samedi 6 juillet 2019

Médialogie : Affaire DGPN contre Alexandre Langlois (Vigi Police)

Alexandre Langlois : tiens, pour le moment, rien dans L’Humanité ou Le Média

Ce qui va suivre est sans doute à prendre avec plus de recul que celui qui l’exprime… Cette affaire de sanction contre le secrétaire général, Alexandre Langlois, du syndicat Vigi-Ministère de l’Intérieur (et non « Vigi Police ») mérite peut-être plus d’attention…
Qui est Alexandre Langlois ? Franchement, je n’en sais rien. Quelqu’un « en recherche d’opportunités pour valoriser [ses] compétences acquises dans le milieu du renseignement, des ressources humaines… » (source : l’intéressé sur LinkedIN) et si j’en crois la presse dite prédominante (mainstream), un policier syndicaliste privé de toute ressource pour six mois (douze d’exclusion de la police, dont six assortis de sursis).
Ce pour des propos outranciers, injurieux, infamants visant la hiérarchie policière…
Je ne vais pas trop revenir sur le fond de l’affaire sinon pour estimer qu’effectivement, Alexandre Langlois n’avait pas trop mâché ses mots mais qu’à mes yeux, la sanction est lourde, si ce n'est non conforme à la loi. Ce d’autant que le conseil de discipline ne s’était pas clairement prononcé et que la sanction vient de la Direction générale de la police nationale (sans doute en toute indépendance par rapport au ministre Christophe Castaner). Opinion fondée sur les apparences et la lecture, voici quelques petites heures (deux, trois ?) du site du Figaro.
En bonne place, on trouvait ce titre « Un syndicaliste policier suspendu pour ses “critiques outrancières” contre l’institution ».
Ce midi, pour retrouver cet article, il fallait effectuer une recherche interne au site du Figaro.
Mais quand même, première remarque : comme très souvent, c’est bien la presse prédominante (et crois-je pouvoir présumer, le site de L’Express avant quelques autres), qui fournit les informations avant que les réseaux sociaux les relayent…
Cela étant, il est possible que des réseaux sociaux aient, avant les sites de presse, répercuté les informations présentées sur le site du syndicat (vigimi.fr).
Donc, ayant lu l’article d’Alexandre Loch (Le Figaro), je tente de trouver d’autres sources. Et quels sites remontent en premier (circa 10:00) ? Boulevard Voltaire et SputnikNews. Avec d’assez longs entretiens avec l’intéressé et rien d’autre.
Que le site du Fig’ ait relégué son article en archives n’ai rien de choquant : RTFrance (aussi proche du Kremlin que SputnikNews) a fait de même (mais l’affichait encore en pied de page d’accueil vers 12:30).
Soutiens divers
Pour le reste, je ne vais pas vérifier toutes les 30 minutes si le site de L’Humanité a été actualisé, si MediaPresse (salutations amicales au passage à Denis Robert), vont ou non faire état de cette affaire Alexandre Langlois. Il convient aussi de signaler que le député Ugo Benalicis (FI-dpt. du Nord) avait lanterné alors que le policier passait en conseil de discipline : La France insoumise n’a pas tout à fait lâché son ex-consultant.
Pourtant, pourtant, quand Vigi-Ministère de l’Intérieur restait affilié à la CGT, son secrétaire général était fort bien accueilli dans les colonnes de L’Humanité. Et côté Mélenchon, quand Alexandre Langlois servait de consultant police à la France insoumise, ses quarts d’heure de notoriété ne lui étaient pas trop comptés sur les sites proches de FI…
Qu’est-ce que Vigi-MI ? À première vue et au conditionnel, sous toutes réserves, un syndicat ultra-minoritaire. 0,4 % aux élections de 2018, aucun siège dans les instances trustées par les trois formations majoritaires. Ce en raison d’un tripatouillage des suffrages, comme le dénonce Vigi-MI ? Peut-être, mais de cette ampleur, qu’on me permette d’imaginer que le phénomène soit resté marginal et que Vigi-MI n’était pas en passe d’égaler les scores d’Alliance (17 sièges) ou d’Unité(idem), voire de l’Unsa (six sur un total de 41 ; source : le site d’Alliance, créditant la CFDT d’un siège). Je ne sais s’il reste des syndicats policiers affiliés étroitement à l’une des deux grandes centrales que sont FO et la CGT (le site CGT-Police est inactif depuis 2017, celui la CGT-Police Île-de-France reste actif, mais a soigneusement effacé toute référence au camarade Alexandre Langlois ; en tout cas, « Désolé, mais rien ne correspond… » à une recherche interne portant sur lui). Unité SGP, selon Vigi, resterait affilié à FO.
Alexandre Langlois a reçu le soutien d’une pétition et de divers Gilets jaunes. Peut-être parce que, soucieux de voir des collègues se faire taper par des autonomes, et d’autres électrons libres dits d’ultra-gauche, il avait réclamé une meilleure gestion des manifestations. Et puis un temps proche de la mouvance Mélenchon et consorts, il avait critiqué non pas trop fort l’action des policiers de la Bac en civil, mais le fait qu’ils auraient pu (en gros, et au conditionnel) avoir reçu « des consignes pour laisser faire des dégâts matériels, mais surtout pas de blessés » (fausse citation que je lui prête, non verbatim, donc pas d’italique). De fait, depuis la fin des années 1990, il est très difficile, voire impossible, d’établir la présence de policiers-casseurs dans les manifestations en France. Cela étant, sur Sud-Radio, il avait utilisé « chiens fous » pour désigner de jeunes policiers n’ayant pas été suffisamment formés (c’est du moins ce que je retrouve mentionné). Et il s’était alarmé des « images catastrophiques d’un McDonald’s qui brûle avec nos collègues qui le regardent brûler ».
Deux poids, démesure ?
Ce qui est patent : un autre Alexandre (Benalla) avait écopé le 2 mai 2018 d’une mise à pied de deux semaines (avec « solde », sans traitement ?), très inférieure aux six mois de celui-ci qui lance une cagnotte sur le site Le Pot commun (1 036 participants ce jour à 13:30, 1 046 à 14:00). Bizarre : à ce moment T, tous les participants sont des anonymes. Mais la plupart des gens (163) ayant laissé des messages ont usé de leur patronyme (au pif : moins de la moitié). Pas le moindre signataire se déclarant policier, ou syndicaliste, et un seul pseudonyme (« un petit fonctionnaire » ; non policier) fait état d’une… fonction.  Peur du « gendarme » ?
Et cela me… quoi ? Interpelle ? Désole ? Inquiète ? Le pire, excusez que je ne me contente pas de m’en tenir aux faits, c’est que cela ne me surprend guère.
Sur le fond, il y a défaut d’information de la part d’un peu tout le monde… Il est clair qu’Alexandre Langlois, ayant usé de termes comme « criminels » (délictueux, contrevenants aurait sans doute suffi), évoqué une « complicité de meurtre de fonctionnaires » (visant la DGPN au sujet de suicides de policiers ; ce qu’il aurait fallu peut-être mieux démontrer, ou employer d’autres qualifications), syndicaliste ou pas, y est allé fort, même si des points d’interrogation atténuaient ses écrits. Ce qu’on aimerait savoir, c’est pourquoi ce n’est que récemment qu’un conseil de discipline a été réuni, et quels autres moyens graduels (genre blâme, avertissement…) furent ou non employés.
L’intéressé (ou Vigi en tant que personne morale ?) fait aussi l’objet d’une plainte en diffamation de la part d’un médecin inspecteur de la région Grand Est, sanctionné lui aussi hiérarchiquement et par le tribunal de Reims, après avoir fait l’objet de dix plaintes « de jeunes recrues de la police nationale » (de l’école de Reims ou déjà en poste, signalait Catherine Daudenhan, de L’Est Républicain). Cette affaire en diffamation sera débattue devant le tribunal de Metz (audience prévue le 10 juillet prochain).
En fait, Alexandre Langlois affirmait à Boulevard Voltaire : « ils ont fait ce conseil de discipline parce qu’à chaque fois qu’ils nous ont envoyé devant un juge, ils ont perdu. » (« ils » étant sans doute la DGPN). Il serait souhaitable d’en savoir plus…
Enfin, plus de clarté sur les suites des enquêtes menées par l’IGPN serait souhaitable. Il semble que la sanction infligée soit le double de celle dont écopa « un cuisinier CRS » ayant prélevé « trois steaks périmés pour son chien ». Gourmand, le mâtin !
Je ne saurais vraiment (car non assez documenté) me prononcer sur cette sanction ni sur son traitement… Ce que je remarque, c’est que le site Profession Gendarme la relate en reprenant deux pages, l’une de SputnikNews, l’autre du site LGS (Le Grand Soir, pas vraiment droitier). Et met en bonne place « L’Appel à l’aide d’Alexandre Langlois ». Je serais ministre de l’Intérieur ou patron de presse vendant encore du papier, cela me donnerait du grain à moudre (et food for thought). Non ?
Frédéric Carteron, magistrat honoraire, ancien policier, enseignant en droit, se déclarant « gaulliste social » a confié une tribune à Profession Gendarme. « Je n’en salue pas moins le courage et les convictions de Monsieur Langlois. ».
Comme des fuites...
Rien à voir ? Il y avait une page Facebook, « Citoyen solidaire », qui, semble-t-il, publiait un compteur des suicides de policiers ou gendarmes. Certaines familles l’ayant mal pris, ce compteur a été arrêté (vers 56 décomptés). On en trouvera trace sur la page FB (@collectifpoliciersidf). Un collectif sans doute pas trop proche de Vigi… Si ce n’est dans la critique des syndicats majoritaires. Son porte-parole, Jean-Pierre Colombies, se déclare à présent « comédien et auteur ». J’en ai connu d’autres, des policiers qui ont rangé la casquette ou rendu l’écusson. Loin d’être les moins compétents, les moins humains, les moins intelligents (au contraire, même). Certains ont pu atteindre 57 ans (retraite décotée, sauf pour les « actifs » avec 25 ans de service), d’autres pas. Eh oui, dans la police, ce sont rarement les pires qui s’en vont…
Ce qui serait vraiment attristant… Ce policier syndicaliste est diplômé bac+5 (master de droit), et gardien de la paix… Comme nombre de bac+x (le concours est ouvert aux titulaires du baccalauréat ou équivalent, aux sportifs de haut niveau, aux parents d’au moins trois enfants, aux pompiers, militaires, &c.). Le filtrage à l’oral l’aurait-il laissé passer par erreur ? Bon, je retire : bien sûr que les plus diplômés ne sont pas systématiquement recalés lors de l’entretien mené avec le jury (quoique j’ai connu un docteur l’ayant été, reçu à un autre concours de la fonction publique, il finira peut-être sous-préfet, comme un certain ex-inspecteur des impôts devenu secrétaire d’État à l’Intérieur). Et puis, je digresse… Mais imaginez le pauvre capitaine, la pauvre commissaire, devant s’adresser à un gardien de la paix lui répliquant par une citation d’Euripide… Pitié pour la hiérarchie policière  !

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