samedi 14 novembre 2020

Trump se replie mais ne cède rien

 Trump s’approprie « son » vaccin de son « second mandat »

Donald Trump s’est adressé à la presse pour vanter son Operation Warp Speed de vaccination de masse. Il a refusé toute question, n’a pas abordé celle de la passation de pouvoir à Biden-Harris, mais s’est au moins préservé de proférer des insultes visant les démocrates.


Donald Trump est tel un gamin nécrophage. Il profère des insanités et s’en délecte. Mais il faut remonter à la veille du 3 novembre pour retrouver des invectives visant Sleepy Joe (Joe le somnolant) ou la monstrueuse Kamala Harris, qu’il considère « plus à gauche que Bernie [Sanders] le fou ». Biden a remporté de très loin le vote populaire (en fait, depuis 1992, les démocrates ont toujours remporté plus de voix que les républicains, sauf en 2000, sans pourtant toujours obtenir le nombre voulu de grands électeurs). Mais de toute façon, grâce au tripatouillage des circonscriptions savamment découpées, les républicains (à présent les trumpistes) parviennent toujours à mieux se placer aux commandes, hormis dans les États à écrasante majorité « bleue » (démocrate).

Si Biden-Harris ont remporté 306 grands électeurs, c’est grâce à une participation record et notamment en Géorgie où 800 000 nouveaux inscrits (les républicains faisant tout leur possible pour tenter de bloquer les inscriptions sur les listes électorales de fort longue date) ont voté démocrate. Mais on peut toutefois douter que la Géorgie puisse envoyer deux démocrates au Sénat. Or, le Sénat peut bloquer les nominations des ministres, des ambassadeurs, &c. Et aussi priver la présidence des fonds nécessaires pour mener ses réformes.

La tactique à long terme de Trump est de marteler qu’on lui a volé l’élection. Qu’importe que les recours légaux de l’équipe de Rudy Giuliani puissent ou non aboutir. Certains cabinets d’avocats se retirent comme en Pennsylvanie, d’autres réfutent qu’il y ait pu se produire des fraudes manifestes et se bornent à maintenir que des erreurs involontaires ou de fumeuses irrégularités justifient leurs plaintes. Seize procureurs fédéraux exerçant dans une douzaine d’États ont formellement réfuté les suspicions de fraudes avancées par le ministre de la Justice, William Barr. Mais pour Trump, c’est secondaire. Seule la « presse boîteuse ou éclopée », soit la fausse presse forcément libérale, mensongère, celle des élites, s’acharne en vain à le contredire (ce qui, pour lui, ne saurait tromper les vrais patriotes).

Une autre bataille légale, déjà entamée en coulisses, vise Trump, pour fraude fiscale et aux assurances et faux en écritures notamment. Qu’à cela ne tienne, c’est un peu comme l’affaire de l’ingérence russe dans l’élection précédente, de basses manœuvres des élites contre lui. Ces poursuites n’ont aucun autre fondement que politique, afin de le discréditer faussement, soutient-il.

Il n’en a cure et s’il reste à la Maison Blanche, c’est pour  préparer des vaccinations de masse, dès que « son » vaccin pourra être validé. Ayant déjà sauvé l’Amérique de la décrépitude et du déclin, il va sauver physiquement les Américains en proie à la pandémie sans, bien sûr, qu’il soit nécessaire de les confiner.

En sept jours, les États-Unis ont compté 7  000 morts de plus, et le vaccin « contre le virus chinois » (expression de Trump)  ne pourra pas être distribué avant le début de l’année prochaine, au mieux. Qu’à cela ne tienne, Trump doit rester à la Maison Blanche pour tout agencer. S’il y a des cafouillages après son départ, ce sera la faute de Biden et des « communistes » démocrates.

Trump a mis à présent la pression sur les législateurs républicains de quatre États remportés par Biden (Arizona, Michigan, Pennsylvanie et Wisconsin) pour qu’ils désignent des grands électeurs votant pour lui. Les quatre ont formellement refusé de se mettre dans l’illégalité : ils nommeront des grands électeurs qui voteront pour Biden.

Ce qui en fait déjà des républicains seulement de nom (ou Rino, in name only), comme tout autre élu républicain ne se pliant pas au bon vouloir de Trump.

C’en est au point que la perspective de voir la présidence passer à la démocrate Nancy Pelosi, qui préside la Chambre des représentants (c’est le dernier recours si les nominations de grands électeurs étaient contestées), n’est pas ce que recherche Trump. Dans ce cas, on lui aurait volé deux fois son second mandat. Le jour même de l’élection, puis de nouveau celui de l’investiture.

Histoire de chauffer les participants de la Marche Maga sur Washington ce samedi, Donald Trump Jr, le fils de l’autre, a dénoncé le candidat démocrate de Géorgie pour ses liens financiers avec la Chine (ils sont en fait indirects, liés à des droits d’auteurs pour un documentaire d’une société basée à Londres).

La marche sur Washington de ce samedi est loin d’être la seule. Le site stopthesteal.us en recense dans pratiquement tous les États.

De ce fait, même si Trump commence à réaliser qu’il a perdu, afin de préparer la suite (dont les élections de 2024), il lui semble adéquat de continuer à ressasser son antienne le plus longtemps possible. Il peut certes changer le ton de sa teinture capillaire, mais pour générer des fonds, engranger des dons, il ne peut se dédire en admettant sa défaite. Il lui suffira d’affirmer que les machines et logiciels électoraux ont été piratés par les services chinois pour que ses partisans en soient convaincus. Ou il peut arguer que les électeurs issus de l’immigration l’ont emporté sur les « vrais Américains » (c’est déjà ce qu’avance breitbart.com, le site proche de Steve Bannon). Ce qui est certain, c’est que ce n’est pas pendant la Marche pour Trump que l’intéressé va décevoir ses partisans et admettre son indéniable défaite

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