Trois patronymes pour un seul homme
Devant faire de l’ordre dans sa maison familiale de
Fargniers, la fille de Roger Choin retrouve une coupure de presse de l’Aisne
nouvelle faisant état de son père, Roger Chuin. Puis dans un livre de
Ludivine Broch, publié par la Cambridge
University Press en 20126, je retrouve le même Roger Choin devenu Roger Chouin.
JParis-Midi
ou Paris-Soir.
e vous ai déjà fait part de mes recherches sur Roger
Vailland m’ayant amené à retrouver des articles d’un certain Roger Vaillant
(indubitablement le même Vailland, Roger). Les deux cohabitaient dans
Cette attention aux quasi-homonymes, je la dois au fait que,
longtemps, j’ai alimenté un site consacré par Sandy Utley à Tom Coraghessan Boyle, auteur que
j’avais traduit. Qui n’est autre que Thomas John Boyle, ou plus fréquemment
T.C. Boyle. Je ne me souviens plus du nombre des variantes trouvées en ligne pour
ce Coraghessan (avec un, deux r, i inséré superflu). Depuis, je me méfie.
Qu’écrit Ludivine Broch sur ce Roger Choin p. 155 d’Ordinary
Workers, Vichy and the Holocaust)? « « En octobre 1943, Roger Charbonnier
et deux autres cheminots, Robert Lebrun et Roger Chouin (sic), décidèrent
de saboter les voies à Tergnier. Pas un était âgé de plus de 20 ans. »
C’est vrai, mais pour Roger Choin, ce n’était que l’un de ses — tardifs – faits
de Résistance. Toute la famille Choin avait bien auparavant caché des Juifs ou
des parachutistes britanniques. Soit avant février 1943. Date à compter de
laquelle un certificat officiel atteste que, rattaché au groupement « B/I
Sect. BI/1 »), il « a participé à des actions directes contre
l’ennemi. ». Pour cet ennemi en tout cas, ses actions antérieures
étaient tout à fait directes.
Roger Choin (alias Roger Chuin pour l’Aisne nouvelle
traitant des activités de l’association du Musée de la Résistance et de la
Déportation en Picardie de Tergnier), a emporté ses souvenirs avec lui. La mémoire
de sa veuve, France Choin, 93 ans cette année, est devenue défaillante, leur
fils est décédé, et leur fille, ne se souvient que d’anecdotes
orales éparses, non datées.
Roger Choin, né le 9 septembre 1925 à Bellicourt (Aisne),
resta un homme discret ne recherchant aucunement les honneurs.
Il est très difficile de retrouver facilement en ligne des
informations sur cette période. De plus, les patronymes renseignent souvent
moins que les pseudonymes (ainsi, je lis que le futur colonel de Sarrazin se
faisait appeler Dauvergne).
Il semble que ce fut Roger Choin qui répartit les
détonateurs qui firent exploser les charges posées sur pas moins de 16 locomotives
en gare de Tergnier.
Mais, passé de la SNCF à EDF où il fut ingénieur, Roger
Choin se laissa peut-être oublier. Avec son entier assentiment. Je ne suis
d’ailleurs pas du tout sûr qu’il aurait approuvé que j’honore ainsi sa mémoire.
Si je passe outre, c’est qu’il me semble qu’il ne dénoncerait
pas que des journalistes, des historiens, travaillent « en
conscience ». La mienne me dicte d’attirer l’attention sur l’éventualité
de coquilles dans la transcription des patronymes. C’est certes sans doute
dérisoire, mais au moins pense-t-on qu’il serait encore davantage dérisoire de
n’avoir pas tenté de dire ou faire ce que l’on croit idoine. Et comme je ne
vois pas de conséquence néfaste au fait d’attirer l’attention sur les coquilles
et les quasi-homonymies, pourquoi me retiendrais-je ?
Il est plus facile de distinguer DuponD (aux bords des
moustaches droits) de DuponT (bords évasés en pointe par Hergé) que de
retrouver l’orthographe réelle d’un protagoniste d’un fait historique. Parfois,
c’est facile. Je m’étais un peu intéressé à l’affaire du « du pompier
Fauveau », condamné, puis acquitté (Me Jacques Isorni étant son défenseur)
par les assises de la Seine , du fait que Robert François (pseudo de
Roger Vailland) s’y était intéressé. Selon les organes de presse « l’embaumeur
Courtot » devient Courtaud ou Courtaut. Je cherche encore un Courtauld ou
Courtault, et je ne désespère pas d’en trouver. Jusqu’à nouvel examen minutieux,
l’embaumeur Courtaud l’emporte (en nombre de références) sur le préparateur en pharmacie
Courtot. Lequel devint même « le pharmacien Courtot » dans Le
Petit Courrier du 10 juillet 1937. L’affaire ne fut jamais élucidée avec la
découverte d’une ou d’un coupable, il se peut d’ailleurs que Courtot finisse
par l’emporter sur Courtaud, dit « le docteur Michel » (article
de l’Œuvre du 11 septembre 1937, l’un des derniers à revenir sur « le
garçon de laboratoire Courtot », sous la plume de Pierre Laude). Pour
la minime histoire des coquilles, je relève aussi cet article du Petit Parisien
du 21 août 1936 dans lequel p. 2, Henri—Michel Courtaud, « dit Michel »
en haut de première colonne devient par la suite Michel Courtaut (deux fois
même colonne, puis colonne suivante). Il n’est pas mentionné nommément en
accroche de première page où l’on apprend que le sapeur-pompier Roger Fauveau
est « affecté comme typographe à l’état-major des pompiers, boulevard
du Palais. ». Un Pierre Bellemare aurait pu lancer à l’antenne : « Fauveau,
ou le typographe injustement affligé ». Je reste, votre serviteur, typographiquement affligeant.
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