-je la faiblesse de croire,  davantage à mes maîtresses et maîtres d’école de bac moins cinq qu’à mes profs agrégés ou universitaires émérites que je crois de pouvoir encore à peu près comprendre les corrigés et les sujets de ce concours.