Médialogie : la presse française suit les brisées
de la gutter press britannique…
Médialogie ? Médiologie ? Peu
importe… Toujours est-il que je suis frappé par l’évolution de la presse
française. Illustration avec un exemple récent…
Presque tous les jours je consulte le
site du Daily Mail. Pas que… Guardian’s & Independent’s idem. Le Mail n’est pas tout à fait une presse « de
caniveau ». Mais
limite, limite… Désormais, Le Figaro s’en
rapproche (sujets « sociétaux » et « comportementaux »,
alimentation, chiens-chats, célebs,
&c.). De plus en plus flagrant à mesure que passent les mois… Mais je n’imaginais
pas lire dans L’Express un titre tel
que « Successeur de Collomb : Macron se tait mais a choisi ».
Un
titre digne d’Ici Paris, France Dimanche et prédécesseurs… Un
peu comme « Untelle effondrée : sa terrible calamité ! » (son
petit chat est souffrant ; enfin, la concierge a remarqué qu’il n’a plus d’allant,
et si la très médiatique Unetelle ne s’exprime pas sur le sujet, c’est parce qu’elle
est submergée par le chagrin). Macron se tairait mais a un nom, un candidat pour
remplacer l’ex-ministre de l’Intérieur.
Il
fut un temps, où, au Cuej, au CFJ-CFPJ, à Lille et même à l’IUT de Tours, il
était enseigné comment titrer « incitatif » et « factuel ».
Je ne blâme pas les signataires de l’article de L’Express, Corinne Lhaïk et Éric Mandonnet. Voici longtemps que les
inventifs sèches et secs de rédac’ sucrent les titres des journalistes de
terrain s’ils ne sont pas à leur goût.
Mais
bon, quand un titre allèche ainsi, c’est qu’on peut avancer un, ou du moins,
des noms… Mais là, c’est du délayage, du tirage à la ligne. Avec beaucoup d’interrogatives
et l’insertion de la mention de la mort de Charles Aznavour (c’est là « écrire
pour Google ») qui aurait (le conditionnel s’impose) pu différer l’annonce
du maintien de la démission de Gérard Collomb.
« Selon nos informations, le chef de l’État a
d’ores et déjà décidé. ». Quoi ? Qui ? Allez savoir. Bref,
pour tirer à la ligne, Lyon devient « la
capitale des Gaules ». Genre : « tu as dit combien de signes ?
Ah, d’ac’, trois feuillets… ». Pour remplir, il est donc supputé que Georges
Kénpénekian n’allait pas rendre si aisément son écharpe de maire. Hypothèse qui
téléphone « l’envie de rester calife
à la place du calife… ». Soit près d’une cinquantaine de caractères de
« mieux ». On ajoute « et
ce n’est pas la moindre des raisons » (car Macron « déteste être contraint d’agir sous la
pression »).
Bref,
on ne sait pas vraiment si « rien ne va plus » entre Gérard et
Emmanuel, ou s’ils conservent une tendresse réciproque. Ce n’est pas un divorce,
c’est une séparation, mais les deux chérubins auraient eu des mots, vifs… qu’une
prochaine chaleureuse réconciliation fera oublier. Le jugement de Brigitte
Macron sur les choix vestimentaires de l’ex-ministre nous est toutefois épargné.
Au fait, ne serait-ce pas pour conforter le primat des Gaules, Mgr Barbarin,
que l’ancien maire de Lyon a voulu regagner la cité des canuts, les collines de
Fourvière et de la Croix-Rousse, les rives de la Saône et du Rhône, l’ombre du « crayon »
de La Part-Dieu, les bouchons des Mères, la métropole du tablier de sapeur, le
berceau de sainte Blandine, &c. ?
Bref,
on en vient à se demander si la presse française « sérieuse » (quality press) n’est plus incarnée que
par Siné Mensuel, Le Monde diplomatique, et quelques –
trop rares– revues confidentielles…
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